Dimanche 20 Octobre (3/3)
J'ai le rythme cardiaque élevé en entrant dans la pièce où se trouvent Percy et McGonagall. Cette dernière m'accueille d'un signe de la tête. Elle me regarde à travers ses petites lunettes. J'ai l'impression qu'elle sait déjà ce que je vais leur annoncer. Je m'assois timidement sur la chaise à côté de mon père. Il me sourit, je n'arrive à lui rendre qu'une grimace crispée. Il ne sourira plus dans quelques minutes, quand j'aurais annoncé la terrible nouvelle. La directrice me demande, croisant ses mains sur son bureau :
« Miss Weasley, avez-vous de nouvelles informations à apporter ? »
Elle penche la tête vers moi, me fixant toujours de ses yeux perçants. Je tente de respirer correctement, en hochant la tête, un peu hésitante. Papa me regarde, impatient d'en savoir plus et en même temps embarrassé, car il ne veut pas que je sois mêlé à ça. Ça lui fait peur, autant qu'à moi. Je toussote pour mieux déclarer ce que j'avais tant répété dans ma tête :
« Oui, il s'agit de Scott. »
Je m'arrête pour scruter leur visage. Papa semble beaucoup plus étonné que Minerva. Je continue, avant qu'on ne me pose des questions.
« Il m'avait demandé de ne pas en parler mais avec ce qu'il s'est passé avec Astrid, je ne peux plus faire comme si de rien était. C'est pour ça que je vous en parle aujourd'hui. On a conscience que c'est très dangereux. Il est désespéré, il ne sait pas où chercher de l'aide. Vous êtes sa dernière chance de se sortir de cet enfer.
– Tu veux dire que ... ? fait mon père en hoquetant.
– Il y a un groupe de mages noirs qui a réussi à infiltrer l'école, je ne sais pas très bien pourquoi mais ils sont là, autour de nous. Ils se font appeler les Salvateurs. Astrid fait partie des Salvateurs. Scott fait partie des Salvateurs. »
J'ai l'impression d'avoir posé un bombe et d'avoir allumé la mèche. Le visage de Percy semble exploser. McGonagall reste comme figée. Je continue, essayant tout pour le défendre :
« Il m'en a parlé et j'étais furieuse contre lui et effrayée. Je n'ai pas su comment bien réagir mais avec ton arrivée, Papa, je pense que c'est le bon moment. On ne peut pas laisser ça continuer. Il est prêt à tout vous raconter, à vous aider à les arrêter. Il est prêt à tout pour faire cesser ce groupe de magie noire. Il peut nous être utile...
– Depuis quand sais-tu cela, Molly ? »
Et la voix de Percy claque comme un fouet, dure et brutale. Je m'arrête de parler pour le regarder dans les yeux. Il se contient encore. Je ne peux pas lui dire que je sais cela depuis longtemps. Je ne peux pas avouer que je suis sortie avec lui alors même que je savais. Je ne peux pas dire qu'il m'a forcé à sortir avec lui le temps de sa venue à Poudlard, que ça fait partie d'un plan. Je réponds d'une voix plus tremblante que prévue :
« Pas très longtemps, j'ai tout de suite refusé de le revoir quand j'ai découvert que ... Mais je tiens à lui, plus que je ne le croyais. C'est quelqu'un de profondément bon, à qui il est arrivé de mauvaises choses. Il faut lui donner une chance de s'en sortir. Je m'en voudrais toute ma vie si on ne parvient pas à le sauver des griffes de ces Salvateurs. »
Je suis inconsciente, je me mets en danger sans cesse alors qu'il a perdu tout ce qu'il avait de plus cher au monde. Il souffle profondément, se retenant de crier tout cela à ma figure maintenant. Je n'ose même plus le regarder dans les yeux. Je garde la tête baissée.
« Merci, Molly, dit Minerva d'une voix apaisante. Tu peux aller le chercher. J'imagine que c'est lui qui attend derrière la porte. »
J'acquiesce d'un signe de tête. Je me lève en silence et me faufile pour retrouver Scott qui me regarde arriver avec angoisse. Il cherche dans mes yeux à savoir comment ça s'est passé, je murmure :
« Ils veulent te voir. J'ai fait de mon mieux, je te promets. »
Il prend ma main et la serre trop fort. Il est très tendu. Je pose une main sur sa joue avant qu'il n'y aille. Il respire mal.
