Chapitre 12
Le mois de décembre venait de commencer, et avec lui, une froideur envahissante s'était installée, non seulement dans l'air, mais aussi dans mon esprit. Les jours étaient devenus plus sombres, plus lourds. Pourtant, depuis que j'avais instauré ces fameuses règles avec Alastor, quelque chose avait changé entre nous. Il n'était plus aussi menaçant qu'avant. Au contraire, il semblait presque... plus convivial. Cela faisait un moment que je respectais notre arrangement, lui accordant ces cinq heures hebdomadaires, un temps que nous avions convenu comme une contrepartie à nos règles.
Une semaine, je n'avais pas tenu parole. La fatigue, le stress, tout s'était accumulé, et j'avais manqué à ma promesse. Alastor n'avait rien dit de particulier, mais je sentais son agacement dans l'air. Il était resté plus silencieux, presque distant, mais avec cette tension palpable autour de lui. J'avais craint qu'il replonge dans ses anciennes habitudes, mais finalement, je m'étais rattrapée. La semaine suivante, je lui avais offert dix heures. Dix heures de temps passé ensemble à jouer aux échecs, à parler ou simplement à l'écouter. Et depuis, il était plus apaisé, comme si notre relation avait pris une autre tournure, moins tendue, plus stable. Je ne pouvais pas dire que tout était simple entre nous, mais il respectait les règles, et cela suffisait pour que je me sente plus en sécurité.
Ce matin-là, pourtant, un poids bien différent s'était installé en moi. Je parcourais mon téléphone, essayant de me distraire, lorsque l'écran s'illumina d'une notification. C'était mon père. Mon cœur se serra. Cela faisait tellement longtemps que nous n'avions pas échangé. Chaque message de sa part avait cette capacité à réveiller en moi des émotions que je tentais d'enfouir.
Je déverrouillai mon téléphone, le souffle court, et lus lentement le message :
Je ne pourrai pas être là pour Noël et le Nouvel An, comme chaque année. Peux-tu l'annoncer à ta mère ?
Mon cœur se serra si fort que j'eus du mal à respirer pendant un instant. Comment pouvait-il encore me demander ça ? Comment ne voyait-il pas ce qui se passait ? Il n'avait aucune idée de la réalité. Pour lui, ma mère était toujours là, présente dans ma vie, à la maison, comme si rien n'avait changé. Mais il ne savait pas. Il ne savait pas que, depuis des mois, elle m'avait laissée seule, m'abandonnant sans explication. Elle n'était plus qu'un fantôme dans ma vie, un souvenir douloureux.
Les larmes me montèrent rapidement aux yeux, et avant même de pouvoir les retenir, elles glissèrent le long de mes joues. Comment pouvait-il encore me demander d'être celle qui transmettrait ce message ? Pourquoi devait-il toujours m'utiliser comme un lien entre eux deux, alors qu'ils étaient aussi absents l'un que l'autre ? La solitude me frappa de plein fouet, et je laissai tomber mon téléphone sur le lit, mes mains tremblant de tristesse et de frustration.
Je cachai mon visage entre mes mains, étouffant mes sanglots. Noël n'avait jamais été une fête joyeuse pour moi. C'était devenu un rappel cruel de tout ce que j'avais perdu, de cette absence d'amour familial que je ressentais chaque année un peu plus. Mes parents ne pouvaient même pas être là pour une fête censée réunir les familles. Ils m'avaient tous deux abandonnée, et maintenant, mon père me demandait de combler le vide entre eux. Comme si tout était normal. Comme si rien n'était brisé.
Je me noyais dans ma tristesse, les larmes continuant de couler librement, lorsque j'entendis soudain une voix derrière moi.
— Pourquoi pleures-tu ?
Je levai lentement les yeux, surprise, et vis Alastor debout à quelques pas de moi. Ses yeux rouges, d'ordinaire pleins de malice ou de distance, étaient aujourd'hui attentifs, presque inquiets. Il avait cette présence différente, moins oppressante, plus... humaine. Depuis que nous avions instauré nos règles, il semblait avoir changé. Plus d'intimidation, plus de jeux de pouvoir. Il était là, simplement, essayant de comprendre ce qui m'affligeait.
Il me regarda un instant en silence, puis tendit la main vers moi, me présentant un mouchoir en soie, immaculé et délicat. Le geste me prit de court. Alastor, ce démon fier et distant, m'offrait un mouchoir pour mes larmes. Ce simple geste, presque humain, réveilla quelque chose en moi. C'était comme s'il avait laissé de côté son rôle de manipulateur pour un instant.
