"Rendez-vous"
Mes sentiments pour June prenaient de l'ampleur au fur et à mesure que nous passions du temps ensemble. Et à ce moment-là, nous étions collés du matin au soir en raison des vacances d'été, je sentais donc mon cœur s'emballer en permanence.
J'avais décidé de ne rien laisser paraître de ce que je ressentais, je ne voulais pas lui faire peur ou risquer de la perdre.
Ce soir-là, nous n'avions pas pu nous voir de la journée et tel un drogué, je ressentais le manque de June. C'était difficile d'expliquer ce que sa présence avait comme effet sur mon corps tout entier, je me sentais bien avec elle.
Quand nous n'étions que nous deux, nous n'avions pas besoin du prétexte de l'élastique pour nous laisser aller à des caresses. Depuis la nuit chez moi, nos contacts physiques étaient moins timides et beaucoup plus fréquents, elle n'hésitait plus à se jeter dans mes bras à la moindre occasion. En ce qui concerne les baisers, elle restait tout de même assez prude mais il lui arrivait d'embrasser le coin de mes lèvres et je me sentais littéralement fondre.
Le programme du jour était une promenade dans notre parc préféré. La nuit, il y avait quelque chose d'apaisant qui s'en dégageait et nous aimions beaucoup explorer les recoins qu'il cachait. Il était vraiment gigantesque ! Malgré tout, nous parlions toujours d'amitié et de moments entre amis. Il n'était pas question d'évoquer les moindres sentiments tant de sa part que de la mienne.
Alors que je m'apprêtais à partir pour la rejoindre, je pris un verre d'eau dans la cuisine et ma mère entra au même moment. Elle vint m'entourer de ses bras en les passant devant mon ventre et posa sa bouche contre mon épaule qu'elle embrassa.
- " Qu'est-ce qu'il y a, maman ? " Lui dis-je en posant ma main sur l'une des siennes avant de me retourner pour la prendre dans mes bras. J'avais deviné que cette étreinte ressemblait à un appel au secours.
- " J'avais juste besoin d'un câlin, mon grand. " Dit-elle en souriant faiblement.
Lorsque sa commissure s'étira, je vis que sa lèvre était fraîchement déchirée. Ne voulant pas tirer de conclusion hâtive, je la questionnai sur sa blessure. Mon père n'était pas systématiquement violent envers elle directement, il était plutôt du genre à casser tout le mobilier mais cette fois-là, j'eus un mauvais pressentiment. Elle ne répondit rien et confirma mes doutes. Je déposai un baiser sur le dessus de son crâne et lui offris le réconfort dont elle avait besoin.
- " Il faut qu'on parte, Maman. " Dis-je en laissant mes lèvres contre elle et en la serrant tendrement.
Mes paroles la firent trembler et très vite, elle éclata en sanglots qu'elle voulait discrets. Je ne supportais plus cette vision de ma mère fragilisée, je ne supportais plus de voir une femme en détresse. Ce ne fut pas la peine qui m'envahit mais la colère, comment pouvait-on rendre une femme aussi malheureuse ? Qui plus est, une femme aussi merveilleuse que celle que j'avais dans mes bras.
Mon père entra dans la cuisine, je reconnus à son regard qu'il commençait à être saoul et je culpabilisai de passer autant de temps avec June car je laissais ma mère livrée à son bourreau à chaque fois. Je caressai les cheveux de ma maman qui pleurait toujours dans mes bras quand il prit la parole :
- " Pourquoi tu pleures ? "
Il lui attrapa un de ses bras qui m'entouraient et la tira brusquement mais je la gardai contre moi.
- " Lâche ta mère, je vais rien lui faire." Soupira-t-il.
- " Tu oses demander pourquoi elle pleure ? " Lui lançai-je avec amertume.
- " De quoi tu te mêles, William ? "
Cette façon qu'il avait de mettre de la distance entre nous en m'appelant par mon prénom complet fit monter un peu plus la colère en moi. C'était comme si j'étais la personne de trop à chaque fois. Je relâchai ma mère avant de me mettre devant elle et le défiai du regard.
- " T'en as bu combien cette fois, papa ? " Lançai-je avec arrogance " Une... Peut-être deux ? " Ris-je " oh mais attends, on parle bien de bouteilles, là ? "
- " Tu crois que tu vas faire quoi du haut de tes seize ans ? " Dit-il en s'approchant dangereusement de moi. "T'es même pas encore un homme. "
- " C'est quoi être un homme ? Taper sur sa femme ? J'en serai jamais un alors." Dis-je en sentant ma mère m'agripper le bras.
- " Will, arrête. " Me supplia-t-elle.
