Samedi 16 Novembre (2/2)

Le soir arrive doucement. Je laisse les filles s'endormir dans le dortoir. Après avoir enfilé une robe noire, je descends sur la pointe des pieds jusqu'à notre point de rendez-vous où Eugénie m'attend. Elle me fait un petit sourire entendu et on commence notre tour de garde par le couloir du rez-de-chaussée. Je lui explique ma stratégie. Elle écoute très attentivement.

A l'approche de l'Infirmerie, après un grand tour du château, on se sépare, chacune d'un côté du couloir. L'Auror au milieu, devant la porte, n'a pas l'air de dormir. Tout est parfait. J'enfile la cape de James dans l'ombre et je compte les secondes.

Du verre se brise de l'autre côté. Eugénie pousse un cri et sort sa baguette. Elle envoie des étincelles rouges dans tous les sens, comme pour se protéger de quelque chose. Quelle actrice. L'Auror bondit sur ses pieds et se précipite vers elle, baguette à la main, éclairant sur son passage. J'entends Eugénie respirer difficilement, lui expliquer qu'elle est préfète-en-chef, badge à l'appui, qu'elle finissait tout juste son tour de garde et devait rentrer dans sa salle commune quand Peeves s'était attaqué à elle. Elle grogne de rage en essayant de montrer par où l'esprit frappeur s'est échappé avec un ricanement.

Pendant ce temps, je me glisse jusqu'à la porte de l'Infirmerie. L'Auror garde son attention sur Eugénie qui pousse des soupirs exaspérés et en rajoute pour se plaindre d'un groupe de quatrième année qui avait laissé des bombabouses traîner dans le couloir d'à côté.

« Mais heureusement que vous êtes là pour nous aider, soupire-t-elle. On n'a jamais eu autant besoin d'aide pour gérer la situation à Poudlard. Vous avez bien du courage pour en faire votre métier... »

La porte de l'Infirmerie s'ouvre une petite seconde et se referme dans un petit cliquetis discret. Je n'entends plus la tirade parfaite d'Eugénie. Je suis à l'intérieur. Enfin. Je ferme les yeux pour respirer silencieusement, appréciant ce sentiment de victoire avec un sourire joyeux. Je traverse la grande pièce comme un léger coup de vent. Personne ne peut me voir et de toute façon, tout le monde dort à poing fermé. Il est tard. Trop tard peut-être. Il va falloir le réveiller un peu.

J'atteins le rideau qui cache son lit et il s'agite sans un bruit alors que je passe de l'autre côté. Je sors ma baguette et me concentre. Je lance la plupart des sortilèges de protection que je connais et je fais tout pour que personne n'entende ce qui se dira derrière ce rideau. Ma baguette virevolte dans les airs et je peux enfin ôter la cape de James que je plie soigneusement, comme il me l'a demandé. Je la laisse néanmoins à portée de main alors que je me m'assois sur la petite chaise à côté du lit de Léon.

Il dort profondément. Je sors de mon petit sac deux bouteilles de bièraubeurre et des gâteaux. J'ai de quoi le calmer avec ça s'il m'en veut d'écourter sa nuit.

Je ne sais pas à quoi il rêve mais il a l'air parfaitement serein. Ses cheveux noirs lui tombent dans les yeux. Ses traits sont détendus. Faut-il vraiment que je le réveille ? J'ai passé ma journée à préparer mon plan et je risque ma vie pour être là. Oui, il faut que je le sorte de son sommeil, même si cela veut dire que je ne pourrais plus l'observer à ma guise. C'est vrai qu'il est agréable à regarder.

« Léon ? chuchoté-je sans le moindre effet. Léon Wilkes ? »

Je soupire. Ça ne va pas marcher comme ça. Je m'approche un peu de lui pour poser une main sur son épaule et le secouer doucement. Il grogne un peu et se retourne dans sa couverture. Je fais un petit sourire. Oui, il est indéniablement mignon quand il dort. Il plonge son nez dans l'oreiller, fronçant ses petits yeux fermés, comme s'il était dérangé par quelque chose. Peut-être est-ce ma présence. Je persiste pourtant, sans pitié pour son sommeil.

