Nébuleuse perspective

Commentaire de l'auteur:
Coucou tout le monde ^^
Bonne lecture!!

Nous étions au salon et la discussion allait bon train. Nous venions de tomber d'accord; à leur retour, Benjamin sera prié de demeurer parmi nous. Emmett en parfait gentleman, proposait de laisser au couple la petite dépendance qu'occupait d'ordinaire Jacob, « Afin qu'ils aient un peu d'intimité ! » avait-il précisé et l'idée déchaînait son hilarité. Comme à son habitude, tout débat était propice à la légèreté pour lui. Sauf que le loup n'était pas du tout de son avis, il rageait intimement, incapable de dire tout haut ce qu'il pensait tout bas de cette idée qui ne lui convenait pas du tout.

Et mon intimité à moiil y pense le suceur de sang? Pesta-il, boudeur, tout en essayant de ne pas croiser mon regard.

J'étais peut-être indulgent, conscient qu'il n'y avait pas meilleur compagnon pour ma fille que lui, mais, je n'étais nullement prêt à accepter qu'il puisse la percevoir ainsi. Encore moins apte à savoir qu'elle aussi le conçoit de la même manière et qu'elle se lamente présentement de l'idée suggérée, qu'elle pense d'une monumentale stupidité. Je ne pus m'empêcher de grogner tout bas lorsqu'un fugace instant de cette intimité qu'il aimait tant, échappa à ses pensées.

Je ferais mieux d'aller me dégourdir les pates, pensa-il, en s'empressant de se lever, le vieux commence à monter les crocs…ça m'a échappé…pas fait exprès…excuse beau papa!

Il faisait de l'humour et il n'y eut que mon regard noir pour lui répondre.

- Mais t'en va pas! ricana Emmett se méprenant sur sa réaction qu'il attribuait à sa proposition de le mettre dehors, je te ferais une belle niche dans le jardin…c'est promis mon pote…allez reviens!  

Il parvint à amuser Renesmée qui rayonnait. Ça me comblait de la voir si joyeuse, si épanouie. Je pouvais accorder au moins ça à ce cabot de Jacob; il la rendait heureuse, même si les moyens qu'il utilisait pour y parvenir me donnaient de violentes envies de meurtre. Bella comprit que ma contrariété était incontestablement liée au départ du loup.

Ça me fait cet effet-là à moi aussi, m'affirma-elle, si on s'y met à deux, je crois qu'on pourra lui faire sa fête, ni vu ni connu.

Elle me souriait malicieuse. Les autres furent surpris de nous entendre rire sans raison apparente.

 Quel gamin! ne cessait de penser Jasper, comme Emmett n'en finissait pas de déblatérer sur le sujet.

Rosalie partageait son avis, avec beaucoup plus de tendresse néanmoins.

C'est dangereux que Benjamin reste! pensa-elle, angoissée à l'idée de tout ce que cette décision pouvait entraîner comme répercutions négatives, dramatiques plutôt. Puis, son regard croisa le reflet de son visage sur la baie vitrée et ses pensées en devinrent par conséquent nettement moins profondes. J'en souris amusé et m'en échappai à grand renfort de concentration.

Tout comme moi, Alice veillait elle aussi et depuis quelques heures déjà à bloquer les visions qui voulaient l'assaillir; celle d'Angie dans les bras de Benjamin. Le départ de Jacob rendait l’exercice nettement plus difficile. Elle croisa mon regard.

Je compatis, songea-elle en souriant, toi qui dois tout le temps faire ça…

Étrangement, cela devenait de plus en plus ardu pour elle de chasser les images qui voulaient l’assiéger, mais elle ne s'en inquiéta pas outre mesure. Elle focalisa toute son attention sur Bella, mais elle grimaça en changeant ses plans, car elle vit plus que clairement que notre soirée à nous aussi sera très mouvementée.

Eh bien! Je ne suis pas sortie de l'auberge !

