Mercredi 11 Septembre

Encore une belle journée. Il fait si beau dehors. Cependant, si je devais qualifier mon humeur avec une couleur, je dirais le gris. Quoiqu'un gris très foncé, à la limite du noir. Voilà. Encore une belle journée sous le soleil gâchée par des gens qui me mettent d'une humeur massacrante.

Ce n'est pas à cause d'un petit débile de Serpentard, de ma sœur, d'un Scamander ou d'un quelconque Poufsouffle. Non, là, c'est à cause d'Emeline Lovener et il n'y a rien de pire que cette fille. Si pédante, si supérieure, si hautaine, si méprisante, si méchante. Je pourrais continuer encore longtemps comme ça mais je n'ai pas le temps.

Elle m'a fait, en sortant du cours de Métamorphose du Professeur Bloom, un petit sourire et un geste de la main pour que je vienne la voir. Premièrement, je ne suis pas son chien. Deuxièmement, on se déteste mutuellement, ce soudain intérêt pour moi me rend méfiante. Troisièmement, non loin d'elle, il y avait Léon Wilkes et je mets un point d'honneur à passer le plus de temps possible loin de lui. Alors je l'ai ignorée une première fois.

Mais elle ne lâche rien. Pire qu'une tique ou qu'une teigne. Elle m'a refait le coup au déjeuner. Non, elle a fait pire ! Je mangeais tranquillement mes pommes de terre quand ce monstre à la figure d'ange blond s'est posé à côté de moi pour me chuchoter à l'oreille.

« Weasmoche, tu ne veux pas qu'on ait une conversation privée ? »

Je lui ai jeté un regard sceptique avant de reprendre une bouchée de mon assiette, l'ignorant royalement, ce qui a fait pouffer de rire Roxanne à côté de moi. Mais elle a encore récidivé en continuant, avec l'air de quelqu'un de vexé qui essaye de rester maître de ses émotions :

« C'est à propos de quelqu'un qui a des informations sur ta mère. »

Je deviens pâle instantanément. Je sens littéralement le sang quitter mon cerveau. Piquée à vif, je me lève pour lui faire face. Comment ose-t-elle venir me parler de ma mère ? Comment ose-t-elle avoir ce petit sourire si malfaisant en me disant ça ? J'enjambe le banc et sans plus réfléchir, je lui prends le bras pour l'entraîner loin des oreilles attentives de mes camarades. Je ne pense pas qu'ils aient entendu ce qu'elle m'a dit mais ma réaction provoque un hoquet de surprise chez Roxanne qui en lâche sa fourchette.

Le hall n'est pas assez tranquille, je traîne Emeline, très fière d'elle, jusqu'à la Salle des Trophées qui est vide à cette heure là. J'ai une terrible envie de supprimer son petit sourire par un coup de poing dans le nez. Voyant bien qu'elle a réussi à me déstabiliser, elle me regarde en gloussant. J'en ai presque les larmes aux yeux. On n'aborde pas un sujet si sensible de cette manière. Je m'approche d'elle, inquiétante, en la dévisageant et en m'exclamant :

« C'est quoi cette histoire ? »

Elle fait un sourire incroyablement vicieux en ne répondant pas. Elle pose doucement ses doigts sur mon torse pour me repousser légèrement, comme si elle était trop précieuse pour qu'on soit trop près d'elle. Le contact de ses mains sur moi me révulse, je sors ma baguette de ma poche pour la menacer avec. Elle émet un petit rire nerveux, je pointe ma baguette sur son cou en m'écriant :

« Et puis comment tu sais ça, toi ? »

Elle hausse les épaules en secouant la tête avant d'éclater purement et simplement de rire. Je hurle :

« Qu'est-ce que tu sais à propos de ma mère ? Emeline, Merlin, réponds ou je t'éborgne sans aucun scrupule !

- Molly chérie, je suis la fille du ministre, me rappelle-t-elle d'une voix mielleuse. Tu pensais vraiment que je pouvais passer à côté de ce genre d'information ? »

Elle est beaucoup trop sûre d'elle, elle me donne envie de prendre sa tête pour la frapper contre le verre qui protège un trophée, briser le vitre et lui enfoncer les débris dans son crâne, un par un. Je souffle pour évacuer cette possibilité. C'est une mauvaise idée, sur le moment ça me détendrait beaucoup mais ça ne rendrait pas service à mon futur. Le sujet de ma mère est plus que sensible, elle le sait parfaitement et joue avec mes nerfs avec un plaisir pervers.

