Vendredi 27 Septembre (2/3)
Je suis mortifiée. Ça ne me ressemble pas. Rien de cela ne me ressemble. J'ai embrassé plus de garçons en un jour et une nuit que je ne l'ai jamais fait de ma vie. Des coups de tête totalement irréfléchis qui auront des conséquences que je sens déjà abominables.
Je suis allée en cours cet après-midi avec une terrible envie de vomir toute ma honte. Je suis restée bien cachée au fond de la salle. Et j'ai remué dans mon esprit les derniers événements. À chaque fois que je pense à ce soir, je me rends compte à quel point ça va être un carnage affreux.
Je préfère rester enfermée dans le dortoir, roulée dans ma couette, au chaud et à l'abri des autres et de moi-même. Je perds complètement la tête. Embrasser Scott encore, pourquoi pas. Sur le moment, ça paraissait être naturel, presque un geste libérateur, un besoin d'être rassurée, de partager quelque chose après ce qu'il s'était passé pendant la nuit.
Mais embrasser Léon Wilkes ? Il n'y a rien de plus insensé. Merlin, je ne peux pas décemment descendre ce soir et aller le voir pour discuter de comment on se répartit la présentation du quiz. C'est impossible. Je ne pourrais pas parler et je n'ai aucune idée de comment il pourrait réagir mais ce ne sera certainement pas bon pour moi. Je n'ai aucune idée de ce qu'il s'est passé exactement dans mon cerveau. À quel moment j'ai trouvé que c'était une bonne idée de faire ça ? J'étais énervée, très énervée, j'avais l'intention de le frapper. Je ne trouve pas le lien. J'ai envie de hurler, seule dans mon lit. Hurler tout mon ressentiment.
« Non mais l'autre ! fait Roxanne en ouvrant grand la porte du dortoir et en criant à m'en faire gémir. Elle prépare une soirée quiz, est pénible avec ça pendant des jours et des jours et elle fait quoi ? Elle reste dans son lit au lieu de se préparer ... Gros tas, lève-toi et change-toi ! »
Ma cousine me saute presque dessus pour tirer sur ma couverture d'une force avec laquelle je ne peux pas rivaliser. J'abandonne le combat et la laisse me relever sans délicatesse. Elle constate avec scepticisme l'état de mon visage, rougi par les larmes et mon front amoché. Sans faire de commentaire, elle court dans la salle de bain pour prendre sa trousse avec ses affaires de beauté. Je grimace en grommelant :
« Roxanne, c'est bon, je n'ai pas besoin de ... »
Elle me donne une petite tape sur la tête pour me faire taire et sort une crème que je ne connaissais pas. Elle en applique doucement sur mon front et des picotements me font froncer les sourcils. Elle me lance un regard noir pour que j'arrête et continue à masser pendant quelques secondes. Contente du résultat, elle me passe un coton pour que je m'essuie le visage et va ouvrir ma malle en s'exclamant :
« Par le bon vieux Seigneur des Ténèbres, Molly, je ne sais pas ce qu'il t'arrive mais réveille-toi ! Le dîner commence dans une dizaine de minutes et je ne suis pas ta mère, je ne vais quand même pas tout te faire. »
Elle soupire en cherchant apparemment une tenue décente dans mes affaires. Je la regarde avec des petits yeux sombres. Je sens qu'elle comprend la colère qui pointe en moi parce qu'elle se retourne avec un regard d'excuse. Ce n'était pas très malin de sa part de me parler de mère quand ça ne va pas bien. Elle prend une robe noire qui était dans le fond de ma malle et s'approche de moi. Elle ne voulait certainement pas être désagréable, d'autant plus qu'elle a raison, mais je ne peux m'empêcher de la dévisager en lui arrachant le tissu des mains. Je souffle :
« C'est bon, ne t'inquiète pas. Je vais être prête. »
Je la fixe jusqu'à temps qu'elle comprenne que je voudrais qu'elle me laisse tranquille. Elle soupire, navrée et redescend dans la salle commune. Je me prends la tête dans les mains. Rien ne va. J'aimerais tellement lui en parler mais elle ne comprendrait certainement pas et se moquerait de moi. Je me mets toute seule dans un état déplorable que je regrette.
À bout de force, j'enfile ma robe. Je jette un coup d'œil au miroir. Ma petite éraflure a presque disparu. Je ne rayonne pas, c'est le moins qu'on puisse dire mais j'essaye d'arranger les choses du mieux possible en me coiffant correctement et en mettant un tout petit peu de mascara. Je ne suis pas adepte de ce genre d'artifice mais il faut que je fasse quelque chose pour donner l'impression que tout va bien.
Je prends une grande inspiration. Ça y est. Je ne peux pas reculer plus. Il faut que je descende et que j'aille voir Léon. Je n'en ai pas du tout envie. Cependant, je suis une Gryffondor, je n'ai pas le droit de lâchement abandonner un projet que j'ai organisé, même si en échange je dois faire face à la colère du Préfet-en-chef. Qu'est-ce qu'il pourrait me faire ? Au pire, il pourrait en redemander.
