Chapitre 13


Sam Green et Eva Potter s'étaient trouvées comme on rencontre sa meilleure amie pour la vie. Le hasard des choses les avait poussées à collaborer et elles étaient depuis inséparables.

Oui. En deux semaines et trois jours.

Qu'est-ce que c'est foutrement beau l'amitié.

Ce soir était un soir comme je n'en avais jamais vu à New York. D'habitude, j'aurais squatté le canapé du salon avec Keira et nous aurions passé plus d'une heure à zapper avant de tomber sur notre sujet de discussion préféré : « les chaussettes et leur double maléfique. ». En ce fameux samedi vingt septembre, Keira et moi étions à quelques centaines de kilomètres l'une de l'autre et en bas, ma mère parlait gaiement de l'intérêt de la fourrure sur les tabourets pour faire sentir à son fessier qu'on l'aime. Des trucs de designer, visiblement. Des trucs qu'Eva Potter, la mère de Seth Potter (est-ce que comme ça, c'est vraiment clair ?), comprenait presque aussi bien que Keira saisissait la subtilité de mes arguments.

Leurs rires montèrent jusqu'à ma chambre. Agacée, je me frottai les yeux, grognai et essayai de reporter mon attention sur l'écran de mon ordinateur. Norah m'avait épargnée le courrier des lecteurs, considérant que je pourrais provoquer un incident diplomatique, Holly affirmait que c'était sa manière à elle de me remercier d'avoir récupérer Seth pour le devoir de littérature. Dans les deux cas, j'avais du mal à décider si je devais bien le prendre.

Surtout que mon merveilleux voisin avait raconté à tous nos clients que nous allions jouer une scène ensemble et, lorsque nous fermâmes le café, une vieille dame me fit promettre de la lui jouer en avant-première. Encore un peu et la célébrité locale qu'était Seth allait nous amener tout droit sur les plateaux télé de Blueberry's Harbour.

Toujours était-il que Norah m'avait épargné les courriers des lecteurs pour me charger de réfléchir au prochain article. Et c'était ici que je m'arrêtais pour signaler que Josiane et moi étions toujours plus efficace lorsque nous prenions le temps de déposer nos royales arrière-trains dans un canapé.

Sad story, ma mère avait été plus maligne que moi pour obtenir le sofa et m'envoyer dans ma chambre.

Et comment m'avait-elle appâtée ? Avec une pizza. J'étais vraiment une proie facile. Et puis, ce n'était pas comme si Pamplemousse avait eu pitié de moi et était monté me rejoindre. Oui, il m'avait rejoint dans ma chambre, avait délicieusement ronronné contre ma jambe, s'était blotti dans mes chansons et dans la minute qui suivait, il ronflait comme un pachyderme. Même mon chat m'abandonnait.

Bref. Concentre-toi, Carly. Un article. Avec un thème intéressant. Un thème drôle et touchant à la fois. Un thème qui me parlait. Quelque chose comme : « Comment se débarrasser de son voisin pour éviter un devoir de littérature ? » ou « Comment prendre des cours de théâtre sans entrer dans le club de votre lycée. ». Et pourquoi pas : « Je veux rentrer à New-York, habiter chez Keira et retrouver ma mère. »

Tout à coup, j'eus le cœur lourd. Ce n'était pas comme si j'étais malheureuse. Je ne l'étais pas du tout, même. Mais je me sentais vraiment seule, parfois. Si Nora et Holly étaient chaleureuses et pleins de belles surprises, ça en faisait pas si longtemps que je les connaissais et l'absence de Keira était parfois envahissante.

« Mon Pampy, les choses sont vraiment compliquées... murmurai-je en poussant un soupir. »

Evidemment, mon chat ne me répondit pas. Etonnant ? Pas du tout. Nouveau soupir, regard dramatique vers la fenêtre, comme dans les films. Être une dramaqueen dans tout son art. Il ne me manquait plus que la musique et je devenais la prochaine Julia Roberts.

Mon portable s'agita soudain sur la table, vibrant plus fort qu'à son habitude. Quand je vis s'afficher le nom de l'envoyeur, je ne pus m'empêcher de lever les yeux au ciel. Ce n'était pas Keira, elle travaillait encore. Ce n'était pas non plus Nora ou Holly qui devaient être en train de manger à cette heure-là. Je jetai un rapide regard à travers ma fenêtre. De l'autre côté de la rue, au chaud dans sa chambre, son téléphone en main, Seth me souriait. J'attrapai mon téléphone et ouvrait son message.