Maman a disparu il y a de ça dix ans. Dix longues années passées à me demander ce qu'il s'était passé, dix longues années durant lesquelles mon père a essayé de nous protéger de l'enquête, nous cachant qu'il y travaillait secrètement, nous disant qu'il y avait toujours un espoir qu'elle soit toujours là, quelque part, en vie, qu'elle reviendrait un jour.

Suite à sa disparition et à l'enquête, on a déménagé au Terrier, Papa a perdu les élections pendant lesquelles je crois que le père d'Emeline l'a attaqué au sujet de sa femme volatilisée étrangement. Celui qui est devenu ministre a dit des choses horribles pour le battre : que Papa avait fait exprès pour avoir la compassion des électeurs de ne pas la retrouver, qu'il savait qu'elle le trompait et s'en était débarrassée, qu'elle était partie de son propre chef parce qu'elle le trouvait faible. J'étais trop petite pour comprendre la douleur incommensurable qui ravageait mon père et l'avait enfermé dans un protectionnisme démesuré à notre égard. J'avais sept ans, Lucy trois. Il ne voulait pas nous mettre sur les épaules ce poids qu'il portait difficilement et plus que tout, il ne voulait pas nous perdre. Le moindre danger auquel on pouvait être confrontées, les prises de Grand-père, les jeunes du village que l'on croisait parfois, les journalistes qui s'intéressaient de trop près à l'affaire... Chaque chose prenait une ampleur excessive et dramatique pour lui.

Aujourd'hui, il a arrêté toutes ses recherches, abandonnant la possibilité qu'elle soit encore vivante. J'y crois encore. Je ne sais pas si c'est mon âme d'enfant à laquelle je me rattache ou parce que le contraire me détruirait, mais je suis persuadée qu'elle est là quelque part, attendant qu'on vienne la sauver. J'y pense très sérieusement maintenant. À aller la sauver.

Emeline me détaille en souriant. Elle soupire, presque impatiente. Je lui jette un regard dénué d'émotion pour elle, ma baguette toujours tendue vers ses veines palpitantes. D'une voix doucereuse, elle murmure :

« Alors, ça t'intéresserait ?

- Parle au lieu de me regarder comme ça ! crié-je pour qu'elle arrête de me torturer mentalement.

- On t'a déjà dit que tu manquais de patience ? Doucement, fait-elle en levant les mains, consciente que ma baguette tremble de rage et qu'elle risquerait d'avoir rapidement des problèmes. Doucement, reprend-elle, je vais te le dire. »

Elle abaisse d'une main ma baguette, je me laisse faire, toujours un peu méfiante. Elle se rapproche de moi pour me le dire à l'oreille, comme si quelqu'un d'autre pouvait l'entendre :

« Celui qui a une information sur ta tendre mère t'aime beaucoup. Il aimerait bien que tu le remarques parce qu'il a un tas de choses à te dire ...

- Je veux son nom, Emeline, dis-je en serrant mes dents.

- Ne m'en demande pas trop, veux-tu ! »

Sa langue sort légèrement de sa bouche, elle me fait penser à une vipère. Elle ricane et recule rapidement en voyant que je réagis pas. Elle s'en va, presque en courant, ouvre la porte et me jette un dernier sourire éclatant avant de la claquer derrière elle.

Mon sang est en ébullition. Je n'ai rarement été si en colère de ma vie. J'aurais pu la rattraper et essayer de lui sortir les vers du nez mais je sens que c'est peine perdue. J'ai envie de donner un coup de pied dans quelque chose ou alors d'éclater un trophée par terre. Malheureusement, une personne ouvre la porte et me regarde avec des yeux doux et inquiets. Derrière elle, il y a deux autres têtes curieuses qui sont tout autant inquiètes. Je ferme les yeux et range ma baguette avant de hocher la tête et de répondre à leur question sous-entendue :

« Tout va très bien. Vous ne vous étonnerez juste pas si vous retrouvez l'autre peste assassinée cette nuit. Ce sera moi la meurtrière et je prendrai plaisir à planter un couteau dans son cœur, si elle en a un. Dans le cas contraire, je m'attaquerais à chaque partie de son corps pouvait bouger.

