Chapitre 6
La musique à fond, le cocktail dans la main, les pieds dans la piscine.
Neuf heures du soir, je suis loin d'être fatiguée.
Une semaine déjà que j'ai fait connaissance avec Carmen, Arsène et les autres. Depuis hier, où on a discuté tout les deux, je n'ai pas osé lui parler à nouveau. Je ne sais pas ce qui me retient, mais j'ai presque peur d'aller vers lui, peur qu'il remarque mon attirance, peur, mais je me sens attirée vers lui comme un aimant.
Lui, c'est un garçon drôle, charismatique et intelligent.
Moi, je ne suis qu'un corps sans but. Sans esprit, sans émotions.
Carmen s'assoit à côté de moi, l'air malicieux.
«- Hey, Andrea ! Pourquoi tu n'es pas avec Arsène ?»
«- Heu... je sais pas.»
«- Oh, crois moi, je ne suis pas dupe ! C'est complètement cramé qu'il est à fond sur toi !»
«- Tu penses ?»
La phrase m'échappe, et je prend une délicate teinte rouge.
Carmen fait un sourire victorieux.
«- Je sûre, tu veux dire! Difficile de le louper : il fait que te dévorer des yeux depuis le début de la soirée !»
Je détourne le regard.
«- Ça m'étonnerais.»
C'est vrai qu'avec mon vieux tee-shirt enfilé à la va-vite sur mon maillot de bain et mon short en jean effiloché, je n'ai rien de sexy ni de particulièrement attirante. Carmen semble lire dans mes pensées, car elle ajoute:
«- Oh que si.»
«- Et puis de toute façon, je pars d'ici deux jours. On ne se reverra jamais.»
«- Eh ben justement ... On voulait te proposer, Leonardo, moi et les autres, de rester jusqu'à la fin des vacances avec nous. Tu pourrais appeler tes parents pour leur demander, non ?»
Même si je ne le montre pas, sa proposition me fait bondir le coeur dans la poitrine. Ça ne m'étonnerait pas que mes parents acceptent.
«- C'est super gentil, Carmen; Merci. Je vais demander à mes vieux, mais en tout cas, ça me fait trop plaisir.»
Je lui souris, et en retour, elle m'adresse un regard rusé.
«- Et crois moi, je vais trouver le moyen de vous réunir dans le même lit, toi et Arsène, d'ici la fin de l'été.»
«- Carmen !»
Je proteste, sans m'empêcher de rire.
Elle se relève, et retourne discuter avec son chéri.
Je reste pensive, au bord de l'eau.
À la villa, c'est la fête tout les soirs.
N'importe qui aurait rêvé d' y être, et je dois avouer que je me plais, avec eux.
Je bois une gorgée de mon cocktail, fabriqué par Arsène qui d'ailleurs gère en tant que barman du groupe.
Rien que de penser à lui, je sens des papillons décoller dans mon bide, c'est comme dans ces films romantiques que je regardais quand j'avais quatorze ans.
Je ne me souviens pas de la dernière fois où j'ai aimé quelqu'un. Ça doit remonter à la seconde. Quand j'étais au collège, je me souviens que j'étais sortie avec plusieurs garçons, en disant d'eux après que c'était tous des connards, mais depuis le début du lycée, je ne me souviens pas avoir eu un crush ou un quelconque copain.
Est ce que c'est de l'amour, ce que je ressens pour Arsène ? Ou simplement une déraisonnable attirance ?
J'avais jamais vu de nuits aussi calme...
J'la regarde enchaîner les cigarettes...
Je relève la tête.
Tu m'as même comparé à Lucifer, maintenant tu bois et tu veux bien de moi, non mais j'hallucine hein.
La musique dégagée par l'enceinte retentit dans l'air chaud du soir.
Soit je la quitte en lui disant... Garde le sourire !
Une nuée de souvenir se dégage d'un coup dans ma tête.
Notre histoire n'aurait jamais dû finir dans le calme et la tendresse !
Je te déteste comme cette phrase qui dit 'C'était trop beau pour être vrai !
Je chante cette dernière phrase en même temps, du bout de mes lèvres.
Putain, ça fait tellement longtemps...
La voix de Lomepal s'insinue dans ma tête, et je ne peux pas m'empêcher de chanter à voix basse. Tellement longtemps... Je ne peux pas m'empêcher de taper du pied en rythme.
J'écoutais cette chanson, avant... Tout me reviens en mémoire, comme si quand j'écoutais de la musique, c'était dans une époque lointaine.
Lomepal, OrelSan, Angèle, Dua Lipa... J'aimais le rap, ça y est je me rappelle. J'écoutais tout ça et bien d'autres artistes, des musiques que j'écoutais en boucle pendant mes journées de livre, la musique c'était quasiment ma vie, comme les livres, d'ailleurs.
J'ai fait du violon jusqu'au lycée, par ce que j'ai été dans un lycée loin de mon école de musique. Après ça, j'ai continué, j'adorais toucher cet instrument, son odeur de bois, de forêt, ce son cristallin et puissant à la fois.
Mais depuis le mois de janvier, j'ai abandonné la musique. Mon violon, je ne sais même pas où il est actuellement, je suppose qu'il a pris la poussière. Mon casque audio, je ne l'ai plus utilisé, et maintenant, je sors sans mes écouteurs .
Des larmes se mettent à couler sur mes joues, mais cette fois, ce n'est pas de la tristesse, c'est du bonheur. Tout ce pan de ma vie réapparaît, et c'est juste... incroyable, y a pas d'autres mots pour dire ce que je ressent, je suis remplie d'allégresse, et j'ai l'impression qu'une partie du poids qui alourdissait mon coeur vient de s'envoler.
