Chapitre 25
La porte de la classe s'ouvrit dans un grand fracas et deux hommes armés de couteaux entrèrent en trombe.
Ayame eut à peine le temps de se lever que l'un des hommes lui avait déjà asséné un coup à la carotide. Le couteau ressortit sans une goutte de sang mais l'attaque laissa Ayame et Ciel décontenancés assez de temps pour que les hommes les assomment par surprise.
★★★
Lorsque Ciel revint à lui, il était dans une pièce entièrement vide. Et bien qu'il ne soit pas attaché, il était incapable de bouger d'un millimètre, comme si une force le retenait.
Ayame était assise à côté de lui, totalement inconsciente. Il l'appela à plusieurs reprises mais elle ne répondit pas. Il n'était même pas sûr qu'elle respire toujours tant elle était immobile. Mais qui aurait pu la tuer alors qu'elle était, elle aussi, transformée en diable ? Il continua de l'appeler.
« Tais-toi donc » dit-une voix provenant de derrière lui.
Ciel ne pouvait pas se retourner et ne savait donc pas à qui il avait à faire, mais la voix lui paraissait familière.
« Il est quelle heure ? demanda-t-il.
— Quelle étrange question... »
Il entendit des pas se rapprocher de lui.
« Nous ne nous sommes pas vus depuis longtemps et pourtant c'est la première chose que vous me demandez.
— Grey ?
— Ding-dong, bonne réponse. »
Charles Grey se plaça face à lui.
« Ce ne sont pas les manières d'un gentleman que de kidnapper les gens, je vous croyais plus éduqué.
— Ce n'est pas les manières d'un gentleman que de refuser systématiquement de voir sa patronne et même d'ignorer ses lettres.
— Certes. Mais je pense avoir de bonnes raisons de ne pas vouloir la voir.
— Tss-tss, les rancunes ne peuvent pas durer éternellement cher Comte. Elle n'a fait que tuer une seule personne.
— Oui, le père de celle que j'aimais.
— Vous êtes vraiment étriqué d'esprit, elle ne voulait que vous remettre sur le droit chemin. Vous vous étiez perdu après tout.
— Il est quelle heure ? demanda-Ciel froidement.
— Vous avez une vraie obsession pour l'heure dites-moi. Ça me donne d'autant plus envie de ne pas vous répondre.
— Il est quelle heure ?
— Vous ne voulez pas savoir pourquoi vous êtes là, tous les deux ?
— Non merci. Il est quelle heure ? »
Charles Grey leva les yeux au ciel en soupirant.
« Je vais vous le dire quand même. J'ai quelques interrogations, à propos de votre chère femme.
— Ayame ? C'est vous qui l'avez engagé, non ? Alors pourquoi des questions ?
— Disons que l'on avait manqué de zèle en se renseignant avant de l'engager, nous avons raté un point important.
— Lequel ?
— Sa famille. Nous n'avons vu que ce que nous voulions voir : leur renommé. Nous n'avons pas cherché plus loin.
— Et donc ?
— Savez-vous, cher Comte, comment sa famille a été exterminée ? »
Ciel y réfléchit, mais Ayame ne lui avait jamais dit.
« Non, avoua-t-il.
— Hm, ça ne m'arrange pas ça, mais passons. Votre chère Ayame a cherché à aider votre bien aimée Yuuka lorsqu'elle vous recherchait, vous le saviez ?
— Non, mentit-Ciel.
— Tt, décidément. Question plus simple, Ayame est-elle au courant de votre relation passée avec Yuuka ?
— Je ne lui en ai pas parlé, alors techniquement non.
— Cent pourcent professionnel, c'est ça ? Vous n'avez même pas développé un semblant d'amitié ?
— J'ai une tête à vouloir être ami avec un sbire de sa majesté ? Ou être ami avec quelqu'un tout court d'ailleurs. On ne fait que collaborer. Plus tôt cette mission sera finie, mieux ce sera.
— Bien... C'est un bon point, ça rassurera la reine.
— Et donc, où est-ce que vous voulez en venir avec ces interrogations ? demanda-Ciel.
— Je ne sais pas si je dois en parler du coup, ça pourrait compromettre tout ce beau travail. Je devrais peut-être interroger votre femme en votre absence.
— Et pourquoi ne pas avouer les choses maintenant ? » demanda-t-Ayame qui se montrait enfin réveillée.
Ciel tourna les yeux vers elle, rassuré qu'elle aille bien. Il laissa échapper un soupir.
