Mardi 17 Septembre

Je la fixe depuis tout à l'heure, elle n'a pas l'air de sentir le poids de mon regard mais si elle se tourne un tout petit peu vers la gauche, elle verrait mes yeux à mi-chemin entre le vert et le marron qui devraient la foudroyer. Elle est à l'autre bout de la salle d'Histoire de la Magie, assise à côté de sa fidèle amie Brittany Norwich, qui, ne l'oublions pas, a eu une histoire cet été avec Léon Wilkes. De telles informations peuvent se révéler utiles en temps voulu. Emeline Lovener se donne l'air si importante, assise tout devant alors qu'elle n'écoute rien, se prélassant en jetant des coups d'œil aux garçons derrière elle.

L'agresser, ou lui demander gentiment de répondre à mes questions ne devrait pas être si compliqué. Le seul problème que je dois résoudre, c'est comment l'isoler de son groupe à la fin du cours pour que ce soit juste entre elle et moi.

J'évite de penser à Lorcan et pour ça, je me concentre sur cet objectif. Une fois que Binns a fini de marmonner les devoirs à faire pour la prochaine fois, je me précipite dehors, la baguette à la main pour l'attendre et attaquer par surprise. Je pense l'attraper par le bras et la traîner dans une salle vide, ou alors, lui lancer un Stupéfix et la déplacer ensuite avec un Wingardium Leviosa. Je suis tellement tendue que lorsque quelqu'un pose une main sur mon épaule, j'en sursaute, pointant ma baguette dans sa direction.

« Merlin, Weasley, tu es dangereuse !

- Qu'est-ce que t'as, toi ? »

J'ai loupé Emeline, elle est passée juste au moment où j'entendais Wilkes s'exclamer. Est-ce qu'il avait prévu ça ? Je ne sais pas mais elle s'échappe, je n'ai pas vu de quel côté elle a tourné et je n'ai plus cours de la journée avec elle. Je souffle de colère alors que Léon me dévisage, reculant d'un pas, un peu inquiet.

« Je me demandais juste ce qu'il s'était passé avec Lorcan, comme il avait l'air furieux hier et que ...

- Ce ne sont pas tes affaires ! Je ne sais pas à quel moment tu as pu commencer à croire qu'on était pote, Léon, mais je ne parlerai pas avec toi de mes problèmes.

- Doucement, descends d'un ton, j'essaie juste d'être aimable, prévient-il en m'empêchant de lever ma baguette de colère.

- Va être aimable avec quelqu'un d'autre. »

Froidement, je lui tourne le dos et pars dans la direction où Lovener était partie. Léon n'insiste pas, il grommelle quelque chose que je ne prends pas le temps d'écouter. Pour l'amabilité, il faudra revenir un autre jour. Je sais ce que c'est, ça m'arrive d'être gentille mais aujourd'hui, impossible. Emeline n'est nulle part, évidemment. Ah, j'ai envie de donner un coup de pied dans une armure mais le règlement résonne dans ma tête et m'ordonne d'être raisonnable. Je soupire, marchant à toute vitesse entre les élèves aussi pressés que moi. Soudain, je me sens partir en arrière, un élève de première année a eu la mauvaise idée de me foncer dessus.

« C'est une manie chez eux ou quoi ? grommelé-je en me rattrapant in extremis pour rester debout. Merlin, c'est toi en plus ! »

Je regarde avec des yeux noirs le petit blond à l'air insupportable qui me fixe avec de grands yeux. C'est mon très cher Mike Douglas. Je n'arrive pas à savoir s'il a peur de moi ou s'il vacille parce qu'il m'est rentré dedans à pleine vitesse. Je le prends par la manche pour qu'on s'écarte du passage et je me permets de lui rappeler les règles du château :

« On ne court pas dans les couloirs aux heures de pointe ! T'as cru quoi ? Que c'était la bonne heure pour faire un petit footing ? Mais enfin, ce n'est pas possible d'avoir si peu de choses dans la tête !

- J'ai quelque chose pour toi.