« Il ne faut pas craquer maintenant. Tout est entre tes mains et tu vas y arriver. Ne mens pas, fais comme on a dit. Ça se passera bien.
– Merci, Molly. »
Il hoche la tête en soupirant. Il lâche ma main pour entrer dans le bureau, où les chuchotements s'éteignent en nous voyant. McGonagall, le regard sévère, montre la chaise où j'étais assise à Scott. Elle déclare à mon intention :
« Merci Molly, vous pouvez disposer. »
Je fronce les sourcils. J'aurais aimé être présente, j'aurais aimé savoir tout ce que Scott ne m'a pas dit. Mais je ravale ma fierté et fais demi-tour, n'adressant pas un regard à mon père qui de toute façon aurait tout fait pour l'éviter. Il ne veut pas m'impliquer plus. Quelle hypocrisie, je suis sûre que je les aide bien pourtant. Et voilà comment on me récompense.
Je bouillonne, forcée de rester à la porte, à essayer d'écouter ce qu'il s'y dit sans y parvenir. Rien n'est intelligible, je ne peux que remarquer les haussements de ton de mon père. Il doit sérieusement crier sur Scott. Ça me ronge de l'intérieur. Il pense que ce ne sont pas mes affaires mais il se trompe. Non seulement il se trouve que je suis une de leur cible mais en plus, il se pourrait bien que ce soit lié à Maman. Et ça, plus que tout, ça me donne envie de défoncer la porte.
« Mollynette, qu'est-ce qu'elle t'a fait cette porte ?
– Elle existe et c'est déjà trop, maugréé-je en me retenant de donner un coup de pied dedans.
– Comme les chaises, dit-il avec un sourire peu amusé.
– Oui, un peu. »
Je ne lui ai pas parlé depuis hier matin, depuis que j'ai discuté avec Scott. Quand il me regarde avec ce fond d'amertume, ce sérieux, il ressemble beaucoup plus à son frère. Lysander, cet ami inattendu, celui qui est toujours là malgré tout. Je reste muette, terriblement angoissée. Je n'ai pas le cœur à me fâcher avec lui. J'aurais plutôt une sale envie de pleurer. Adossée au mur, je me laisse glisser pour m'asseoir par terre, je suis comme recroquevillée, entourant mes genoux de mes bras. Il soupire et s'assoit à côté de moi, laissant traîner ses grandes jambes en travers du couloir.
« Après Lorcan, toi. Je vais commencer à croire que vous essayez de m'envoyer des signaux.
– Rassure-toi, je ne risque pas de te laisser seul très longtemps.
– Comment ça ? Ton père n'aime pas Scott ? Ou alors au contraire, il l'aime trop et ça te rebute ? »
Je hausse les épaules en esquissant un petit sourire ironique. Il semble comprendre en entendant un éclat de voix provenir du bureau.
« C'est sur Scott que ton père crie comme ça ? Qu'est-ce qu'il se passe ?
– Apparemment, ça ne me concerne pas suffisamment.
– Et ça crie depuis combien de temps à l'intérieur ?
– Bien trop longtemps, si tu veux mon avis... »
Il reste silencieux, ne pose pas plus de question. Il doit voir que je n'ai pas l'intention de tout lui dire, ou que je ne pourrais pas l'expliquer simplement. On reste tous les deux quelques instants dans le silence avant qu'il ne fasse un petit sourire en disant :
« Tu as parlé avec Lorcan. »
Ce n'est pas une question, il le sait, et à voir son regard, il en est content. Je souris pâlement.
« Oui. Toi aussi ?
– Oui, il est venu me voir pour s'excuser, dire qu'il prenait les choses différemment maintenant. Deux jours qu'il sort avec Coralie, il est transformé.
– Je crois que ça lui a fait du bien de s'éloigner un peu. Il a pu réfléchir et arrêter ...