Sa vision de bon augure, m'aida à me dérober un court instant à l'effervescence des pensées qui m'entouraient. J'imaginais déjà le réconfort que ce serait de serrer ma raison de vivre dans mes bras, imaginais son corps contre le mien. J'éprouvai soudain, le besoin urgent de donner raison au présage d'Alice. Bella constata sans grande peine mon humeur; mon sourire en disait long. Et comme en écho à mes propres pensées; Vivement! songea-elle, en me laissant accéder à ses réflexions, par le biais desquelles elle s'amusa à me tourmenter.

Esmée nous couvait de son regard maternel; heureuse et anxieuse à la fois, comme elle l'a été ces treize dernières années.

Est-ce réellement une bonne idée? se questionna Carlisle en la contemplant, soupirant intérieurement, soucieux lui aussi. En pensant mon prénom, il me dirigea ses méditations; Aro pensera qu'on se ligue contre lui, m'assura-il.

- Je sais! l'approuvai-je.

Benjamin est un garçon bien, me dit-il, il mérite de retrouver une vie paisible…C'est de ma faute s'il est traqué; s'il ne nous avait pas aidé rien de tout cela… (il s'interrompit, sachant le nombre de fois ou je l'ai surpris à méditer là-dessus) C'est la moindre des choses de le protéger à notre tour…combien de temps laisserons-nous cette hypocrite mascarade se poursuivre?...Tous ces pauvres gens Edward, traqués, sacrifiés pour une vaine cause! Un jour il faudra bien que quelqu'un fasse quelque chose.

- Oui, mais qui?...Nous? m’enquis-je, conscient de l'impossibilité d'un tel scénario.

Les Volturi n'ont jamais été aussi forts, jamais aussi nombreux. Nous n'avons aucune chance, même alliés aux nombreux clans qui crient: vengeance!

Carlisle accorda à sa famille autour de lui, un regard plein de mansuétude. Comment pourrait-il jamais nous embarquer là-dedans? Courir le risque de perdre l'un de nous?

Bien sur que non, soupira-il, ce serait du suicide pur et simple. Cependant, ce serait injuste de laisser ça se poursuivre Edward!… Aro a commis des erreurs qu'il ne pourra jamais rattraper, des erreurs impardonnables ! Ce serait un sacrilège que de le laisser s'en sortir impunément… Tant de souffrances à cause de sa soif de puissance, tant de clans écartelés par sa faute…Avant hier encore Eleazar m'a contacté, m'apprit-il, accablé, Aro est encore allé lui rendre visite.

Je dus y mettre du mien pour parvenir à m'apaiser et faire disparaître le voile de colère qui m’obscurcit soudain la vue. Je regrettais de savoir ce que Carlisle entendait par ses mots; Aro ne rendait jamais des visites de courtoisie, même si ces dernières étaient déguisées ainsi. S'il a pris comme coutume d'aller voir les Dénali, c'est uniquement lié au pouvoir de leur chef de troupe; Eleazar. Un ancien de son clan. Un précieux don qui s'est éloigné, qui a suivi son propre chemin; du temps ou Aro permettait encore qu'on le fasse. Celui-ci n'a pas d'autre choix que de l'accueillir, même sachant pertinemment ce que leur poignée de main augurait. Elle signifiait que tout ce qu'a jamais pu voir Eleazar, toutes les discussions qu'il a pu avoir, tous les gens qu'il a rencontrés, appartenaient désormais à Aro. Et comme le leader des Dénali, ne peut empêcher son pouvoir de fonctionner, qu'il ne peut le bloquer comme Alice et moi arrivons à le faire, lorsqu'il rencontre un congénère doué de talent, il ne peut faire autrement que de le noter et s'il le remarque, Aro le fait lui aussi. Et quand Aro remarque un don, il n'est pas très ardu de deviner le cheminement que prendront les événements. Si bien qu’Eleazar en arriva à se couper du monde, de ses connaissances, ne voulant pas leur causer du tort sans le préméditer. Mais, Carlisle ne pouvant admettre se séparer trop longtemps de son ami l’avait prié d’accompagner sa famille qui était venue il y’a quelques jours de cela.

