Chapitre 20

Vingt-quatre heures plus tard, toute trace d'apaisement avait disparu.

Leonard allait et venait dans sa chambre, sous les yeux de Neavi, qui, assise sur le lit, ne cessait de soupirer.

Voilà une heure que Joanna était interrogée par la commission d'enquête de Starfleet, composée de Pike, de l'Amiral Archer et de deux lieutenants dont Leonard n'avait pas cherché à retenir les noms un seul instant.

Ils avaient à peine laissé le temps à Leonard de leur ouvrir la porte qu'ils lui avaient demandé d'aller avec Neavi à l'étage. D'un signe de tête, Pike lui avait communiqué son soutien, et il avait obéi. Résister n'aurait fait que l'enfoncer.

Depuis, il tournait en rond dans sa chambre, incapable de se poser plus d'une minute. Il ne pouvait s'empêcher d'angoisser, autant pour sa fille que pour leur projet et la tournure qu'il pourrait prendre à la fin de ce rendez-vous.

« Viens t'asseoir, Leonard ! s'écria une Neavi à la voix exaspérée.

— Je ne peux pas ! Comment veux-tu que je me calme alors qu'ils sont en train d'interroger ma fille ?

— Ils ne la retiennent pas en otage non plus, Leo' ! Viens t'asseoir.

— Non !

— Viens t'asseoir. »

Au regard dur de Neavi, Leonard finit par obéir et s'assit près d'elle. Toute trace de colère envolée, elle prit sa main entre les siennes, la caressa quelques instants de la pulpe de ses doigts, puis elle exerça une forte pression à la jonction de son pouce et de son index, envoyant une puissante décharge électrique tout le long de son bras.

« Aïe ! s'écria-t-il en reprenant sa main. Ça va pas, non ? »

Elle ne lui répondit pas, la main tendue et une expression blasée au visage, et il posa sa main entre les siennes de nouveau. Elle appuya de nouveau, il reçut une nouvelle décharge, mais à mesure qu'elle massait la zone, il se sentait de plus en plus détendu.

Puis elle offrit le même traitement à sa deuxième main. Son emprise sur lui était si douce qu'il n'avait plus envie de se dérober malgré la douleur qui continuait de traverser ses nerfs bien trop tendus.

Au bout d'un long moment, Neavi reposa sa main sur ses genoux et posa sa tête sur son épaule.

« Joanna va très bien se débrouiller, Leo', tu n'as pas à t'inquiéter.

— Je ne veux pas qu'ils la brisent.

— Ils sont peut-être des explorateurs, mais ils sont aussi des personnes. Ils savent gérer des enfants, sinon ils ne seraient pas là. Ils savent où s'arrêter. »

Leonard laissa son esprit méditer quelques instants sur ces paroles puis il hocha lentement la tête et enroula un bras autour de la taille de Neavi.

« Tu crois que ça sera bon ?

— Pour ?

— L'adoption.

— Ne pense pas au futur. Pense à toi, pense à nous, et la décision viendra. »

Il soupira et laissa sa tête tomber en avant, lassé de toute cette situation.

« Et si elle est négative ?

— Ne pense pas à ça. Ça te ronge, tu dois penser à autre chose, et ce n'est pas en imaginant le pire que tu vas t'en sortir.

— Je n'y arrive pas.

— Je sais. Mais on trouvera une solution si ça ne marche pas. »

Un vague grognement s'échappa de la gorge de Leonard et il se laissa tomber en arrière, les bras en croix. Neavi soupira et se glissa contre lui, une main posée sur son torse pour sentir son cœur battre dessous.

« Parle-moi de ce Papi que Joanna aime tant et dont elle n'arrête pas de me parler. »

Un petit rire agita la forme étendue de Leonard et il tourna la tête en souriant pour regarder Neavi.

« Les enfants n'ont jamais connu mon père, il est mort il y a neuf ans, Joanna est beaucoup trop jeune pour s'en rappeler. Je voulais leur offrir cette présence dans leur vie mais je ne pouvais pas.

— Tu t'entendais bien avec ton père et ton grand-père ? »

Il sourit au souvenir de ces deux hommes qui avaient tant marqué sa vie, les yeux fermés, et se laissa envahir par tous ces morceaux de sa mémoire qui déferlaient dans son esprit.

« Merveilleusement bien. Ils comptent énormément dans ma vie. Ce sont eux qui m'ont initié à la médecine. Leur présence m'était toujours bénéfique. »

Neavi sourit presque tristement de voir Leonard aussi touché, elle réfléchit quelques instants, ses doigts tapant un rythme inconnu sur le torse de son compagnon.

« Tu avais à peine plus de vingt ans quand ton père est mort, il devait être jeune lui aussi.

— Il l'était.

— Tu ne veux pas parler de ce qu'il lui est arrivé ? »

Leonard prit une grande inspiration qu'il relâcha lentement, et lorsqu'il baissa son regard sur Neavi, ses yeux étaient emplis de larmes et de colère. Elle ferma ses paupières avec une expression douloureuse alors que la puissance des sentiments de Leonard venait frapper son esprit.

