Dans ma chambre, un soupir de soulagement s'échappe de mes lèvres alors que je me laisse tomber lourdement sur mon lit. La tension qui m'habitait depuis notre retour à l'Hazbin Hotel semble se dissiper peu à peu.

Je murmure alors un vague "Désolée, Bambi...", mais mes mots se perdent dans l'atmosphère étouffante de ma chambre. Je suis désolée, oui, mais pas seulement envers lui. Je suis désolée envers moi-même, pour ne pas avoir été assez forte pour affronter cette tempête, pour avoir cédé à la tentation de fuir.

Un regard chargé de mépris vient brusquement briser ce moment de quiétude, m'arrachant à mes pensées apaisées. Je devrais pourtant m'y attendre, Pearl ne rate jamais une occasion de me ramener à la réalité, d'une manière ou d'une autre.

Je la sens-là, dans l'ombre, son aura empreinte de reproches et de curiosité. Elle attend, attendant que je livre des réponses à ses questions muettes mais oppressantes. Et pourtant, je ne suis pas sûre de vouloir partager mes tourments avec elle. Pas maintenant. Pas après tout ce qui s'est passé.

Moi : Pearl... Arrête.

Pearl me fixe intensément, ses yeux brillant d'un mélange de curiosité et de reproche.

Pearl : Où étais-tu passée ?

Moi : Bloquée chez Alastor à cause de la neige...

Pearl : Ah oui ?

Moi : Ouaip... Que veux-tu, je suis toujours faible face aux aléas de la météo.

Je dis cela d'un ton pensif, laissant échapper un soupçon de frustration. Peut-être étais-je aussi impuissante face à la personne qui me suivait. Avec le temps, j'avais appris à détecter les personnes qui me suivaient peu importe comment elles se faisaient discrètes. J'arrivais toujours à les déceler. Mais là, je le sens, je le sais, mais impossible de savoir qui... Tout ce que je sais, c'est qu'il ne veut pas mon bien.

Pearl me fixe de plus belle, son regard chargé d'une gravité que je connais trop bien. Son accusation me prend au dépourvu, mais je refuse de flancher, même sous son regard perçant.

Moi : Pearl, je t'assure que ce n'est rien de grave. Juste une série d'événements imprévus.

Je m'empare de mon oreiller et enfouis ma tête dedans, cherchant un répit momentané dans l'obscurité feutrée de mes pensées tourmentées.

Moi : Quelqu'un nous a suivi...

Pearl, imperturbable comme toujours, ne perd pas une seconde pour apporter sa réponse cinglante.

Pearl : Tu lui as éclaté la gueule au moins ?

Je me redresse, sentant le poids de l'anxiété s'intensifier dans ma poitrine.

Moi : C'est cela le problème. Impossible de savoir d'où venait ce regard... Je pense même devenir folle avec cela...

La frustration monte en moi, une sensation familière que je pensais avoir laissée derrière moi depuis longtemps.

Pearl : Ton instinct ne t'a jamais fait défaut, Romane. Si quelqu'un te suit et que tu as la sensation que quelqu'un te suit, ça veut dire que quelqu'un te suit.

Je hoche la tête, reconnaissant la sagesse de ses paroles.

Moi : Oui, mais pourquoi ? Tu crois que quelqu'un d'autre que Crymini m'a reconnue ?

Pearl pèse ses mots, son regard sondant les profondeurs de mon âme tourmentée.

Pearl : Si c'était juste un fan, tu ne serais pas autant sur les nerfs, je pense... Je pense que tu sais que cette personne te veut peut-être du mal.

Le poids de ses paroles s'abat sur moi comme un coup de massue, réveillant en moi une peur que je pensais avoir enterrée depuis longtemps.

Moi : Je ne le pense pas, j'en suis sûre.

Pearl sourit avec satisfaction, mais je sens que nos échanges ne font que gratter la surface de la véritable menace qui plane sur moi.

Pearl : Ah voilà la Romane que je connais, celle qui n'a peur de rien. Alors, que vas-tu faire ?

Je reste silencieuse, me laissant submerger par le tourbillon de pensées qui tournoient dans mon esprit torturé.

Moi : Je ne sais pas. Je ne veux pas mettre les gens de l'hôtel en danger avec mes fantômes du passé...