Seth. : Alors, honey... Les mamans s'amusent bien ?

Carly. : Elles sont insupportables... Je dois descendre toutes les cinq minutes pour leur demander de se calmer. J'arrive même pas à plancher en paix...

Seth. : Parce que tu vas me faire croire que tu bosses ?

Carly. : Et ouais, ça m'arrive.

Seth ne répondit pas et je retournai à mon fichier de traitement de texte. Allez, ça ne devait pas être aussi compliqué de trouver un thème ? Mon téléphone se manifesta une nouvelle fois. Autre regard. Seth, toujours vivant, toujours dans sa chambre, toujours aussi agaçant.

Seth. : Qu'est-ce que la vie ?

Carly. : Un vrai bonheur quand tu n'es pas là.

Seth. : Tu dis ça parce qu'au test Pottermore, ton patronus était un putois.

Carly. : Si tu continues à me faire chier, je dis à ta mère que tu fabriques des boules puantes en chimie.

Seth. : Tu crois que tu me fais peur ?

Carly. : Je devrais, Chaton.

Je ponctuai ce message d'un smiley chat. J'étais étrangement fière de ma répartie et j'octroyais déjà à Josiane une petite tape dans le dos pour cette pique joliment placée. De l'autre côté de la rue, Seth leva son majeur à mon attention. Je retenais un éclat de rire, ça lui aurait fait trop plaisir.

Seth. : Ouvre ta fenêtre, saleté. Il me reste encore une boule puante.

Carly. : As-tu pensé, ne serait-ce qu'une seule seconde qu'il y avait marqué pigeon sur mon front ?

Seth. : C'est écrit en lettre capitale et en gras.

Carly. : C'est bien ce que je me disais, tu me prends pour une conne.

Seth. : Mais non.

Je décidai d'ignorer ce message et de me concentrer à nouveau sur un thème. Pourtant tout ce qui me venait à l'esprit résidait en quelques mots : « voisin » et « profondément agaçant ». Encore un peu et je me décidais à écrire un article sur la manière dont on pouvait disparaitre un corps sans que personne ne s'en rende compte. Mon téléphone vibra une nouvelle fois.

Seth. : On se voit quand pour bosser la littérature ? J'ai pleins d'idées pour la pratique... Si tu vois ce que je veux dire.

Carly. : Eurk. Pervers.

Seth. : Je n'ai jamais parlé de ce genre d'activité...

Derrière sa fenêtre, Seth m'offrait un sourire affreusement moqueur. Il m'adressa un clin d'œil et me répondit.

Seth. : Mais ça peut se discuter.

Carly. : Eurk. Non.

Et comme pour lui faire comprendre que je ne voulais pas en entendre plus de sa part, je fermai mes rideaux d'un coup sec. Ce qui ne découragea pas pour autant mon voisin qui fit sonner six ou sept fois mon téléphone avant que je ne daigne lui répondre.

Alors que j'abandonnais définitivement l'idée d'écrire un article ce soir, Seth m'envoya un dernier message.

Seth. : Tu verras bien.

OooO

C'était une après-midi particulièrement agréable. Si le ciel était parfois légèrement couvert, la température était tout à fait propice à jouir d'un moment à l'extérieur.

Comme je ne travaillais pas, Nora et Holly m'avait proposé de faire un tour sur le port et de nous asseoir sur l'une des petites pelouses. La directrice de notre club me décrivait les dynamiques amoureuses de la classe en insistant particulièrement sur les histoires liées à Seth. Holly, elle, roulait des yeux dès qu'elle trouvait que son amie en faisait trop. Quant à moi, je l'écoutais religieusement, m'indignant de temps sur le comportement de Seth pour faire plaisir à Nora quand je ne m'exclamai « oh ! » pour marquer mon étonnement quand à certaines histoires.

« Et Elena ? demandai-je, curieuse. Elle voulait vraiment être avec Seth pour le devoir de Finnigan. »

Nora fit la moue et Holly regarda ailleurs.

« Ne m'en parle pas... soupira la directrice du club de journalisme. Elena est pire qu'une bactérie. En plus d'être de plus en plus résistante, elle s'aggrave avec le temps.

- J'ai entendu dire qu'elle avait coincé Juliet au toilette la semaine dernière, souffla Holly comme si elle n'avait pas l'habitude de jaser sur le dos des autres. Je ne sais pas ce qu'elles se sont dit mais Juliet est ressortie toute retournée.

- Comment ça ? insistais-je.