« C'était de ma faute.

— J'en doute, affirma-t-elle avec confiance.

— Tu ne devrais pas. C'est la vérité, j'ai tué mon père. »

Une larme solitaire fit son chemin sur sa joue, et Neavi, d'un geste trahissant toute sa douceur et tout son amour, l'essuya d'une caresse du pouce.

« Et si tu m'expliquais ce qu'il s'est passé, plutôt que de t'accuser comme ça ? »

Une nouvelle grande inspiration, et Leonard se lança dans le vide. Il ne savait pas quelle serait la réaction de Neavi à la suite de cette discussion, lui-même partirait en courant.

« Il était malade. Très malade. Il agonisait chez lui, j'allais le voir tous les jours, et chaque jour, il était plus mal que la veille.

— Ta maman était là ?

— Oui, elle avait pris un congé pour rester avec lui. Elle ne sortait que quand j'étais là. Le jour de sa mort... »

Il se mordit la lèvre et tourna la tête pour échapper au regard à la fois curieux et bienveillant de Neavi. Il n'avait jamais raconté cela à personne, il avait toujours voulu le garder pour lui, emporter ce secret dans sa tombe. Mais Neavi arrivait à le mettre à nu, à faire tomber toutes ses défenses, et il n'arrivait pas à lui résister.

« J'étais seul avec lui. Il allait tellement mal... Il me parlait mais je l'entendais à peine tellement il était faible. Mais je savais ce qu'il me demandait. Je savais que le jour viendrait. Je l'avais pressenti le premier jour de sa maladie. »

Il déglutit difficilement et regarda Neavi, qui avait dû deviner ce dont il parlait, si son regard embué était une quelconque indication.

« Je ne voulais pas le faire, je n'ai jamais voulu le faire. Mais il me suppliait, il souffrait tellement... J'ai débranché le respirateur et je l'ai regardé mourir. Pas un seul instant je n'ai pensé à le sédater, pour qu'il souffre moins. Il agonisait, il convulsait, et moi je pleurais sur lui. Comme si je n'avais rien pu faire pour lui. »

Leonard serra les draps dans ses poings jusqu'à sentir la douleur de ses ongles s'enfonçant dans ses plaies, vestiges du départ de Jim. Il tapa l'arrière de sa tête contre le matelas, les lèvres pincées pour retenir les insultes qu'il voulait se proférer depuis des années.

« Quand ma mère est arrivée, je lui ai dit qu'il était mort naturellement alors que j'étais descendu à la cuisine. J'ai dit la même chose à Jocelyn. J'étais incapable de dire que j'avais tué mon père, parce que je savais que c'était la plus grosse erreur de ma vie. »

Il sentit Neavi bouger contre lui, puis des lèvres se posèrent sur son front, ses tempes, ses joues au goût salé, son nez, ses lèvres. Elle attira son attention à elle mais il ne faisait que résister pour ne pas la regarder.

« Tu as abrégé ses souffrances, Imzadi, c'est l'un des plus beaux actes d'amour qui existent.

— Je n'ai pas réussi à arrêter mes recherches sur sa maladie. Un mois plus tard, j'ai trouvé le remède. »

Un halètement horrifié résonna dans son oreille mais il ne l'entendit pas ou du moins n'y fit pas attention.

« J'ai fait ma réputation dans le métier ce jour-là. Mais je m'en fichais. Si j'avais été moins égoïste, j'aurais écouté et regardé son agonie juste un peu plus longtemps mais il serait toujours en vie. J'ai tué mon père pour rien. »

Neavi referma son étreinte autour de lui et le serra fort contre elle, son oreille posée sur sa poitrine. Devenu froid à toute émotion sinon sa haine profonde envers lui-même, il ne fit aucun geste pour la serrer contre lui. Il restait simplement ainsi, allongé sur le dos, sans bouger.

Ils n'auraient pas dû changer de sujet.

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Après près d'une heure sans bouger plus d'un cheveu, la voix de Joanna les appelant sortit Leonard et Neavi de leur torpeur. Il se dressa sur ses jambes engourdies et se précipita au rez-de-chaussée, suivi de près par sa compagne.

Son inquiétude et son angoisse atteignaient des sommets alors qu'il descendait les escaliers quatre à quatre. Et s'ils l'avaient poussée trop loin dans ses retranchements ? Et si elle n'avait pas réussi à leur répondre comme ils le voulaient, et que maintenant l'adoption tombait à l'eau ?

Mais sa peur retomba bien vite lorsqu'il vit sa fille, assise près du Capitaine Pike qui avait une main posée dans son dos et lui tendait un verre d'eau. La jeune fille était souriante, les quatre hommes aussi, et il se sentit immédiatement bien plus calme de la voir ainsi.

Son dos, qu'il n'avait pas remarqué être si tendu, se relaxa, et il se pencha en avant, les mains posées sur ses cuisses pour reprendre son souffle. Neavi arriva juste derrière lui et soupira de soulagement à son tour en posant sa main dans le dos de Leonard.