Je pris le mouchoir, mes mains tremblant encore sous l'émotion. Essuyant mes joues mouillées, je tentai de reprendre mon souffle, mais la douleur dans ma poitrine restait vive.
— Ce... ce n'est rien, murmurai-je, ma voix à peine audible, brisée par les larmes.
Je vis Alastor plisser les yeux, clairement peu convaincu par mes mots. Il se tenait là, me fixant, sans insister, mais je pouvais voir dans ses yeux qu'il cherchait à comprendre ce qui me brisait autant.
— Tu ne veux pas m'en parler, dit-il doucement, sans jugement, presque avec une douceur que je ne lui connaissais pas. Très bien... Alors, parlons d'autre chose.
Je levai la tête, surprise par sa réaction. Il n'insistait pas, il ne cherchait pas à forcer la vérité hors de moi. Non, il respectait mon silence, une attitude qu'il n'aurait jamais adoptée auparavant. C'était une autre preuve que quelque chose avait changé entre nous.
Mais avant que je ne puisse répondre, je sentis soudain un vertige m'envahir. La pièce autour de moi se mit à tourbillonner, et en un clin d'œil, le décor changea. J'étais ailleurs.
Le vertige se dissipa doucement, et lorsque mes pieds touchèrent le sol, je fus frappée par l'immensité de ce qui m'entourait. Tout n'était que silence et blancheur. La neige recouvrait l'horizon, s'étendant à perte de vue comme un océan immaculé sous un ciel pâle et infini. L'air était si froid qu'il semblait figer chaque son, chaque souffle. Et pourtant, je ne ressentais pas le froid comme je l'aurais cru. C'était un paysage presque irréel, figé dans le temps, où la moindre brise semblait chargée de magie.
Je baissai les yeux et remarquai que mes vêtements avaient changé. Je ne portais plus mon sweat-shirt léger et inadéquat pour la saison, mais une tenue chaude, élégante, qui m'enveloppait d'une douce chaleur. Une cape épaisse, d'un bleu profond, avec des bordures en fourrure, recouvrait mes épaules, et mes bottes, doublées, enfonçaient doucement leurs semelles dans la neige sans que je ressente le froid mordant du sol. Alastor n'avait pas seulement changé le décor autour de nous, il avait pris soin de m'habiller en conséquence.
Je levai les yeux vers lui. Il se tenait à quelques pas de moi, parfaitement immobile, son regard d'un rouge profond observant l'horizon enneigé. Alastor, lui aussi, avait changé d'apparence. Fini son costume sombre habituel qui renforçait son allure intimidante. Il portait à présent un long manteau noir, sobre et élégant, qui soulignait sa stature imposante, et une écharpe noire était nouée négligemment autour de son cou. Ce changement de tenue était frappant. Il paraissait presque... normal, comme s'il cherchait à se fondre dans cette tranquillité environnante.
— Où sommes-nous ? demandai-je doucement, encore un peu étourdie par la transition brutale entre ma chambre et cet endroit si différent.
— Peu importe, répondit-il d'une voix calme, ses yeux fixés sur la neige. Je voulais simplement t'emmener ailleurs, là où tu pourrais oublier, ne serait-ce qu'un instant.
Ses mots flottèrent dans l'air glacé, réchauffant légèrement quelque chose en moi. Oublier ? C'était inattendu, surtout venant de lui. Il ne cherchait pas à comprendre pourquoi j'avais pleuré, ni à forcer des confidences. Non, Alastor voulait simplement me transporter loin de mes problèmes, même si ce n'était que temporaire. Et cela me toucha plus que je ne l'aurais imaginé.
— Pourquoi ici ? demandai-je, ma voix vacillant légèrement, à la fois curieuse et émue.
Il tourna enfin la tête vers moi, ses yeux rouges brillants dans la lumière pâle du paysage enneigé, et un sourire presque imperceptible étira ses lèvres.
— Tu m'avais dit, il y a quelque temps, que tu n'avais jamais vu la neige. J'ai pensé que tu aimerais cet endroit, répondit-il simplement, comme si cela allait de soi.
Je restai bouche bée un instant, la réalité de ses mots m'atteignant de plein fouet. Je me souvenais vaguement de cette conversation, autour de notre échiquier. Nous avions parlé de tout et de rien, et j'avais mentionné en passant, presque par mégarde, que je n'avais jamais vu la neige tomber. C'était un rêve d'enfance que je n'avais jamais réalisé. Je n'avais pas pensé un seul instant qu'il se souviendrait d'un détail aussi insignifiant pour moi. Et pourtant, il l'avait fait.