Il avait vu Benjamin, mais son don n’était pas un secret et les deux hommes ne se souciaient guère que le persécuteur de l’un rende visite à l’autre; ils s’appréciaient, réussissaient à en plaisanter. Sauf qu’il y avait quelqu’un de nouveau dans notre famille, quelqu’un qu’Eleazar ne connaissait pas et dont il n’a pu faire autrement que d’en apprécier les performances…Angie. Carlisle décrypta mes pensées aussi facilement que s’il avait eu mon don.

- Il sait pour elle maintenant, soupira-il intérieurement, crois-tu que son don puisse réellement l’intéresser ?

- Je ne pense pas, non, répondis-je dans un murmure, comme Carlisle et moi discutions en aparté. Son don est peut-être rare, mais il n'en reste pas moins obsolète, primaire en comparaison de ce qu'Aro a acquis.

C'est une bonne chose qu'il paraisse inutile, songea-il, légèrement apaisé.

Je m'apprêtais à lui donner raison, lorsque nous fûmes tous les deux tirés de nos réflexions par le hoquet étouffé d'Alice. Tout le monde se retourna vers elle et leurs pensées me submergèrent instantanément, créant un brouhaha pratiquement incompréhensible. La surprise y régnait en maître mot, la peur aussi. Mais, on était tous loin de se douter de ce qui s'apprêtait à nous tomber dessus. Le visage décomposé d'Alice laissait supposer le pire, mais quand je vis défiler l'avenir qu'elle voyait, aussi clairement que si j'y étais en ce moment, je sus qu'il n'y avait plus d'espoir de trouver une quelconque issue favorable. Je sus que notre quotidien sera à tout jamais chamboulé, que nous ne retrouverions plus jamais la sérénité, ni ne goûterions la paix de nouveau.

Je n'ai rien vu ! La voix mentale d'Alice retentit plus forte que toutes les autres, car on n'était encore que deux dans la confidence; l’effroyable terreur n’avait pas encore atteint les autres à leur tour.

- J'essayais de les bloquer, je ne pouvais pas savoir que...

Que quoi?! fut la pensée générale.

Le temps se trouva suspendu durant un moment, comme s’il voulait observer une minute de silence… et la minute n’était en réalité qu’une médiocre seconde; l’espace d’un laborieux souffle, juste une pause avant que la machine infernale ne se remette en marche. Nous savions tous que la trêve trouvera une fin, qu'un jour l'affrontement sera inéluctable, mais nous ne nous attendions sûrement pas à ce qu'il prenne cette forme.

- Téléphone! exigea-elle, le regard dans le vague, les lèvres tremblante, désespérée et Jasper le lui apporta dans un éclair.

Elle pouvait nettement voir que sa vision persistait malgré sa manœuvre (La main qui s'emparait de l'appareil dans sa vision n'était pas celle d'Angie, ni celle de Benjamin et le traqueur à qui elle appartenait ne comptait pas décrocher) mais, affligée de remords et de culpabilité, elle s'entêtait à essayer. Elle croisa mon regard, Edward!...Edward! haleta-elle intérieurement, suppliante. Mais, j'étais aussi perdu qu'elle, aussi impuissant. Il n'y avait plus d'espoir et nous le savions, il ne restait plus qu'à entraîner les autres dans les ténèbres de cette constatation.

- Que pouvons-nous faire? Pourquoi restons-nous ici? s'énerva Emmett.

Comme pour nous tous, le sentiment d'impuissance qu'imposait la situation le rendait fou. La réponse à sa question était cruelle et personne n'osait la lui donner. Nous ne pouvions rien faire, absolument rien! Ils étaient trop loin. Il était trop tard.

- Allons-y! s'impatienta-il, quand la seule réaction qu'il eut fut le renforcement des sanglots de ma Renesmée.

Ça me ravageait de la voir dans cet état! Quand je la vis enfouir son visage dans le cou de sa mère pour me cacher sa douleur, j'eus envie d'hurler ma rage.

- Allons les arrêter!