« Bon sang, Jo', souffla-t-il, ne me fais jamais peur comme ça... »

Joanna se mordit la lèvre, jeta un coup d'œil à Pike qui hocha la tête, et se leva pour rejoindre son père. Elle se pressa contre lui et il s'agenouilla pour la serrer contre son torse, son visage enfoui dans ses cheveux.

« Pardon, Papa, je ne voulais pas t'inquiéter, murmura-t-elle dans son oreille.

— Ce n'est rien, chérie. Ça va ? Ça s'est bien passé ? »

Il se recula et la tint aux épaules à longueur de bras, l'inspectant à la recherche de blessures, même s'il savait qu'il n'y en aurait aucune. C'était ni plus ni moins qu'un réflexe.

« Ça s'est bien passé, Papa, je te le promets. Je vais très bien.

— Merci, mon Dieu, » souffla-t-il en la serrant de nouveau contre lui.

Il sourit de soulagement pour lui-même et se releva en relâchant Joanna. Elle lui sourit à son tour puis ils rejoignirent les quatre officiels, qui n'avaient pas bougé de la table du salon et faisaient tout pour ne pas les regarder, plongés dans leurs padds.

« Excusez-moi, messieurs, je suis incorrect, souffla-t-il en s'approchant.

— Il n'y a pas de mal, Leonard, sourit Pike. On sait tous ce qui vous est arrivé, et on sait que ce n'est pas facile à surmonter.

— Mais Joanna s'est très bien débrouillée, intervint Archer. C'est une jeune fille très intelligente et elle sait se défendre. »

Joanna rosit aux joues et se pressa contre la hanche de son père, qui sourit en la voyant faire.

« J'en suis ravi. Elle ne s'est jamais laissée faire, et j'espère qu'elle ne le fera jamais.

— Si mon expérience est une indication, elle ne le fera pas, acquiesça l'amiral. Si vous permettez, docteur, nous aimerions inspecter la maison, tant que nous sommes ici. »

Leonard ne put s'empêcher de froncer les sourcils. Qu'avaient-ils à inspecter ?

« Puis-je me permettre de vous demander pourquoi cela ?

— Bien sûr. Nous voulons nous assurer du caractère sain de votre environnement, voir si James serait bien logé s'il revenait ici, et voir si c'est viable pour lui, dans son état de santé actuel. »

Il dut se restreindre de leur lancer tout ce qu'il pensait en pleine tête, les lèvres pincées. Neavi, qui était restée en retrait, s'approcha, passa une main au creux de ses reins, et il sentit une vague de calme déferler dans son esprit.

« Procédez, Amiral, je vous en prie, lâcha-t-il enfin entre ses dents serrées. Sa chambre est à l'étage.

— Nous inspecterons chacune des pièces. »

Et sans un mot de plus, il se leva, suivi des deux lieutenants, et partit vers l'étage. Il se retourna à mi-chemin pour questionner Pike du regard, celui-ci lui répondit d'un vague signe de la main, et ils reprirent leur route.

Une fois que ses trois collègues eurent disparu par les escaliers, Christopher se leva et vint se tenir devant Leonard, une main posée sur son épaule. Il y exerça une petite pression qui envoya une nouvelle décharge le long de son bras et desserra son poing qu'il ne se rappelait pas avoir fermé.

« Je suis désolé de la façon dont tout ça se passe, Leonard.

— Pour qui se prennent-ils ? murmura-t-il avec colère pour ne pas se faire entendre. D'abord on me traite de criminel, puis de mauvais père ! Bien sûr que tout est adapté pour Jim, il a vécu ici pendant six ans, vous avez fait vos visites de contrôle, pas besoin de plus ! »

Pike soupira, regarda brièvement Neavi et Joanna, puis il s'éloigna juste un peu et s'appuya sur une chaise.

« Je sais, je vous assure que je sais combien c'est frustrant pour vous d'être traité ainsi. Je vous connais, je sais que tout cela, toute cette procédure, est stupide. Je sais que vous êtes un père merveilleux pour Jim, qu'il vous aime et que vous l'aimez, mais c'est la procédure traditionnelle pour des cas comme le vôtre. »

Un grognement fit son chemin le long des cordes vocales de Leonard, et il ne put s'empêcher de serrer les poings de nouveau.

« Vous savez quoi ? C'est une vaste blague ! Quoi, ça vous amuse de nous détruire ? Parce que c'est ce que vous êtes en train de faire ! Plus le temps passe, plus on me convainc que je suis la pire des ordures et que jamais on n'aurait dû me confier la garde du moindre enfant. Vous allez me prendre Joanna aussi, tant qu'on y est ? Allez-y, au point où j'en suis, je crois qu'il n'y a plus rien qui peut me faire de mal. »

Pike soupira et fit un signe à Neavi, qui emmena rapidement Joanna dehors. Il croisa ses bras sur sa poitrine et regarda l'homme face à lui, qui ne ressemblait que de loin au père bienveillant et blessé au plus profond de son âme qu'il avait vu la semaine précédente. Comme si un jumeau maléfique avait pris sa place.