« Léon, réveille-toi, s'il te plaît. »

Il doit m'entendre dans un coin de son esprit car il se retourne à nouveau et remonte sa couette jusqu'à ses oreilles. Je ne peux pas te laisser dormir, Léon. Je finis pas tirer un peu sur sa couverture, dans l'espoir que ça le sorte des bras de Morphée. Mais ça a surtout l'effet de me révéler qu'il ne porte pas de haut de pyjama. Génial, un peu gênant surtout mais absolument ravissant. Je me retiens de rire devant l'absurdité de la situation et en attendant qu'il remarque ma présence, j'attrape une bouteille de bièraubeurre pour la décapsuler d'une main experte. Avec un peu de chance, l'odeur ou le bruit lui fera soulever une paupière. Je la sirote doucement, appréciant le goût frais et sucré. Cette expédition dans l'illégalité est un franc succès. J'aurais le temps de boire toutes les bouteilles avant qu'il ne se réveille.

« Merlin, souffle-t-il d'une voix rauque en s'agitant un peu dans son lit.

– Hé, Wilkes, tu dors ? »

Cette fois, il entrouvre les yeux et émet un petit grognement. Il fait une petite moue contrariée et sert sa couverture contre lui.

« Bonsoir, Léon, murmuré-je avec un petit sourire.

– Mais ... Laisse-moi, Molly, marmonne-t-il. Merlin de rêve ...

– Serais-tu en train de rêver de moi, Wilkes ? chuchoté-je dans un rire à peine retenu.

– Merlin ! Qu'est-ce ... ? 

– Je te pince, si tu veux. »

Il semble réellement émerger cette fois, refusant ma proposition. Il passe une main sur son visage, comme pour vérifier qu'il était bien éveillé. Ses yeux gris rencontrent les miens. Il fronce les sourcils pendant que je fais cogner ma bouteille contre la sienne avec un petit sourire malicieux.

« A la tienne, marmotte ! »

Il cligne plusieurs fois des yeux avant de se redresser un peu pour m'observer, toujours perdu dans le brouillard.

« Pourquoi tu ... ? Qu'est-ce que tu fous là ? 

– Je t'ai ramené des gâteaux, au cas où tu aurais un petit creux en plein milieu de la nuit, expliqué-je en lui exposant les pâtisseries sur la petite table de chevet. Je me suis aussi dit qu'il fallait que je vienne te parler, alors je suis venue. 

– T'as vu l'heure qu'il est, Weasley ? T'es complètement barge ... Merlin, soupire-t-il.

– Voyons, Wilkes, tu ne sais pas encore de quoi je veux te parler. Ce n'est pas le moment pour m'insulter. »

Il plisse des yeux et semble soudain remarquer que son torse est exposé à mon regard. Avec pudeur, il remonte lentement la couverture pour se couvrir.

« Tu aimes beaucoup trop me regarder dormir pour être normale, Weasley ... »

Je ne peux pas m'empêcher de ricaner en le voyant faire. Je ne peux pas vraiment nier. Je n'arrive qu'à rougir un peu plus. J'espère quand même qu'il porte quelque chose en bas.

« Tu peux me passer un tee-shirt ? Là, juste derrière ... »

Il me lance un petit regard inquiet alors que je lâche ma bièraubeurre pour lui tendre gentiment son tee-shirt qu'il enfile rapidement avant de se redresser un peu plus et de s'asseoir dans son lit. Il me dévisage, ne comprenant toujours pas l'objet de ma présence.

« Je suis désolée, chuchoté-je. Les Aurors surveillent sans cesse l'Infirmerie. C'est le seul moyen que j'ai trouvé pour parvenir jusqu'à toi sans me faire casser la figure. »

Mon front se souvient encore de l'armure qu'Emeline m'a lancé. Léon hoche la tête en se frottant le visage. Ça ébouriffe un peu ses cheveux noirs. Je souris bêtement.

