Lundi 4 Novembre

Pour ma défense, c'est elle qui a commencé. Depuis le début de la journée, depuis le petit déjeuner où je l'ai croisée alors qu'elle s'amusait encore à tripoter Léon, elle me regarde de travers. La rumeur serait-elle parvenue jusqu'à ses douces oreilles ? Certainement. Emeline Lovener me fixe de ses petits yeux aussi bleus que ceux de son père. Elle a continué en Potion, en Histoire de la Magie, en Défense contre les forces du mal. Elle me fixe alors que je range mes affaires en essayant de l'ignorer le plus possible, elle me fixe quand je sors de la salle, elle me poursuit presque dans les couloirs.

Je finis par soupirer en entendant ses petits pas suivre les miens et je m'arrête.

« Qu'est-ce que t'as, Lovener ? »

Je tourne vers elle un regard las. Elle se plante devant moi, les mains sur les hanches, l'air pas franchement ravie de me voir. Je devrais lui conseiller de ne pas me regarder comme ça si elle ne veut pas me voir mais elle provoque malgré tout en moi un sentiment de curiosité.

« Tu lâches Léon maintenant, Weasley. »

Elle a ce ton froid et cette manière de lever le nez autant que possible pour se donner l'air d'être fière. Je soupire en la détaillant du regard. Est-ce que ce n'est pas un fond de pitié que je ressens pour elle ? Non. Un rien de frustration. Ce n'est pas moi qui lâche Léon, c'est Léon qui me lâche. Pourquoi ne peut-elle pas juste être satisfaite de ce qu'elle a et me laisser tranquille ? Ce serait la moindre des choses. Je bats des paupières sans rien dire de plus. Elle ne doit pas être si sûre d'elle pour se sentir menacer par une simple rumeur. Je la vois devenir de plus en plus rouge à mesure que je reste silencieuse à l'observer.

« Je peux savoir ce que tu faisais avec lui le soir d'Halloween ? dit-elle avec une grimace de colère.

– Et je peux savoir ce que tu faisais à errer seule dans les couloirs ?

– Je ... Comment oses-tu ? Je me suis faite agresser ! s'écrie-t-elle outrée.

– Oui, de toute évidence, murmuré-je. Sans aucun nouvel indice, sans la moindre raison, sans aucune trace de ton agresseur, sans souvenir. »

Elle me regarde avec horreur. Je peux presque voir ses yeux s'embuer. Elle s'indigne :

« Tu crois que je me suis fait ça toute seule peut-être ?

– Je n'en sais rien, Lovener. Tout ce que je sais, c'est que tu traînais dans le couloir, seule, la nuit, alors que c'était contraire au règlement. »

Elle rougit encore plus, si c'est possible.

« Tu me fais quoi, là, Weasley ? Je suis la victime, Merlin, ne t'avise pas de dire que c'est de ma faute ou je te jure que tu le payeras cher.

– Je dis juste que tu n'as toujours pas expliqué ce que tu faisais là-bas.

– Et toi, tu n'étais pas seule dans le couloir peut-être ? Ah non, c'est vrai, t'étais avec mon mec à faire Merlin seul sait quoi ! Tu trouves que c'est mieux ?

– On aurait pas été là, Lovener ...

– Tu veux que je te remercie en plus ? »

Elle hurle, la fureur remplaçant son envie imminente de pleurer. Je recule d'un pas en secouant la tête. Elle a raison, j'aurais pas dû l'accuser mais c'est juste tellement bizarre. Je passe une main sur ma tempe. Bon sang, tout ça me rend barge. Elle dit, d'un ton plus bas mais toujours aussi empreint de rage :

« Mon père va envoyer ses Aurors, Weasley. Crois-moi, je ferai en sorte qu'il y en ait un pour te faire regretter ça. »

Je la fixe sans faire aucun commentaire là-dessus. Elle ne me lâche pas du regard non plus, frémissant de rage. Elle fait un pas vers moi.

« Et je te conseille de ne plus jamais t'approcher de Léon.

