Samedi 7 Septembre
Ma foi, la journée d'hier a été finalement fructueuse puisqu'au petit matin, j'avais mes cent lignes de Mike Douglas et une douce vengeance. C'étaient des pattes de mouches baveuses mais c'est mieux que rien, au moins, l'intention était là. Et qu'y a-t-il de plus satisfaisant que de voir le petit crétin blond ravaler sa fierté avec ses lignes copiées douloureusement ? Au petit-déjeuner, je le dis, il n'y a rien de mieux que sa petite tête dépitée.
Au programme aujourd'hui, trouver une bonne idée avec l'aide de Wilkes pour mettre de l'« ambiance » dans le château. Le pire dedans, c'est vraiment de devoir passer du temps à proximité de Léon Wilkes. Mais si McGonagall le veut, elle l'aura. Bien que je pense au plus profond de moi-même qu'elle a fait une grossière erreur en pensant que je pouvais être capable de travailler avec lui. Je sais que j'ai beaucoup de qualités mais la patience ne fait pas partie d'entre elles. Et puis déjà, qu'est-ce que c'est que cette idée de mettre de l'ambiance dans le château ? Ce n'est pas un lieu d'étude, où on est censé y travailler, avoir nos diplômes pour ensuite pouvoir avoir autant que faire se peut un travail ? Évidemment, c'est toujours sympathique de retrouver ses amis le soir au bord du lac, d'avoir quelques jeux dans la Salle Commune mais à quel moment c'est notre travail d'organiser quoi que ce soit pour mettre de l'ambiance dans une école ? On ne va pas non plus tomber dans la dépravation et avoir une fête toutes les semaines. J'ai une pensée pour mon père qui trouverait ça scandaleux et ça m'arrache un petit sourire au milieu de mes réflexions.
« Alors, j'ai eu quelques petites idées, m'annonce Wilkes en souriant de travers. Qu'est-ce que tu dis d'une fête ? »
J'ai failli éclater de rire mais je me suis plutôt pris la tête entre les mains pour mourir en paix. Il fait beau dehors, le soleil brille et rayonne sur le lac étincelant. L'herbe est verte et le ciel est bleu. Les petites fleurs montrent un arc-en-ciel de couleur. Non, la nature est beaucoup trop belle pour l'espèce humaine. Et moi, je suis coincée dans une sorte de cagibi que l'on nous a présenté comme notre nouveau bureau avec la triste compagnie de Léon Wilkes. Est-ce que j'ai déjà dit que je ne l'appréciais guère ? Non, vraiment, je préfère mourir que de l'entendre proposer une autre de ses idées.
« Non, je sais ! dit-il comme s'il avait eu un éclair de génie, ce qui me rend plutôt perplexe. On n'a qu'à organiser une soirée dans la Forêt Interdite ! »
Je vais le frapper. Je ne prends pas la peine de lui expliquer l'absurdité de sa proposition. À quel moment a-t-il cru que l'intégration des Première année rimait avec Forêt Interdite ? Je pense qu'il a un problème mental qui va bien au-delà de l'absence de matière grise.
« Hé, Weasley, arrête de soupirer à toutes mes idées. Si tu es si géniale que ça, tu pourrais en proposer aussi. »
Le pire, c'est qu'il a raison, c'est vexant et ça ne m'aide pas du tout à réfléchir. Au lieu de chercher à dire quelque chose d'intelligent, je préfère m'emporter contre sa stupidité :
« Ce n'est pas une fête où tes copains alcoolos ramèneront du whisky pur feu qu'attend McGonagall, qu'est-ce que tu as dans la tête ? Et la Forêt Interdite, oublie. Même si tu me disais que c'était pour apprendre aux petits les dangers de la folie et des créatures qui y vivent, ça ne convaincrait ni la directrice, ni moi, ni personne.
– Et tes propositions ? Je les attends toujours. »
Il me regarde avec son insupportable sourire arrogant. Je soupire une nouvelle fois, irritée par son entêtement. Il faut que je réfléchisse rapidement. Il nous faut quelque chose d'intelligent, de plutôt malin, qui nous permettrait de faire participer tout le monde, qu'ils soient grand ou petit. Je jette un coup d'œil au Serpentard qui regarde par la fenêtre, peu concentré, les quelques filles qui font une bataille d'eau dans le parc. Je ferme les yeux en grimaçant. Il me révulse de plus en plus, ce qui n'étaient que des a priori deviennent réels, à mon plus grand malheur.