- Tu vas surtout rester enfermée à double-tour dans le dortoir, cette nuit, dit Roxanne en fronçant les sourcils. Hors de question qu'on se retrouve avec un meurtre sur les bras.

- Un meurtre pour le bien de l'humanité, ça vaut peut-être le coup, tenté-je.

- C'est pas faux. »

Roxanne s'approche de moi en souriant pendant que Fred et Evan se glissent dans la pièce. Je les regarde, un peu penaude, ressassant ce que la fille du ministre me disait. J'ai l'impression que c'est un piège tendu devant moi et que je vais plonger dedans sans aucune hésitation. Quelqu'un qui m'aime beaucoup a des informations, ça m'intéresse beaucoup plus que ce qu'elle ne croit peut-être. Je fronce les sourcils en demandant à haute voix :

« Vous n'avez pas idée de quelqu'un qui m'aime bien en secret ? »

Roxanne me regarde, interloquée, en se retenant de rire. Fred et Evan échangent des regards embarrassés. Ma question n'est peut-être pas claire. Je soupire en ajoutant :

« Elle m'a dit que quelqu'un qui m'aimait bien avait quelque chose sur ma mère. Je veux juste savoir qui et pourquoi. »

Je frissonne en prononçant ces paroles, en me rendant compte qu'il y avait une personne de suffisamment tordue pour avoir des informations et envoyer Emeline pour m'appâter au lieu de me le dire directement. Fred croise le regard de Roxanne, il a l'air de chercher hâtivement qui pourrait correspondre à ce profil. Ma cousine m'enserre de ses bras protecteurs, compatissante et aimante. Evan, quant à lui, propose d'une voix incertaine :

« On pourrait peut-être faire une liste de tous les garçons ou filles qui t'aimeraient potentiellement pour ensuite faire une sorte d'enquête. C'est une mauvaise idée ? »

Roxanne lui sourit tendrement et hoche la tête. Elle me caresse doucement les cheveux, les remettant bien en place en même temps. Fred approuve :

« Non, ça pourrait être un début. Molly, tu en dis quoi ?

- Tout est bon à prendre, accordé-je. J'aurais préféré aller torturer Emeline pour qu'elle donne le nom mais vous n'êtes apparemment pas dans le même état d'esprit que moi. »

Evan fait un sourire et regarde sa montre. Il fait de grands yeux et annonce :

« Les amis, le cours de Sortilèges commence dans trois minutes. On se bouge ?

- On pourrait ne pas y aller,» tente Roxanne en croisant les doigts.

Je lui donne un petit coup sur la tête qui lui fait fermer ses yeux, misérable et triste de devoir aller en cours.

« Refusé. Evan a raison, on doit y aller. Ce n'est pas cette histoire qui va nous empêcher d'avoir nos ASPIC. »

Roxanne grommelle que de toute façon, elle ne les aura pas mais elle nous suit quand même dans les couloirs. Fred me regarde avec inquiétude, comme s'il avait peur que je m'effondre ou que j'explose. On arrive juste au moment où la classe finissait d'entrer dans la salle. Madame Hagel fronce les sourcils en nous regardant nous installer rapidement. Charlie de son prénom, c'est une petite dame avec des cheveux blonds qui remontaient sur ses épaules. Elle a refermé la porte un peu brusquement avant de commencer son cours général sur les Sortilèges de protection.

Assise à côté de Fred, je rumine, observant chaque personne dans la pièce. Est-ce Dorian, le préfet de Poufsouffle avec qui je prends rarement le temps de discuter ? Est-ce Victor, le gentil mais discret Gryffondor ? Scott, un Poufsouffle à qui je n'ai jamais parlé ? Ou encore un Serpentard qui traîne toujours avec Léon ? Ai-je appris comment lancer un sort de Repousse-Moldu pendant cette heure ? Je demanderais à Fred de me passer ses notes et je m'entraînerais plus tard. Là, il faut que je m'organise pour ne pas devenir folle et paranoïaque. C'est-à-dire, autant de boulot que pour passer des ASPIC.

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