- Non! hoqueta Rose, hochant frénétiquement la tête. Lorsqu'il passa devant elle, elle lui attrapa le bras, tentant de le retenir. Non!

- Sois raisonnable chérie, lui murmura-il doucement, je ne peux pas laisser faire ça.

- C'est moi qui ne peut pas laisser faire ça! riposta-elle, farouche.

Ses pensées étaient peut-être chaotiques, mais quelque chose était cependant sûre; jamais elle ne le laisserait y aller.

- Je t'en pris mon ange…ne rend pas les choses plus difficiles qu'elles ne le sont déjà! la pria-il en s'écartant, pressé de réagir.

Rester là à voir nos visages grisâtres, figés d'effrois, le tourmentait. Il manquait d'air. Il fallait qu'il se donne l'illusion de faire quelque chose. Il me fit face, posa ses mains sur mes épaules. Edward, dit moi qu'on va faire quelque chose mon frère! pensa-il. Il ne voulait pas que la dernière chose qu'il lui ait dite soit: « Je vais te faire morfler ! », il ne pouvait pas concevoir ça.

Serai-je suffisamment preste pour les rattraper avant qu'ils n'arrivent aux portes de Volterra? Si tant est que Bella me laisse envisager cette possibilité, ce qui n'était pas du tout joué d'avance...

- Je vous vois y aller ! s’exclama soudain Alice et je partageai sa vision avec espoir.

En effet nous y allions. Carlisle et Jasper étaient du voyage, pas Emmett. Mais, elle pouvait voir aussi aisément que moi, l'inutilité d'une telle démarche.

- Vous arrivez …trop tard! murmura-elle, tenaillée de regrets. La main consolatrice de Jasper étreint doucement son épaule.

- Pourquoi elle ? s’enquit Emmett. Je pensais qu’ils n’en avaient qu’après Benjamin ?

Personne n’arrivait à comprendre comment on en était arrivé là. Carlisle restait silencieux, affligé, ses épaules affaissées par le poids de l’opprimante culpabilité. Dans son esprit ne subsistait aucun doute; dès que Benjamin aura été alerté par la nouvelle, il ira à Volterra et il ira seul. Il devait réparer ce dont il se croyait intiment responsable, il devait essayer, quoi que cela puisse lui en coûter et cela pouvait lui coûter beaucoup.

- C’est juste une façon détournée d’avoir ce qu’ils veulent, lui répondit-il dans un murmure, la voix méconnaissable car empreinte d’une rancœur plus vive que jamais. Nous n'aurions jamais dû les laisser partir...

- Ils veulent l’utiliser comme appât! se scandalisa Rose, outrée, mais cependant incapable de ne pas se sentir soulagée qu’on n’y aille pas.

De longues heures, on resta prostrés ainsi, engloutit dans un état d'hébétude et l'arrivée de Benjamin ne promettait pas un réveil agréable.

Il vint, terrifié, abattu, mais loin, si loin de se douter de la tournure qu'avaient pris les événements. Il pensait les avoir tous eus. Il lui avait dit de courir, l'avait vu faire… Il croyait la trouver ici. Comment pourrons-nous jamais lui annoncer la nouvelle ?... Comment ? Et il vit nos visages, nos expressions et il n’y eut plus rien à ajouter, mais quelque part au fond de lui la flamme d’un espoir factice ne voulut pas s’éteindre, pas encore.

Non !...Non !...Non ! Sa pensée fut répétée sans discontinuer, des centaines, peut-être des milliers de fois, sans pour autant lui apporter de soulagement et son espoir s’effritait, filait comme du sable entre ses doigts.

J’entrouvris les lèvres dans l’intention de dire quelque chose, tout en sachant pertinemment que mes mots n’avaient pas l’ombre d’une chance d’atténuer la violence de sa chute, car il chutait. Il ne pouvait se défaire de cette sensation; il chutait dans un vide abyssal. Encore et encore, sans jamais trouver de fond au gouffre qui le happait tout entier. Dans son tumulte, il se trouva la force de m’arrêter.