– Au fond, Lovener, ça t'arrange bien tout ça, chuchoté-je.

– Ne sois pas jalouse, Weasley. Tu aurais bien aimé que ton père soit ministre et que tu puisses continuer à essayer de me voler Léon comme ça te plaît mais c'est moi qu'il aime et c'est moi qui peut te réduire en bouillie en un claquement de doigt.

– Jalouse ? Je ne crois pas, fais-je avec un léger sourire mesquin. C'est toi qui a une peur bleue que Léon t'abandonne comme il l'a fait tellement de fois auparavant. Il a embrassé Brittany, il m'a embrassé, il en a peut-être embrassé d'autres, il n'en a rien à faire de toi. »

Je fais un pas vers elle en levant un sourcil. Je ne la vois pas arriver mais je la sens bien. Sa main rencontre ma joue à la vitesse d'un dragon en plein vol. Je porte ma main lentement vers ma peau rougie. Je crois bien que je viens de me faire gifler par Lovener. Je regarde le sol en sentant monter en moi un sentiment un peu violent. Quand je pose à nouveau les yeux sur elle, elle se tient bien droite, la main encore suspendue, l'air de pouvoir recommencer à n'importe quel moment. Elle a la poitrine qui se soulève rapidement, elle en devient presque essoufflée. Je la dévisage avec un sourire crispé, la mâchoire serrée.

« Tu n'aurais pas dû faire ça, Lovener, marmonné-je.

– Oh pardon, je t'ai fait mal ? »

Dans ses yeux brille une petite flamme de folie. Elle a un rictus mauvais aux lèvres. Ma main se rapproche lentement de ma baguette.

« J'espère que ça te servira de leçon, Weasley.

– Je crois que tu n'as pas compris, Lovener. Le problème ne vient pas de moi. Ton histoire avec Léon, elle finira comme d'habitude et ce n'est pas parce que tu es la fille du ministre que ça changera quelque chose. »

Elle est tout près de moi. Je sens son souffle passer dans mes cheveux. Son visage semble se décomposer peu à peu, déformé par la colère. Elle tremble. Ma main arrive jusqu'à ma baguette.

« C'est comme ça, Emeline, maintenant il faut que tu ouvres les yeux, je sais que la vérité est dure à entendre mais ... »

Je m'y attendais presque, d'un même mouvement, on a levé nos baguettes. J'ai reculé de quelques pas, ne détachant pas mes yeux des siens. Elle a une grimace à faire peur, les yeux rouges, la bouche tordue.

« T'es qu'une sale petite menteuse, comme ton père, aboie-t-elle. Ça ne m'étonne pas que ta mère vous ait abandonnés. »

Je ne parviens plus à me retenir, un Stupéfix sort de ma baguette. Elle le dévie de justesse avec un air outré. Il va frapper une armure qui tombe dans un grand fracas, attirant quelques personnes curieuses.

« Je ne te permets pas de parler de ma mère. »

Ma voix est saccadée, douloureuse. Elle laisse échapper un ricanement insupportable. Je lance un nouveau sort dans sa direction, déversant sur elle toute ma haine. Elle parvient à se protéger au dernier moment mais elle est obligée de reculer de quelques pas pour éviter d'être déséquilibrée.

« Tu veux jouer à ça, Weasley ? »

Elle me lance un sort que j'esquive en me baissant. Elle avance à nouveau vers moi, le pas décidé et les yeux qui ont tout l'air de vouloir envoyer des éclairs. Je riposte :

« Expelliarmus ! »

Cette fois, elle n'a pas le temps de réagir, sa baguette s'envole en l'air et retombe quelques mètres plus loin. Elle souffle de rage. J'ai l'impression de me retrouver face à un taureau. Elle reste quelques instants immobile à regarder sa baguette entre nous deux. Je pensais qu'elle allait juste essayer de se jeter dessus mais c'est sur moi qu'elle a foncé. Elle m'enserre de ses bras et m'entraîne avec elle. On bascule en arrière. Elle m'attrape le poignet pour me forcer à desserrer les doigts autour de ma baguette. Sous elle, à essayer de me débattre, je lui assène un coup de genou dans le ventre mais elle plante ses dents dans mon bras en représailles, sans aucune pitié. Je lâche à contre cœur ma baguette qu'elle pointe à présent sur ma gorge.