- Elena et Seth ont eu une histoire, expliqua Nora assez sèchement. Pour Seth, c'était très sérieux.

- Pas pour Elena ? relevai-je.

- Non, répondit Holly. »

Nora passa une mèche de ses cheveux derrière ses oreilles.

« Elena voulait juste rendre un autre garçon jaloux, ajouta-t-elle.

- Qui ?

- Leith. »

J'émis un « ah » silencieux, hochant la tête. Maintenant que j'y pensais, quand Seth et Leith étaient de service, ils ne se parlaient pas beaucoup. En y repensant, j'avais même le sentiment qu'ils s'évitaient. Est-ce que c'était à cause de cette Elena ?

« Et toi, tu aimais Seth ? demandai-je, regrettant immédiatement cette question quand je vis Holly s'affoler à côté de moi et Nora écarquiller les yeux d'horreur. Enfin... Je veux dire... bah... du coup... non parce que vous avez l'air très fâchés et... enfin...

- On était amis, me coupa Nora. De très bons amis. Et puis il a fallu choisir entre Elena et moi.

- Et il a choisi Elena, complétai-je. »

Je me sentis bête d'avoir demandé. Mais ça expliquait déjà un peu plus les choses. Je pouvais comprendre Nora, quelque part. Aurais-je pardonné à Keira de préférer un garçon qui lui voulait du mal à moi ? Non, certainement pas. Mais aurais-je été aussi rancunière ?

« Mais il n'est plus avec elle ? ajoutai-je. Pourquoi ne pas avoir recollé les morceaux.

- C'est vrai ça, souligna Holly toute bienveillante.

- Je sais pas moi ! se défendit Nora. J'ai pas envie. Je veux pas faire l'effort quand il a tout ruiné tout seul comme un grand. Je suis gentille mais ça va cinq minutes. »

J'allais répliquer que ce n'étaient pas vraiment un argument quand Nora s'interrompit et jeta un regard par-dessus l'épaule d'Holly. Curieuse, je me retournai pour voir ce que mon amie regardait. Sur son vélo, ses boucles blondes au vent, Leith pédalait à toute vitesse vers nous. Si je m'étais vue, je me serais probablement frappée. Je souriais niaisement, bizarrement heureuse de le voir tout à coup surgir de nulle part.

« Eh ! Carly ! s'exclama-t-il. »

Il s'arrêta brusquement à notre hauteur et posa un pied à terre.

« Tu ne travailles pas aujourd'hui ? enchaîna-t-il.

- Non, comme tu peux le voir, répondis-je en désignant Nora et Holly d'un signe de la main. »

Leith leur jeta un rapide regard avant de replonger ses magnifiques prunelles dans les miennes. Encore un peu et j'en rougissais. Le soleil d'automne caressait à merveille le moindre de ses attraits. On aurait dit un dieu.

« C'est pas juste... marmonna-t-il. J'avais bien envie de passer un peu de temps avec toi... ça a été une journée pénible.

- Et tu espérais que j'en rajouterai une couche ? me moquai-je.

- Non, je pensais que tu serais gentille et souriante, comme d'habitude. »

Les mecs de cette ville allaient me rendre folle. Entre Seth qui me faisait des avances vraiment spéciales et Leith qui remarquait que j'étais souriante, Josiane ne savait plus du tout où mettre de la tête.

« T'es con, me défendis-je en sentant le rouge me monter au joue. On se voit demain, de toute façon.

- Oui, la réunion.

- C'est ça. »

Leith hocha la tête, souriant.

« Bon, je vais vous laisser, je dois filer ! s'exclama-t-il après avoir jeté un petit coup d'œil à la route. A plus, Carly ! »

Il me salua d'un petit signe de la main et se prépara à enfourcher son vélo.

« Salut, les filles. »

Et il fila net alors que je me rappelais la présence de mes deux amies.

« Déso... voulus-je dire avant de constater l'expression fermée de Nora. Tout va bien ? »

Holly haussa les épaules. Elle jeta un regard inquiet à Nora qui leva les yeux au ciel et arracha mécaniquement une touffe d'herbe.

« Oui, ça va, glapit-elle sèchement. »

Elle secoua la tête, se força à sourire et se redressa. Son petit visage rond s'était brusquement éteint et mon amie n'avait pas l'air dans son assiette. Holly n'osa pas prendre la parole et me chercha du regard. Comme elle, j'haussais les épaules.

« Tu travailles avec Leith Thorne, souffla la présidente du club de journalisme. C'est un chic type, mais il est un peu prétentieux, n'est-ce pas ?