« Ils assurent vraiment une sécurité du tonnerre, soupire-t-il. Si tu as réussi à t'introduire si près de moi sans que personne ne le remarque, qui sait ce que quelqu'un de malintentionné aurait pu faire. »

Puis, il s'arrête, figé et je croise son regard un peu inquiet.

« Tu aurais pu faire ce que tu veux de moi ...

– Oui, tu es totalement à ma merci, approuvé-je avec un sourire malicieux. Mais ne t'inquiète pas, je n'ai pas porté atteinte à l'intégrité de ton corps et je te promets que je n'ai rien dessiné d'indécent sur ton joli visage. Jamais je ne me serais permise. »

Il passe une main lente sur son visage, comme pour vérifier qu'il n'y avait rien. Je le sens tout perturbé. Comme si ma présence au beau milieu de la nuit ne le mettait pas en confiance. Je m'en amuse un peu et décapsule l'autre bouteille de bièraubeurre pour la lui tendre.

« Tiens, c'est pas du Pur-Feu mais tu es en convalescence. Il faut rester un peu sérieux. »

Avec méfiance, il prend la bouteille. Il ne me lâche pas du regard.

« Qu'est-ce qu'il y a ? Je te fais peur à ce point ?

– Excuse-moi mais je n'ai pas vraiment l'habitude de me faire réveiller en pleine nuit par une fille qui me dit que j'ai un joli visage. Je me sens ... Comment dire ? »

Je retiens un petit rire en me mordant la lèvre. C'est donc tout ce qu'il a retenu ?

« Je suis presque flatté, souffle-t-il en esquissant son premier sourire. En plus, je suis sûr que tu as maté le joli corps qui va avec de tes yeux perçants.

– Je n'ai pas vu grand-chose de ce corps que tu as si pudiquement couvert. Alors qu'on m'avait jadis promis des abdos, je n'en ai pas vu la trace.

– Le joli corps a été meurtri récemment, je ne sais pas si tu te souviens. Il n'est pas au meilleur de sa forme. Peut-être même qu'il aurait besoin de repos.

– De toute façon, sache-le, je ne suis pas venue pour ça. Je ne sais pas quand je pourrais contempler à nouveau ce spectacle fabuleux de ton doux sommeil, alors laisse-moi profiter un peu.

– Je le savais, s'amuse-t-il. Tu adores me regarder dormir.

– Non, Wilkes, éveillé, c'est bien aussi. »

Il affiche un sourire irrépressible. Je prends une gorgée de bièraubeurre pour m'empêcher de trop réfléchir, pour détacher mon regard de ses lèvres qui forment un sourire enchanteur. Il faut essayer d'arrêter pour le moment ce petit jeu. J'ai des choses sérieuses à lui dire. Mais il sirote sa bièraubeurre en plantant ses yeux gris dans les miens. Un peu de concentration ! Fin de la rigolade.

« En fait, dis-je après avoir pris une grande inspiration, je suis venue m'excuser par avance. Si je te vole quelques heures de sommeil, c'est que je pense que ce sera difficile de se voir, de se fréquenter ou de faire quoi que ce soit ensemble pendant un moment. »

Il pose sa bouteille pour me regarder avec des yeux interrogateurs. J'évite son regard en buvant quelques gorgées. Je reprends, maladroitement, la gorge serrée :

« Il s'est passé pas mal de choses depuis que tu es ici.

– C'est Emeline qui t'a menacée ? Molly, ne l'écoute pas. Vraiment, elle a complètement vrillé cette année. Je ne la reconnais même plus !

– Ce n'est pas seulement Emeline, lui annoncé-je à regret. Ce sont les Aurors au détour d'un couloir, Scott qui revient à la charge, le Ministre qui menace mon père ... C'est trop. Je ne sais pas ce qu'on a fait pour mériter ça. Je prends le risque de venir cette nuit parce que je refuse de leur obéir et de rentrer dans leur jeu mais je ne peux pas risquer davantage. C'est bien trop dangereux.

– Pourtant, tu vis dangereusement, non ? murmure-t-il avec un léger sourire.