« Leonard, vous devez rester calme. Plus vous vous énervez, plus ça met en doute vos capacités à élever des enfants. Je vous le répète, je vous connais, j'arrive à reconnaître que vous n'êtes pas dans votre état normal. Il s'est passé quelque chose là-haut pendant qu'on était avec Joanna, et avec toute la pression que vous subissez depuis un mois, ça n'arrange rien. »

Le regard que Leonard lança au capitaine en aurait fait taire plus d'un, mais Pike était un habitué des menaces de l'espace, et ça ne l'impressionna pas une seconde.

« Je vais vous dire quelque chose que je ne suis pas censé vous dire. Jusqu'à maintenant, rien ne nous a indiqué qu'on ne devrait pas vous rendre la garde de Jim. Votre mère, votre ex-femme, votre secrétaire, Joshi, les professeurs de Jim, Neavi, Joanna... Personne n'a fait la moindre erreur. »

Sous la colère, Leonard sentit une certaine fierté gonfler.

« Il faut le dire, mes collègues doutent de cette sincérité, parce que c'est justement trop parfait. C'est pour ça que je suis là, parce que je vous connais tous et que je connais la situation. Mais Neavi et Joanna ont penché la balance encore un peu plus en votre faveur. »

Pike eut le fantôme d'un sourire aux lèvres, et Leonard fronça les sourcils. De quoi parlait-il ? Qu'est-ce qu'elles avaient pu dire qui pourrait l'aider ?

« Quand on leur a posé des questions sur vous, sur votre comportement depuis l'enlèvement et le départ de Jim, elles nous ont parlé de votre stress poussé à l'extrême et de vos épisodes de dépression.

— Putain... »

Leonard souffla un grand coup et se tira les cheveux en se tournant dos à Pike. Il était foutu... Jamais on ne donnerait la garde d'un enfant à un homme aussi instable mentalement...

Une main se posa sur son épaule et le guida jusqu'au sofa. Il s'y laissa tomber sans lever la tête, et aperçut, du haut de son champ de vision, Pike s'asseoir face à lui, sur la table de salon.

« Ce qu'elles nous ont expliqué nous permet de voir que vous êtes émotionnellement très attaché à Jim. Vous n'arrivez pas à surmonter son absence, et c'est quelque chose qui nous rassure. »

Il releva lentement la tête et son regard tomba dans le bleu glacial des yeux de Christopher. Pas besoin de Neavi pour y lire sa sincérité.

« Vraiment ?

— Vraiment, Leonard. Vous, comme moi, savez que rien dans cette maison ne peut nous amener à refuser cette adoption. Il n'y a plus que votre témoignage et celui de Jim entre vos retrouvailles. »

Un espoir bouillonnant grandit en Leonard, et il suspectait ses yeux de s'être allumés de cette lueur qu'ils revêtaient à chaque fois qu'il pensait à la possibilité de retrouver Jim.

« On sait tous les deux que Jim rêve de revenir ici, malgré le comportement détaché qu'il arbore depuis qu'il est parti. Il ne vous grillera pas. Vous êtes le seul à pouvoir tout faire échouer. Et la moindre trace de colère envers nous, la moindre nervosité à un moment où il ne devrait pas y en avoir... Et tout sera ruiné. »

Tout reposait sur les épaules de Leonard, et il sentit la pression de tout cela s'exercer sur ses épaules. Sa tête retomba en avant et il grogna de se montrer si vulnérable.

Mais Pike ne semblait pas le juger, et, une main posée sur son épaule, il se pencha en avant, augmentant l'impression d'intimité de cette conversation qu'ils ne devraient pas avoir.

« Je sais que vous pouvez le faire. Vous en êtes parfaitement capable, il faut juste que vous vous relaxiez. Juste une heure d'interrogatoire, et vous êtes pratiquement assuré de retrouver Jim. »

Retrouver Jim... Il pouvait presque toucher ce rêve qui le hantait s'il tendait la main...

« Est-ce que ça sera comme là ?

— Comment ça ?

— Eh bien... Est-ce qu'ils essaieront de me déstabiliser et de me pousser à réagir à la moindre question ? »

Pike soupira et passa une main sur son visage visiblement fatigué par les trois jours d'interrogatoires qu'il venait de passer.

« Oui. Vous êtes le seul qui subira ce traitement. Je vous promets qu'on n'a fait ça à personne, on n'a fait que poser des questions jusqu'à maintenant.

— Mais je suis un criminel...

— Vous êtes du moins considéré comme tel. On doit être certain que vous n'êtes pas un danger pour Jim. »

Nouveau grognement et Leonard releva la tête vers Christopher. L'homme avait une expression coupable au visage.

« Vous ne le pensez pas ?

— Je vous ai vu quand Jim était hospitalisé, je vous ai vu quand je l'ai emmené... Et je n'ai jamais vu personne être aussi touché que vous. Ce n'était pas du faux, la sincérité se sent, et vous l'êtes. »

Pike tapota l'épaule face à lui avec un sourire contrit auquel Leonard répondit difficilement, puis une autre pensée lui vint en tête.