« Est-ce que ça te dérange si on va réfléchir de tout ça dehors ? demande-t-il avec un air détaché.
– Pour que tu ailles les mater de plus près ?
– Hé, tu pourrais même manger des glaces au caramel ! »
Il explose de rire alors que je prends un livre dans mon sac pour le frapper en représailles. Il ne le sait peut-être pas, mais je ne suis pas le genre de fille qui aime rire de ce genre de chose. J'ai le droit de me foutre de la gueule des autres mais les autres doivent toujours faire attention parce que la réciproque est dangereuse. Pour eux exclusivement. Il soupire, comme pour me montrer que je suis vraiment quelqu'un sans humour. Il ajoute avec un sourire toujours amusé :
« Sérieusement, il fait beau dehors, les idées viendront peut-être plus rapidement. C'est pas que je t'aime pas mais je préfère autant ne pas passer trop de temps enfermé avec toi. Imagine tu me rends chiant ?
– On te l'a pas dit ? Tu es déjà quelqu'un de chiant, dis-je d'un ton froid. Bon, d'accord, descendons, au moins comme ça, je pourrais respirer un peu. »
Il serre le poing comme s'il venait de gagner au quidditch alors que je rassemble mes affaires, profitant d'avoir à nouveau mon livre dans les mains pour lui en donner un nouveau coup sur la tête. Tous les deux, dans un silence un peu embarrassant mais ce qui est déjà mieux que de l'écouter parler, nous descendons les escaliers vers le parc. Une fois les rayons du soleil un peu plus proches, je me permets un léger sourire. Qui s'efface quelques secondes plus tard. Je n'avais pas repéré mais en fait, on se dirige droit vers sa bande de potes. On travaillera vraiment super bien, c'est génial. Je fronce les sourcils en foudroyant Léon du regard qui hausse les épaules un peu innocemment.
« Yo Léon, tu traînes avec Weasmoche ? Fais attention à toi, elle pourrait te contaminer avec sa mauvaise humeur ... »
Je dévisage Marius Burgoyne avec la méchante envie de prendre ma baguette et de lui lancer un sort qui le calmerait pour toujours mais je me maîtrise, serrant juste les dents et le poing. S'ils s'approchent de trop, ce dernier pourrait très bien partir pour rencontrer une mâchoire. J'ai devant moi une belle brochette d'idiots. Je rappelle le Préfet-en-chef à l'ordre en disant d'un ton sec :
« Bon, Wilkes. Est-ce qu'on ne finirait pas rapidement notre travail pour que tu ailles traîner avec tes amis nuls loin de moi ?
– Mais Weasley, nous sommes de bons amis, fait Côme Selwyn avec un sourire niais.
– Pour des gens comme Léon. Qui se ressemble s'assemble, c'est ça la formule, non ?
– Tu es en train de me traiter de nul ? s'offusque Léon en posant une main choquée devant sa bouche. Merlin, je vais défaillir !»
Je ne prends même pas la peine de répondre. Finalement, ses amis partent d'un autre côté et nous laissent discuter tranquillement de l'organisation d'une activité. Néanmoins avant de partir, ils échangent quelques mots qui me rappellent à quel point je ne devrais rien avoir à faire avec eux :
« Brittany te cherchait, Léon, a déclaré Marius. Je crois qu'elle voulait te parler de ce qu'il s'était passé pendant l'été. Franchement, tu aurais pu lui dire avant pour toi et Emeline, maintenant, c'est gênant au possible.
– Mais Brittany, elle le sait qu'Emeline ne lâche jamais le morceau, soupire Léon avec dédain. Elle devait s'y attendre.
– En tout cas, règle la question rapidement parce que si Lovener apprend ça, ça va pas être rose, conclut Ethan Vane, un autre ami de Serpentard.
