Mardi 3 Septembre

La journée commence sacrément bien. Ironie. Mon réveil a été violent ou plutôt, je me suis réveillée normalement, certes plus tôt que la moyenne mais à une heure tout à fait correcte. Pourtant, quand je me suis levée, je me suis reçue je ne sais combien de coussins dans la face. Ils étaient au moins une centaine à me sauter dessus en voulant me mordre. J'exagère peut-être un peu, disons quatre ou cinq peut-être mais il faisait noir et ça n'excuse rien à la violence du geste. C'était l'œuvre de mes chères camarades de dortoir qui reprennent décidément bien vite leurs réflexes. J'aurais dû me préparer, je le sais pourtant mais j'avais oublié cette aversion du lever qu'elles entretiennent toutes.

Tellement ma journée commence bien, j'ai trébuché dans le couloir, me prenant les pieds dans les oreillers. Mais si je ne suis pas tombée, me rattrapant avec dextérité malgré les pièges, je n'ai pas pu éviter celui qui a suivi. Comme je suis sortie rapidement du dortoir, je n'ai pas fait attention au fait qu'il pouvait y avoir un garçon qui montait les escaliers pour venir visiter les chambres des demoiselles. Encore un de ces foutus innocents de Première année qui n'ont pas écouté quand je les ai prévenu qu'il ne fallait pas le faire. Et j'ai descendu le toboggan la tête en avant. Quel plaisir matinal savoureux de se retrouver sur le tapis de la salle commune, un peu hébétée, douloureuse et les pieds par dessus la tête.

Évidemment, il y avait quelques personnes dans la salle commune qui m'ont regardée avec un amusement non dissimulé. Je n'étais pas coiffée, à peine habillée et la tête dans le tapis. Bonjour, je suis votre préfète-en-chef, pour vous servir ! Autant dire que les rires ont tout de suite émergés des bouches encore pâteuses des Gryffondor et que je ne suis pas restée très longtemps dans cette position. Le ridicule a des limites que j'essaye de ne pas franchir. Heureusement que j'ai pu calmer tout le monde en menaçant quiconque rirait de le mettre en retenue dans les cachots à récurer les vieux chaudrons immondes. Ils ont alors tenté, difficilement, de tempérer leur agitation. Voilà comment se mettre d'une humeur massacrante dès le matin.

Je suis remontée, profitant que l'escalier soit redevenu normal pour échapper aux regards amusés. J'ai juste bousculé au passage le petit qui ne comprenait rien et qui pourtant était tout à fait coupable de cette effervescence. Le dortoir des filles n'est pas, sous aucune condition, accessible à un individu de sexe masculin. Je devrais faire une affiche et la placarder partout parce que ça devient dangereux cette histoire.

En me voyant déjà revenir, les filles qui commençaient à s'éveiller en douceur, contrairement à moi, m'ont lancé un regard interrogateur. Mis à part Effie qui grognait dans sa couette qu'elle voulait que son oreiller revienne à elle. Elle n'avait qu'à pas me l'envoyer dans la figure. J'ai fait une grimace avant de partir m'habiller aussi dignement que j'ai pu.

Ce n'est pas la première fois que je remarque que les Gryffondor sont en général de gros dormeurs et qu'ils ont tendance à agir sans réfléchir. Ce n'est pas mon cas, puisque je suis quelqu'un de véritablement unique. Je dors peu le matin et je suis capable de mesurer les conséquences de mes actes. Le plus souvent.

C'est en plein milieu de la journée que j'ai remarqué que j'avais plusieurs bleus et que je m'étais en fait vraiment fait mal en tombant la tête la première d'un escalier en toboggan. Rose, ma charmante cousine, qui passait à côté de moi alors que j'observais mon genou devenir d'une couleur étrange, s'est arrêtée et a essayé de me forcer à m'emmener à l'Infirmerie. Elle n'avait pas envie que ce soit quelque chose de plus grave et j'ai eu beau avoir protesté en disant que j'allais parfaitement bien, j'ai fini par céder parce qu'elle avait vu que je ne marchais pas hyper droit quand j'essayais de la fuir. Même si en vérité, j'aurais tout à fait pu m'en passer, je me suis fait traîner pour me faire soigner. Or, c'est elle qui devrait aller se faire soigner.

On arrive devant l'Infirmerie et soudain, je m'arrête. Elle hausse un sourcil étonné en commençant à ouvrir la bouche pour m'expliquer qu'il valait mieux y aller et vérifier que je n'avais pas de commotion cérébrale. Je ne sais pas où elle va chercher tout ça mais en voyant que Léon Wilkes y est déjà, je ne peux même plus y aller pour lui faire plaisir. De simples hématomes ne me tueront pas. Et même, je préfère mourir plutôt que d'entrer volontairement dans une salle où Léon Wilkes est déjà. Physiquement, à moins de cinq mètres, c'est déjà insoutenable alors imaginer à quel point il rirait et serait satisfait de me voir dans cet état, c'est non.

