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Chapitre 84

PDV ETHAN

« Et toi, tu es dans la classe de mon petit Rémi ? » me demanda sa mère.

Je relevai la tête et la regardai.

« Bah, on l'était en début d'année, mais il a changé de classe. »

« Ah bon, pourquoi ? »

Elle avait l'air vraiment intéressé par ce que je lui racontais, ce qui changeait de mes tantes et oncles, qui eux, n'en avaient rien à faire de avec qui j'étais, ce que je faisais et ce que je comptais faire plus tard. 

« Bah.. »

Rémi me fait les gros yeux, afin de me faire comprendre de ne rien dire.

« C'est les profs, ils ont changé plusieurs classes afin que ce soit équilibré. »

Je mentais. Cela était évident, mais la vieille femme acquiesça d'un mouvement de tête avant de boire une gorgée de son thé vert. En parlant de cette boisson, j'en avais horreur. Rien que l'odeur m'insupportait, mais n'étant pas chez moi, je n'allais pas me plaindre.

« Il est dans mon équipe de hockey sur glace. » précisa Rémi.

« Ah bon ? Tu fais du hockey sur glace toi aussi ? » me questionna-t-il.

« Oui, depuis 7 ans déjà. »

« Ah oui quand même. »

Elle avait l'air agréablement surprise. Elle me sourit chaleureusement avant de regarder l'heure qui affichait 6h17 sur une vieille horloge qui, pour moi, était à deux doigts de s'effondrer en poussière sur le carrelage.

« Bon, je vais vous montrer vos chambres. Vous avez de la chance que j'ai des chambres d'amis, qui était antérieurement les chambres de mes fils. »

Elle partit dans une biographie de ses enfants, puis vint même nous parler de ses petits-enfants. Non pas que ce n'était pas intéressant, mais j'étais beaucoup plus préoccupé par Emily et son concours, que par la vie de ces gens dont je ne connaissais rien.

« Alors ici, c'est la chambre de Rémi, comme d'habitude. »

Elle lui adressa un sourire, comme pour signifier « Tu as vu, je n'ai pas oublié », puis vint se tourner vers moi.

« Ethan, tu dormiras dans cette chambre, juste en face. Elle est un peu moins grande, mais assez pour ne pas se sentir enfermé. » m'annonça-t-elle.

Elle m'ouvrit la porte et me montra la chambre entièrement couverte de bleu et de jaune. L'ensemble n'était pas très joli, mais ce n'était pas comme si je venais séjourner dans un hotêl quatre étoiles.

« Merci. »

Je pris mon petit sac dans lequel j'avais mis le strict nécéssaire puis le posai sur le lit double qui paraissait confortable. J'appuyai légèrement dessus afin de voir si c'était un matelas mou ou dur.

« Ne t'inquiète pas, le matelas est confortable. » me sourit la tante de Rémi.

Je souris puis regardai par la fenêtre. Deux rideaux se tenaient de chaque côté des vitres. Par celles-ci, je pouvais apercevoir une grande église non loin de la maison, ainsi que des maisons aux vitres cassées, et parfois même des toits en miettes. 

« Pourquoi toutes ces maisons sont-elles ravagées ? » demandai-je à la vieille femme.

Elle vint s'approcher de la fenêtre et me répondit :

« Il y a 1 mois, une petite tornade est venue saccager la ville. Seules quelques maisons comme la mienne restée intacte. Les autres n'avaient pas les moyens de payer des travaux car en ce moment c'est la crise.. Tu comprends. Alors ils ont décidé de partir autre part, sûrement chez des amis ou des gens de leur famille. Le nombre de villageois est passé de 812 à 47. Le bureau de tabac est détruit, mais la boulangerie est ouverte le mercredi, celui au bout de la rue. »

J'acquiesçai. Une tornade ? C'était vraiment étrange. Habituellement, la France ne subissait aucune catastrophe naturelle de ce genre. Ce devait être très rare.

« Il n'y a pas eu de blessés ? » demandai-je, curieux.

« Si. Il y a même eu une famille qui est décédée sous les décombres. Je les connaissais bien, et je prie chaque soir pour eux. » Elle fit un signe de prière avec ses mains avant de poursuivre : « C'est une très gentille famille. Après, il y a eu des blessés, mais ils s'en sont sortis. »

Je grimaçais légèrement. J'essayais de m'imaginer à leur situation, et je n'avais aucune idée comment j'aurais réagi. Peut-être mal. La femme me demanda de la suivre, changeant complètement de sujet. Dans le couloir, nous croisâmes le cousin de Rémi que je n'avais encore jamais vu. Dès qu'il m'aperçut, il me sourit avant de me tendre sa main pour me saluer.