Je sentis ma gorge se nouer, une vague d'émotion montant en moi. Ce n'était pas seulement le geste, mais l'intention derrière. Il voulait que je sois bien, que je me sente apaisée, même si ce n'était qu'un instant éphémère.
— Merci... murmurai-je presque imperceptiblement, mes yeux rivés au sol, alors que je me penchais pour toucher la neige, la sentant froide et douce sous mes doigts.
— Ce n'est rien, répliqua-t-il avec détachement, détournant légèrement le regard comme s'il n'était pas à l'aise avec cet échange. Pourtant, je savais que cela n'était pas anodin. Pour Alastor, ce genre de geste ne venait pas naturellement, et il avait choisi ce moment pour me l'offrir.
Un sourire fugitif s'échappa de mes lèvres, et avant même de pouvoir me retenir, une idée enfantine me traversa l'esprit. Je ne réfléchis pas plus longtemps et me baissai rapidement pour ramasser une poignée de neige dans mes mains. La boule de neige se forma rapidement, compacte et froide, et sans un mot, je la lançai droit sur lui.
La boule de neige frappa Alastor en plein sur l'épaule. Son expression fut d'abord celle de l'incrédulité, ses yeux rouges s'écarquillant légèrement, avant que son visage ne se transforme en une étrange combinaison de surprise et d'amusement. Pendant un instant, je crus avoir franchi une ligne, que je l'avais peut-être vexé. Mais son sourire en coin me rassura immédiatement. Il releva doucement la tête, et je compris dans ses yeux que la bataille était lancée.
— Vraiment, Amélie ? dit-il d'une voix teintée d'une moquerie douce. C'est ainsi que tu souhaites jouer ?
Je haussai les épaules avec un sourire espiègle, tout en reculant lentement, anticipant sa riposte. Mais au lieu de se venger immédiatement, il se baissa, ramassa de la neige, et forma à son tour une boule dans ses mains. Son regard se fit malicieux, presque défiant, et je savais que j'avais réveillé quelque chose en lui.
— Tu l'as voulu, murmura-t-il avec un sourire qui en disait long.
Avant que je ne puisse réagir, il lança la boule de neige droit sur moi. Elle me frappa en pleine poitrine, si vite que je n'avais même pas eu le temps de lever les bras pour me protéger. Je laissai échapper un petit cri de surprise, suivi d'un rire incontrôlable. C'était si absurde, si inattendu. Alastor, ce démon redoutable, jouait avec moi, à la neige, dans un endroit qu'il avait choisi juste pour me faire plaisir.
— Ce n'est pas juste ! m'écriai-je, riant tout en tentant de lui lancer une autre boule de neige.
— Je ne joue jamais juste, répliqua-t-il avec un sourire narquois, ses yeux rouges brillant d'amusement.
Il leva soudain la main, et je vis, avec une stupeur grandissante, plusieurs boules de neige léviter autour de lui. C'était une démonstration de ses pouvoirs, et je me figeai, bouche bée.
— Ce n'est vraiment pas équitable ! protestai-je en riant, levant les mains en signe de reddition.
— Je n'ai jamais dit que ça devait l'être, répondit-il, ses lèvres étirées en un sourire malicieux.
Sans prévenir, il lança toutes les boules de neige vers moi d'un seul coup. Elles fondirent sur moi à une vitesse folle, et je n'eus d'autre choix que de les encaisser. La neige éclata tout autour de moi, m'enveloppant dans un tourbillon blanc, et je ne pouvais m'empêcher de rire aux éclats. C'était tellement absurde, tellement... différent de tout ce que nous avions partagé jusqu'à présent. C'était la première fois depuis longtemps que je me sentais aussi légère, aussi insouciante.
— D'accord, d'accord ! Tu as gagné ! criai-je, essoufflée, les mains levées en signe de défaite.
Alastor s'arrêta, visiblement satisfait de sa victoire. Il me regarda un instant, un petit rire s'échappant de ses lèvres. C'était rare de l'entendre rire ainsi, sans ironie, sans malice. Un rire sincère, presque... humain.
— Tu n'as jamais eu la moindre chance contre moi, dit-il en souriant, mais son ton n'était ni moqueur ni méprisant, simplement amusé.
Essuyant la neige sur mon manteau, je lui rendis son sourire, essoufflée mais heureuse. Pour la première fois, il n'y avait plus cette tension entre nous, plus ces sous-entendus menaçants. Juste deux personnes partageant un moment de jeu, d'innocence.
