Pouvoir et vengeance

Je parcourai la rue, suivant la femme de près. Elle m'avait promis de tout m'expliquer dans un endroit sûr, mais j'ignorais où elle comptait m'emmener. Pour elle, tout semblait normal. Elle venait de m'annoncer qu'en fait, j'étais poursuivi par un monstre qui en engageait d'autres pour me tuer, et elle, elle m'emmenait en balade dans les rues de la ville.

Tout à coup, elle entra dans une boutique. Je la suivis. Je pensais que comme dans les films, le magasin de vêtements n'était qu'une couverture pour une base secrète et qu'on allait passer par un passage secret pour y aller. Mais non, la femme ne fit que regarder les vêtements.

Elle me montra une veste de cuir rouge et me demanda :

— Tu penses que ça m'irait ?

Non mais elle se fichait de moi là ! Elle m'avait trimbalé dans les rues de toute la ville pour entrer dans un magasin et me montrer une veste ?!

— A quoi vous jouez ?

La femme ne parut pas surprise de ma question. Elle se contenta de remettre la veste et de fouiller à nouveau, faisant glisser les cintres. Je réitérai ma demande :

— A quoi ça rime tout ça ?

La femme changea de présentoir et me dit en continuant de fouiller :

— Ne parle pas trop fort.

Là c'était la goutte d'eau qui faisait déborder le vase, elle osait me dire de me taire ?!

— C'est une blague j'espère ?!

La femme prit un pull over et le plaça devant moi, pour en vérifier la taille.

— Je te préviens t'as pas intérêt à t'affoler.

— M'affoler de quoi ?

— On nous suit.

Je déglutit, qui pouvait bien nous suivre ? Et pourquoi ?

— Un monstre ? dis-je tout bas.

Elle reposa le pull et en prit un autre.

— Je ne pense pas. Ou alors il sait très bien dissimuler son apparence.

— Qui alors ?

— Je ne sais pas, mais il vaudrait mieux qu'on le sème.

Elle déposa à nouveau le pull, me prit par le bras et me tira hors du magasin.

— Je peux marcher tout seul !

— Marcher je n'en doute pas, voler par contre, ça reste à voir.

— Pardon ? Voler ?

Ok, deux solutions, soit cette femme était totalement folle, soit j'avais mal entendu.

— Oui voler. dit elle en me tirant vers une ruelle.

Ok, donc elle était folle.

— Écoutez je pense que je vais devoir y aller, je dois...

Je n'eus pas le temps de terminer ma phrase qu'elle me mit sa main sur ma bouche et me dit :

— Silence.

La femme ferma les yeux et se concentra. Tout à coup, des ailes semblables à celles des chauves-souris lui poussèrent dans le dos. Elle était maintenant pourvue d'immenses ailes. Je n'eus pas le temps de crier qu'elle les battit un coup et mes pieds quittèrent le sol.

Lorsque je rouvris les yeux, j'étais au sommet d'un immeuble. Je cherchais la femme des yeux, elle était penchée sur le bord du toit et semblait observer quelque chose au sol. Elle me fit signe d'approcher. Je m'exécutai. Arrivé près du muret, elle me demanda :

— Tu le connais ?

Je baissai la tête et vit un homme qui semblait chercher quelque chose. Ou quelqu'un...

— Non... C'est lui qui nous suivait ?

La femme hocha la tête, se redressa et marcha au centre du toit.

— Étrange...

Je m'approchai d'elle.

— Et sinon ça vous arrive souvent les... dis-je en montrant du doigt son dos, là où se trouvait il y a à peine deux minutes des ailes immenses.

— Chut, je réfléchis.

Bon, décidément, elle était pas très bavarde...

— Et vous savez qui était cet homme ?

— Bien sûr que non ! Sinon, je ne serais pas en train de réfléchir.

— Et à quoi vous réfléchissez ?

— À comment te tuer.

Je reculai. C'est pas vrai, elle aussi voulait ma mort ?! Je pensais pourtant qu'elle voulait m'aider ! Je tournai la tête et cherchai après les éventuelles issues. Deux options s'offraient à moi, sauter du toit et me briser les os du corps ou combattre la femme. Je regardai l'autre immeuble et essayai de mesurer mentalement la distance qui séparait celui-ci du bâtiment où je me trouvais.

— Ne fais pas l'idiot, dit la femme, tu te briserais tous les os du corps. Certes, ça me faciliterait la tâche mais ça serait plus douloureux pour toi.

— Pourquoi voulez-vous me tuer vous aussi ? Vous êtes à ses ordres aussi ?

— Qu'est-ce que tu racontes ? Non mais je... rhooo tu n'as rien compris !

— Comment ça je n'ai rien compris, vous avez dit vouloir me tuer ! m'exclamai-je.

— Écoute, les monstres obéissent à une seule et même personne.

— Oui vous l'avez déjà dit ça, mais à qui obéissent-ils ?

— À Hadès, le seigneur des Enfers.

Je marquai une pause et réfléchis.

— Attendez, je connais ce nom, Hadès... mais cette histoire sort tout droit d'un mythe !

La femme eut une expression de dégoût.

— S'il te plaît ne prononce pas ce mot.

— Vous voulez dire que...

— Hé bien, deux éclairs d'ingéniosités dans la même journée, tu te surpasses !

— La mythologie existe ?!

— Enchantée, Némésis pour te servir.

Je m'assis sur le sol. Incroyable, mes connaissances en mythologie étaient très limitées, mais j'en savais suffisamment pour savoir que ces histoires inventées de toutes pièces étaient utilisées pour expliquer des phénomènes inexpliqués aux temps anciens. Alors imaginer une seule seconde que tout cela était réel...

— Bon gamin, on n'a pas toute la journée non plus !

— Pourquoi, où devons-nous aller ?

— Rho suis un peu ! Tu vas devoir  trouver quelqu'un qui puisse t'assurer un passage vers les Enfers !

— Et vous ne venez pas avec moi ?

— Non.

— Mais pourquoi ?

— Cesse de pleurnicher, tu dois accomplir cela tout seul !

— Mais si vous me laissez seul, je me ferai tuer par les monstres !

— C'est fort probable.

— Vous ne pourriez pas me prêter un peu de votre force ?

— Non.

Je baissai la tête, c'était peine perdue. Je me ferai tuer quoi qu'il se passe.

Soudain, une scène de mon rêve me revint en tête. Maintenant, j'étais sûr que la femme de mon rêve était celle qui était devant moi. Ce qui signifiait que...

Je relevai la tête. La femme me regardai toujours. Je plongea mes yeux dans les siens et dit :

— Je veux me venger.

La femme eut un sourire cynique et répondit :

— Aaaah enfin, depuis le temps que j'attendais ces mots !

Elle se mit à dégager soudain une énergie incroyable, une aura rouge émanait d'elle. Ses ailes noires se déployèrent. Un sentiment de haine m'envahit, de plus en plus fort. Les cheveux de la femme flottaient dans les airs, lui donnant un air de super-héroïne. Tout à coup, elle tendit les bras et une vague d'énergie pourpre m'atteint en plein torse, me faisant basculer du toit.

Je tombai à présent dans le vide, m'attendant à m'écraser sur le sol. Je fermai les yeux, mais rien ne se passa. Lorsque je les rouvris, j'étais à à peine quelques centimètres du sol avec des ailes de chauve-souris qui battaient dans mon dos. J'esquissai un sourire.

Maintenant, j'allais pouvoir me venger.

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