« Tu es Ethan ? Moi c'est Tristan. »

Je lui serrai la main et lui souris. Il fit de même avant de me relâcher. Il annonça à sa mère qu'il partait se balader dans le village avec un de ses amis -qui faisait certainement parti d'une de ces familles qui étaient restées ici- sans donner d'heure de rentrée. 

« Ok, tu ne sors pas trop longtemps hein. A tout à l'heure ! » s'exclama la femme.

Le jeune homme devait avoir 19 ans, dans ces eaux-là. Et connaissant l'âge de sa mère, je comprenais qu'elle l'avait eu tardivement. Cependant, elle ne m'avait pas du tout parlé de son mari, ni Rémi d'ailleurs. Peut-être était-il décédé, ou simplement parti de la maison ? Ce n'était pas mes affaires, mais j'étais de nature curieuse..

PDV EMILY

Les yeux fermées, je sentais le sang vaciller dans mes veines. Mon coeur battait à la va-vite. J'avais l'impression d'exploser intérieurement. Je voulais être prise pour la suite. Je voulais qu'ON soit prise. 

« .. 7.. 9.. et 10 ! »

Avait-elle bien dit 9 ? Avais-je mal entendu ? Je n'eus pas le temps de réagir que j'entendis Tania crier de toutes ses forces et sauter comme une petite fille. Elle me serra fortement contre elle en hurlant :

« NOUS SOMMES PRISES ! NOUS SOMMES PRISES ! LE JURY NOUS A CHOISI ! »

J'écarquillai des yeux, et après quelques secondes de réflexion, je sentis l'adrénaline me montait et j'hurlais à mon tour.

« ON A REUSSIIII !! TANIA ! ON A REUSSIIII !! » 

Nous criions tellement fort que les autres -qui avaient perdu- nous dévisageaient. J'étais désolée pour eux, mais mon contentement prenait largement le dessus, et je ne pouvais pas faire autrement que de hurler afin de faire comprendre la joie et le soulagement que j'avais en moi.

La salle était remplie à la fois de joie et de tristesse. D'un côté, il y avait les personnes qui pleuraient, qui étaient démoralisés. D'autres ne disaient rien, et restaient sans rien dire, comme choqués. Puis il y avait nous, les gagnants, qui pleurions de joie et criions sans faire attention aux gens autour de nous. Peut-être était-ce égoïste de montrer notre joie aussi explicitement, mais c'était tellement bon. Après une heure et demi d'attente nous avions eu enfin notre réponse. En plus d'être positive, elle était tellement inattendue que nous fûmes terriblement surprise. J'étais heureuse. Vraiment.

« Il faut absolument que j'aille dire tout ça à mes proches ! » m'exclamai-je, essuyant mes larmes.

Tania regarda mon mascara qui avait certainement coulé, puis sourit d'une manière pas très normale.

« J'ai une idée. »

Je la regardai plus intensément, me demandant ce qu'elle préparait. Elle avait l'air à la fois impatiente et amusée.

« Et si on leur faisait croire qu'on avait perdu, et que tes larmes étaient dûes à une profonde tristesse ? »

Je souriais. Son idée était pas mal, mais comment allait réagir ma mère ? Cependant, l'idée était vraiment bonne. J'étais persuadée qu'ils allaient sauter de joie lorsque nous allions leur avouer que ce n'était qu'une blague et que nous avions gagné cette avant-dernière épreuve.

Avant de sortir de la pièce, Raphäel vint me taper à l'épaule. J'avais complètement oublié qu'il était là. Il me regardait et souriait de toutes ses dents.

« Félicitations à toi. »

« Félicitations à toi aussi. » répondis-je.

Il avait gagné lui aussi. Il était le duo n°7. Nous l'avions croisé vite fait dans les couloirs juste avant nos prestations.

Nous nous prîmes dans les bras, fiers de nous. Tania, elle, était en train d'envoyer un SMS à une de ses amies. Elle lui racontait ce qu'il venait de se passer et avait le sourire aux lèvres. Il fallait dire que nous ne pouvions pas nous empêcher de sourire. C'était automatique.

« Donc du coup, on va devoir s'affronter à la prochaine épreuve ? » demandai-je à l'intention de Raphaël.

« Je crois bien que oui. »

Il me regardait de haut, comme pour me provoquer gentiment. Je lui pinçai le bras, ce qui lui fit lâcher un gémissement de douleur. Je souris faussement avant d'ajouter, amusée :

« Ne crois pas que tu vas gagner. Tout n'est pas encore joué. »

Il se frotta le bras et ne cessa de me regarder dans les yeux, comme pour me déstabiliser. Sauf qu'à ce moment précis, rien n'aurait pu me déstabiliser, tant la confiance en moi était revenue. Je me sentais réellement puissante et talentueuse d'en arriver là. J'étais à deux doigts de devenir la gagnante du concours national de France, à deux doigts de devenir l'une des grandes musiciennes françaises !