- Génial, ça a intérêt à être bien si tu ne veux pas reprendre tes cent lignes, fais-je en tapant du pied avec impatience.

- Tiens ! »

Il me tend un papier avec des yeux suppliants. Il a de l'espoir que ça m'attendrisse, je hausse un sourcil en lui arrachant le mot des doigts. Je me fige. Il me regarde avec inquiétude. Je murmure :

« Dégage, Douglas, c'est bon pour aujourd'hui. »

Il ne demande pas son reste et s'enfuit en courant, il risque de se blesser un jour. Je soupire, l'inconnu est de retour. Je lis le message dans ma tête et froisse le papier pour le jeter dans mon sac.

Douce Molly, tu es décidément très têtue. Tu en as payé les conséquences mais là n'est pas la question. J'ai vraiment besoin de ton aide alors je suis prêt à tout te révéler, à la seule condition que tu me promets de tenir ta langue sur mon problème. Si tu acceptes, viens ce soir, juste avant le couvre-feu au même endroit que la dernière fois. Si tu n'acceptes pas, arrête de me chercher car tu le regretteras. Je t'embrasse.

Il suffit que j'accepte pour découvrir qui il est et ce qu'il a à dire sur ma mère. Il suffit que j'accepte, que je l'aide à faire ce qu'il veut et si c'est de l'aide pour un devoir d'Arithmancie, ce ne sera pas bien compliqué. Qu'est-ce que j'ai à perdre ? De l'honneur d'avoir cédé à ses menaces ? S'il n'y a que ça, je ferais mieux d'y aller.

Je ferme doucement les yeux, reprenant mon calme. Il faut que j'arrête d'être sans arrêt sur les nerfs, je finirais par véritablement agresser quelqu'un au bout d'un moment. Je file en cours de Sortilèges et Enchantements, ça me détendra peut-être. Encore deux heures sur les Sortilèges de Protection, c'est vraiment intéressant pour se défendre mais il y en a tellement, pour toutes les situations que je me sens presque écrasée sous la tonne de choses à retenir.

Fred m'a laissé une place à côté de lui, je pose mes affaires et m'assois, lui faisant un petit sourire. Il fronce les sourcils et me penche pour me demander :

« Tu as parlé avec Lorcan ?

- Pourquoi ça intéresse tant de monde ? soupiré-je. Non, je ne lui ai pas parlé, il n'avait pas l'air d'être vraiment parti pour discuter avec moi alors je préfère laisser un peu de temps passer. »

Il hoche la tête, compréhensif et enchaîne avec une autre question :

« Tu as des nouvelles de ton inconnu ? »

Je grimace. On peut dire ça. J'acquiesce en regardant la professeur arriver en se plaçant au tableau pour noter par quel sort nous allons commencer. Je cherche dans mon sac le papier que Mike m'a donné tout à l'heure et je le tends à Fred qui l'observe attentivement.

« J'ai reçu ça il y a quelques minutes. C'est bien lui qui a énervé Lorcan contre moi.

- Tu vas y aller ? fait mon cousin en fronçant les sourcils.

- C'est ce qui me paraît le plus sage. Je n'ai pas envie d'avoir un autre Lorcan sur les bras, c'est suffisamment douloureux comme ça. »

Il approuve d'un signe de tête alors que Madame Hagel commence à parler de sa voix forte des différents Charmes du Bouclier. J'écoute attentivement le cours qui pourrait m'être utile dans le cas où l'inconnu se révèle être un pervers psychopathe.

À la sortie du cours, Roxanne me retrouve et je vois à ses yeux plissés et son sourire contrarié qu'elle va aborder un sujet sensible. Je parie sur sa discussion avec Lorcan d'hier et au fond, j'espère me tromper et qu'il ne lui a rien dit. Elle se poste devant moi, les bras croisés et toujours ce regard inquisiteur. Elle finit par dire :

« Lorcan m'a dit ce qu'il s'était passé. J'en ai parlé avec Lysander, qui trouvait ça étrangement plutôt amusant. Alors maintenant, je viens en discuter avec toi puisque tu as toujours refusé de m'en parler, c'est peut-être l'occasion.