– D'être un idiot complet, complète Lysander en riant. Ouais, on va prier Merlin pour que ça continue. »
Soudain, les cris que l'on entendait depuis tout à l'heure se taisent. Il y a eu comme un bruit sourd. Je me suis levée, bondissant sur mes pieds, surprise. La porte du bureau de McGonagall s'est ouverte en grande, violemment, avec une colère furieuse. Percy est sorti du bureau, seul, rouge, les lunettes tombant de plus en plus bas sur le bout de son nez. J'ai dégluti, n'osant pas un faire un geste. Lysander s'est levé et a reculé de quelques pas. Il est tellement en colère qu'il ne nous a même pas vu. Il passe une main, si fatiguée, sur son visage, sous ses lunettes, pour tenter de se calmer. Ses yeux sont à présent clos. Il ne va pas bien. Ça ne s'est pas bien passé.
Mon cœur accélère, j'ai le ventre plus noué que tout à l'heure, si cela est possible. J'aimerais tellement me glisser dans le bureau de la directrice pour rejoindre Scott. Tout sauf affronter Percy seule. Mais je ne vois pas d'autres issues. Avec hésitation, je m'avance d'un pas vers lui, je tente une approche discrète, douce, qui inspirerait au calme.
« C'est fini, Molly, dit-il d'une voix sourde. Plus jamais tu ne fais ça, plus jamais tu ne t'approches de lui, plus jamais tu ne te mêles de cette histoire.
– Papa, je ... Qu'est-ce qu'il s'est passé ? »
Et c'est comme si tout avait explosé autour de nous, Percy explose et j'encaisse les dégâts comme je peux.
« Je t'ai demandé de ne pas t'en mêler, Molly Artemisia Weasley Junior. Tu ne te rends pas compte d'à quel point c'est dangereux ! Tu as beaucoup trop tardé pour en parler à des adultes. Des victimes auraient pu être évitées bien plus tôt ! Non seulement, tu t'es mise en danger mais tu as participé à cela, tu as mis d'autres personnes en danger. Tu t'es rendue complice ... Est-ce que tu comprends, Molly ? »
Il hurle. Il hurle, tout le monde peut entendre ses mots si durs. C'est injuste. J'en ai le souffle coupé, c'est à peine si je ne suffoque pas, j'ai les yeux brouillés, l'envie de partir en courant. Je me sens comme une petite fille qui vient de faire une bêtise et que son père gronde.
« Est-ce que tu comprends, bon sang, Molly ? »
Il m'assène ces mots avec ses pupilles dilatées de colère. Et je les reçois comme des coups de marteaux. Je n'arrive pas à répondre, j'ai des sanglots coincés dans la gorge. J'ai envie de m'effondrer mais je reste plantée devant lui, bien droite, les yeux dans les siens. Et je ne dis rien. Il reprend ses invectives encore plus fort :
« Mais enfin, Molly, comment as-tu pu faire ça ? Si tu savais tout le mal que j'ai eu quand ta mère a disparu et que j'ai dû vous élever tout seul, toi et ta sœur, tu trouverais ça totalement irrespectueux de te mettre en danger comme ça ! Qu'est-ce que je deviens, moi, sans toi ? Tu y as pensé avant de te mêler à cette affaire ? Et tu n'as pas pensé que tu aurais pu être renvoyée ? Revenir à la maison, tu aurais aimé, n'est-ce pas ? Molly ? Tu n'as pas pensé une seule seconde à ton poste ? C'est important pour toi et pour aller au ministère ! Mais non, Molly Weasley n'en a que faire de son avenir ! Et puis tu as pensé à ma réputation, tout ça aurait pu ruiner ma carrière ! Tu ne reverras pas ce garçon, tu m'entends ? »
Je frémis de colère. Chacun de ses mots me révolte un peu plus que le précédent. Non seulement il ose me parler de sa carrière mais il le fait de manière abjecte. Il fait tout pour me faire réagir, il veut une réaction de ma part, des excuses peut-être, n'importe quoi. Mais je n'ai pas le cœur à m'excuser de quoi que ce soit. Je ne suis pas la principale responsable. Je ne suis que la victime. C'est si injuste.