Si ma mère était intervenue c'est parce qu'elle savait que confronter mon père à ses démons était la pire chose à faire. Je sentis le danger arriver mais je ne bougeai pas et sentis mon nez craquer sous la force du coup qu'il venait de m'envoyer. Ma vue se brouilla quelques secondes et je me penchai instinctivement en avant, le visage dégoulinant de sang. Ma mère se mit à lui hurler dessus, c'était la première fois que je l'entendais riposter. Malgré la douleur, je ne pus m'empêcher de penser que je venais de gagner une bataille en la voyant se réveiller.
- " Mais pourquoi tu fais ça ? Il faut que tu te soignes, Paul. C'est ton fils ! TON FILS ! " Hurla-t-elle en s'agenouillant près de moi " ça va aller mon cœur, on va t'emmener à l'hôpital. "
J'eus du mal à lui répondre avec la quantité de sang qui s'écoulait sur ma bouche mais je le fis tout de même :
- " J'irai à l'hôpital seulement si tu appelles la police. "
- " Elle va faire quoi la police tu crois ? Elle va t'en remettre une, petit merdeux. Tu crois que c'est comme ça qu'on parle à son père ? "
Je me relevai rapidement pour lui faire face et le poussai violemment au point qu'il chuta en se cognant la tête.
- " Quel père ? " Dis-je en crachant du sang en sa direction.
J'attrapai un essuie rempli de glace que ma mère venait de me sortir et me dirigeai vers la porte d'entrée. J'avais besoin de me défouler et frapper sur mon père n'allait pas arranger les choses, ce serait répondre à sa violence, communiquer comme lui. Mon nez me faisait vraiment mal et je m'assis sur le devant de la maison, la tête relevée alors que le sang continuait de couler. Ma mère vint me rejoindre avec les clés de sa voiture à la main, elle avait l'air affolée. Elle me prit par le bras pour me relever mais je ne réagis pas.
- " Will, on va à l'hôpital, lève-toi. "
- " Non. "
- " Will... " Soupira-t-elle.
- " Je vais porter plainte maman. "
- " C'est ton père, tu ne peux pas faire ça. "
- " Et lui, il peut faire tout ça, peut-être ? Pourquoi tu prends toujours sa défense ? Comment tu peux aimer quelqu'un comme ça ? "
Elle ne répondit pas tout de suite et se remit à pleurer.
- " Tu verras quand tu tomberas amoureux. " Dit-elle.
- " Je le suis et jamais je pourrais lui faire de mal comme papa t'en fait. " Dis-je en me levant, en colère.
Je décidai de rentrer pour me débarbouiller et changer de t-shirt, le saignement ne s'arrêtait pas et je commençais à avoir la tête qui tourne. Peut-être que la case hôpital n'était pas qu'une option et était nécessaire en fin de compte... Mais je refusais d'y aller avec ma mère, ma fierté était en jeu. Celle-ci revint dans ma chambre et insista, une fois de plus. Je secouai la tête et la douleur s'accentua.
- " Il y a une fille qui vient d'arriver, elle t'attend en bas. " Dit-elle alors qu'elle partit en soupirant.
J'avais presque oublié notre rencard qui, officiellement, n'en était pas un. Je ne parvins pas du tout à retirer mon t-shirt malgré mes efforts alors je décidai de descendre dans cet état. Lorsque je franchis la dernière marche, je la vis assise sur l'une de nos chaises hautes, les mains sur les genoux. Rapidement, elle les porta à sa bouche en découvrant ma blessure.
- " Salut, June. " Dis-je sur un ton naturel, voire enjoué, pour dédramatiser la situation.
Elle s'approcha rapidement de moi et posa sa main sur ma joue en me regardant tristement.
- " Tu vas bien ? " S'inquiéta-t-elle.
- " Je pète la forme. " Lui dis-je en me forçant à sourire.
Je jetai un rapide coup d'oeil vers le salon et vis que mon père était assis dans le fauteuil, il laissait ses mains dans le vide, entre ses jambes et sa tête pendait vers la même direction comme s'il réfléchissait.
- " On y va ? " Lui dis-je en voulant éviter une confrontation June-Papa.
- " On va à l'hôpital, oui. " Insista ma mère. " Je ne rigole plus, Will. Tu es mineur, c'est moi qui décide alors tu vas monter dans le voiture. " Ajouta-t-elle, la voix tremblante.
Je la regardai affaiblie par des années de dispute et de colères, elle était pourtant si belle quand elle était rayonnante. Je compris que mon refus lui faisait de la peine et ma fierté n'avait soudainement plus aucune importance, elle avait raison après tout. Je lui fis un signe de tête pour qu'elle comprenne mon accord et elle vint déposer un baiser sur ma joue ensanglantée en soupirant de soulagement tandis que June retirait sa main de mon visage.