« Vous aussi.

— De quoi est-ce que vous parlez ?

— Vous aussi, vous essaierez de me déstabiliser. C'est votre travail. »

Le capitaine hocha lentement la tête, son air coupable de nouveau sur son visage.

« Oui. J'aimerais l'éviter, parce que je sais que vous n'avez pas besoin de ça pour vous sentir mal, mais je risque qu'on doute de ma loyauté à Starfleet, je n'ai pas le choix. Mais je me modèrerai, et je leur demanderai d'en faire de même.

— Christopher, un problème ? » résonna une voix dure non loin d'eux.

Leonard et Pike redressèrent la tête en même temps, pour voir Archer et ses deux acolytes s'approcher d'eux. D'un signe de tête discret, Christopher rassura le père blessé, puis il se leva, lissa son uniforme et se raidit face à son supérieur hiérarchique.

« Leonard a simplement eu un petit malaise. Nous n'avons pas voulu choquer Joanna, donc elle est partie dehors avec Neavi et je me suis occupé de notre malade. »

Ledit malade était impressionné par la capacité de Pike à mentir à Archer. Il venait probablement de risquer sa carrière dans Starfleet pour lui, c'était plus qu'il n'ait jamais reçu de la part d'un presque inconnu.

Mais Archer avertit son regard sur Leonard, visiblement pas certain de la sincérité du capitaine, et, ne souhaitant pas ruiner à la fois la carrière de Pike et ses chances de retrouver Jim, il feint la faiblesse.

L'avantage d'être médecin, c'était qu'il connaissait très bien les symptômes. Il passa sa main dans ses cheveux, qu'il trouva étonnamment déjà trempés de sueur, et se leva lentement sur des jambes faussement tremblantes.

« Oui, merci beaucoup, Capitaine, sourit-il faiblement à Christopher. Est-ce que vous avez rencontré un problème à l'étage, messieurs ?

— Non, aucun, trancha Archer, les sourcils froncés. Voudriez-vous bien me montrer les équipements, si vous en avez, du rez-de-chaussée ?

— Bien sûr, c'est par ici. Si vous permettez, je vais simplement me rafraîchir un peu. »

L'amiral hocha sévèrement la tête sans répondre et Leonard partit à la cuisine. Il se rinça le visage au robinet, prit quelques secondes pour reprendre son souffle, but un grand verre d'eau, puis il en ressortit et ouvrit le placard du salon où reposait toujours la plateforme adaptative de Jim.

« Voici ce qui nous sert à placer James à hauteur de tout meuble dont il aurait besoin. »

Ils n'étaient définitivement pas sortis de là.

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Appuyée contre le chambranle de la porte d'entrée, Leonard regardait Neavi rejoindre son hovercar, talonnée par Joanna. Toutes deux avaient d'affreux cernes noirs au visage, et il savait qu'il arborait les mêmes.

La nuit avait été désastreuse pour tous les trois, et Leonard ne pouvait s'empêcher de se blâmer pour cela. En effet, après le départ des quatre officiels de Starfleet, il avait laissé libre court à tout son stress, qui était resté en arrière-plan toute la journée, et qui l'avait gardé éveillé toute la nuit.

Il avait passé la nuit à faire des allers-retours dans le salon, réveillant Neavi et Joanna, qui étaient restées avec lui jusqu'à ce que tous trois s'endorment sur le sofa dans un amoncellement de membres, tôt sur le matin.

Mais si lui ne travaillait pas aujourd'hui pour recevoir Pike et ses acolytes, ce n'était pas le cas des deux femmes. Joanna allait en cours et Neavi à l'hôpital, et leur fatigue était bien visible, même si elles faisaient tout pour le masquer.

Après avoir fait monter Joanna dans le véhicule, Neavi revint vers Leonard et se posta devant lui, une main sur sa joue. Elle approcha son visage jusqu'à ce que leurs fronts se frôlent et maintint son regard dans le sien.

« Bon courage, Imzadi, ça va bien se passer.

— Je l'espère.

— Tant que tu contrôles tes émotions, ça ira.

— Je vais essayer. Bon courage, fais attention à toi. »

Elle sourit et posa ses lèvres contre les siennes en un baiser tendre avant de murmurer un petit « promis » contre ses lèvres. Ils se séparèrent ensuite, elle attrapa sa main qu'elle caressa quelques instants, puis elle partit en sautillant joyeusement. Alors qu'elle s'éloignait, une vague d'amour vint percuter son esprit et il sourit pour lui-même.

Alors qu'il retournait à l'intérieur de la maison pour terminer de se préparer avant l'arrivée des hommes de la commission d'enquête de Starfleet, son esprit dériva vers toute cette histoire de télépathie à laquelle il ne comprenait pas encore tout. Jusqu'à maintenant, il ne l'avait rencontré qu'avec des patients, et en être la cible directe le perturbait beaucoup.