« Bon, on va rejoindre nos parents ? » nous proposa Tania qui avait terminée de pianoter sur son téléphone.

« Allons-y ! Il faut qu'on prenne une expression triste.. ! » m'exclamai-je.

J'arrêtai difficilement de sourire, et à plusieurs reprises, Tania me fit rire. Elle prenait une expression du visage qui était très peu convaincante. Elle ressemblant un orang-outan qui boudait car il n'avait pas reçu sa banane. Nous tentâmes plusieurs fois, et au bout d'un certain, nous arrivâmes à garder une expression triste, déçue, et assez convaincante. Nous sortîmes de la pièce, gardant cette expression sur nos visages. J'essayai de rester sérieuse et de ne pas faire attention aux gens autour de nous. Je tenais fermement mon étui en main et marchai nonchalament jusqu'à la salle où se trouvait les parents et les proches des candidats et ex-candidats.

Dès que j'entrai dans la salle, Kate, Matthew et ma mère vint jusque moi. Ils me posèrent plusieurs questions dont je ne compris pas le sens tant le brouhaha des dizaines de personnes autour de nous était intense. Je ne répondis pas, et regardais le sol. Je sentis leur sourire s'effaçait peu à peu, puis Kate vint poser sa main sur mon épaule comme pour me soutenir moralement. Je sourais intérieurement. J'avais envie de crier « J'AI REUSSI ! MAMAN ! J'AI REUSSI ! C'EST UNE BLAGUE ! » mais je me retins. Je me devais d'être une bonne actrice pour ce moment tant important de ma vie.

« Tu sais.. Tu avais une chance sur trois.. Mais ne doute pas que tu es une fille talentueuse.. » me dit Kate. 

Je levai les yeux et lui souris faiblement, comme si je faisais un effort surhumain. Je devais ressembler à une fille complètement déboussolée, paumée, dépressive, mais je m'en fichais.

« Emily.. Tu sais, ce n'est pas grave hein.. »

Ma mère vint me prendre dans ses bras et me serra fortement contre elle. Ma tête posée sur l'épaule de ma mère, je pouvais voir Matthew qui me fixait. Je souris de toutes mes dents, et lui fis un clin d'oeil. Il comprit directement et se retourna afin de cacher sa joie et me permettre de continuer à jouer la comédie.

« Maman.. ? » dis-je d'une voix douce, très faiblement.

« Oui ma chérie ? »

Elle prit mon visage entre ses mains et me regarda dans les yeux. Elle remit une mèche de mes cheveux derrière mon oreille et se concentra sur ce que j'étais sur le point de lui dire :

« C'est pas vrai. »

Elle arqua un sourcil, suspicieuse. Elle ne comprenait pas trop où je voulais en venir.

« C'est une blague. » ajoutai-je.

Je me mis à sourire de toutes mes dents et elle me lâcha tout en bredouillant :

« Tu veux dire... que.. tu.. ? »

« J'suis admise pour l'épreuve suivante, Maman. J'ai réussi. »

Ma mère explosa de joie. Tellement sa joie était forte qu'elle se mit même à verser des larmes de bonheur. La voir aussi heureuse me fit réellement du bien. J'avais peut-être abusé sur le fait de leur avoir menti, mais je savais que la vérité allait être deux fois plus touchante. Kate me lançait un regard d'incompréhension, et lorsque je lui souris en acquiesçant d'un mouvement de tête, comme pour affirmer mes propos, elle se mit à sourire et me prit également dans ses bras.

« Nous sommes tellement fiers de toi ma chérie. » me chuchota ma mère à l'oreille.

Sans même le vouloir, je me mis à pleurer de nouveau, doucement, sur l'épaule de ma mère.

« Emily est la meilleure ! » s'exclama Matthew.

J'éclatai en sanglots. Non pas des sanglots négatifs, mais ce genre de sanglots très rare. Ces larmes sur ses joues que tout le monde rêverait d'avoir. Ce genre de sentiment qui nous fait nous sentir grand, puissant, et tellement bon..

[Chapitre légèrement plus long que le précédent ! J'espère qu'il vous a plu ! *-* Alors, que pensez-vous d'Emily, Tania et Ethan ? A votre avis, quel tournure va prendre l'histoire ? Comment va évoluer la relation entre Emily et Ethan dans les prochains chapitres ? Essayez de deviner. ;) Sur ce, je vous souhaite une bonne journée ou nuit, ainsi que de gros bisous sur vos faces d'enfants sages ! :3 Byebye. ♥]

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