Je me lève en précipitation, et je cours chercher dans mon sac mon téléphone.
Je compose le numéro avec mes doigts tremblants.
La sonnerie résonne dans mon oreille.
«- Allô ?»
«- Maman !»
«- Andrea, ça va ? Qu'est ce que tu as ?»
«- Maman... Mon violon... Il est où ?»
«- Euh... Il est rangé dans le salon.»
«- S'il te plaît, sors le de son étui, fait sonner ses cordes. Je... J'ai besoin de l'entendre.»
«- D'accord. Ne quitte pas, ma chérie.»
J'entends ma mère courir, le bruit de la fermeture Éclair retentir, et le bruit du tissu posé sur l'instrument se froisser.
«- Voilà, je l'ai sorti.»
Je ferme les yeux pendant que ma mère fait sonner mes cordes en pizzicato. Les larmes coulent de plus belle.
«- Tout va bien ?»
S'inquiète ma mère.
«- Tout va super bien, maman, je la rassure. Merci... Merci beaucoup.»
«- Tu es sûre ?»
«- Oui. Maman ? Je voudrais vous demander de rester jusqu'à la fin du mois d'Août. Les amis que je me suis fait à la plage proposent de m'héberger jusqu'à là.»
«- Je ne sais pas trop. On ne connais pas ces gens, ma chérie.»
Rien qu'à la pensée de retourner chez moi, là où je serais noyée par la peine, j'ai envie de vomir.
«- S'il te plaît... Je veux rester ici...»
Je supplie.
«- Il faut que j'en parle avec ton père.»
«- Tu ne comprends pas... Je suis bien, ici... »
«- Non.»
«- Maman ! Depuis que je suis arrivée, depuis que j'ai rencontré ces ados... J'ai l'impression d'oublier un peu le mois de janvier, maman !Grand silence derrière le combiné.
«- C'est accord.»
Je souris, baignée de larmes.
«- Merci... Tu ne peux pas savoir quel point je suis contente.»
«- De rien, ma chérie.»
«- Il faut que je te laisse. Passe le bonjour à papa. Je t'aime, maman.»
«- Moi aussi, je t'aime. À très vite, Andrea.»
Je raccroche, puis me dirige vers la cuisine pour me rincer le visage.
Je me frotte les yeux pour éliminer mes larmes, puis je ressors, les yeux fixés vers le sol.
Je heurte soudain quelqu'un. Je relève la tête, et découvre Arsène.
«- Oh. Salut.»
«- Tout va bien, Andrea ? Tu as l'air d'avoir pleuré... »
Je réfléchis à toute vitesse.
«- Non, c'est pas ça. Je me suis pris un peu d'eau chlorée de la piscine dans les yeux, et j'ai appelé mes parents pour savoir si je pouvais rester.»
«- Et tu peux, du coup ?»
Je me persuade que l'espoir que je vois dans ses yeux n'est que le fruit de mon imagination.
«- Oui ! Il veulent bien que je reste avec vous jusqu'à la fin du mois d'Août.»
«- Super ! Ça aurait été dommage si tu avais dû partir après-demain.»
«- C'est clair ! Je suis trop contente. »
J'évite son regard, et je me dirige vers la porte vitrée.
«- Bon, ben, à plus tard...»
Il me rattrape par le bras et se plante devant mois.
«- Attends, Andrea ! Tu es sûre que tout va bien ? Tu m'évites depuis hier.»
Bien sûr que ça ne va pas, j'ai envie de crier. Je t'évite, par ce que je ne veux pas m'attacher à toi, puisque tu ne me considéreras toujours juste comme une amie !
«- Non, non, je réponds à la place. Je ne t'évite pas.»
Il fronce les sourcils.
«- D'accord... Je te laisse, alors.»
À mon tour, j'ai envie de le retenir, de lui demander de rester avec moi, mais je n'ose pas et je le regarde partir tristement, les épaules voûtées.
Putain, j'avais oublié à quel point ça faisait mal, l'amour, si c'est bien ce que je ressens pour lui.
Je reste prostrée devant la table de la terrasse, recouverte de nourriture d'un bout à l'autre, comme tout les soirs. Un véritable buffet !
Marie et Ludivine m'aperçoivent à ce moment et se dirige vers moi.
«- Andrea ! Carmen m'a dit qu'elle t'avait proposé de rester, du coup ! Qu'est ce que tu vas faire ?»
Je me force à adopter un ton joyeux.
«- Je viens d'appeler mes parents pour leur demander, et ils ont accepté.»
«- Génial ! Ça va être super, hein, Ludi ?»
«- Ouais, c'est bien que tu restes, Andrea !»
«- En plus, ajoute Marie en se penchant vers moi avec un air de conspiratrice, si je parie qu'il y a quelqu'un qui va être ravi, c'est bien Arsène.»
«- Eh bien, je lui ai déjà dit.»
«- Et il a répondu quoi ?»
Je masque ma tristesse.
«- Il a dit que c'était super.»
«- Si je peux me permettre, je trouve que toi et Arsène, vous allez très bien ensemble, murmure Ludivine.»
«- Complètement, acquiesce Marie. Ça serait génial si vous pouviez vous mettre ensemble !»
«- Je sais pas trop. Je ne crois pas qu'il soit intéressé.»
Je m'éloigne un peu dans le jardin, mon verre à la main.
Je crois vraiment que je l'aime, Arsène.
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