Il ne pouvait nier que ça lui plaisait beaucoup pour autant. Lors de ces atteintes, toute la personnalité de Neavi était toujours représentée. C'était doux, chaud, passionné, calme, tendre, tout ce qui faisait sa compagne et la rendait si irrésistible. C'était même plus intime, plus intense, et ça propageait à coup sûr des frissons à travers son corps entier.

Pour autant, il aurait aimé pouvoir rendre ces attentions à Neavi, pouvoir lui rendre cette tendresse et cette chaleur qu'il n'osait pas toujours montrer en public. Mais il se savait humain et incapable d'une telle prouesse, même s'il se promit d'en parler avec sa compagne une fois cette affaire terminée.

Il n'eut le temps de se poser cinq minutes après s'être préparé qu'on sonnait à la porte. Il vérifia l'identité des visiteurs au judas, prit une grande inspiration qu'il relâcha lentement puis ouvrit la porte, un sourire crispé plaqué au visage.

Face à lui, Archer, Pike, et leurs deux acolytes le fixaient, le visage dur, l'uniforme parfaitement lissé.

« Bonjour, messieurs. »

Archer et les lieutenants le saluèrent d'un bref signe de tête puis passèrent à côté de lui sans faire plus attention à sa présence. Leonard déglutit difficilement et leva son regard vers Pike, qui avait l'air sincèrement désolé. Le capitaine s'approcha de lui, lui serra la main et se pencha au-dessus de son épaule pour murmurer à son oreille.

« C'est pire que ce que je pensais. Accrochez-vous, et si ça ne va pas, faites-moi signe. »

Pike se recula et attendit que Leonard hoche la tête en signe de compréhension pour rejoindre ses collègues.

Le médecin attendit qu'il parte, ferma la porte, respira profondément, puis il rejoignit la table, où les quatre hommes étaient déjà installés, comme la veille. Pike était seul au bout de la table, les trois autres sur une même longueur.

Leonard s'échappa dans la cuisine pour revenir avec cinq grands verres et une carafe d'eau, puis s'installa face à Archer, non loin de Pike.

Sur la table, un petit dispositif était posé entre leurs padds. Un boîtier cubique de trois ou quatre centimètres de côté, avec deux petites diodes sur le dessus, relié par une gaine à un bracelet de cuir noir. À l'intérieur de celui-ci, deux petits carrés métalliques étaient visibles.

Leonard déglutit difficilement, comprenant immédiatement l'intérêt du dispositif.

« Je vais vous mettre ce bracelet, Leonard, commença Pike en tendant la main vers lui. Je pense que vous avez deviné ce que c'est, c'est un détecteur de mensonges.

— Simple précaution, ajouta Archer. Avec les hommes comme vous, on ne sait jamais à quoi s'attendre. Et n'essayez pas de mentir en contrôlant je ne sais quelle réaction de votre corps, on le saura. »

Pike, le regard plus désolé que jamais, remua les doigts en direction de Leonard, qui lui tendit la main sans aucune résistance. Rien ne servait de ne pas obéir, ça ne ferait qu'attirer plus de soupçons sur lui. Être clairement traité de criminel lui suffisait.

Le capitaine passa le bracelet autour de son poignet. D'abord, le cuir fut agréable sur sa peau, puis les plaques métalliques se posèrent sur lui alors que Pike resserrait le bracelet pour qu'il ne bouge plus, et un violent frisson fit son chemin dans tout son bras.

On aurait dit qu'ils l'avaient mis au congélateur pendant des heures avant de lui mettre !

Avec son haut à manches courtes, sa réaction physique fut bien visible et les quatre officiels la remarquèrent d'après le regard qu'ils posèrent sur lui, mais ils ne firent aucun commentaire, et en quelques secondes, le métal se réchauffa au contact de sa peau.

« Surtout, ne vous inquiétez pas du dispositif. Faites comme s'il n'était pas là. Vous faites des phrases de la longueur que vous voulez, s'il y a le moindre mensonge, il le captera. »

Leonard hocha la tête en direction de Pike qui lui offrit un sourire contrit, puis tourna la tête vers Archer, qui attendait visiblement de poser la première question.

« Vous êtes prêt ?

— Je le suis, Amiral. Je n'ai rien à vous cacher. »

Du coin de l'œil, il vit le dispositif flasher en vert mais n'y fit pas plus attention et resta concentré sur Archer.

« Bien. Avez-vous adopté James Tiberius Kirk dans l'optique de lui faire du mal ? »

Leonard dut retenir à la fois son envie de hurler sur Archer et celle de rendre son déjeuner sur son uniforme impeccable. Vraiment ? Une telle question ?

« Amiral- commença Pike avant d'être coupé.

— La ferme, Pike, ou vous dégagez ! Répondez. »

Christopher réprima visiblement la remarque acerbe qu'il avait sur le bout de la langue en se mordant l'intérieur de la lèvre avec une grande inspiration nasale. Leonard lui fit un bref signe de tête pour lui signifier que tout allait bien avant de regarder Archer.

« Je n'ai jamais adopté Jim dans l'optique de lui faire du mal. Jamais je n'aurais pu lui souhaiter le moindre mal.