« Alors ? continua-t-elle. Je peux le dire si vous ne voulez pas. »
Grey la regardait avec intérêt, un sourire planté sur le visage.
« Mais d'abord, quelle heure est-il ? demanda-t-elle.
— Mais quel est donc votre problème avec l'heure ? »
Il regarda sa montre.
« Seize heure cinquante-trois, puisque ça vous intéresse tant.
— Parfait, c'est l'heure idéale, non ? »
Ciel approuva en silence.
« Vous me fatiguez tous les deux, dit-Charles. Alors je vais sauter tout de suite au sujet de notre entrevue. Vos parents ont été tués sur ordre de la reine, chère baronne. Vous le saviez ?
— Oui, évidemment, le message était très clair. Arrêter d'aider Yuuka à chercher Ciel, au risque de mourir à mon tour.
— Alors pourquoi travailler pour elle malgré tout ?
— Je ne travaille pas pour elle. Je travaille pour la couronne, pour le pays. Je travaille pour améliorer les relations entre la France et l'Angleterre, pour étendre mon entreprise et faire décoller ma réputation. Peu importe qui dirige le pays. »
Grey la regardait sans ciller.
Il doit se demander s'il peut la croire, pensa-Ciel. Moi, je ne la croirais pas.
« Vraiment ? demanda-Grey sur un ton hautain. J'ai du mal à croire que vous n'ayez aucun ressentiment contre la reine. Votre cher mari, par exemple, lui en veut beaucoup d'avoir tué le père de sa petite-amie.
— Bien sûr que je lui en veut, quelle question idiote. Mais ça m'importe peu, j'ai d'autres priorités.
— Et vis-à-vis de Yuuka et sa relation avec Ciel ? Pourquoi ne lui avez-vous pas dit que vous saviez qui il est ?
— Yuuka n'était qu'une connaissance de passage, je n'ai fait que l'aider car je connaissais la réputation de sa famille et que tout est bon à prendre.
— Les affaires, toujours les affaires. Tous les deux vous n'avez que ça à la bouche.
— Il n'y a rien de plus important, dit-Ciel.
— D'ailleurs, continua Ayame, j'ai une nouvelle qui fera plaisir à sa majesté.
— Quoi donc ?
— Ciel et moi envisageons de nous marier.
— Pardon ? s'exclama Grey, désarçonné.
— Oui. C'est, je pense, un bon moyen de rapprocher nos deux pays, et de stabiliser nos influences en tant qu'entreprises mondiales. Une collaboration serait un peu trop basique, alors nous envisageons un mariage de convenance pour lier plus fortement notre relation. Et sur le plan légal c'est une très bonne opportunité.
— Donc... toujours le business, et uniquement le business, on est d'accord ?
— C'est exact, intervint Ciel. Nous y pensons depuis quelques jours puisque notre collaboration se passe bien. Et nous croyons que c'est une chose que la reine approuverait et encouragerait même. »
Grey les regarda l'un après l'autre, dubitatif. Ils paraissaient tous les deux très sérieux mais ne laissaient pas transparaître la moindre émotion. Ça ne l'étonnait même pas, surtout venant du Comte, mais il n'était pas sûr de pouvoir leur faire confiance.
« Quand avez-vous l'intention de vous marier ? demanda-t-il.
— Nous en avons parlé ce matin justement, dit-Ayame.
— Dès que l'enquête sera finie, compléta Ciel.
— Où allez-vous vous installer ?
— Notre résidence de mariés sera officiellement le manoir de Ciel.
— Mais nous continuerons de vivre séparément, nous ne serons mariés que pour la forme après tout.
— Et pour les entreprises ? continua-Grey.
— Elles seront renommées.
— Mes entreprises ajouteront le nom d'Ayame à la suite du mien, et inversement. Nous voyons une fusion, plutôt que l'un soit embarqué dans l'autre ou que les deux entreprises restent indépendantes. »
Grey pensa qu'ils ne pouvaient pas avoir inventé ça sur le tas, et qu'ils ne pouvaient pas non plus avoir préparé à l'avance un interrogatoire qu'ils ne pouvaient pas imaginer arriver un jour. Ils répondaient ensemble, ne se lançaient même pas un regard. Il avait tendance à y croire mais hésitait.
Il abandonna et se dit qu'il verrait bien comment évolueront les choses à l'avenir.
« Bon, cet interrogatoire est-il fini ? »
Grey se retourna pour se retrouver face à un Sebastian plus qu'agacé.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top