- " Merci mon chéri. "
- " Est-ce que je peux venir ? " Demanda June, timidement.
- " Bien sûr. " Lui répondit ma mère, un petit sourire aux lèvres.
En revenant de l'hôpital
J'étais à l'arrière de la voiture avec June, elle n'avait posé aucune question et j'espérais qu'elle n'allait pas le faire. Sa douce main vint se glisser sur ma cuisse et je relevai la tête vers elle, un sourire se dessina sur mon visage en croisant son regard. J'attrapai ses doigts entre les miens et les refermai ensuite. Je compris très vite qu'elle tentait d'être discrète aux yeux de ma mère. Nous n'étions que des amis qui agissaient comme des amoureux, ce n'était pas évident à comprendre pour quelqu'un de l'extérieur.
- " Où habites-tu, June ? Je vais te déposer. "
Son regard toujours plongé dans le mien, je pus observer la déception dans ses yeux clairs, elle ne semblait pas prête à partir et je ne me sentais pas prêt à la laisser non plus. Je la vis entrouvrir les lèvres et avant qu'elle ne réponde, je pris la parole.
- " Tu peux nous déposer au parc juste à côté ? "
- " Non, tu as vu l'heure ? " Souffla-t-elle en me regardant dans le rétroviseur.
Elle avait raison, nous étions restés des heures aux urgences de l'hôpital pour qu'on s'occupe de moi, j'avais fière allure avec ce bandage sur le nez. Heureusement, la fracture était minime et je n'étais pas trop gonflé. Je me mis à serrer ses doigts entre les miens et elle indiqua le chemin à ma mère.
Une fois devant chez elle, sa mère sortit presque aussitôt, elle semblait inquiète évidemment. Elle vint passer sa tête par la fenêtre et remercia ma maman en l'appelant par son prénom. Elle posa ensuite son regard sur moi et je compris à son expression que cette vision allait tout changer.
- " Soigne-toi bien, Will. " Dit-elle sur un ton froid en reculant vers June.
Deux semaines plus tard
Comme je l'avais pressenti, la mère de June lui avait interdit de me voir, sans donner de raison acceptable. Je n'avais plus de ses nouvelles depuis deux longues semaines et je devenais fou, mon nez avait bien cicatrisé et il ne restait que quelques ecchymoses jaunâtres sur mon visage comme traces de l'alcoolisme de mon père.
Je n'avais pas osé passer dans son quartier car ma mère voulait que je m'aligne à la décision de celle de June mais ce soir-là, le manque était bien trop présent. Je sortis par la porte de derrière et rejoignis, une boule au ventre, le chemin me menant à June. Sur ma route, je réfléchis à un moyen de prendre contact avec elle sans passer par la porte d'entrée.
La technique des cailloux contre la fenêtre ne fonctionnait que dans les films, je savais que j'allais casser son carreau si je m'y risquais. Je plongeai ma main dans ma poche et en sortis mes clés...qui étaient garnies d'une petite lampe de poche. J'eus envie de hurler de joie en trouvant mon stratagème.
Une fois devant chez elle, je passai par derrière et inspectai depuis l'extérieur le décor des pièces pour trouver sa chambre. Elle m'avait parlé d'un mur violet et je le distinguai rapidement. Impatient, je lui fis des appels à l'aide de ma lampe de poche, je priais intérieurement pour qu'elle soit dans sa chambre.
Au bout de quelques essais, je la vis s'approcher de la fenêtre à petits pas avant de l'ouvrir avec un large sourire. Je n'eus pas besoin de parler et elle n'eut pas besoin de le faire non plus. Nous nous regardâmes longuement, profitant de la dose d'endorphines envoyée par la présence de l'autre, même à cette distance.
Toujours silencieux, je lui fis un signe de tête indiquant le parc à côté de chez elle, notre parc. Elle hochait la tête en souriant de toutes ses dents et refermait la fenêtre. Je me dirigeai rapidement vers le lieu de notre rendez-vous et l'attendis avec une impatience qui me donnait envie de sauter partout.
Elle arriva quelques minutes plus tard dans une tenue qui ressemblait à un pyjama et plus elle s'approchait, plus mon cœur battait. Deux semaines sans elle, c'était l'enfer. Elle dut passer par un petit muret pour me rejoindre mais je m'approchai d'elle avant qu'elle ne descende.
- " Je suis désolée, elle est complètement parano. " me dit-elle en attrapant la main que je lui tendais. " Comment tu vas ? " Ajouta-t-elle.
- " Bien, maintenant. " Dis-je en la regardant intensément.