Pearl soupire, sa patience commençant à s'épuiser devant mon refus obstiné d'affronter mes démons intérieurs

Pearl : Et voilà, elle est repartie... Allez, Romane, bouge-toi. Tu as une nouvelle vie, enfin une nouvelle non-vie... Ne te focalise pas sur ton passé comme tu le faisais de ton vivant et avance...

Je retire enfin l'oreiller de mon visage, me redressant pour m'asseoir sur le bord de mon lit. La voix de Pearl résonne dans ma tête, comme un rappel constant à l'ordre. Elle a toujours eu ce talent pour me pousser à sortir de ma zone de confort, même quand je préférerais m'enfoncer dans mes pensées et mes tourments.

Moi : J'ai l'impression qu'on a eu cette discussion maintes et maintes fois... Et je t'ai déjà dit, Pearl, que je ne pouvais pas tant changer... Je suis ainsi.

Pearl : Tu n'as juste pas le courage...

Je sens mon cœur s'accélérer, les mots de Pearl résonnant comme un écho de mes propres doutes. Le courage... Ai-je vraiment peur de changer, ou est-ce simplement une excuse pour rester dans ma zone de confort ?

Moi : C'est à moi que tu dis ça ?

Pearl : Bah si c'est vrai que tu es courageuse ...Va dire tes sentiments à Alastor.

Soudain, je me sens prise au piège. Les mots que je n'ai jamais osé dire à voix haute, Pearl les prononce sans détour. Les battements de mon cœur résonnent dans mes tempes, mon esprit cherchant désespérément une échappatoire.

Moi : Je... je ne vois pas de quoi tu parles. Nous sommes seulement amis

Dis-je avec un sourire forcer.

Pearl : Je ne me souviens pas que tu considérais tes amis comme ça. Ou alors je me trompe ? Tu n'as vraiment aucun sentiment pour Alastor ?

Son sarcasme pique comme une épine dans ma conscience. Je sens la chaleur monter à mes joues, un mélange de honte et de colère. D'un geste brusque, je saisis l'oreiller à côté de moi et le lance en plein visage à Pearl.

Moi : Arrête de dire n'importe quoi !

Pearl : Et maintenant, tu m'attaques.

Elle rit, défiant mes tentatives de la faire taire. La tension entre nous est palpable, mais il y a aussi une certaine complicité, une amitié forgée dans le feu des épreuves.

Moi : Tu mérites que je te réduise en bouillie.

Pearl : Ah, j'aimerais voir ça !

Je laisse échapper un rire sarcastique teinté d'une pointe d'amertume. Pearl sait pertinemment que je possède la puissance nécessaire pour la vaincre, que mes capacités surpassent de loin les siennes. Pourtant, elle comprend aussi que je suis émotionnellement incapable de recourir à une telle violence. Après quelques instants de joute verbale, je parviens peu à peu à retrouver mon calme et je reprends la parole d'un ton plus posé, bien que toujours teinté de tension.

Moi : Pearl, crois-tu seulement savoir pourquoi je suis ici ? Et pourquoi je refuse catégoriquement d'accepter mes sentiments envers Alastor ?

Un silence pesant s'installe dans la pièce avant que Pearl ne réponde d'une voix lente mais assurée.

Moi : Tu étais là ?

Pearl : Je serai toujours là. Donc oui, je sais ce que tu as fait, et je sais ce qu'on t'a demandé... Mais tu n'as pas apporté la misère du monde avec toi.

Moi : J'ai accepté. C'est ainsi que je veux mener ma non-vie...

Le poids de mes mots semble emplir la pièce, soulignant le fardeau de mon passé et les choix difficiles que j'ai dû faire pour parvenir jusqu'ici.

Pearl : Je vois... Comme toujours, quoi...

Son visage changea soudain, son expression taquine laissant place à une lueur d'inquiétude.

Pearl : Maintenant que j'y pense, c'est peut-être une personne que Nina a tuée après ta mort ?

Moi : Quoi ?

Pearl : La personne qui te suit, c'est peut-être une personne que Nina a tuée par rage après ta mort. Elle m'a bien détruite, moi.

Le soupçon de Pearl m'atteint comme une flèche empoisonnée, troublant ma quiétude momentanée. La simple idée que quelqu'un puisse être animé par un désir de vengeance après avoir été victime des actions de Nina, même indirectement à cause de moi, fait émerger en moi un sentiment de culpabilité oppressant.