« Tu bouges d'un poil et je te jure que je t'explose. »

Je coupe ma respiration. Elle a la main qui tremble, tout son corps tremble en vérité? Elle est emplie d'une fureur qu'elle maîtrise mal. Elle a les cheveux qui lui tombent devant les yeux. J'ai une main bloquée par sa poigne, qui souffre de sa morsure ; l'autre est libre et je ne vais pas me gêner pour l'utiliser. Je mets autant de force que je peux pour me redresser ne serait-ce qu'un peu pour la déstabiliser et j'attrape ses cheveux, n'hésitant pas à tirer dessus pour qu'elle relâche la pression sur mon autre bras. Elle pousse un cri affreux, la tête renversée en arrière. J'en profite pour essayer de me dégager d'elle complètement mais au lieu de me lancer le moindre sort, elle jette ma baguette et m'assène un coup de poing dans le nez. Je pousse un grognement sonore avant de tirer un coup sec sur ses beaux cheveux blonds. Elle hurle de douleur tout en essayant d'atteindre à nouveau mon visage avec ses ongles.

« Mais qu'est-ce qui ... ? Molly ! Mais arrêtez-les, bande d'idiots ! »

Sa voix a arrêté net Emeline. Elle a lâché mon menton qu'elle avait commencé à griffer et j'ai ouvert ma main, libérant ses cheveux. Léon. J'ai laissé ma tête retomber lourdement sur le tapis du couloir en fermant les yeux.

Autour de nous, beaucoup de gens se sont regroupés, nous observant de leurs petits yeux curieux et en chuchotant, ricanant un peu. Au milieu d'eux, je devine Léon Wilkes qui regarde sa petite amie à l'air plus dépenaillé que jamais et moi, allongée sous elle qui réalise soudain l'absurdité de la situation. Je ne peux pas m'empêcher de pouffer de rire. Il relève Emeline qui tremble toujours autant de rage. Des bras me saisissent. Je ne sais pas très bien qui me redresse. Je m'essuie le visage du revers de ma manche, fixant toujours la Serpentard qui passe une main dans ses cheveux, en m'adressant un regard douloureux. J'ai du sang sur ma manche, je dois saigner du nez.

« Molly, Merlin ! fait quelqu'un en me retournant, me forçant à me détacher de Lovener. Qu'est-ce qui t'es passé par la tête ? »

Fred a un air ahuri et me tient fermement par les épaules. Je le regarde sans émotion, faisant juste un signe de tête en direction de l'autre folle. Je peux les entendre, ils sont si près.

« Merlin, Emeline, qu'est-ce qu'il s'est passé ?

– Tout est de sa faute, dit-elle dans un sanglot.

– Viens-là. »

Il doit la serrer dans ses bras. Je suis sûre qu'il la serre dans ses bras et caresse ses cheveux. Je ferme les yeux mais ça ne m'empêche pas de les voir. Emeline sourit forcément, contente de se retrouver tout contre lui.

« Molly ? chuchote Fred d'une voix douce.

– Dégagez, il y a plus rien à voir, s'énerve Wilkes sur les badauds.

– Parle-moi, Molly, continue Fred. Tu ne peux pas dire que tout va bien cette fois.

– Non. »

Je sens les larmes monter en moi, accompagnées d'une grande fatigue. Merlin, je passe ma manche tachée de sang sur mes yeux pour les éponger. Fred me regarde avec un peu de pitié et beaucoup d'inquiétude. C'est ridicule. Je sais qu'on ne s'est pas juste battu pour Léon avec Emeline mais Merlin, en venir aux mains... Je la déteste tellement. J'enfonce ma tête dans l'épaule de Fred pour y sangloter bruyamment.