– Ouais, je verrais ça. A tout à l'heure, je dois aller travailler. »
Je hausse un sourcil. De un, ce qu'il se passe chez les Serpentard ne m'intéresse pas et je regrette d'avoir entendu cette conversation embarrassante à propos de ses histoires avec Brittany Norwich et Emeline Lovener, qui sont deux pestes de leur maison. De deux, quand il utilise le mot travailler, je me demande s'il sait vraiment ce que c'est. Il avance vers un banc sous un arbre où il s'installe en passant une main dans ses cheveux. Il a l'air préoccupé par cette histoire. Je n'ai vraiment pas envie d'en savoir plus, les détails par exemple, ça a tendance à me répugner mais il dit quand même, comme s'il se sentait obligé de partager ça avec moi :
« Merlin, faut jamais sortir avec deux filles en même temps ... »
Je secoue la tête, il peut toujours me dire ça, ce n'est pas à moi que ça arriverait. Je ne fais pas de commentaire, je fais tout pour ne pas le regarder et essayer de me concentrer en sortant plume et parchemin. Mais il est hermétique au message :
« Emeline est un peu pénible mais elle canon. Après, Brittany, ça ne pourra jamais être ...
– En fait, je m'en fous, l'arrêté-je pour couper court à ses confessions maintenant.
– Désolé, j'oublie que tu n'as pas de cœur. »
Je fronce les sourcils, il a à moitié raison. Cependant, quelque chose me vient à l'esprit. Je n'en ai rien à faire de ses histoires d'amour avec les deux demoiselles mais en même temps, ce ne sont pas n'importe qui non plus. Elles me détestent toutes les deux. Brittany, sans raison, parce que je ne l'aime pas non plus, je pense. Mais Emeline, c'est différent.
Emeline Lovener est la fille de Vilnius Lovener, notre cher ministre de la magie. On se déteste mutuellement. Son père est une ordure de premier rang et il a battu le mien aux élections, ce que sa fille aime beaucoup me rappeler à chaque fois que je la croise. C'est une grande blonde, gâtée de partout, qui profite du pouvoir acquis par son père pour se croire supérieure. Je tiens les gens comme elle en horreur. La défaite de Papa était un drame parce que ça a laissé un ministre incompétent à la tête du pays ; pour sa fierté personnelle, ça a été difficile mais il s'en est remis. Le monde pourra-t-il se remettre en revanche de la victoire d'un homme corrompu ? Connaître les histoires d'Emeline pourra toujours me servir de réplique la prochaine fois qu'elle m'agressera pour me rappeler ce triste moment de l'histoire de la famille Weasley.
Dans un froid qui n'est pas dû au soleil, on réfléchit chacun de notre côté. Au bout de quelques minutes qui me semblent interminables, j'ai enfin un concept qui pourrait se mettre en place et qui répond à tous les critères.
« J'ai quelque chose, annoncé-je, alors je te propose qu'on mette en place une sorte de soirée quiz.
– Des quiz ? dit-il un peu sceptique.
– Oui, ça passe mieux auprès de la direction que la Forêt Interdite et on pourrait faire ça par maison, avec un élève de chaque niveau. Comme ça, les plus grands travaillent avec les plus petits. On pose des questions de type culture générale, donc avec un intérêt pédagogique et chaque maison a une équipe qui doit répondre correctement pour gagner des points. Tout le monde aime gagner des points et ça peut être divertissant.
– Tu veux dire barbant, corrige-t-il avec un insupportable sourire en coin.
– Sérieusement, Léon, tu as une meilleure idée ? Ça peut très bien marcher si on s'y met un peu et qu'on prépare des questions variées, certaines peuvent même être amusantes. »
Il réfléchit longuement. Tout compte fait, ça lui arrive de temps en temps. Il finit par hocher la tête en soupirant.
On se sépare rapidement. Il rejoint ses amis qui s'étaient installés un peu plus loin et je rentre à la Salle Commune retrouver Fred et Evan qui font une partie d'échec version sorciers. Je m'allonge dans le canapé, satisfaite de mon idée, priant tout de même pour que McGonagall soit d'accord et que les élèves ne soient pas trop réticents. Je partage mon idée aux garçons qui me regardent en souriant. Je n'arrive pas à savoir s'ils se moquent de moi ou pas. De toute façon je suis épuisée par cette journée, je n'ai pas le courage d'argumenter correctement.
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