– Je suis sérieuse, Léon. »

Il hoche la tête, perdant son sourire rapidement pour s'asseoir un peu mieux dans son lit. Il reprend sa bièraubeurre et fait tourner le liquide dans la bouteille en réfléchissant. Quand il relève les yeux vers moi, il est aussi sérieux que moi :

« Je suis désolé. Merlin Molly, souffle-t-il.

– Ce n'est pas de ta faute, Léon.

– Mais si, tu es menacée parce qu'ils veulent m'atteindre.

– Je crois qu'ils te menacent aussi parce qu'ils veulent m'atteindre, soupiré-je en constatant la situation terrifiante dans laquelle on se trouve.

– C'est malin de leur part, fait-il remarquer à regret. Mais tu as raison, on ne peut pas faire ce qu'ils attendent de nous. Je ne sais pas qui donne les ordres dans leur truc mais je te jure que si c'est Emeline qui a demandé à son père de tout faire pour nous éloigner, je ne suis pas sûr de pouvoir résister à l'envie de ... »

Il ne termine pas sa phrase mais je visualise bien ce qu'il veut dire. Un petit silence s'installe entre nous. J'en profite pour attraper un petit gâteau. Je finis par dire :

« J'ai continué mes recherches sur l'affaire Fulmer. »

Léon ouvre la bouche mais ne dit rien, me laissant continuer.

« Je suis allée déterrer de vieux rapports pour avoir une idée plus précise. Il faisait du trafic de potions qui étaient censées améliorer les capacités mentales mais ça a eu tout l'effet inverse. »

Léon hoche la tête mais il ne fait toujours pas de commentaire. Je plisse les yeux alors qu'il semble se réfugier derrière sa bièraubeurre. Je sors un bout de parchemin de mon sac pour lui montrer mes notes.

« Alors, tout ce que je sais, c'est que l'un des Aurors s'appelle Murphy O'Burke. Je ne sais pas exactement lequel c'est mais je suis prête à parier que c'est celui avec un regard qui fait froid dans le dos. Je suis persuadée que c'est un Salvateur. La note de Minerva semblait indiquer qu'il avait un lien avec Hunter Zabini l'an dernier dans l'organisation de ses fêtes et donc aussi avec Luke Fulmer qui a organisé un trafic dangereux à Poudlard. Tu suis ?

– Oui, à peu près. Donc au moins un des Aurors fait partie de leur groupe. Tu penses qu'il peut être responsable de ma chute ?

– Lui ou un autre, je le crois bien. J'ai l'impression qu'on est sur une piste mais il nous manque encore trop d'éléments. C'est beaucoup trop peu. Leur réseau semble immense, ça en devient effrayant !

– Je ne sais pas dans quoi on s'embarque, Molly, avoue-t-il en observant mes notes avec inquiétude.

– Ce n'est pas le moment pour me lâcher, Léon Wilkes. On avait dit qu'on ...

– Se battrait ensemble, murmure-t-il. Je sais. Je ne te lâche pas. J'ai juste un peu peur je crois.

– Ne t'inquiète pas, ça me terrifie aussi. »

Il esquisse un sourire las et, dans un élan de je-ne-sais-quoi, il lève sa main et la pose sur la mienne. J'ai comme l'impression qu'il s'est rapproché sans que je ne m'en aperçoive. Je rougis en baissant légèrement les yeux. Ses doigts sont posés sur les miens. Je sens comme des décharges électriques me remonter tout le bras. Je frissonne légèrement. Mes doigts, sans que je ne leur demande, se tournent légèrement pour aller se glisser entre ceux de Léon.

« Tu sais, chuchote-t-il dans le silence de la nuit, à Halloween, j'ai vraiment merdé. »

J'affiche un léger sourire.

« Je sais, oui, approuvé-je. Mais tu ne pouvais pas ne pas aller aider Emeline.