Je souffle un bon coup et dévale les escaliers pour éviter à tout prix de devoir croiser le regard triste de Roxanne. Je serre contre moi mon sac avec mes questions dedans, le protégeant avec attention. Pour éviter de penser à autre chose. Si je me remets à entrevoir l'idée que ça va mal se passer, j'aurais trop envie de faire demi-tour. J'arrive dans la Grande Salle, les plats sont déjà installés et je repère que les équipes de chaque maison se sont réunies au bout des grandes tables. Lily me fait un grand sourire fier en me voyant passer. Je lui fais un léger clin d'œil qui la fait rire un peu nerveusement. Mes yeux partent à la recherche de Léon mais ne le trouvent pas. Je m'installe à côté de ma petite cousine qui me raconte fièrement qu'elle était la première à rejoindre l'équipe de Gryffondor. Je la félicite mais mon esprit n'est pas du tout avec elle.
J'essaye d'engloutir quelques bouchées de mon dîner mais je sens que ça ne passe pas bien alors je repose sagement mes couverts en révisant mon texte. Je n'ai pas envie de bafouiller devant tout le monde.
« Weasley ? »
L'eau que je buvais a failli ressortir de ma bouche pour arroser joyeusement les assiettes de mes camarades autour. Je fais volte-face pour me retrouver devant Wilkes. Il n'a pas l'air différent de d'habitude. C'est plutôt injuste, j'ai l'impression de suer à grosses gouttes. Il hausse un sourcil et dit :
« Tu viens, il faut qu'on aille installer le plateau.
- Oui, acquiescé-je en me levant. Je suis prête. »
Il marche juste devant moi, au moins il ne voit pas mon regard totalement désorienté et ma panique que j'ai du mal à contenir. On arrive dans la petite salle derrière la table des Professeurs. Minerva McGonagall y discute avec Monsieur Londubat, ils nous attendaient visiblement. Neville me fait un grand sourire en me voyant arriver et s'exclame :
« Voilà nos organisateurs ! Êtes-vous prêts, les jeunes, à épater tout le monde ? »
J'affiche un sourire gêné alors que Wilkes hoche la tête avec sérieux en se tournant vers la directrice. Elle nous regarde avec une sévérité atténuée par un très léger sourire. Elle s'approche de nous en demandant :
« Vous voulez installer ce que vous avez prévu, je présume ?
- Effectivement, dit Léon. On voulait installer les tables de manière à ce que les équipes puissent se mettre derrière.
- Je vais m'en occuper, s'écrie le professeur de Botanique joyeusement, apparemment heureux de se rendre utile.
- Bien, quand vous aurez fini de vous préparer, ajoute McGonagall, prévenez-moi, je ferai une annonce à l'assemblée. »
Elle appuie ses propos par un regard entendu par dessus ses lunettes et sort à la suite de son ancien élève enjoué. Je regarde Léon avec une forme d'appréhension. Il a toujours l'air si calme. Ce n'est pas normal, pas après notre dispute de tout à l'heure et surtout ... Comment appeler ça ? Une « aventure », comme dirait Lysander, fort malheureuse. Il s'est peut-être rendu compte que tout était allé trop loin. Il se tourne enfin vers moi, sans aucune trace de sourire, sans aucune trace de colère non plus. Je crois que c'est pire que tout. Il dit, froidement :
« Tu as préparé ton texte pour introduire ou tu veux que je le fasse ?
- Je t'avais dit que je m'en étais occupée, ai-je répondu en restant toute aussi glaciale que lui ou plutôt en essayant de l'être.
- Parfait. Pour les questions, on fait une sur deux, d'accord ?
- Bien sûr. »
Il a hoché la tête sèchement et s'est penché vers le casque d'une armure pour remettre correctement en place ses cheveux noirs. Il s'est ensuite tourné vers moi et il m'a dévisagé avec un petit sourire narquois. J'ai légèrement tressailli, je ne sais pas s'il a remarqué. Je pense qu'il en joue beaucoup. Il dit d'un ton détaché :
« Ne me regarde pas comme ça, Weasley. On dirait que tu stresses. Ce n'est pas un oral, c'est peut-être devant tout le monde mais il n'y a pas besoin de te mettre la pression pour ça. »
Il y a quelque chose qui déconne. Je fronce les sourcils et je décide de ne pas lui répondre. Il commence à me courir sur la patacitrouille et je n'ai pas l'intention de discuter avec lui de toute façon. C'est quelqu'un d'ignoble, la fatigue me fait juste faire des choses étranges. Il hausse un sourcil presque amusé et sort de la pièce, certainement pour prévenir McGonagall que nous sommes prêts. Je n'ai aucune idée de ce qu'il se passe, mon esprit est comme débranché. J'ai très peur de ce qui va arriver quand je sortirai dans la Grande Salle pour faire mon petit discours. D'accord, je stresse un peu. Je respire un bon coup et suis le Serpentard avec une légère anxiété.