Mais soudain, sans prévenir, il disparut.
Mon sourire s'effaça immédiatement, remplacé par une vague d'inquiétude. Le paysage qui m'entourait, si serein quelques instants auparavant, devint oppressant. Le silence, auparavant réconfortant, semblait maintenant menaçant. Mon cœur se mit à battre plus vite. Où était-il parti ? Avait-il décidé de partir, juste comme ça ?
— Alastor ?! criai-je, ma voix se perdant dans le vaste désert enneigé.
Mais aucune réponse ne me revint. Mon regard balayait frénétiquement l'horizon, cherchant désespérément une trace de lui, un signe, quelque chose. Mon cœur battait à tout rompre, l'angoisse montant en moi comme une vague incontrôlable. Et s'il m'avait laissée ici, seule ? S'il était retourné en enfer ?
Puis, dans la distance, je vis quelque chose bouger. Ce n'était pas lui. C'était un couple, deux silhouettes âgées marchant lentement dans la neige, bras dessus, bras dessous. Ils semblaient paisibles, se fondant presque dans le paysage blanc, comme des fantômes d'un autre temps. Mon cœur se calma un peu en les voyant. Ils étaient la preuve que je n'étais pas complètement seule ici.
Et alors que le couple s'éloignait, je compris. Alastor avait disparu pour une raison simple. Il ne voulait pas être vu par des humains. Il respectait cette barrière, cette frontière invisible entre son monde et le nôtre.
Dès que le couple fut hors de vue, je sentis une présence familière derrière moi. Je me retournai, et Alastor était là, son visage toujours calme mais marqué par un sourire en coin.
— Pourquoi... pourquoi tu es parti comme ça ?! m'exclamai-je, la panique dans ma voix trahissant à quel point son absence soudaine m'avait déstabilisée.
Il haussa légèrement les épaules, son sourire s'élargissant un peu plus.
— Quoi ? Tu as eu peur que je t'abandonne ? dit-il avec un ton faussement innocent, presque taquin.
Je sentis mes joues rougir légèrement, agacée et soulagée à la fois.
— Ne fais plus jamais ça, murmurai-je, ma voix légèrement tremblante sous l'effet de l'émotion.
Alastor éclata de rire, un son profond et chaleureux, et ensemble, nous reprîmes notre marche à travers la neige, côte à côte, laissant derrière nous nos traces mêlées dans la poudreuse.
Nous étions restés un moment à contempler le paysage enneigé, un silence paisible s'étendant entre nous. L'air glacial piquait doucement ma peau, mais la chaleur de mes vêtements élégants me protégeait. Alastor, à mes côtés, semblait étrangement calme, perdu dans ses pensées.
Je finis par briser le silence, ne pouvant m'empêcher de sourire légèrement en repensant à notre bataille de boules de neige.
— C'était... agréable, dis-je doucement, mon regard toujours perdu dans l'horizon immaculé. Je n'aurais jamais imaginé que tu me montrerais quelque chose d'aussi... beau.
Il tourna légèrement la tête vers moi, ses yeux rouges pétillant sous la lumière pâle du jour.
— Ce n'était qu'une simple distraction, répondit-il, mais sa voix avait cette teinte douce qui trahissait plus que de simples mots. Tu avais besoin de t'éloigner de tout cela, même si ce n'est que pour un moment.
Je souris à ses mots, appréciant ce qu'il venait d'admettre sans vraiment le dire. Il avait essayé de me faire plaisir, à sa manière, et même s'il n'y avait pas de réelle excuse dans ses paroles, je savais que c'était un geste de sa part. Cela comptait.
Je restai silencieuse un moment, puis la pensée de mon père et de ce message revint me frapper comme un coup de froid. Mon sourire s'effaça légèrement, et je baissai les yeux vers la neige.
— Tu penses que fuir tout cela, c'est la solution ? demandai-je dans un murmure, presque pour moi-même.
Alastor ne répondit pas immédiatement. Il continua à regarder l'horizon, puis sa voix résonna, calme et profonde.
— Je ne crois pas que fuir soit la solution, Amélie. Mais parfois... il faut prendre du recul. Même pour quelques instants. C'est tout ce que je voulais t'offrir aujourd'hui.
Je tournai la tête vers lui, touchée par ses mots. C'était rare pour lui d'admettre une telle vérité, et je réalisai à quel point il avait essayé de faire quelque chose de bien pour moi, même s'il le faisait de manière détournée.
— Merci, soufflai-je enfin, ma voix à peine audible.
Il hocha simplement la tête, un léger sourire flottant sur ses lèvres.
