Je regarde le paysage défiler. A travers la vitre, la nature devient presque floue tant nous roulons vite. J'observe avec attention ce paysage vide, vert de feuilles et d'arbres, sans vie. J'observe ce qui sera bientôt ma nouvelle vie.

Dans la voiture, seul le silence règne, un silence pesant. Pourtant moins pesant que si nous parlions. Néanmoins, ce silence semble la déranger, elle allume la radio. Le son devient fort, il remplit désormais la voiture, et s'empare de mon esprit. Je me laisse transporter par cette douce musique, en contraste total avec mon âme meurtrit. Je ferme les yeux, et écoute sans grande attention, cette chanson d'amour et de paix. Cela me fait sourire, l'espoir fait vire.

La musique continue de s'imprégner en moi, je me sens lourde, ma vision se trouble, les notes de musique dansent autour de moi, j'ouvre rapidement les yeux dans l'espoir de résister, mais le sommeil s'empare tout de même de moi me berçant de rêves d'amour et de paix, mais tout cela n'est qu'un rêve.

- On est arrivées Wennie !

Sa voix me semble lointaine et pourtant si proche à la fois. Je sens qu'on me secoue, qu'on me bouscule mais je ne bouge pas. Elle me secoue de plus belle.

- Nolwenn ! Les déménageurs sont déjà là depuis dix minutes, réveille-toi !

J'ouvre brusquement les yeux.

Ma mère se trouve juste à côté de moi, sur le siège conducteur de notre petite voiture. Elle me regarde avec de grands yeux.

- Oh enfin ! Viens vite m'aider, on a du pain sur la planche !

Puis sans même me laisser répondre, elle sort de la voiture, claquant la portière avec force pour être certaine de bien me réveiller, ce qui ne fait que de m'agacer.

Je sors à mon tour, je me sens sale, lourde. Je prends une grande inspiration et me dirige vers notre nouvelle maison.

A première vue, elle semble immense. Une maison de pierre, ressemblant fortement à un petit château, j'aurais pu l'aimer si seulement je savais le faire.

Un grand jardin, entoure la bâtisse. Mais quelque chose cloche, il est sombre, aucune fleur, aucun arbre, juste de l'herbe, mais pas de l'herbe colorée d'un vert éclatant et vif, de l'herbe fade, verte foncée. La maison de pierre grise mariée au teinte sombre du jardin, donnait à ce lieu une apparence nonchalante.

Je ne remarque aucun voisin. Nous sommes en haut d'une petite colline à l'extrémité de la ville, nos voisins les plus proches se trouvent à bien cinq cents mètres d'ici. Je ne l'admettrai probablement jamais, mais cette maison me plait, elle me ressemble : sombre et seule. Peut-être qu'elle aussi a vécu d'horribles choses. Je m'y sens bien. C'est étrange à dire mais elle me comprend, je peux sans peine m'y comparer.

Après quelques hésitations, j'ouvre enfin la porte d'entrée, je remarque directement ma mère. Elle semble affolée, et indique avec nervosité, aux déménageurs, l'emplacement des différents cartons. En me voyant elle s'exclame :

- Ah Wennie ! Tu es enfin là ! Les déménageurs ont presque fini, ils sont adorables !

- Surement...

- Oh... Ne fais pas cette tête voyons ! Tiens puisque tu as l'air de t'ennuyer va donc commencer à installer ta chambre.

- Avec plaisir, mais je te rappelle que je ne sais pas où se trouve ma chambre... Lui dis-je avec sarcasme.

- Ah... Oui. Attends je vais rapidement te faire visiter répond t- elle embarrassée.

Toujours aussi nerveuse, elle me fit une rapide visite guidée.

Au rez-de-chaussée se trouve une grande cuisine, moderne, avec un gigantisme plan de travail en son centre. Il y a également, le salon associé à la salle à manger, la pièce est encore vide, ce qui la rend juste énorme. La salle de bain quant à elle est spacieuse, aussi moderne que la cuisine, comportant une baignoire et une douche principalement. La visite du rez-de-chaussée se termine sur les toilettes, qui je trouve sont tout de même beaucoup trop grande pour de simples toilettes.

A l'étage se trouve les chambres. Celle de ma mère est encore vide, mais je sais qu'elle va s'y plaire. Chaque pièce de cette maison a des proportions gigantesques, je me sens si petite face à l'immensité des lieux. De nouveaux des toilettes, c'est tout de même dingue mais ici, même des toilettes peuvent paraître jolies, enfin si on oublie à quoi elles vont servir bien sûr. Il y a également quelques pièces vides, dont même ma mère ne sait pas à quoi elles vont servir, elle en fera surement un bureau et des chambres d'amis je suppose, bien que nous ayons peu d'amis à ce jour. Pour finir, ma mère me montre une pièce, au bout du long couloir. Elle la désigne comme étant ma chambre, enfin elle ne m'a pas vraiment laissée le choix. J'entre, et sans surprise découvre une pièce immense, rectangulaire, avec un balcon de pierres, les murs de cette maison sont évidemment tous en pierres également. Les meubles ont déjà été montés, un grand lit en bois, ainsi qu'une commode, un bureau et une armoire. Sur le sol repose une dizaine de cartons. On peut dire qu'il y a effectivement du boulot. Ma mère interrompt notre lourd silence la première.

- Alors ça te plaît chérie?

- Oui. Dis-je froidement.

- Super ! Euh... Bon... Eh bien je vais m'occuper du salon pour commencer. Je t'appellerai pour dîner, on mange pizzas ce soir !

- Super...

Ma mère part, dépitée par ma froideur. Peut-être même triste.

Mais je ne suis plus le petit bébé qu'elle a porté pendant neuf mois, je ne suis plus la petite fille joyeuse qui courrait après les papillons. Pendant un temps je me suis accrochée, je courrais après le bonheur, je continuais de penser qu'il existait. Mais maintenant je ne suis plus la même. J'ai abandonné, je ne cours plus après quoi que ce soit. J'ai sombré. Mon unique raison de rester dans ce monde de cons, c'est bien elle, ma mère. Je ne veux pas qu'elle sombre également.

Je m'allonge sur mon nouveau lit, et ferme les yeux, cette fois- ci je ne dors pas. Je laisse mon esprit prendre le dessus, les souvenirs m'assaillent. J'aimerais bien vivre, heureuse, sans voir la douleur partout. Mais à chaque fois que le bonheur m'approche, mon passé resurgit et me rappelle, que non, il en a les preuves, on ne peut pas être heureux.