– J'aurais pu ne pas ressortir avec elle ensuite. T'inviter pour de vrai à danser à la place. J'ai eu peur d'un coup. Emeline paniquait, j'ai cru qu'elle ... Je me suis dit que je ne pouvais pas la laisser tomber juste à ce moment-là.

– On traîne tous nos fantômes. J'ai eu une petite discussion mouvementée avec Scott ce matin. Ce n'était pas très agréable. Je ne sais pas qui est le pire entre lui ou Lovener ...

– Molly... »

Il serre ma main doucement. J'ai surtout envie de finir ma bouteille de bièraubeurre pour oublier Scott, Emeline et toute cette histoire qui me pèse tellement sur les épaules. Je prends une grande inspiration pour chasser les quelques larmes qui s'approchaient trop près du bord. Je suis bien avec Léon. Pourquoi doit-on parler de toute cette peur ? C'est de ma faute, je sais, je n'arrive pas à la sortir de ma tête. Quand ai-je vraiment profité de l'instant présent pour la dernière fois ? Je ne m'en souviens même pas.

« Parlons plutôt d'autre chose, proposé-je en secouant la tête.

– Tu ne penses pas plutôt qu'il vaut mieux en parler ? S'il continue à te faire souffrir, tu ne devrais pas rester seule à porter ça. Profite que je sois encore là pour cracher sur Reeve. C'est une activité que j'approuve tout particulièrement. »

J'esquisse un sourire amusé. D'accord. Je prends une grande inspiration.

« Il commence à tourner autour de Rebecca Lemoine, de Poufsouffle. Elle se laisse gentiment courtiser et ça me met hors de moi. Il est tellement vicieux. Il paraît gentil comme ça mais il va la manipuler. Il va lui faire croire qu'il veut la protéger et quand elle se rendra compte de ce qu'il cache, ce sera trop tard.

– Ignore-le. Molly, il essaye sûrement d'attirer ton attention et de te provoquer pour que tu fasses des erreurs.

– C'est pas facile, soufflé-je. Et si elle était la prochaine victime ? Qu'est-ce que je peux faire ? »

Il me fixe de ses doux yeux gris alors que ma main libre tremble en amenant la bièraubeurre à ma bouche. Il soupire.

« Tu fais déjà beaucoup, crois-moi. Je sais que c'est dur de ne pas pouvoir tout faire mais il faut que tu penses à toi aussi. »

Je hoche lentement la tête en buvant quelques gorgées sucrées. Il me fait sourire presque malgré moi.

« Scott est un manipulateur, ajoute-t-il sérieusement. Depuis le début, je le sens pas.

– T'étais surtout jaloux au début, commenté-je en étirant un peu plus mes lèvres.

– Pas du tout, se défend-il sans me convaincre. Ce gars est juste bizarre. Et tu avais l'air de souffrir avec lui.

– Bien sûr, tu t'inquiétais surtout pour moi. »

Je ricane un peu en soufflant dans ma bouteille. Je ne sais pas s'il fait exprès pour me faire rougir mais son pouce caresse le mien presque imperceptiblement. Nouveau frisson. Ses yeux gris ne me lâchent pas une seconde.

« Je m'inquiète souvent pour toi, avoue-t-il avec un léger sourire.

– Dit celui qui est tombé de son balai en plein match et qui dort à l'Infirmerie depuis une semaine. Comment vont tes blessures ? »

Il plisse les yeux et secoue la tête.

« Ne change pas de sujet. Je m'inquiète pour toi parce que tu as un courage admirable et d'immenses ressources en toi. Mais qu'est-ce qu'il se passerait si un jour le coup est trop dur et que tu n'as plus la force de te relever ?

– Pour l'instant, je tiens encore debout, fais-je d'une petite voix.

– C'est trop dur pour une seule personne, Molly. Les menaces à répétition, les agressions, la pression sur tes épaules, la haine, les secrets.

– Tu es là, non ? »

Je détourne les yeux pour fixer sa main qui tient encore la mienne. Il tire dessus doucement pour m'inciter à m'approcher un peu plus, à le regarder dans les yeux, à voir ses yeux d'un gris profond. Je suis attirée lentement vers lui.

