11.2
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L'amitié était quelque chose d'étrange, et Ji Min avait des difficultés avec ce type de relations, si ce n'était pas avec toutes. Il s'entendait bien avec Tae Hyung et Jung Kook, ils le soutenaient sans s'en rendre réellement compte, mais jamais ils ne parlaient vraiment sérieusement de leurs problèmes. En vérité, quand il se posait la question, Ji Min se rendait compte qu'il n'avait jamais partagé cette relation amicale idyllique qu'avec une personne : Lui. Parmi ses amis de Busan, il n'y avait eu que Lui, son véritable ami, son confident, son amour, tout. Il avait tout été. Les autres n'avaient été que des suppléments dont il ne retenait pas grand-chose si ce n'est une certaine sympathie, voire une nostalgie. C'était ce qu'il ressentait alors qu'il était au téléphone avec une de ces personnes qu'il avait considérée comme proche à l'époque, mais qui ne représentait plus beaucoup à présent. La loi de l'éloignement était terrible.
« J'aimerais être à Séoul. Je veux dire, tous les gars du club y sont. Je suis tout seul ici.
- La fac de Busan n'est pas si mal, non ?
- Ouais, mais j'aurais aimé intégrer une académie de danse à Séoul, le niveau doit être tellement meilleur.
- Sûrement.
- C'est nul que tu aies arrêté la danse, Ji Min, tu as du talent. »
Le roux se mordit la lèvre inférieure. Il n'aimait pas qu'on lui parle de danse, ça lui rappelait trop de choses. Les meilleurs comme les pires moments de sa vie, et honnêtement, il ne savait pas lesquels étaient les plus douloureux.
« Il est à Séoul aussi, non ? »
Pourquoi cet idiot devait-il en parler ? Alors qu'il avait tourné la page, alors qu'il était près à s'investir avec une autre personne, pourquoi fallait-il lui rappeler l'existence de cette personne qui le hantait encore ?
« Tu l'as revu ?
- Non. J'en ai pas envie, honnêtement.
- On n'aura jamais de nouvelles, hein ? Demanda tristement son interlocuteur.
- Je pense que non. »
L'envie de pleurer s'empara de lui d'un seul coup, violente. Il la réfréna. Ça faisait des lustres qu'il n'y avait pas pensé, il avait réussi à l'oublier. Presque.
« Je dois y aller, je te rappelle une prochaine fois ! »
Il se fit violence pour être chaleureux alors que son cœur était en train de se briser à nouveau. La seule personne à qui il pensait, pourtant, c'était Yoon Gi. Yoon Gi a qui il n'arrivait pas à faire confiance à cause de tout ça, et il s'en voulait. Peut-être qu'il n'était pas comme ça, qu'il n'allait pas le trahir et lui tourner le dos. Il se frustrait d'avoir peur à ce point. Croire en quelqu'un, c'était si difficile ?
Il se leva de son lit et alla dans le salon, branchant son téléphone sur la chaîne hi-fi. Yoon Gi n'était pas là, heureusement, il n'avait pas envie de se donner en spectacle aujourd'hui. Il avait toujours la playlist de toutes les chorégraphies qu'il avait apprises à l'époque. Il les avait sûrement oubliées, tant pis.
Une heure, peut-être même deux. La transpiration coulait sur ses tempes, trempant les mèches de cheveux qui venaient se coller à son visage. Elle glissait dans son dos, collant son tee-shirt contre sa peau. Il avait chaud, mais tant pis. Ça lui faisait du bien. Depuis qu'il était arrivé ici, il n'avait jamais dansé de nouveau. Parce qu'il n'avait pas le matériel pour dans sa chambre, et qu'il avait peur de déranger son colocataire bougon s'il mettait la musique à tue-tête dans le salon en se servant de sa propre chaîne. Il se serait certainement fait engueuler il y a quelques semaines, mais il se disait que ça ne poserait sûrement aucun problème à Yoon Gi à présent. Non, en fait, il n'en avait simplement rien à faire : il en avait beaucoup trop besoin pour se poser véritablement la question.