— Dans ce cas, expliquez-nous les circonstances de son adoption. »

Leonard sourit en lui-même au souvenir de cette période, six ans auparavant, durant laquelle Joanna et lui étaient devenus de véritables piles électriques.

« Il y a six ans, ma fille Joanna est rentrée de l'école en me racontant qu'ils avaient parlé des pupilles de Starfleet. Ça ne m'a pas plus interpellé que ça sur le moment, mais je me suis ensuite rendu compte que j'étais obsédé par ces enfants, et que j'avais besoin d'en sauver au moins un, de le prendre avec moi et de l'élever, de l'aimer, de lui offrir tout ce que j'offrais déjà à Joanna. »

Le lieutenant roux fronça les sourcils, glissa son doigt sur l'écran de son padd quelques instants, puis leva la tête vers lui.

« Vous dites que vous étiez obsédé par ces enfants. Quels étaient vos idées à leur égard ? »

Leonard dut se retenir de rouler des yeux, ce que ne se gêna pas Pike de faire dans le dos de son supérieur hiérarchique. Est-ce qu'ils pensaient vraiment qu'il avait des pensées sexuelles à l'égard de gamins aussi jeunes ?

« Les seules idées que j'avais étaient celles d'élever un enfant dans de meilleures conditions que celles dans lesquelles il vivait. De lui offrir une famille, des amis, tout ce dont un enfant peut rêver. Si vous pensez que j'aurais pu vouloir une relation abusive et sexuelle avec un enfant, ce n'est pas le cas. »

Le deuxième lieutenant, blond, celui-ci, fronça à son tour les sourcils, la tête penchée sur le côté.

« Vous amenez de vous-même le sujet. Avez-vous des pensées ou des actes à vous reprocher dans le domaine ?

— Non. Je suis médecin, doublement diplômé en traumatologie et en psychiatrie, je sais les dommages physiques et psychologiques qu'amènent de tels actes, jamais ça n'aurait pu me traverser l'esprit. »

Ce fut au tour de Pike d'intervenir, et Leonard le remercia intérieurement de ne pas poser une question plus délicate.

« Quand et comment avez-vous appris les conséquences des abus sexuels sur les enfants ?

— À l'école de médecine, il y a une dizaine d'années. Ça faisait partie du cursus classique d'apprentissage. J'ai ensuite pu le constater sur différentes espèces de la Fédération une fois dans la vie active, y compris sur des humains. »

Pike hocha la tête en souriant discrètement, visiblement fier de lui, mais Archer ne le voyait pas de ce point de vue, et lui demanda de continuer l'histoire de l'adoption.

« Oui, Amiral. Après deux semaines de réflexion, nous sommes montés, Joanna et moi, à San Francisco, pour rencontrer des enfants. Tous étaient rassemblés dans la salle commune, beaucoup sont venus vers nous, mais il y en avait un qui restait en retrait. Jim repoussait quiconque venait vers lui, surtout les enfants, et bon nombre d'entre eux avaient un air haineux au visage. »

Leonard avait appris plus tard que ces gamins avaient brutalisé, volé, moqué Jim tout le temps qu'il avait passé à l'orphelinat. À chaque fois qu'il repensait à eux, il ne pouvait empêcher l'envie secrète qu'ils n'aient jamais été adoptés de monter en lui.

« Joanna l'avait remarqué aussi. On ne lui a pas parlé, mais on savait tous les deux qu'on devait sauver Jim et le sortir de là.

— Vous avez immédiatement dû remarquer la beauté physique de James. Est-ce que ça a été un motivateur de cette adoption ? »

« Bon sang, est-ce qu'ils vont me lâcher avec ces foutus pensées sexuelles ? » hurla Leonard dans sa tête. Il commençait sérieusement à en avoir marre et craignait de plus en plus de craquer et de les renvoyer bouler. Mais il ne devait pas, surtout pas.

« Absolument pas. Jim est un très beau garçon mais cette adoption n'avait rien à voir avec cela. Je me suis senti immédiatement lié à lui, j'avais besoin de le protéger, de-

— Et malgré ce besoin, il a été enlevé et torturé, le coupa Archer. C'est tout de même très contradictoire, tout cela. »

Il dut se retenir de toutes ses forces d'envoyer ses quatre vérités à l'amiral. Ce n'était même plus un coup bas, c'était au-delà de ça.

« Comme je l'ai expliqué, et comme Jim l'a expliqué également lors de nos témoignages respectifs au commissaire Joshi, nous n'aurions rien pu faire pour empêcher ce qu'il s'est passé. Son frère voulait à tout prix l'atteindre, il l'a lui-même avoué, j'aurais pu le protéger autant que je voulais, il aurait réussi son coup. »

Pike sourit discrètement à Leonard en voyant qu'il ne se laissait pas démonter par les questions des trois autres. Len' devait bien avouer que lui-même était un peu fier de lui, il se sentait de plus en plus capable de supporter cet interrogatoire sans craquer.

« En effet, c'est ce que vous avez tous deux affirmé, confirma Pike. Il est vrai que d'après les événements, ça serait arrivé un jour ou l'autre.