« Je suis là, murmure-t-il en se calant bien dans son lit, me laissant assez de place pour m'asseoir tout prêt de lui.

– Et je suis contente que tu sois là, Léon Wilkes, chuchoté-je avec un sourire et les yeux brillants. Si on m'avait dit il y a quelques mois que je prononcerai de telles paroles en les pensant vraiment ...

– Moi non plus, je n'y aurais pas cru.

– Qu'est-ce qu'il s'est passé pour que tout soit chamboulé comme ça ? Tout va trop vite, je ne vois pas les semaines passer, c'est effarant. »

Il ne cesse de caresser doucement ma main, pour apaiser mes pensées. Et ça marche. Je suis perdue dans le clair-obscur de ses yeux et tout s'évapore comme par magie. Mais ça ne peut pas calmer les battements de mon cœur. Rien ne pourra les calmer cette nuit.

Il laisse sa bièraubeurre sur sa table de chevet pour approcher sa main libre de mon visage. Il remet derrière mon oreille une mèche rousse. Il va sentir que je transpire à grosse goutte. Je ferme les yeux quelques secondes pour ne pas m'affoler. Merlin, tout va bien se passer, Molly. Respire. Personne ne sait que je suis là, sinon, je n'y serais sûrement plus. Personne ne va ouvrir le rideau et nous découvrir sur le fait. Personne ne va crier au meurtre. Personne ne nous dérangera.

« Merci d'être venue, Molly. »

La voix de Léon se glisse jusqu'à mon oreille. Son souffle caresse mes cheveux. Je rouvre les yeux avec un petit sourire et les joues écarlates. Il étire ses lèvres doucement. C'est comme une invitation. Je lâche sa main pour la porter à sa joue. Ses bras se referment sur moi alors que ma bouche effleure la sienne. Il m'embrasse tendrement. Un doux baiser au goût de bièraubeurre, né dans le creux d'un sourire. Il se détache un tout petit peu de moi, juste pour me regarder mieux. Moi, je prends goût à ses lèvres et je ne peux pas m'empêcher d'y poser les miennes à nouveau, de prolonger un peu le plaisir.

Il faut un temps pour respirer, nichée dans le creux de ses bras. J'ai peur d'appuyer sur une de ses blessures, de lui faire mal, de briser l'instant suspendu dans la nuit. Mais il ne s'en plaint pas, tout occupé qu'il est à afficher un air béat. Je ne suis pas mieux. Mes yeux pétillent et mes doigts frétillent contre les siens. J'ai investi son petit lit d'infirmerie. On est peu serré mais ce n'est pas désagréable. Il dépose un petit baiser sur ma tempe et chuchote :

« Tu sais quoi, Molly ? On les emmerde tous. Personne n'a à décider pour nous. Ça nous appartient et ils ne l'auront pas.

– De toute façon, on a intérêt à garder ça pour nous, marmonné-je. C'est bête, pour une fois que j'avais quelque chose de sympa à raconter.

– Tu te rends compte, je ne pourrais pas me vanter que la plus belle fille de Poudlard est venue me rendre visite pendant la nuit. »

Je lui donne un petit coup de coude, embarrassée. Mais ça n'enlève rien à l'euphorie qui a pris possession de son visage. Je dois être rouge cramoisi. Je me mords la lèvre inférieure et je ferme les yeux, prête à m'endormir, blottie dans ses bras pour finir cette nuit enchanteresse. Alors qu'il pense certainement que le sommeil m'a emporté, j'entends son souffle près de mon oreille.

« Fais de beaux rêves, Molly Weasley. »

Mon cœur s'arrête et repart de plus belle. Je me sens secouée, comme si j'étais dans les airs sur le dos d'un dragon qui ne faisait que descendre en piqué. Au milieu de la nuit, au milieu d'un sourire, je murmure :

« Bonne nuit, Léon Wilkes. »

***

J'espère que ça aura fait des heureux. Je vous laisse là-dessus hihi
(profitez des bons moments où tout se passe bien, ça arrive parfois)


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