Toutes les tables ont été déplacées. Chaque maison est derrière son équipe pour les soutenir et les encourager. Le Professeur Londubat finit juste d'installer celle des Serdaigle quand il nous voit arriver. Il affiche un grand sourire et nous laisse la place au centre de la salle en nous adressant un petit signe d'encouragement. Un frisson me parcourt. Tout le monde a les yeux rivés sur nous. Je devrais avoir l'habitude avec le nombre de fois où tout le monde me regarde dès que je me fais allègrement humilier, c'est-à-dire assez régulièrement tout de même. Léon m'adresse un petit sourire et je mets quelques secondes avant de comprendre qu'il veut que je commence à parler. Je m'éclaircis la voix avant d'essayer de calmer le brouhaha ambiant.
« S'il vous plaît ! Bonsoir à tous ... »
C'est peine perdue, les premiers rangs sont à peu près attentifs mais au-delà, ça se bouscule et ça rit fort. Autant utiliser des moyens conséquents, je sors ma baguette et jette un regard à la professeur de Sortilèges qui affiche un petit sourire.
« Sonorus, murmuré-je en agitant ma baguette. S'il vous plaît, taisez-vous ! »
L'effet est tout de suite visible, les visages enfantins se tournent vers nous et ils peuvent tous m'entendre à présent. Je continue, essayant autant que possible de sourire :
« Je disais, bonsoir à tous ! Avec mon cher collègue Léon Wilkes, on a choisi d'organiser un petit quiz aujourd'hui. Pour tester vos connaissances et vous faire gagner des points de manière relativement ludique. Vous aurez besoin d'encourager l'équipe de votre maison pour qu'elle se surpasse. Le public aura l'obligeance de ne pas souffler les réponses sous peine de suppression immédiate de point évidemment. Si une équipe trouve une réponse, elle envoie des étincelles dans les airs et pourra répondre celle qui sera la plus rapide. Si tout est clair, nous pouvons commencer. Léon, la première question ? »
Il me lance un regard amusé et souriant puis enchaîne directement, avec enthousiasme. Je fronce les sourcils, la situation me perturbe beaucoup. Il faut que je me détende un peu, que je sois au moins un minimum naturelle. Il dit sa question :
« La première sera une question plutôt amusante. Elle devrait plaire à Molly, glisse-t-il en me regardant, puisqu'elle concerne notre grande et admirable directrice. Est-ce que vous êtes prêts ? »
J'ouvre la bouche pour protester et je me ravise en voyant les autres rire. Je lève alors simplement les yeux au ciel. Les équipes ont l'air sur le pied de guerre.
« À votre avis, en quelle année est née Minerva McGonagall ? Ah, Gryffondor réagit rapidement ! »
Léna a envoyé des étincelles rouges dans les airs. Ses joues s'empourprent aussi légèrement quand elle tente de ne pas rire en répondant :
« On pense qu'elle est née en 1940.
- Faux, archi-faux ! s'exclame fièrement le préfet-en-chef. Les Serpentard, récupèrent la main instantanément, on vous écoute.
- Madame la Directrice est-elle née en 1937 ? essaye un garçon de cinquième année.
- Eh non ... »
Léon paraît un peu déçu de son équipe et ça m'arrache un sourire. J'interroge les Serdaigle qui se risquent à dire :
« 1935, peut-être ?
- C'est exact ! Un point pour nos intellos favoris ! »
Lysander fait un grand sourire en tapant dans la main d'une fille de son équipe. Je regarde Léon qui attend apparemment quelque chose de moi. Après un clignement intensif des yeux, je comprends qu'il faut que je pose ma question. Mon cerveau fonctionne vraiment au ralenti.
« Bien, poursuivons. Qui a écrit : « L'Histoire de la magie » ?
- Tes questions sont moins passionnantes que les miennes, murmure Wilkes pour que seule moi puisse l'entendre et le foudroyer du regard.
- Poufsouffle peut proposer une réponse, dis-je sans faire grand cas de la remarque de mon homologue.
- Newt Scamander ? propose une première année en ouvrant de grands yeux inquiets.
- Merlin ! »
C'est Lysander qui hurle en entendant le nom de son ancêtre mal utilisé et qui envoie des étincelles bleus à toute allure dans le ciel étoilé du plafond. Je m'esclaffe en le voyant ainsi réagir. Je me vois dans l'obligation de l'interroger et il dit la bonne réponse : Bathilda Tourdesac. Les Serdaigle continuent à amasser des points. Tout au long de la soirée, qui se poursuit dans la bonne humeur relative, ils sont devant au total des points, talonnés par Serpentard et Gryffondor qui se battent pour la seconde place et Poufsouffle est un peu à la traîne. Tout s'était bien passé jusqu'à la dernière question, posée par Léon.
« Pour finir en beauté, j'ai une question un peu farfelue. Je vous propose de trouver le nombre de garçons que notre chère Molly Weasley a embrassé dans sa vie. Si elle a réussi à compter bien sûr, dit-il en me faisant un clin d'œil. Allez, n'hésitez pas ! »
J'ai cru que j'allais m'évanouir.
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