« Tu sais, Rose, je crois qu'ils se guériront très bien sans rien. C'est plus naturel que d'utiliser je ne sais quelle potion ou onguent. Toi qui veux protéger l'environnement, tu devrais savoir que le corps humain est tout à fait en capacité de se régénérer sans avoir besoin de réduire en esclavage la nature, non ? »

Elle a froncé les sourcils. Merlin, elle est tellement mignonne quand elle fait ça, ses tâches de rousseur ressortent sur sa peau encore un peu bronzée par le voyage en France qu'on a fait tous ensemble cet été. Pourtant, elle a beau avoir un visage adorable, elle commence à devenir grande, elle est en quatrième année. J'ai profité de ce froncement de sourcil et d'inattention de sa part pour m'éloigner d'elle et de ce lieu où se trouve le pire individu de l'espèce, en courant, le plus vite possible dans la direction opposée à l'Infirmerie. Elle a essayé de me rattraper. Et elle a réussi. J'avoue, j'ai un peu mal au genou et elle est plus sportive que moi. Me reprenant par le bras, fière de constater qu'elle avait raison et que j'étais bel et bien handicapée, elle a tenté de me tirer vers ce lieu maudit. Il faut que je prenne rapidement une décision. Finalement, pour la dissuader, je lui dis d'une voix suppliante :

« Rosie, si tu continues comme ça, je n'aurais aucun scrupule à te donner une retenue ou t'enlever des points pour le motif que tu nuis à ma liberté de mouvement.

– Tu n'oserais pas, affirme-t-elle sûre d'elle. Tu n'enlèves pas de points à ta propre maison.

– Mais me connais-tu réellement ?

– Bien sûr. Mais en temps normal tu es raisonnable, Molly. Qu'est-ce qu'il se passe ? Tu as une soudaine phobie des lieux blancs ?

– S'il te plaît, tu veux bien me respecter de temps en temps ? Tu me fais perdre mon temps. »

Elle jette un coup d'œil à la porte ouverte de l'Infirmerie et elle soupire. Je vois soudain Léon Wilkes qui en sort, elle le voit elle aussi et peut-être qu'elle comprend enfin. Il se dirige vers nous et j'échange avec ma cousine un regard sceptique. Il fait un sourire en passant devant nous et nous salue d'un geste :

« Des Weasley, toujours en train de pulluler dans les couloirs ?

– Un enfant de Mangemort, répond Rose avec un regard noir et la tête haute, ce n'est pas aussi rare qu'on l'espérerait. »

J'affiche un sourire satisfait en le voyant plisser des yeux. J'ai crû un moment qu'il allait s'arrêter pour fracasser le joli minois de Rose sur le sol en pierre. Je sors ma baguette en prévention mais il ralentit juste en nous disant avec une once de colère dans la voix :

« Je serais vous, je ferais plus attention.

– Merci Merlin, tu n'es pas nous, fais-je froidement.

– Continue à rire, Weasley. Tant que tu le peux.

– Sérieusement, une menace ? J'aimerais bien voir ça.» 

Je continue à jouer les durs en haussant un sourcil moqueur. Il soupire et poursuit son chemin, ne se retournant pas mais je sens rien que dans son pas qu'il est en colère. Rose me regarde avec des yeux mi-amusés, mi-inquiets.

« D'accord, tu ne voulais pas le croiser, c'est un peu raté. Honnêtement, je te plains mais tu ne penses pas que vous allez devoir tenter tout de même de vous entendre un peu ?

– Qui peut s'entendre avec ce genre de personne ? Très peu pour moi, je vais aller me reposer dans la Salle Commune, ce sera aussi efficace. »

Elle soupire, vaincue et me raccompagne jusqu'aux chers et moelleux canapés. J'aperçois soudain le petit Gryffondor qui a totalement détruit tout espoir dans ma journée en essayant de me tuer. Je bondis sur lui, le faisant sursauter avec un malin plaisir. Il me regarde avec de la peur dans les yeux et je lui glisse à l'oreille, consciente de le traumatiser mais c'est pour son bien :

« N'essaye plus jamais de t'introduire dans le dortoir des filles, d'accord ? Si tu recommences, je ne serais pas si clémente, pourtant tu as ruiné ma journée. Je te pardonne pour cette fois ... Tu t'appelles comment ? »

Il ne répond pas et s'enfuit en courant, en direction des toilettes. Ça me fait sourire pendant que je me réinstalle dans mon canapé en me demandant s'il voulait vraiment aller aux toilettes ou s'il voulait aller dans son dortoir. Maintenant, c'est bon, tous les regards qui se posent sur moi sont à nouveau un peu respectueux. Surtout ceux des plus jeunes. Ils ont l'air d'avoir compris qu'il ne fallait pas chercher Molly II Weasley sous peine de représailles massives. Roxanne apparaît devant mes yeux et se met à rire en me tendant la main pour que je tape dedans. Je hausse un sourcil et garde les bras croisés sur ma poitrine.

« Ah ouais, s'offusque-t-elle, tu te la joues comme ça ?

– Fais pas genre, Roxanne, c'est en partie de ta faute.

– Tu n'as aucun humour. Je voulais te remercier d'avoir fait taire tous les petits bruyants mais comme tu n'es qu'une ingrate, tant pis. »

Elle essaye de me donner une petite tape sur la tête que j'esquive facilement et elle s'en va en me tirant la langue. Je soupire en tentant de ne pas sourire. Je ne lui ai pas pardonné l'agression de ce matin. Ça mérite encore une petite vengeance. 

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