- Je ne trouve pas, répondis-je, légèrement sur mes gardes. Il a toujours été très gentil avec moi.

- Forcément, soupira Nora, tristement.

- Il y a un problème, insistai-je, prenant Holly de court. »

Nora arracha une nouvelle touffe d'herbe à ses pieds et regarda au-dessus de mon épaule.

« Non, tout va bien, répondit-elle. »

Et comme pour chasser ce drôle de moment, elle reprit en souriant bizarrement :

« On disait quoi, déjà ? »

OooO

Keira resta silencieuse, se concentrant probablement sur ce que je venais de dire.

« Et tu n'as pas insisté ? éructa-t-elle à l'autre bout du fil.

- Non ! Je me suis sentie mal à l'aise, mais euh...

- Enfin, Carly, tu es un peu con quand même... »

Je roulais des yeux, grommelant quelque chose dans ma barbe. Keira avait raison. J'avais manqué de tact avec Nora une première fois en lui posant la question sur Seth. Et après Leith, eh bien... Eh bien, j'ai bien senti qu'elle m'en voulait un peu.

« Mais je ne comprends pas... marmonnai-je. Leith et Nora ne se connaissent pas !

- Et avec sa réaction, tu ne t'es pas demandée si ce n'était pas le cas ?

- J'en sais rien moi ! C'est une petite ville Blueberry's Harbour. Et je viens d'arriver. On ne peut pas attendre de moi que je sache tout sur tout. Et puis, en plus, je n'y peux rien si... »

Je m'étais brusquement arrêtée de parler, songeant bêtement à ce que j'allais dire. Aussi tôt ? Ce n'était pas possible. J'étais juste un peu perdue et je me raccrochais à l'idée d'un visage sympathique et d'une attitude plaisante. Si ça se trouve, je n'étais rien pour lui. Pas plus qu'une collègue souriante. Mais à quelle collègue disait-on qu'elle était souriante ? Pouvions-nous dire qu'on s'entendait bien ? Que ça pourrait aller plus loin ?

« Si quoi ? insista Keira. »

Et puis Nora avait raison, ce n'était pas comme si je le connaissais vraiment. Et en même temps, avec lui, je me sentais vraiment bien. Ce n'était pas comme Seth qui passait son temps à me faire rougir parce que ça le fait rire de me voir bredouille. Non. Il était vraiment gentil. Et doux. Et à l'écoute. Je n'avais jamais autant parlé à un garçon avant lui. Je lui faisais vraiment confiance. Et ça, c'était beaucoup. Même Josiane pouvait l'affirmait. Et puis, même s'il avait blessé Nora, je n'étais pas au courant de l'histoire. De toute façon, Nora avait l'air de s'être disputée avec tous les garçons des environs. Seth était un peu embêtant, mais pas si méchant. Alors, lui ? Différent de l'image que j'en avais ? C'était dur à croire.

« Carly ! »

Je sursautais malgré moi.

« Hm ? Quoi ?

- Eh ben, qu'est-ce tu disais ? »

Je me disais simplement que je n'y pouvais rien si j'aimais bien Leith.

Et puis, tout à coup, ça m'a frappée.

J'étais l'héroïne d'un roman à l'eau de rose et ça craignait. Mais genre, vraiment.

Hey !

Oui, j'ai oublié le chapitre du lundi 31 octobre... Je suis désoooolée ! J'ai encore quelques chapitres d'avances au chaud et j'essayerai de poster vendredi, du coup. 

Qu'avez-vous pensé de ce onzième chapitre ? De l'échange SMS entre Carly et Seth ? De ce qui va se passer chez Monsieur Finnigan ? J'attends vos retour avec impatience ! :D

On a bientôt dépasser les 600 lectures. J'étais super contente en voyant ça ! Même si la fiction n'est pas hyper connue, même si vous êtes parfois des lecteurs fantômes, je suis heureuse de vous retrouver d'un chapitre à l'autre. Je suis contente que vous soyez là, contente de voir que vous appréciez toujours autant Carly, Seth et toute la patrie !

Alors, si vous vous sentez tout frais, n'hésitez pas à voter, partager et laisser un petit commentaire, ça me fera super plaisir ! 

Pampy et moi, on vous claque la bise !

E.

NB d'update : quelques petites modifications que les anciens remarqueront sûrement ! :D J'espère qu'elles vous plairont, en tout cas, je m'amuse toujours autant ! ;)

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top