« Réponds-moi, Molly. Promets-moi de ne plus jamais t'approcher de lui !
– Non, fais-je d'un ton buté. Non, je ne peux pas te promettre ça.
– Qu'est-ce que tu ... ? s'arrête-t-il soudain.
– Tu m'as bien entendue. Ce sont des affaires qui me concernent maintenant, que tu le veuilles ou non. On m'y a mêlé, ce n'est pas de ma faute et je continuerai à essayer de comprendre. »
Il me regarde, stupéfait de ma réponse. J'ai parlé le plus calmement possible, sans baisser les yeux, avec détermination. Il secoue la tête.
« C'est hors de question ! Je t'interdis de faire ça. Tu n'as pas intérêt à me désobéir. Si tu le fais, Molly Weasley, il y aura des représailles terribles.
– Parce que tu crois que c'est ce qui m'importe le plus ? Je n'en ai rien à faire de ta réputation, ni de la mienne. Tu ne comprends pas. Tu ne vois pas ce qu'il y a derrière, de bien plus important.
– Tu vas me dire que tu l'aimes et que tu ne peux quitter l'amour de ta vie ? grogne-t-il avec mépris.
– Surtout pas, réponds-je avec une rage profonde. Je te parle de l'amour de ta vie, à toi, que tu aimais et que tu as quitté en arrêtant de chercher. »
Le temps semble suspendu. Il me regarde fixement, soudainement beaucoup moins agité, comme s'il en était abasourdi. Il ne devait pas s'attendre à ça. J'ose en remettre un coup, avec froideur.
« Je n'ai pas l'intention de laisser tomber comme tu l'as fait. Crois-moi, s'il faut que je me mêle à cette affaire pour avancer alors je n'hésiterai pas. Tu peux essayer de m'en empêcher, tu peux toujours, mais, Percy Weasley, tu risques de le regretter. »
Je prends une grande inspiration et tourne les talons. Percy ne semble pas être en état de réagir. Lysander, témoin de la scène, me regarde passer devant lui, dans un silence glacial. Je ne me retourne pas, je ne veux surtout pas lui donner cet espoir. Il a voulu m'humilier. Il n'aura pas ce qu'il veut.
Je reste longtemps, toujours au même endroit, au bord du lac. A pleurer de colère, à arracher des touffes d'herbes pour laisser sortir ma rage. J'ai comme mal partout, je n'arrive pas à respirer correctement. J'ai de la colère dans la tête, une sourde et noire colère, aveuglante, un fond d'humiliation, une profonde tristesse, une déchirure. On m'écarte du jeu, on me crie dessus, on me rend plus coupable que je ne le suis, on ne m'a pas laissé m'expliquer. Réduite au silence, il faut bien que ça sorte.
Le vent sèche mes larmes. Je me lève. Il ne me reste qu'une terrible envie de ne pas me laisser faire. Je ne vais pas laisser mon père dicter ma vie. Il faut que je voie Scott, qu'il me dise comment il va faire maintenant, ce qu'ils ont prévu, ce qu'il a révélé. Percy devrait partir avant le dîner. Qu'il parte et qu'il le fasse en regrettant tout ce qu'il m'a dit.
Les yeux brûlants de colère, je marche d'un pas vif. Scott, il faut que je trouve Scott. Je n'ai jamais autant voulu le voir. Je ne sais pas où il est mais je jure que je vais le trouver. Je parcours tout le château, du bureau de McGonagall, à la salle commune des Poufsouffle, je ne m'arrête pas, je traverse des couloirs vides, j'évite les pièges de Peeves et enfin, j'aperçois sa silhouette non loin de la cour de Métamorphose. C'est à peine si je ne me jette pas sur lui. Il sursaute.
« Molly ! Tu ne devrais pas être là...
– Je suis où je veux. Raconte-moi, ça s'est passé comment, avec McGonagall ? Tu vas pouvoir jouer les agents double ? Elle va pouvoir te protéger ? Dis-moi !
– Je n'ai rien le droit de te dire, Molly, ton père a été très clair. Si je veux pouvoir rester à Poudlard, on doit arrêter de se voir.
