Quand je suis sortie de ma chambre, une heure après m'y être enfermée, quelle fut ma surprise quand je découvris que Matthew était toujours là et en train de préparer le dîner. Touchée et reconnaissante qu'il soit resté après mes propos, je lui demande plus pour lui montrer que je me suis calmée que pour réellement connaitre la réponse :

— Qu'est-ce que tu fais ?

— Je te prépare des pâtes carbonara ! me montre-t-il fièrement la poêle dans laquelle les lardons sont en train de frémir.

Au fond de moi, cela me fait beaucoup rire de l'imaginer batailler entre mes quelques cartons encore non rangés et mes placards pour trouver les ustensiles qu'il lui fallait. Je me moque donc de lui pour essayer de détendre l'atmosphère :

— C'est le seul plat que tu sais faire ?

— Disons que je suis meilleur au lit qu'à la cuisine... assume-t-il, un sourire en coin.

— Tu es bête, rigolé-je en lui tapant affectueusement sur l'épaule.

— Mais au moins j'ai réussi à te faire rire, se satisfait-il.

Cet homme est vraiment incroyable, il fait tout pour me faire rire après les propos que j'ai eu envers lui. Peu le ferais.

— Merci Matthew d'être resté après que je t'ai demandé de partir, de toujours être là pour moi. J'aurais compris si tu étais parti, d'une certaine façon je l'aurais bien mérité après ce que je t'ai dit, murmuré-je en baissant les yeux.

Aujourd'hui, je ne le méritais pas.

— Une certaine personne m'a appris qu'il ne fallait pas laisser seuls les gens que nous aimions quand ils sont tristes.

Je souris à sa phrase. Je lui avais dit ça quand il était mal l'autre jour après être allé voir sa mère. C'est là qu'attendrie par ses actions, je réalise ce que je ressens pour lui.

— Je t'aime Matthew, finis-je par lâcher.

Il se retourne alors médusé. Cela faisait plusieurs jours désormais qu'il m'avait dit qu'il m'aimait, et je ne m'étais jamais sentie prête à lui dévoiler mes sentiments, mais maintenant oui. Pourtant, il semble perplexe :

— Tu es sûre ? Tu sais, ce n'est pas parce que je te l'ai dit que tu es obligée de faire de même, je sais que tu es pudique sur tes sentiments...

— Je ne le dis pas souvent, c'est vrai. Et je n'ai jamais aimé quelqu'un auparavant, un homme je veux dire. Mais toi je sais que je t'aime. Je n'étais juste pas prête à te le dire.

C'est ainsi qu'il s'approche de moi pour me prendre dans ses bras et me serrer si fort que j'ai l'impression qu'il craigne que je m'en aille. Néanmoins je ne peux pas lui en vouloir, car moi non plus je ne sais pas comment je pourrais faire sans lui, maintenant que je l'ai rencontré. J'ai toujours trouvé surfait de prétendre ne pas pouvoir vivre sans l'être aimé, mais je comprends désormais cette sensation. Nous passons alors le reste de la soirée dans les bras l'un de l'autre, sans forcément discuter, juste apprécier la présence de la personne aimée.

***

Le lendemain, je décide de retourner travailler. Matthew m'a proposé de me donner ma journée mais j'ai refusé. J'ai besoin de m'occuper l'esprit. En revanche, j'ai accepté qu'il me dépose et nous arrivons en même temps qu'Alexia. Lorsqu'elle nous aperçoit, elle ne nous lâche qu'un vulgaire signe de tête et poursuis son chemin. Notre amitié me manque. Comment ai-je pu douter d'elle ? Elle a toujours été si gentille et compréhensive envers moi, même quand elle ne me connaissait à peine. Voyant ma mine attristée, Matthew me conseille :

— Invite-la à déjeuner, et expliquez-vous.

Depuis quand est-ce lui qui me donne des conseils pour mieux gérer mes relations ? Mais, le fait est qu'il a raison.

C'est de cette manière que je me retrouve à déjeuner dans une brasserie, à midi, avec Alexia. Pour être honnête, nous n'avons pas cherché bien loin et avons pris la première adresse à pied en sortant de chez Clayton Corporation. L'ambiance est chaleureuse à l'intérieure, il y a même un spectacle sur la piste du milieu. J'espère que cette ambiance me permettra de crever l'abcès avec Alexia. Toute la matinée elle est restée distante avec moi, et c'est seulement quand je lui ai proposé de venir déjeuner avec moi qu'elle s'est détendue.

— Je ne savais pas comment agir avec toi, m'a-t-elle finalement avoué, penaude.