Je m'attendais à voir ses joues rougir comme d'habitude mais ce ne fut pas le cas et je perdis le sourire qui ne me quittait pourtant pas depuis que je l'avais aperçue, perturbé. Je crus un instant que tout avait changé mais j'étais loin d'imaginer que ce n'était pas dans le sens que je pensais. Elle était plus haute que moi, à moitié assise sur ce muret. Alors qu'elle entoura mon cou de ses bras, je lui attrapai les hanches pour amortir sa descente mais elle ne sembla pas vouloir toucher le sol tout de suite vu qu'elle passa ses cuisses de part et d'autre de ma taille. Je dus déplacer mes mains sous celles-ci car elles étaient vraiment hautes.
Sa main droite glissa délicatement contre ma joue et je tentai de la suivre des yeux. Ma concentration sur le moindre de ses gestes me fit entrouvir inconsciemment les lèvres et elle déplaça ses caresses sur ces dernières. Je les refermai légèrement pour embrasser ses doigts et je vis un sourire illuminer son visage. Par la suite, elle déposa un baiser sur mon front, je fermai les yeux à ce contact et profitai de ceux qui suivirent : un sur chaque pommette.
- " Qu'est-ce que tu fais ? " Dis-je en ouvrant les yeux avec un sourire que je ne pouvais retenir.
- " Tu m'as manqué. " Murmura-t-elle.
Elle venait tout juste de condamner mon cœur à un arrêt cardiaque. D'autant plus qu'elle n'en resta pas là, après mes pommettes, ce fut le tour de mon nez abîmé de recevoir les caresses de ses lèvres. Elle descendit ensuite celles-ci et effleura mes lèvres mais sa course s'arrêta sur mon menton. Une fois le dernier baiser déposé, elle redressa sa tête sans la reculer et respira plus vite contre ma bouche.
Je devinai que le moment était enfin venu et je la laissai entièrement décider de la suite. Je ne voulais surtout pas qu'elle regrette même si j'attendais ça depuis des mois, ce ne devait pas être comme avec Sam.
Elle avançait un peu plus son visage, sa main exerçait une pression sur ma joue et elle finit par poser ses lèvres sur les miennes. Je fermai les yeux à ce contact et en profitai du mieux que je pus, me sentant comme dans un rêve. Peu sûre d'elle, elle recula la tête après quelques secondes et je décidai d'intervenir en relâchant l'une de ses cuisses pour venir plaquer ma main derrière sa nuque et appuyer nos lèvres l'une contre l'autre. Elle eut une sorte de soupir contre moi et je dus l'appuyer entre le mur et mon torse car je n'arrivais pas à la porter d'une seule main.
Connaissant son manque d'expérience, je menais la danse et lui imposais un rythme. Rapidement, nos lèvres se caressaient tendrement et ma main collée sur sa nuque vint contre sa joue. J'écartai nos visages pour la regarder et ce fut à son tour de recapturer mes lèvres avec précipitation. À croire qu'elle attendait ça depuis aussi longtemps que moi... Ç'avait été une torture de lui résister et ce baiser me faisait me sentir léger et rempli d'émotions à la fois.
Il dura quelques minutes, je ne me lassais pas du goût de ses lèvres, c'était aussi bon que ce que ce j'avais imaginé mais elle finit par y mettre fin en écartant son visage. Elle se mordit la lèvre aussitôt en ouvrant les yeux et ne put éviter mon regard, sûrement illuminé par tout l'amour que je ressentais pour elle.
- " Tu m'as manqué aussi. " Lui dis-je en la regardant profondément.
Elle vint nicher sa tête dans mon cou en me serrant de toutes ses forces. Je la fis redescendre de mes bras pour mieux l'y attirer et je la serrai à mon tour. Quand je réalisai à quel point il m'avait été difficile de ne pas l'avoir près de moi durant deux semaines, je compris l'ampleur de mes sentiments pour elle. June Thompson venait de m'embrasser et je n'avais jamais été aussi heureux de toute ma vie.
***
Hello ! Doux Jésus ce que j'ai aimé écrire ce chapitre olala... Vraiment, j'ai eu mal au ventre tout le long. Certains savent que Will est inspiré de mon premier amour et mon premier baiser était semblable à celui-là donc je ne vous dis pas comment je me suis plongée à fond dans ce chapitre ahhaha !
Encore une scène avec son papa... Mais aussi le début des hostilités avec Catherine... On voit un peu plus la maman de Will également !
Et surtouuuuut le bisou avec Juuuuuuuune 😍 à mettre en lien avec " la troisième" hehe.
Vous avez préféré le bisou du passé ou celui du futur ? 😁
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