– Je ne peux pas rester en dehors de ça, tu le sais bien. J'imagine que tu ne leur as pas parlé précisément de tes missions. Mais elles continuent de me concerner, n'est-ce pas ? Mon père ne serait pas clément s'il l'apprenait malencontreusement.
– Qu'est-ce que tu veux que je te dise ? De toute façon, ton père ne peut que me détester ...
– Crois-moi, ça, je l'avais bien vu.
– On a entendu votre dispute avec McGonagall. »
Il me regarde en soupirant, visiblement tiraillé. Il ne sait pas comment me gérer, personne ne le sait, je suis incontrôlable. Il finit par me prendre le bras, pour m'entraîner plus à l'écart, là où personne ne pourrait ni nous voir, ni nous entendre.
« D'accord, je sais que tu penses qu'il y a un lien entre les Salvateurs et ta mère. Je ne peux pas te dire le contraire mais je n'ai pas plus d'information que ça.
– Et ils te protégeront, alors ? demandé-je le cœur battant.
– Ton père était très mitigé, il n'avait pas vraiment envie que je reste à Poudlard. McGonagall a eu du mal à le convaincre que je puisse être utile. Mais finalement, oui, je dois les informer de tout ce que j'apprends. J'ai la formelle interdiction de prendre le moindre risque, je dois paraître normal à leurs yeux.
– Alors tu devrais continuer ta mission. »
Il fronce les sourcils en regardant tout autour de nous. Il n'a pas l'air convaincu par mon idée.
« Continuer à sortir avec toi ? Ton père ...
– Mon père est un idiot. »
Il soupire. Il a l'air de penser que je ne peux pas lui demander ça, que ça nous mettrait en danger tous les deux. Mais au fond, il en a envie, je le sais. Et il sait que je ne peux pas m'arrêter, il ne peut pas me raisonner, c'est trop tard. Et il sait aussi qu'il risque de le regretter, d'en payer le prix fort.
C'est l'heure, Percy va partir, je suis postée dans un coin du Hall. Ils devraient tous arriver bientôt. Scott, Percy, tout le reste de la famille. Tous prêts pour un ultime feu d'artifice.
« Je te cherche depuis tout à l'heure, fait une voix à côté de moi.
– Je n'ai pas le temps, Lysander, dis-je sèchement.
– Je ne sais pas ce que tu vas faire, Molly, mais c'est certainement une mauvaise idée. Tu n'es pas en état de réfléchir correctement. »
Je le foudroie du regard. Il a l'air particulièrement sérieux, les bras croisés, le menton relevé. Je hausse les épaules.
« Laisse-moi faire ce que je veux. Tu vois bien que je suis d'une humeur massacrante, pour ton propre bien, laisse-moi tranquille.
– Et pour ton propre bien à toi, tu devrais m'écouter. »
Lasse, je lève les yeux au ciel. Et je le laisse parler, pour m'occuper en attendant que tout le monde arrive.
« Ton père était complètement bouleversé. Et tu es au moins autant bouleversée que lui. Quoi que tu fasses, tu ne penses pas que tu le regretteras ? Tu ferais mieux de ne pas chercher plus la confrontation. Ton père s'en veut beaucoup, tu ne ferais qu'empirer les choses. Ce n'est pas raisonnable.
– Je n'ai pas envie d'être raisonnable, là. Je te remercie d'essayer de me protéger de moi-même mais tu as bien entendu ce qu'il m'a dit, n'est-ce pas ? Je ne peux pas laisser passer ça. »
Tant pis si, à la fin, il ne reste que des cendres, au moins, j'aurais laissé sortir cette rage de moi. Lysander secoue la tête, convaincu du contraire.
Soudain, entre dans mon champ de vision Percy, accompagné de Lucy au regard sombre, de Roxanne à l'air embarrassé, de Rose à la lèvre mordue, de tous les autres qui affichent une mine déconfite. La nouvelle s'est propagée. Je me redresse, sentant en moi la terrible envie de trouver du plaisir dans sa souffrance. Ses lunettes toujours basses sur son nez se tournent vers moi, me remarquent. Je laisse apparaître un sourire mauvais. Scott devrait arriver d'une minute à l'autre. Qu'il fasse vite, que je puisse libérer mes pulsions. Roxanne fait quelques pas dans ma direction, espérant certainement, elle aussi, me raisonner. Mais c'est trop tard, Scott est là et je traverse le hall pour le rejoindre, sous les regards angoissés de ma famille, sous les yeux déçus et blessés de mon père.
