Chapitre 11
Encore des flammes, plus grandes, plus puissantes, plus rouges, plus dévastatrices. Les langues de feu dévoraient tout sur leur passage, rien ne survivait, pas la moindre touffe d'herbe. Alors comment Yuuka aurait-elle pu s'échapper ? La réponse était simple, elle ne l'avait pas fait.
Ciel arrivait encore une fois en retard, la maison était en cendres et il ne restait plus rien. Si, une chose avait survécu, le collier qu'il lui avait offert. Il trônait au milieu de ce brasier, intact, comme si rien ne pouvait l'atteindre. Et à travers lui, Yuuka semblait lui demander pourquoi il ne l'avait pas sauvée, pourquoi il l'avait laissée mourir.
Il se réveilla en sursaut, un cri s'échappant de... Non, ce n'était pas lui qui avait crié. Le matin était levé et le soleil éclairait une Ayame affolée. Elle s'était elle aussi réveillée en sursaut, criant à pleins poumons.
Le temps qu'elle se calme et retrouve ses esprits, Ciel n'avait pas cessé de la regarder. Mais cette fois, aucune suspicion dans ses yeux, juste une question muette à laquelle elle ne répondrait sans doute pas.
« Ça va ? » demanda-t-il.
Elle acquiesça en silence avant de regarder par la fenêtre. Au frissonnement de ses épaules, Ciel compris qu'elle pleurait, mais il n'osa pas insister et alla à la salle d'eau pour lui laisser de l'intimité. Il prit le temps de se laver et préparer avant de ressortir. Ayame s'était calmée. Elle passa à côté de lui, sans le regarder, pour s'enfermer dans la salle d'eau.
Ciel s'était reconnu à travers ses yeux et ses pleurs, ceux de quelqu'un qui a tout perdu, de quelqu'un qui fait le même cauchemar chaque nuit.
Lorsqu'ils s'installèrent dans la petite cafétéria des professeurs, ils ne s'adressèrent d'abord pas un mot, trop mal à l'aise pour parler. Finalement, Ayame prit la parole.
« Je ne t'ai pas réveillé au moins ?
— Non, j'étais... Je me suis réveillé en même temps que toi mais... Ce, ce n'était pas de ta faute.
— Des cauchemars ?
— Un seul en fait, mais oui.
— Je comprends. À propos de Yuuka, ou de... tes parents ?
— De Yuuka, dit-il sans s'étonner qu'elle sache à propos de sa famille. Et toi ?
— C'est compliqué. C'est à propos de tout le monde, même de ceux qui ne sont pas encore morts.
— Comme ?
— Moi. J'ai perdu beaucoup de gens, j'attends juste que mon tour arrive. Mais je dois d'abord me venger de ceux qui m'ont fait ça...
— On existe pour la même raison alors.
— On dirait bien, Ciel. »
La cohabitation ne serait peut-être pas si difficile finalement.
✩ ✩ ✩
Dans la journée, ils découvrirent leurs bureaux, leurs classes ainsi que leurs collègues. Ils n'avaient pas encore trouvé de moyen de faire embaucher Sébastian et Ciel se voyait mal proposer à Ayame de tuer un des professeurs pour le faire entrer. Ils se contenteraient donc d'enquêter à deux en attendant de trouver une solution.
Le personnel comptait dix-sept professeurs, trois cuisiniers et trois personnels de ménage. Les lieux n'avaient pas changé depuis l'époque où Ciel était venu en infiltration.
Ils visitèrent ensemble, sans accompagnateur, Ciel considérant que ses souvenirs seraient bien suffisants pour se repérer. Il pensait que Ayame serait plus perdu mais elle semblait se déplacer comme si elle connaissait parfaitement les lieux.
« Tu es déjà venue ? demanda-t-il.
— J'ai visité cette nuit.
— Cette nuit ? Je ne t'ai pas vue sortir de la chambre.
— Forcément, tu dormais profondément. Mais ne fait semblant d'être choqué, tu traînais aussi dans les couloirs, à l'époque. »
C'est vrai, pensa-t-il, mais j'enquêtais. Une pause dans sa réflexion. Nous enquêtons aussi en fait.
« Mais, comment tu le sais ? Yuuka te l'as dit ?
— C'est écrit dans son journal, pourquoi est-ce que je ne le saurais pas ?
— Tu... as lu son journal ?
— Évidemment, pas toi ? dit-elle en riant.
— Mais, comment est-ce possible? Il est toujours chez moi depuis que je l'ai découvert.
— Tu es arrivé bien tard à la maison. Tu ne t'es jamais demandé pourquoi le journal n'avait pas brûlé avec tout le reste ?
— Si, mais je pensais qu'Ella l'avait perdu en s'enfuyant.
— Il n'était pas dans la maison au moment du feu. C'est moi qui l'avait.
— Mais pourquoi ?
— Parce qu'il m'a été... envoyé, en quelque sorte. La maison était déjà brûlée lorsque je l'ai déposé dans les cendres pour que tu le trouve.
— Pourquoi me le laisser ?
— Parce que tu es celui pour qui elle l'a écrit.
— Et qui te l'a envoyé ? Que veux-tu dire par "en quelque sorte" ?
— Tu poses beaucoup de questions. Et je ne peux pas te donner les réponses à ces deux questions.
— Parce que tu ne les as pas ? C'est l'un des éléments auquel tu n'as pas encore trouvé de solution ? »
Ayame haussa les épaules.
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