La musique s'arrêta, il attrapa sa bouteille d'eau avant de la terminer et la laisser tomber dans un coin de la pièce. Sa main s'empara de son téléphone, et la même piste résonna à nouveau dans la pièce. Les voisins devaient en avoir marre, tous comme ses parents n'en pouvaient plus à l'époque, mais il était enfin à deux doigts de maîtriser à nouveau parfaitement la danse qu'il avait apprise il y a trois ans. Trois ans, c'était quand ils étaient encore ensembles. Il se souvenait s'être entrainé pendant des heures avec Lui, jusqu'à s'effondrer de fatigue. Puis Il riait, lui offrait son magnifique sourire chaleureux, et ils repartaient pour un tour.
Ses joues étaient bien trop humides pour que ça soit uniquement de la transpiration.
La musique résonnait, tonitruante, si bien que quand Yoon Gi passa la porte, il se demanda quelle mouche avait pu piquer Ji Min, qui était, d'ordinaire, plutôt calme. Il avait la désagréable sensation de se tromper d'appartement, de ne pas être chez lui. C'était le problème, il avait du mal à vivre avec quelqu'un, encore maintenant. Pourtant, ça ne l'énerva pas. Il se contenta de soupirer, prêt à rejoindre calmement sa chambre pour s'allonger sur son lit, mais il se figea alors qu'il passait devant le salon, ses yeux se fixant sur les mouvements de Ji Min.
Depuis quand faisait-il de la danse ? Non, comment était-il possible qu'il ignore encore tant à son sujet ? Vu le niveau qu'il avait devant les yeux, ce n'était pas qu'un passe-temps, c'était une passion, une dévotion, ça se sentait. À quel point étaient-ils encore des étrangers l'un pour l'autre ? Quand allaient-ils enfin pouvoir affirmer qu'ils se connaissaient réellement ?
La gorge de l'ainé se serra. Parce qu'il se rendait compte qu'il y avait encore un chemin à parcourir pour qu'il puisse véritablement comprendre le jeune homme. Savoir ce qu'il aimait, ce qu'il détestait, ce qu'il avait vécu pour que sa dance reflète tant de douleur et de frustration. Aussi parce que Ji Min était magnifique, encore plus qu'il l'avait déjà constaté. Il était différent, il était concentré, il semblait être pleinement lui-même pour la première fois. Il resta silencieusement contre la porte, sans même poser son sac, les yeux perdus sur son colocataire et quand le morceau cessa, un silence fracassant s'emparant de l'appartement, il lui sembla être autant à bout de souffle que le roux qui se laissa tomber sur le sol, s'allongeant totalement sur le parquet.
C'est alors qu'il le remarqua, croisant son regard. Il ne dit rien, Yoon Gi non plus. Ils n'avaient rien à dire. C'était comme si, pour la première fois, ils se comprenaient réellement. Yoon Gi se rendait compte du fossé énorme qu'il lui restait encore à franchir, et Ji Min voyait ce qu'il provoquait en lui. Ils étaient transparents l'un pour l'autre, ils ne se cachaient pas derrière quoi que ce soit. Pour l'un, un obstacle, pour l'autre, une voie dans laquelle se jeter.
Il n'y avait aucun bruit dans la pièce si ce n'est la respiration saccadée du plus jeune et le vrombissement des enceintes dont le volume était définitivement très élevé. La main de Ji Min battit l'air, tapotant le sol à la recherche de la bouteille d'eau, vide. Il s'en empara, soupira, la jeta de nouveau. Il ne fallut pas plus de quelques secondes à Yoon Gi pour comprendre ce qu'il lui demandait avec son regard suppliant.