- Non ! hurla-il, fou de douleur.

Il voulait croire encore, croire que tout ceci n’était qu’un cauchemar, une odieuse plaisanterie. Et qu’est-ce qu’il aurait voulu que c’en soit une ! Qu’est-ce qu’il aurait voulu qu’on s’écrie tous qu’on l’avait bien eu et qu’Angie vienne s’excuser du puéril canular. Il nous dévisageait sans nous voir, hagard, déboussolé par le tourbillon incessant qui le malmenait. Il allait se réveiller, bientôt, il le fallait ! Il fut durant un long moment absorbé par l’effondrement de sa vie, et si intensément accaparé par la décadence de celle-ci que la main d’Emmett qui se posa sur son épaule le fit sursauter. Il se dégagea brusquement, recula, secouant la tête. Pas ça ! gémit-il intérieurement. Pas d’apitoiement, car celui-ci signifiait que tout ceci était réel.

- Pourquoi ? haleta-il, le menton tremblant, la voix aigue. Ils me veulent moi…moi !

Ses mains s’aplatirent sur son tors qu’il cogna de ses poings frémissants et sa démente tristesse me serra le cœur jusqu'à m’en étouffer. Je ne pouvais tolérer ça encore bien longtemps. Comme ma famille autour de moi, j’éprouvais l’inconvenant besoin de me dérober à ça, de quitter cette pièce, de m’éloigner du piteux spectacle. Et il comprit encore, sans qu’on ait recours aux mots. Il saisit qu’Angie n’était qu’une monnaie d’échange, un vulgaire objet de troc et aussi étrange que cela puisse paraître, la certitude fit renaître en lui un espoir inattendu. Il ira, fera l’échange et quand elle sera libérée, il déchaînera sa fureur. Il en tuera jusqu'à s’en épuiser. Il en tuera jusqu'à ce qu’ils finissent par le tuer à leur tour et il n’en avait pas peur. Peur ? Ce mot lui paraissait si faible, si futile ! Il n’y avait pas l’ombre d’une hésitation dans son esprit tourmenté. Pour elle, il ira en enfer s’il le fallait et si Aro était le diable, il était prêt à lui donner son âme.

Instantanément la vision d’Alice le confirma; il y allait. Et il se plantait devant ses persécuteurs sans flancher, s'offrait, demandait certainement que l'odieux échange se fasse. Elle se concentra davantage, car l'image de sa vision vacillait changeait à mesure que les décisions se mettaient en place. Puis, quand tout fut clair de nouveau, nous aurions tous deux voulu rester dans le flou. Il avait beau y aller, avait beau leur donner ce qu'ils cherchent depuis des mois, des années, ils ne se mettaient pas pour autant à respecter les règles. La vision d'Alice ne laissait aucune place au doute; elle ne revenait pas. Ils ne la libéraient pas.

Benjamin se releva, car dans son épouvante, il avait mis genoux à terre. Il fit face à Carlisle, honteux, affligé, ne pouvant le regarder dans les yeux. Ce dont il ne paraissait pas conscient c'est que Carlisle se sentait aussi coupable que lui, aussi redevable.

- Je vais la chercher! affirma-il d'une voix sans timbre.

- Non! objecta Alice.

Les autres demeuraient engloutis dans un silence contemplateur; chacun d'entre eux pouvant si aisément s'imaginer ce que Benjamin devait ressentir, songeant à ce que cela aurait été si l'un d'eux avait perdu l'être le plus cher à son cœur, se demandant si ce qui venait de survenir était sujet à répétition, si la guerre était désormais ouverte.

- Non, répéta-elle, il ne faut pas!

Benjamin tourna lentement vers elle son visage dévasté, la contempla sans la voir.

- Pourquoi? s'enquit-il, sans prêter une réelle attention à sa mise en garde; quoi qu'elle réponde il ira tout de même. Dans le monde qui s'écroulait autour de lui, il ne lui restait que cette certitude.