« Je t'emmène à l'Infirmerie. »

Je sens sa main parcourir mon dos. Je finis par hocher la tête en reniflant. Les deux autres sont déjà partis. Avec mes yeux rouges et le nez en sang, je dois faire peur. Fred essaye de remettre une mèche derrière mon oreille mais il a du mal, ça colle de partout, c'est poisseux, il la laisse voleter mollement en soupirant. Je marche à côté de lui, un peu honteuse et toujours frémissante de colère. Il ne dit rien de plus, jetant juste des regards noirs à tous ceux qui se questionnent sur mon état.

« Elle a insulté mes parents, lâché-je enfin devant la porte de l'Infirmerie.

– Tu lui as mis une belle raclée à cette harpie, dit-il dans un sourire léger.

– J'espère bien. »

Il hoche la tête et ouvre la porte. Madame Ewer s'occupe déjà de Lovener qui est assise sur un lit. Léon a une main posée sur son épaule. Il a instant d'hésitation en me voyant entrer. Il évite mon regard mais enlève sa main pour croiser les bras. Emeline me suit des yeux, de l'animosité transpirant par tous les pores de sa peau. Je lui adresse un regard noir alors que Fred se tient toujours à côté de moi, la foudroyant lui-aussi du regard. Il passe une main dans mon dos pour me guider vers l'autre bout de la large pièce. Je m'assois en soupirant sur un des lits libres. Fred se met auprès de moi. Il ne me fait pas la morale, il est juste là, comme un garde du corps. Je le remercie d'un murmure.

« Tu peux y aller si tu veux. Tu as sûrement mieux à faire que me regarder pleurer bêtement.

– C'est rien, Molly. Ça ne me dérange pas. »

Je hoche la tête. On reste silencieux un moment, tous les deux, jusqu'à ce que Madame Ewer nous rejoigne de son petit pas pressé. Elle soupire :

« Ce n'est pas vrai, Miss Weasley. Je vous pensais plus mature que ça. »

Je ne réponds rien, l'observant juste s'agiter pour sortir de sa poche une compresse qu'elle imbibe d'un produit et m'applique sous le nez. Ça sent terriblement fort, je grimace. Elle aperçoit la trace de dent sur mon bras et pousse un nouveau soupir.

« Par les sabots de Chiron, c'est dans un sale état. Tenez ça ! »

Je pose mes doigts sur la compresse alors qu'elle va chercher un petit pot contenant une pâte bleutée qu'elle m'applique précautionneusement sur le bras. Je n'ai pas tellement mal. J'ai surtout un poids énorme sur mes épaules, une grosse fatigue, l'envie d'en finir avec toutes ses histoires, de voir disparaître à jamais toute la famille Lovener de ma vie. Madame Ewer dit quelques mots encore sur la barbarie de l'acte. Je ne fais que hausser les épaules et Fred affiche un petit sourire désolé. L'Infirmière dit soudain :

« Vous êtes attendues toutes les deux dans le bureau du Professeur McGonagall. Vous êtes en état d'y aller ? »

Je grogne une réponse vague. Merlin, McGonagall. Elle va être tellement déçue. Elle s'attendait certainement à mieux en me nommant préfète-en-chef. Un frisson me parcourt. Il y aura certainement une sanction. J'échange un regard un peu désespéré avec Fred qui ne sait pas quoi dire pour me donner du courage.

«Hé, Weasley, ramène-toi ! »

La voix de Léon arrive jusqu'à mon oreille, je lève des yeux durs vers lui. Emeline est accrochée à son bras, elle fait semblant de boiter. Fred fronce les sourcils alors que je me lève, le laissant là, pour partir sans un mot. Léon a soupiré et a dit à Madame Ewer qu'il nous accompagnait jusque là-bas. J'ai filé devant pour ne pas avoir à marcher à côté d'eux. Rien qu'entendre les petits soupirs douloureux de Lovener m'agace terriblement. Je les attends en bas de la statue ailée, les bras croisés, le dos tourné. J'entends Emeline continuer à se plaindre :

« C'est elle qui a commencé, Léon, tu vois bien qu'elle est complètement folle.