— Il est peut-être temps de rentrer, dit-il après un moment. L'hiver est magnifique, mais je préfère la chaleur.
Je laissai échapper un petit rire. L'idée qu'Alastor, un démon, préfère la chaleur à l'hiver avait quelque chose d'amusant.
— Tu as raison, répondis-je en serrant ma cape contre moi. Mais... j'aurais aimé rester ici encore un peu.
Alastor esquissa un léger sourire en coin, et avant que je ne puisse dire quoi que ce soit de plus, je sentis à nouveau ce léger vertige. Le paysage enneigé s'effaça en un instant, et nous étions de retour dans le salon de ma maison, aussi soudainement que nous étions partis.
— Tu sais vraiment comment changer d'ambiance, murmurai-je, encore un peu étourdie par la transition.
Il haussa légèrement les épaules, son expression légèrement moqueuse.
— J'ai toujours eu un goût pour les entrées dramatiques.
Je secouai la tête, amusée par son commentaire. Je déposai ma cape sur le dossier du canapé et me dirigeai vers la cuisine, un sourire encore sur les lèvres.
— Je vais faire du chocolat chaud. Tu en veux aussi ? demandai-je, ma voix légère, sans trop y réfléchir.
Il me suivit du regard, toujours assis dans le canapé fauteuil , ses yeux rouges pétillants d'amusement.
— Un chocolat chaud, Amélie ? demanda-t-il, son ton légèrement moqueur. Non, merci. Si je dois boire quelque chose, je préfère un café.
Je levai les yeux au ciel, incapable de retenir un sourire.
— Bien sûr. Le démon boit du café, dis-je à moitié pour moi-même en me dirigeant vers la cuisine.
Alastor laissa échapper un léger rire, un son rare mais chaleureux, tandis que je commençais à faire chauffer le lait pour mon chocolat. J'attrapai une casserole, versant le lait et ajoutant le chocolat en poudre. Pendant que le liquide chauffait, je ne pouvais m'empêcher de penser à cette étrange normalité qui s'était installée entre nous.
Alastor, assis dans le salon, se fondait dans cet espace avec une aisance troublante. Il était là, avec moi, dans ma maison, après m'avoir emmenée dans un lieu magique pour me faire oublier mes problèmes. Et maintenant, je lui proposais du chocolat chaud. C'était absurde, presque irréel.
Mais en même temps... c'était exactement ce dont j'avais besoin.
Quand le chocolat fut prêt, je versai le liquide chaud et onctueux dans une grande tasse et me dirigeai vers le salon, où Alastor m'attendait toujours, confortablement installé. Ses yeux se posèrent sur moi tandis que je m'asseyais en face de lui, tenant ma tasse à deux mains.
— Tu es sûr que tu ne veux pas essayer ? demandai-je en souriant. Il est vraiment bon.
Il me lança un regard en coin, son sourire amusé toujours présent sur ses lèvres.
— Je te crois sur parole, répondit-il d'une voix moqueuse. Mais je t'assure, le café reste ma boisson de prédilection.
Je haussai les épaules, acceptant sa réponse, et pris une gorgée de mon chocolat chaud. Le silence qui s'installa entre nous n'était pas gênant. C'était un silence apaisant, presque complice, comme si nous n'avions pas besoin de mots pour comprendre que, pour l'instant, tout allait bien.
Le chocolat chaud réchauffait mon corps, mais c'était plus que ça. Pour la première fois depuis longtemps, je me sentais... en sécurité. Pas dans un monde parfait, pas sans mes problèmes, mais dans une bulle où je pouvais enfin respirer.
Après quelques instants, je jetai un coup d'œil à Alastor, et il me surprit avec une question inattendue.
— Tu pensais vraiment que je t'abandonnerais là-bas ? demanda-t-il, brisant le silence, sa voix plus douce qu'à l'accoutumée.
Je tournai la tête vers lui, étonnée par sa question, puis secouai doucement la tête.
— Non... Enfin, sur le moment, j'ai eu peur, avouai-je. Mais je savais que tu reviendrais.
Il hocha lentement la tête, visiblement satisfait de ma réponse, et un léger sourire étira ses lèvres. Il détourna ensuite son regard, l'air pensif.
— Bien, dit-il finalement. Je n'ai pas l'intention de disparaître si facilement, murmura-t-il.
Je ne dis rien, mais un léger sourire se dessina sur mes lèvres. Malgré toutes nos différences, malgré les tensions qui avaient existé entre nous, il restait là. Et c'était tout ce dont j'avais besoin pour l'instant.
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