Moi : Tu sais très bien que Nina en est incapable. Elle, comme moi, enfin, nous tous, avons accepté d'être les juges et les enquêteurs, pas les bourreaux. Règle numéro une : on ne tue pas. Je traquais les criminels, je ne les tuais pas, même si certains le méritaient...

Chaque mot que je prononce résonne avec une conviction forgée par les épreuves que j'ai traversées. Mais malgré ma confiance en la nature de Nina, le doute s'insinue dans mon esprit, alimenté par l'idée que mes actions, aussi bien intentionnées soient-elles, pourraient avoir déclenché une série d'événements incontrôlables.

Pearl : Je sais, je sais... Règle numéro 1, on ne tue pas. Règle numéro 2, on reste soudés. Règle numéro 3, on ne trahit pas une promesse, et ainsi de suite, je les connais, tes règles à la con... Mais tu sais très bien que ta mort a dû laisser une trace chez ta sœur et tes amis.

Je baisse la tête, submergée par un mélange de culpabilité et de frustration. Les paroles de Pearl résonnent dans mon esprit, me rappelant les règles que j'ai établies pour moi-même, les principes auxquels je me suis toujours tenue. Mais malgré tout, je ne peux m'empêcher de ressentir ce poids sur mes épaules, cette responsabilité qui semble toujours retomber sur moi.

Pourquoi ai-je toujours l'impression que c'est de ma faute ? Pourquoi est-ce que je me sens si impuissante face aux conséquences de mes propres actions ? Des pensées tourbillonnent dans ma tête, des scénarios alternatifs où j'aurais pu agir différemment, où j'aurais pu prévenir tout cela. Mais la réalité demeure implacable, et je suis forcée de l'affronter.

J'aurais dû... J'aurais dû être plus forte, j'aurais dû lui résister... Mes doigts se serrent sur le tissu de ma chemise, cherchant désespérément un réconfort illusoire. Mais au fond de moi, je sais que cette faiblesse est ancrée en moi depuis toujours, que l'amour que je porte aux autres est à la fois ma plus grande force et ma plus grande faiblesse.

Et puis, il y a Alastor... La simple évocation de son nom fait battre mon cœur un peu plus fort, mais aussi un peu plus vite. Pourquoi est-ce si difficile d'avouer mes sentiments pour lui ? La peur de l'inconnu, la crainte d'être rejetée, toutes ces émotions se bousculent en moi, me laissant désemparée et confuse.

Pearl rompt le silence, ramenant brusquement mon esprit à la réalité présente. Sa question résonne dans la pièce, empreinte d'une préoccupation teintée de reproche.

Pearl : Regrette tu d'avoir accepté ?

Non, ce n'est pas le cas. Malgré tout, malgré mes doutes et mes peurs, je reste déterminée à accomplir ma mission, à sauver des vies, même si cela signifie affronter mes propres démons.

Moi : Pas du tout. J'ai encore des vies à sauver et je compte bien le faire.

Pearl soupire, comme résignée, et se dirige vers son chargeur. Je la regarde s'éloigner, reconnaissante pour sa présence constante à mes côtés. Elle a toujours été là, une sorte de pilier de soutien dans ma vie, même dans les moments les plus sombres. Sans elle, je ne sais pas comment je ferais face à toutes les turbulences qui secouent mon existence.

Quant à moi, je m'installe à mon bureau, laissant mon esprit s'immerger dans la planification de notre prochaine mission. Les pensées s'entrecroisent dans mon esprit alors que je trace des stratégies, évalue les risques et anticipe les imprévus. J'ai été laissée trop longtemps sans agir, laissée à mes doutes et à mes tourments. Mais maintenant, je suis prête à reprendre les rênes.

Après tout, j'ai maintenant des démons à protéger. Ils comptent pour moi, on compte sur moi, pour trouver une solution à leurs tourments. Je sens le poids de leur confiance sur mes épaules, mais cela ne fait que renforcer ma détermination. Je ne les décevrai pas. Je suis prête à affronter tous les défis comme toujours, car c'est ce pour quoi je suis faite : trouver des solutions, protéger ceux qui en ont besoin, et avancer quoi qu'il arrive.