– Je ne veux pas savoir. Tout ce que je sais c'est que vous êtes dans de beaux draps toutes les deux maintenant.

– Et ça te fait rire, toi ? »

Elle arrive à côté de moi alors que je ricanais de la voir s'efforcer de mettre toute la faute sur moi. Je la trouve ridicule. Je sais que je suis loin d'être mieux mais franchement, ne peut-elle pas au moins assumer d'avoir été la première à utiliser la violence ? Non, elle aime trop jouer à la princesse en danger pour ça. Je soupire et commence à monter jusqu'au bureau de McGonagall. Je frappe et entre en entendant sa réponse. Elle est postée à la fenêtre, nous montrant son dos plutôt que ses yeux perçants. Elle va être furieuse. Je me mords la lèvre nerveusement. Elle se retourne et je vois dans ses yeux plus de déception qu'autre chose. De son air sévère, elle dit :

« Mesdemoiselles, entrez. Monsieur Wilkes, c'est bien que vous soyez là. »

Je l'ai entendu déglutir. Je n'ai pas l'impression qu'il est ravi d'être là. À mon avis, il s'est juste dit qu'il devait nous accompagner pour éviter qu'on recommence à nous battre. On reste tous les trois à regarder la directrice qui nous scrute par dessus ses lunettes.

« Donnez-moi une explication convenable pour être passées si ostensiblement outre le règlement. »

J'ai l'impression que son regard se pose plus longuement sur moi. Je ne fais que hausser les épaules. Emeline en profite pour répondre vivement :

« Elle m'a agressée ! Elle est complètement cinglée. Je n'ai fait que me défendre. »

Je ne peux retenir un léger ricanement. Évidemment. C'est elle qui m'a provoquée, elle qui m'a frappée en première et c'est moi qu'elle accuse. Je ne pouvais pas m'attendre à autre chose. Je croise le regard dur de Minerva et je ne peux que déclarer :

« Je ne l'ai pas agressée, Professeur.

– C'est une blague ? Qui a jeté le premier sort, Weasley ? »

Je soupire, lasse de l'entendre crier.

« Ça suffit, fait McGonagall sèchement. Peu importe qui a commencé, vous étiez visiblement toutes les deux autant impliquées.

– Mais elle a insinué que j'ai fait exprès de me faire agresser à Halloween. »

Un lourd silence tombe sur la pièce. Ils tournent tous leurs regards vers moi. Minerva a presque une ombre d'inquiétude dans l'oeil, comme si elle espérait vraiment que je n'avais pas fait ça. J'ai fait ça, moi ? Je baisse légèrement la tête. Oui, je l'ai fait, c'est bien possible. Elle a posé ses deux mains sur son bureau et a lentement secoué la tête. Elle s'est adressée à Léon :

« Monsieur Wilkes, vous étiez présent ?

– Je ne ..., bégaye-t-il. Non, je ne suis arrivé que pour les séparer.

– Bien, fait-elle en hochant la tête. Miss Lovener, vous aurez une semaine de retenue avec Madame Griffith et vous privez votre maison de trente points.

– Trente ! s'étouffe-t-elle. Mais ce ... »

Léon a posé sa main sur son bras pour l'arrêter. Elle s'est ravisée en me jetant un regard noir terrible. Minerva a pincé les lèvres en la regardant sévèrement et s'est tournée à nouveau vers moi. J'ai baissé les yeux, honteuse.

« Bien, vous pouvez disposer, j'aimerais m'entretenir seule avec Miss Weasley. »

Elle a dit ça d'un ton froid. Léon l'a remerciée alors qu'Emeline avait envie d'assister à ma sanction comme si c'était un beau festin à ne surtout pas rater. Il a pris son bras et l'a tirée vers l'extérieur, me lançant un dernier regard un peu inquiet. Ils m'ont laissée à la merci de la directrice. J'ai une forte envie de m'effondrer mais elle penserait que j'essaye de l'attendrir. Au lieu de me mettre à pleurer comme ça me démange, je garde la tête haute, affrontant son regard dignement. Elle a simplement montré de la main la chaise en face d'elle et s'est assise sans rien dire de plus. Lentement, avec un peu de méfiance, je me suis installée. Elle m'a observée longuement.