- Au moins, il t'a dit ce qui n'allait pas, à toi. J'ai juste eu le droit à des insultes sans explication. »

Elle lève les yeux au ciel et me fait signe de la suivre jusqu'au parc, où on marche jusqu'à nous installer tranquillement au bord du lac. Je la sens un peu irritée alors doucement, je lui demande :

« Qu'est-ce qu'il t'a raconté au juste ?

- Que tu avais embrassé Lysander l'année dernière. Il n'a pas vraiment détaillé, d'ailleurs, il ne sait sûrement pas tout parce que son frère a été un peu plus précis. Surtout sur la manière dont tu embrasses, dit-elle en me regardant avec un petit sourire moqueur en coin. Tu serais donc moins prude que tu ne le prétends ! »

Je la foudroie du regard en prenant une poignée d'herbe et je lui jette à la figure, vexée par son petit commentaire. J'étais sûre que Lysander allait raconter n'importe quoi, je ne suis pas aidée. Je soupire avant de m'expliquer :

« Premièrement, je ne t'en ai pas parlé parce que je savais que tu te moquerais de moi et que je n'avais pas vraiment la tête à ça.

- Moi ? s'offusque-t-elle. Je suis toujours respectueuse ! Mais tu as quand même fait fort... Te tromper de Scamander ! J'en reviens toujours pas. »

Elle éclate de rire en voyant ma tête se décomposer alors que je reprends tant bien que mal en tentant de couvrir ses gloussements :

« Je n'ai pas fait exprès ! Tu crois que c'était évident ? C'était la première fois que je voulais dire à Lorcan tout ce que je ressentais, je stressais horriblement et il était tard. Normalement, j'avais rendez-vous avec lui, pas avec l'autre ! Alors j'ai tout déballé, je l'ai embrassé et j'ai réfléchi après.

- Et tu as bien aimé ? demande-t-elle malicieusement.

- Je pense que sa joue s'en souvient encore, dis-je en pensant à la force avec laquelle je l'ai frappé. Et franchement, ça m'a totalement dégoûtée de recommencer... »

Je fronce les sourcils, mal à l'aise rien qu'en en reparlant. Je déglutis et jette un coup d'œil à ma cousine qui continue à faire un sourire amusé. Je baisse les yeux, secouant la tête avant de me renseigner :

« Il était comment Lorcan, quand tu lui as parlé ? Ça allait ou pas du tout ? »

Elle fait la moue, cherchant des mots à mettre sur son état. J'attends, un peu angoissée, qu'elle me réponde. Je n'ai jamais voulu blesser Lorcan, c'est mon ami. Je ne voulais pas que ça se passe comme ça. Elle finit par déclarer :

« Il n'allait pas très bien. Il a bien voulu m'expliquer après dix bonnes minutes d'insistance à lui rappeler à quel point on était un groupe soudé avant et qu'il était important de rester bien entourer. Il m'a dit qu'il s'était senti absolument trahi en l'apprenant et qu'il en voulait presque plus à Lysander qu'à toi mais ... Je ne sais pas, je crois qu'il a besoin de laisser sortir un peu sa colère.

- Je le comprends. »

Je me relève pour me donner une contenance et tends ma main à Roxanne pour qu'elle fasse de même. Elle passe un bras par dessus mon épaule, comme un signe de soutien et me serre contre elle, ébouriffant mes cheveux déjà bouclés et emmêlés. Je lui annonce :

« Ce soir, je vais aller au rendez-vous que l'inconnu m'a donné. Je n'ai pas envie qu'il recommence. Il faut que je sache qui c'est pour ensuite lui faire regretter d'être né. »

Je suis déterminée, elle me tape dans le dos en lâchant :

« La vengeance est un plat qui se mange froid ! Ses actes ne resteront pas impunis, Super-Molly est sur le coup ! »

Un rire clair sort de sa gorge alors qu'on remonte au château, bras dessus, bras dessous.

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