Il donna une nouvelle bouteille à Ji Min alors qu'il se redressait, passant érotiquement la main dans ses cheveux. Érotique, oui, il n'y avait pas d'autre mot pour le décrire. C'était la seule manière dont il arrivait à le percevoir à cet instant. Le fait qu'il boive n'arrangea rien, même s'il n'essayait pas de l'aguicher cette fois. C'était malgré lui, ou alors l'attirance que Yoon Gi ressentait était si forte que tout prenait des airs déviants. Ses cheveux trempés, sa sueur sur son cou, son tee-shirt collé à son torse, ses yeux brillants, tout semblait être provocateur, fait pour le pousser à l'imagination et le rendre fou. Ça marchait.
« Je suis désolé, Ji Min, mais il faut que je te le dise... »
Un regard interrogateur s'encra dans le sien.
« T'es trop sexy. »
Un air surpris passa rapidement sur son visage avant d'être remplacé par un grand sourire alors que le garçon éclatait de rire. Ça aussi, c'était la première fois. Il lui avait déjà dit ce genre de chose, mais jamais Ji Min ne lui avait lancé ce regard après, cette manière dont il le regardait à présent, un sourire presque enjôleur sur les lèvres. Ce regard qui signifiait qu'il aimait l'idée de lui plaire, alors qu'avant, il se contentait de soupirer ou de lever les yeux au ciel. Quelque chose avait changé. Yoon Gi ignorait si c'était depuis la teinture, la semaine dernière, ou si ça avait eut lieu à l'instant. C'était comme si Ji Min s'était débarrassé d'un rempart.
Vu la vitesse à laquelle son cœur battait, Yoon Gi était obligé d'admettre que c'était Ji Min qui avait les rênes à présent. C'était à lui de décider ce qu'il allait faire de ces mots et de ce qu'ils signifiaient, s'il allait les accepter ou non, entièrement ou non. S'il allait se rendre compte ou non d'à quel point Yoon Gi les pesaient. Ce fut presque avec peur qu'il suivit des yeux le corps de Ji Min alors qu'il se redressait pour lui faire face, une expression indescriptible sur le visage.
Ce ne fut qu'à cet instant que l'ainé se rendit compte que ses yeux étaient plus brillants que d'ordinaire. Quelle souffrance était enfouie en lui ? Qu'est-ce qui le poussait à se méfier des autres, mais surtout de lui-même, de ne pas se faire confiance, d'être en permanence dans la restriction ? Qu'avait diable pu vivre Jimin pour être comme ça ? Il aimerait pouvoir le savoir, l'aider à se défaire de ses choses, lui faire comprendre que malgré qu'il soit parfois un connard fini, il pouvait devenir une personne digne de confiance, qu'il n'attendait que qu'il se livre à lui. Yoon Gi savait que Jimin le voulait, qu'il en avait besoin, de laisser tomber ses barrières. Ne pouvait-il pas être la personne qui l'y aiderait ?
« Je sais, souffla-t-il en s'avançant d'un pas, rapprochant leurs corps. »
L'ainé ne bougea pas d'un pouce quand la main de Ji Min se posa sur sa joue, ni quand elle se promena sur ses cheveux, sur sa nuque, sur ses épaules. Il ne comprit la véritable signification des mots de Ji Min que lorsque sa paume se posa sur sa poitrine, au-dessus de son cœur affolé. Il savait qu'il avait les rênes, il savait ce qu'il lui faisait. Il savait. L'étrange connexion qui s'était faite quand leurs regards s'étaient croisés plus tôt n'avait pas cessé.
« Moi aussi. »
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Chose promise, chose due ! ~
Je vais essayer de m'imposer un rythme de publication. Autant pour moi que pour vous (il me le faut sinon je vais avoir la flemme). Une ou deux fois par semaine ça me semble bien (vu que j'ai de l'avance dans mes chapitres), mais les parties seront de longueurs assez variable (comme depuis le début en fait, je vois pas pourquoi je préviens.
Il reste une petite partie inutile après celle-ci, je la posterais quand j'aurais envie, et après, je commencerais à être plus régulière. J'espère vraiment m'y tenir. Je suis vraiment désolée pour cette loooongue absence ;;
Vous êtes les lecteurs les plus patients et adorable au monde, voilà des cœurs pour vous :
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