« Vous êtes dans une position délicate, Miss Weasley, je le sais bien. Mais vous ne pouvez pas céder ainsi. »

J'ai tressailli. Qu'est-ce qu'elle raconte ? Qu'elle me donne un bon mois de retenue qu'on en finisse !

« Professeur ? »

Elle n'a plus tellement de colère dans le regard. C'est presque de la compassion. Je ne suis pas sûre de comprendre. Elle prend une inspiration et dit :

« Vous me mettez aussi dans une situation délicate. Vous n'auriez pas dû faire ça. Mais je me doutais bien que cette confrontation arriverait un jour. Seulement, Miss Weasley, vous savez aussi bien que moi que ce n'est pas dans votre intérêt. »

Je plisse les yeux, ne comprenant pas très bien ce qu'elle entend par là. Pourquoi n'est-elle pas juste en colère contre moi ? C'est ce qu'elle fait en temps normal, non ? Elle se met en colère, l'élève en face pleure et tout rentre dans l'ordre.

« Je suis obligée de vous sanctionner, vous comprenez. Vous êtes préfète-en-chef et vous devez montrer l'exemple aux autres élèves et se battre dans les couloirs n'est pas exactement le modèle que vous devez incarner.

– Bien sûr, soufflé-je presque rassurée.

– J'enlève trente points pour Gryffondor, commence-t-elle après quelques instants de réflexion. Vous viendrez aussi en retenue avec moi pendant deux semaines, tous les soirs à dix-huit heures, ici-même. »

Je hoche la tête. En retenue avec McGonagall, je préfère autant ça que d'aller ranger les ingrédients de Madame Griffith par ordre alphabétique. Mais je sens qu'elle n'a pas fini et c'est bien ce qui m'angoisse. Je la regarde de mes petits yeux inquiets. Elle soupire :

« Vous avez vraiment accusé Miss Lovener d'avoir provoqué son agression ? »

Je grimace légèrement. Elle enlève ses lunettes pour me regarder avec un rien de lassitude.

« Miss Weasley ...

– Je voulais juste savoir pourquoi elle était seule dans un couloir quelques instants avant qu'on ne la retrouve. Ça me donnait l'impression qu'elle se rendait quelque part et je voulais juste en savoir plus. De là à parler d'accusation ...

– Vous pensez vraiment que le Ministre a pu s'en servir pour introduire des Aurors à Poudlard ? »

Je la regarde dans les yeux. Elle a donc eu la même réflexion que moi. Je hausse simplement les épaules.

« C'est une possibilité, non ? »

Elle soupire. Je n'arrive pas à savoir ce qu'elle pense vraiment, elle a les doigts entrecroisés devant elle et le regard toujours dur. Je me tortille légèrement sur ma chaise.

« Les Aurors arrivent demain, annonce-t-elle. Vous ne pouvez plus vous permettre d'avoir de telles pensées ou du moins de les montrer. J'attends de vous la plus grande vigilance. »

Elle me fixe droit dans les yeux, extrêmement sérieuse. Je hoche la tête doucement.

« Et je ne peux pas décemment laisser cela passer. Vous êtes suspendue de votre rôle de Préfète-en-chef pour les deux prochaines semaines. »

Je me recule sur ma chaise, soudainement prise de légers tremblements. Je déglutis. Suspendue. Si Percy entend ça ... Je ferme les yeux pour encaisser.

« Quelqu'un va me remplacer ? demandé-je d'une voix légèrement trop aigüe.