— Mais il y a tout de même un élément troublant dans les déclarations de James.

— Ah oui ?

— Cette histoire de Korrigan est tout de même étrange, vous en conviendrez. Quelle preuve avons-nous que ce n'était pas vous ? Que vous ne vouliez pas détruire James en faisant passer cela pour un enlèvement ? »

Là qu'il y pensait une seconde fois, Leonard doutait de pouvoir se retenir d'insulter les trois officiels qui accompagnaient Pike. Il serra et desserra son poing sur sa cuisse, déglutit difficilement, étouffa un grognement, prit une grande inspiration, puis reporta son attention sur le lieutenant roux.

« Ce n'était pas moi. Je n'aurais jamais pu faire ne serait-ce qu'un dixième de ce que cette personne a fait. Ces jours-là, je travaillais, les caméras de vidéosurveillance, mon secrétaire et Neavi vous le confirmeront. Quand je ne travaillais pas, j'étais avec Joanna.

— Pouvons-nous réellement faire confiance aux dires d'une enfant sous votre influence ? Nous n'avons aucune preuve qu'elle ne mentirait pas parce que vous lui avez demandé. »

Nouvelle grande inspiration pour Leonard, qui réitéra son geste du poing sur sa jambe.

« Joanna est très intelligente, vous l'avez dit vous-mêmes. Elle n'est pas aussi influençable que la majorité des enfants de son âge, c'est quelque chose dont sa mère et moi avons pris soin très tôt dans son éducation. »

Les quatre hommes hochèrent la tête de concert et penchèrent la tête sur leurs padds, laissant à Leonard le temps de souffler. Ils allaient finir par le tuer à lui mettre autant de pression !

« Quelle a été votre réaction lorsque vous vous êtes rendu compte de la situation ? reprit Pike après quelques secondes.

— J'étais dévasté. Je ne voulais pas y croire. Mais toutes les évidences étaient sous mes yeux, alors j'ai pris mon courage à deux mains et j'ai essayé de trouver une piste, sans succès. »

Archer fronça les sourcils, gribouilla sur son padd, puis releva la tête vers Leonard.

« Et ensuite ? Vous avez vu les images, autant que nous les avons vues.

— Vous n'avez pas tout vu, du moins pas sur le moment. Ils s'amusaient à nous envoyer les vidéos directement, à Joanna et moi. Et ces images... Elles me brisaient, elles me rendaient malade. Je ne sais sincèrement pas comment j'ai pu survivre durant cette semaine. »

L'amiral hocha la tête avec un air presque désolé et compatissant, puis le lieutenant blond posa à son tour une question :

« Et encore ensuite ? Une fois que vous l'avez retrouvé, que vous l'avez soigné, puis ces jours où vous viviez tous les deux ici ?

— Je n'ai jamais été aussi soulagé que le jour où je l'ai retrouvé. Mais tout ce temps où il était terrifié par ma simple présence, où il souffrait et je ne pouvais rien faire de plus... C'était terrible, je ne souhaite ça à personne. Mais pour autant, j'étais plus qu'heureux d'être avec lui. »

Pike avertit son regard sur Leonard qui souriait presque, puis, un fin sourire aux lèvres, prit la parole :

« Neavi et Joanna nous ont parlé d'épisodes dépressifs. Pouvez-vous nous en dire plus ?

— Je n'en suis pas fier, mais c'est une réalité. J'ai développé une forme minime d'un syndrome de stress post-traumatique, c'est-à-dire que j'ai peur en permanence qu'il arrive quelque chose à Jim ou à quiconque que j'aime. Et je ne peux pas cacher que le départ de Jim m'a plongé dans un état dépressif profond que je combats toujours. »

Les quatre hommes penchèrent la tête sur leurs padds, firent glisser leurs doigts sur leurs écrans, et Leonard se sentit une fois de plus soulagé qu'ils lui laissent un temps de répit. Il respira profondément, tordit ses doigts entre eux, avant qu'une voix ne l'interpelle.

« Dernière question... Est-ce que vous aimez Jim ? » demanda calmement Pike en relevant la tête.

Leonard sourit intérieurement à la question de Christopher, selon lui la seule qu'ils auraient dû lui poser aujourd'hui. Il sentit ses yeux s'humidifier mais combattit ses larmes et redirigea son regard vers Pike.

« Je l'aime plus que tout. C'est mon fils, au même titre que Joanna. Je ne me vois pas vivre sans lui, je n'y arrive pas. Bien sûr, j'arrive à subvenir à mes besoins les plus primaires, j'arrive à parler, à sourire, à marcher... Mais ce n'est pas la même chose. Je sens en moi qu'il me manque quelque chose, quelque chose de très important. Je suis complètement dépendant de mes enfants, et j'ai vraiment besoin de Jim près de moi. »

Archer détourna le regard, les deux lieutenants baissèrent la tête sur leurs notes, Pike posa sa main sur le bras de Leonard et le pressa gentiment en lui ôtant le bracelet.

« Je crois qu'on a terminé. »

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