Je l'enlace, passant une main dans ses cheveux bruns, en appréciant la douceur, et je l'embrasse passionnément. Sans doute est-ce la première fois que j'y mets autant de cœur. Scott, entre deux états, perdu, hésite. Sa raison voudrait me repousser, s'enfuir loin des problèmes que je lui crée. Son cœur n'y arrive pas. Il pose ses mains sur ma taille. C'en est trop pour mon père. J'entends son pas énervé s'approcher. Je ne me détache pas de Scott, surtout pas.
Des mains fermes nous séparent. Lysander et Roxanne me retiennent, ils tentent de m'écarter alors que Percy ne s'intéresse pas à moi, qui lui lance des éclairs avec mes yeux en me débattant. Il préfère attraper Scott par le col et le soulève avec violence. Il crie qu'il ne veut plus jamais qu'il me touche. Je hurle à mon tour qu'il doit nous laisser vivre. James me cloue le bec d'un coup de baguette. Lucy, en larmes, s'accroche à Papa pour qu'il lâche Scott.
« Je suis désolé, Monsieur Weasley, je ... Votre fille a ...
– Tu n'as pas dû bien comprendre, mon garçon, ne rejette pas la faute sur ma fille. Tu es en train de lui faire du mal. Ne l'approche plus jamais.
– Monsieur Weasley ! Que se passe-t-il ? »
Madame Ross, professeur de défense contre les forces du mal, intervient, écartant le petit attroupement qui s'était formé autour de nous. Percy semble se rendre compte de ce qu'il était en train de faire. Il lâche Scott, le laissant enfin respirer. Madame Ross s'approche du Poufsouffle et pose une main sur son épaule. Elle met de la distance entre mon père et lui.
« Vous ne pouvez pas agresser des élèves, Monsieur Weasley, reprenez-vous.
– Ça pourrait nuire à ta réputation, lâché-je d'une voix forte et provocatrice.
– Ce n'est pas la peine de croire que tu pourras le retrouver dès que je serai parti, Molly. Je pense que Scott a mieux compris que toi. »
Il recule de quelques pas, adressant un regard noir à Scott qui me regarde en secouant la tête, me suppliant de cesser. J'ai la gorge serrée, autant que mes bras retenus par mes deux amis. Je lance à Percy un regard plein de défi. Il soupire avec fureur et frustration. Tout semble tendu au maximum et pourrait bien lâcher si quelqu'un le décidait. Mais Roxanne me glisse à l'oreille, tout doucement :
« N'empire pas plus la situation, Molly, il va partir.
– Elle a raison, ajoute Lysander. Viens, tu as besoin de te calmer. »
Je ne sais plus de quoi j'ai besoin. Je me suis perdue dans les méandres de ma colère. Ils me font reculer, pas à pas, alors que Percy a tout l'air de faire de son mieux pour se contenir.
« Tu ne pourras pas m'empêcher de faire ce que je veux de ma vie. Ce n'est pas la tienne, tu sembles l'oublier parfois. C'est bon, lâchez-moi, ajouté-je à l'intention de Roxanne et Lysander. Je n'ai plus rien à faire là, de toute manière. »
Ils me laissent partir. J'adresse un dernier regard sombre à Percy et m'en vais sans me retourner. Ils restent tous bouche-bée. Je peux entendre d'ici les sanglots de Lucy, les pensées emplies de remords de Papa, les doutes de Scott. Je continue à marcher pour ne plus les entendre. Ne plus jamais entendre le désespoir.
***
Bon, j'ai pas voulu vous séparer ce gros morceau en plusieurs parties, c'est pourquoi ça vous fait un plus gros chapitre que d'habitude. J'espère qu'il vous aura plu tout de même, n'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez, comme toujours ^^
Merci pour votre lecture !
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