Je me sens vraiment stupide. Elle a toujours été là pour moi et je lui ai fait du mal en l'accusant. Elle ne méritait pas ça.

— Moi non plus, lui confié-je. Je m'en veux tellement, tu sais, d'avoir douté de toi, de vous...

— Je ne t'en veux pas tu sais, me rassure-t-elle. Moi aussi j'aurais douté à ta place.

Rassurée et touchée qu'elle ne m'en veuille pas, pourtant il est hors de question qu'elle me déculpabilise. J'ai mérité cette situation car je l'ai provoqué.

— Non, je n'ai aucune excuse. J'étais obnubilée par ces menaces et par ce que m'avait dit Adam. J'aurais dû vous en parler au lieu de croire les journaux et ce que l'on m'avait dit. J'ai été une mauvaise amie. Je suis désolée, m'excusé-je platement, ravalant mes larmes pour ne pas m'effondrer.

Ces derniers jours, mes émotions ont fait les montagnes russes et il faut avouer que j'ai des difficultés à les contenir depuis ce weekend, passant d'un fou rire aux pleurs en un instant.

— Mais si je t'avais parlé de cette histoire et si Matthew avait démenti, tu n'aurais jamais pensé ça, s'attriste-t-elle, en s'attribuant une part de responsabilité dans cette histoire.

— Il m'a expliqué pourquoi vous aviez fait ça, et je ne vous en veux pas. Je suis surtout soulagée que ce soit un malentendu. Je ne m'en serais pas remise de perdre ma meilleure amie ici ainsi que l'homme que j'aime, reprends-je l'expression de Adam, car il avait raison, Alexia est ma meilleure amie ici.

— En parlant de ça, Elyssa, ajoute-t-elle. Je sais que j'ai été la première à te mettre en garde contre Clayton, mais il t'aime vraiment. Quand je lui ai dit que tu étais peut-être en danger il était désemparé, il n'est pas avec toi celui qu'il était avec ses précédentes conquêtes. Je ne sais comment tu as fait mais tu l'as vraiment changé.

Directement en arrivant ici, je lui avais confié que je savais qu'elle avait parlé à Matthew et que je ne lui en voulais pas, c'est de cette manière que nous avions commencé à discuter après avoir fait la route en silence. Néanmoins, je suis heureuse qu'elle me donne sa bénédiction concernant l'homme qui partage ma vie.

— Lui aussi m'a changé tu sais. Je n'avais vraiment plus gout à la vie en arrivant ici, me désolé-je en repensant à cette période.

Un sourire triste, elle pose sa main sur la mienne pour me consoler. Cependant, ne voulant pas miner l'ambiance, je rajoute sur un air plus joyeux :

— Mais en parlant d'amour, il y en a un qui t'aime beaucoup aussi Alex'... haussé-je les sourcils un sourire en coin.

— Comment ça ? me demande-t-elle en baissant la voix, comme si elle craignait que quelqu'un ne nous entende.

De quoi a-t-elle peur ? Que tout le monde sache qu'elle est en couple avec Andrew ? Ce n'est pas comme si tout le monde était déjà au courant, ils s'embrassent à chaque coin de rue ce qui m'a toujours beaucoup amusé n'étant pas habituée à m'épancher en public contrairement mon amie.

— Andrew. Quand nous nous sommes disputées pour cette foutue histoire, il m'a appelé pour prendre ta défense. Il voulait vraiment que nous nous réconcilions et que je comprenne que tu n'étais pas comme ça. Je sais que toi aussi tu n'as pas eu beaucoup de chance en amour, mais il faut croire que cette fois, nous avons trouvé des "perles" !

Quand elle a connu Andrew, elle m'avait confié n'avoir rencontré que des hommes s'intéressant uniquement son corps. Étant un peu fleur bleue, elle m'a avoué être tombé à chaque fois dans le panneau après être laissée dès qu'ils avaient eu ce qu'ils souhaitaient d'elle. C'est pourquoi je suis contente qu'elle ait trouvé Andrew, étant toujours à deux je ne le connais pas beaucoup, pourtant je sais qu'il la rend heureuse et pour moi c'est le plus important.

— Alors trinquons à nos "perles", s'exclame alors Alexia en levant son verre de mojito que le serveur vient de nous servir.

Je fais alors de même avec mon verre de vin blanc.

Le soir même, et contrairement à ceux qui ont précédé depuis ma discussion avec Adam, je suis enfin apaisée. Je suis heureuse, j'ai retrouvé l'homme que j'aime ainsi que mon amie.