– Je pensais à Miss Lebeau. »

Je hoche la tête en évitant toujours son regard. Eugénie. Tant mieux. Je préfère largement que ce soit elle plutôt que n'importe qui d'autre. Elle ferait une très bonne préfète-en-chef. Sûrement meilleure que moi. J'ai envie de pleurer un peu. Je veux sortir de son bureau maintenant, fuir, aller me cacher dans un placard à balai et arrêter d'imaginer mon père apprenant la nouvelle. Minerva se lève.

« J'aimerai que vous profitiez de ces deux semaines pour vous reposer, Molly. Vous en avez grand besoin. Je vous attends demain à dix-huit heures pour votre première retenue. »

Je reste quelques secondes sur ma chaise à me mordre la lèvre. Puis je lève les yeux vers elle. Elle n'a pas le regard si dur que ça. Je chuchote : 

« Merci Professeur. »

Je ne sais pas très bien pourquoi je la remercie mais j'ai l'impression qu'elle n'a pas été si sévère que ce qu'elle aurait pu être. Elle a été calme tout du long. Je me dirige vers la porte, un peu sonnée.

J'erre un peu dans les couloirs tout en décrochant l'insigne épinglé sur ma robe. Je l'observe quelques instants avant de le ranger dans mon sac. J'ai presque une impression de légèreté en faisant ça. J'aurais cru que ça m'aurait plus affecté. Mais en réalité, j'ai le sentiment que Minerva a fait ça pour mon bien. Je n'arrive pas à lui en vouloir. Elle a raison, je suis épuisée en ce moment. Mes nerfs sont sans arrêt à vif. Il faut que je profite de ce temps qu'elle me laisse pour réfléchir.

« Molly ! »

Merlin, Wilkes. J'ai presque envie de me mettre à courir dans le couloir pour lui échapper. Mais il me bloque le passage. Je le dévisage avec indifférence.

« Comment ça s'est passé avec McGonagall ? »

Il a l'air sincèrement inquiet. Je ne peux retenir un léger rire. Léon ne s'inquiète pas vraiment pour moi, je n'arrive pas à le croire. Je secoue la tête avec un sourire narquois.

« Je suis destituée de mon poste de Préfète-en-chef. Tu pourras fêter ça avec Emeline. »

Il me regarde, interloqué. J'ai l'impression qu'il se décompose, à ma grande satisfaction. Il tend même sa main vers moi, comme s'il voulait me consoler. Je recule de quelques pas en le foudroyant du regard.

« Tu n'es pas content ? Ce n'est pas ce que vous vouliez ?

– Bien sûr que non ! Je n'ai jamais voulu que ... Qu'est-ce que je vais faire tout seul, sans toi ? Et puis ton père va être furieux ! »

Il a vraiment l'air paniqué, peut-être même qu'il s'en veut. Il a les yeux horrifiés. Ça suffit, je soupire avec sourire amusé :

« Ne t'inquiète pas comme ça, Wilkes. Ce n'est que deux semaines.

– Deux ... ?

– Eugénie me remplace pendant deux semaines et je reviens. Mais en toute honnêteté, Wilkes, c'est sûrement beaucoup mieux comme ça. Deux semaines à ne pas être obligée de voir ta sale tête, de vraies vacances. »

Il se fige, cherchant peut-être à voir si j'omets encore quelques détails. Mais au fond, je sens qu'il est un peu rassuré. Je lève les yeux au ciel avant de le pousser légèrement pour continuer mon chemin. Je n'ai pas envie qu'il dise autre chose. Mes deux semaines de tranquillité commencent maintenant par l'éviction de tout ce qui a tendance à m'énerver. Léon, Emeline, Scott, tous ces gens qui tirent trop sur la corde. Avant que la corde ne cède et que tout le monde se casse la figure, je préfère la couper moi-même.

***

Bonjour chers lecteurs !
Vous êtes de plus en plus nombreux et ça me fait très chaud au cœur, on a même dépassé les 1k de votes, je suis supracontente ! Merci beaucoup à tous !
J'espère que ce chapitre vous a plu, on se retrouve certainement la semaine prochaine pour la suite ^^

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