 Il y allait encore dans la vision d'Alice et comme il ne pouvait permettre de voir Angie entre les griffes des Volturi, il se battait, luttait, se faisait tuer. Elle croisa mon regard. Elle ne comptait pas laisser pareil carnage se produire, avec un léger hochement de tête, je l'approuvai. On n'avait pas besoin de complications de ce genre en prime. Jusque-là personne n'était encore mort, rien n'était définitif. Il fallait que cet état de fait persiste.

- Je te vois partir…souffla-elle, doucement, anticipant son rire. Mais je ne la vois…pas revenir. Je suis désolée Benjamin …

- Je n’y crois pas ! Aboya-il, ce n’est qu’hypocrisie tout ça! Vous voulez me préserver à ses détriments…

- Je te conjure de ne pas y aller ! supplia Carlisle en se levant.

Benjamin recula. Il se demandait si on essaierait de l’arrêter par la force et si nous arriverions à le faire si telle était notre intention.

- Donnez-moi une seule raison de ne pas y aller ! exigea-il, puis, en fixant Alice d’un œil mauvais, il ajouta : Une raison, pas un mensonge !

- J’en ai une, assura-elle pour lui répondre, aucunement vexée par son accusation; elle comprenait aisément l'amplitude de son mal-être. Elle t’en voudra pour l’éternité de t’être sacrifié pour elle…Imagine son chagrin ! Peux-tu seulement envisager de lui faire ça ?

Il secoua la tête, nullement convaincu.

- Ils sont si nombreux! Tu n'arriveras à rien, au mieux ils te feront prisonnier, au pire ils te tueront!

- Je ne lutterai pas, promit-il, je serais là-bas avec elle, ça sera toujours mieux que de la laisser seule.

Et c’était -j’en était certain- tout à fait ce à quoi ils aspiraient; avoir leur deux dons. Pourquoi choisir quand on peut tout prendre, tout détruire ? On pouvait le laisser y aller, lui permettre de la retrouver et le voir devenir l'un des leurs; Peut-être cela le soulagera-il de tomber sous l'ignoble hypnose de Chealsea, de perdre toute maîtrise sur sa personne...?

- Tu sais tout comme moi ce qu’ils peuvent faire, lui rappela-elle, ils te manipuleront ! Tu ne seras plus le même, elle ne sera peut-être plus la même. Pense à ce qu’ils pourront faire de toi, de ton don…

- Ça suffit ! lui intima-il, je sais tout ça, et rien de ce que vous pourrez me dire ne me fera accepter l’idée de la laisser là-bas…toute seule !

L’idée lui était inadmissible. Juste l’imaginer à Voltera, entourée de tous ces rapaces...Songer au mal qu’ils pourraient lui faire. Il en devenait fou, littéralement fou. Il fixa Carlisle.

- Comment pouvez-vous me demander ça ? l’implora-il presque.

- Aller là-bas maintenant est loin d’être la solution Benjamin, s'empressa de lui répondre Carlisle, saisissant l’opportunité afin de tenter de le raisonner, alors qu’il n’arrivait pas à se raisonner lui-même. Je sais ce que tu dois ressentir et crois-moi quand je te dis que ma colère est aussi vive que la tienne...

Et elle l’était. J'eus le loisir durant notre longue cohabitation d'apprécier la violence de sa colère et elle a rarement atteint ce degré d'intensité.

- Espérez-vous que je reste là sans réagir ? l'interrompit Benjamin.

- Ce n'est pas ce que je te demande, l'apaisa-il, je te prie seulement de réfléchir au meilleur moyen que nous avons de la sortir de là. Si tu y vas, nous vous perdrons tous les deux à tout jamais!

Et ce fut cette phrase là -à la fois emplie d'illusions et vide d'un réel espoir - qui nous embarqua tous dans ce qui serait peut-être notre dernière entreprise sur cette terre. L'heure de la révolte avait sonnée.

Commentaire de l'auteur:
Cc tous le monde! Merci d'avoir lu! Désolée pour le retard mais avec la rentrée je n'ai pas eu le temp de publier mes chapitres😉.

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