Les envoyés

L'air s'engouffrait dans mes cheveux, je survolais la ville, faisant battre mes ailes noires, fraîchement acquises. Les habitants ne levaient même pas la tête, trop occupés à vivre leur vie banale. Je tournoyai dans les airs et fis un looping avant d'atterrir sur le toit d'un immeuble. Ce sentiment de liberté était époustouflant. Je m'assis sur le bord du toit et contemplai la ville. Tout semblait si minuscule vu d'en haut. Ce pouvoir était une véritable bénédiction. J'observai le ciel au loin et poussa un soupir de plaisir.

— C'est beau n'est-ce pas ? intervint soudain une voix féminine.

Je me retournai en sursautant et fis face à une jeune fille. Cette dernière avait les cheveux bruns attachés en queue de cheval et les yeux verts. Elle aussi observait la ville, un pied sur le rebord du toit. Elle se trouva vers moi et me dit en souriant :

— Moi aussi, j'adore contempler la ville du toit d'un immeuble. On se sentirait presque comme les dieux tout là-haut. dit-elle en montrant le ciel du doigt.

Je fus interloqué par l'emploi du mot « dieu » au pluriel. Oh mais oui ! Elle devait être comme moi ! Elle aussi avait dû recevoir le don d'un dieu ! Alors je n'étais pas seul ! Une vague de soulagement s'empara de moi. Peut-être qu'elle pourrait m'aider à me rendre aux Enfers. Peut-être même pourrait-elle m'aider à vaincre le dieu qui y gouverne ! Mais un doute m'assaillit, et si elle n'était pas celle que je pensais, je me faisais peut-être des idées. Je décidai de rester sur mes gardes et demandai :

— Excuse-moi mais qui es-tu ?

— Oh oui, je manque à tous mes devoirs ! Je me nomme Adicie. répondit-elle toute souriante.

— Et qui es-tu plus précisément ? insistai-je.

— Oh je vois ce que tu veux dire, oui, moi aussi j'ai reçu mon pouvoir d'une déesse grecque !

— Une déesse ? Laquelle ? demandai-je excité.

— Oh je ne me souviens plus trop de son nom, cela fait maintenant très longtemps ! me répondit-elle en faisant des gestes superflus de la main.

— Ah... Combien de temps exactement ?

— Oh depuis des lustres !

— Mais tu parais jeune pourtant !

— Oui, quand on reçoit le pouvoir d'un dieu, on ne vieillit pas de la même manière.

— Cela veut dire que je vais rester adolescents ?

— Oui durant un ou deux cents ans !

— Oh donc tu as ces pouvoirs depuis deux cents ans ?!

— Oh non, je les ai depuis beaucoup plus longtemps !

Je ne comprenais plus rien. On revenait au point de départ : Comme pouvait-elle paraître si jeune après toutes ces années ? Toute cette histoire prenait un drôle de tournant.

Je n'eus pas le temps de réfléchir plus longtemps car un adolescent, qui semblait être du même âge que la fille, approcha.

— Je te présente Dolos. Lui aussi a reçu ses pouvoirs d'un dieu !

À nouveau, quelque chose me frappa, leur nom était grec, ou du moins, semblait l'être.

Je n'y pris pas gare et regardai à nouveau la ville en contrebas. Le dénommé Dolos s'installa à côté de moi et se mit à me parler. Il me raconta que lui aussi avait été traqué par les dieux et que lui aussi avait perdu toute sa famille. Au final, nous semblions beaucoup nous ressembler. Peut-être même un peu trop... Par prudence, je décidai de rester sur mes gardes. Lui au contraire, n'était pas avare en explications ! À chaque question que je posais, il repartait dans une nouvelle histoire, plus longue encore que la précédente.

Je commençai à me méfier lorsqu'il raconta qu'il avait reçu ses pouvoirs d'un dieu et que quelques minutes plus tard, il disait avoir reçu ses pouvoirs d'une déesse. J'eus la vague impression que rien de tout cela n'était vrai.

A peine quelques secondes après que je n'ai commencé à douter, il me montra quelque chose sur le trottoir en bas de l'immeuble sur lequel nous nous trouvions. Je me penchai pour essayer de mieux le distinguer mais peu à peu, je sentis soudain des mains pousser sur mon dos, me faisant tomber d'un coup du toit.

Je faisais une chute libre lorsque tout à coup, mes ailes se déployèrent en première vitesse et battirent avec force vers le toit d'un immeuble, un peu plus loin. Une fois sur le toit, je m'agenouillai.

Je ne comprenais rien à ce qui venait de se passer. Pourquoi est-ce que ces deux adolescents qui étaient comme moi avaient tenté de me tuer ?

Un choc dans mon dos me fis faire une culbute avant. Lorsque je me relevai, les ailes déployées, Dolos et Adicie se tenaient devant moi. Un sourire cynique déformait leur visage. Leurs yeux étaient soudain remplis de haine.

— Pourquoi me faites-vous ça ?! Je suis comme vous !

— Oh non tu n'es pas comme nous ! cria Adicie

— Mais je pensais que vous aviez reçu vos pouvoirs d'un dieu ?!

— Oui, nos pouvoirs nous ont été donné par la nuit et les ténèbres ! Nous sommes des esprits ! Obéissant à Hadès, le seigneur des morts.

— Vous êtes des esprits ?! Mais c'est quoi ?!

Comme pour répondra à sa question, leurs traits se déformèrent soudain. Sur le visage d'Adicie, se trouvaient maintenant des cicatrices et des larmes de sang coulaient sur ses joues, des tatouages se formèrent sur ses bras et son coups. Dolos, au contraire, semblait soudain être plus sérieux et mature. Mais c'est avant qu'il ne se retourne. Au lieu d'avoir des cheveux à l'arrière du crâne comme toutes personnes normales, se tenait maintenant un autre visage, celui-ci déformé par le mépris et la colère. Les deux adolescents, maintenant transformés, semblaient être tout droit sortis d'un film d'horreur.

Ils disaient être des esprits, mais je n'avais aucune idée de ce que c'était ! Ils n'étaient pas des monstres, je ne saurais comment l'expliquer, mais leur « odeur » n'est pas la même.

— Viens ici que je te démembre de mes propres mains ! hurla Adicie en se jetant sur moi.

Je voulus m'envoler pour lui échapper mais celle-ci me saisit la jambe et m'envoya m'écraser contre un mur. Une vive douleur dans mon dos m'arracha un gémissement. Lorsque celle-ci plongea à nouveau vers moi, j'étais trop sonné pour pouvoir esquiver l'attaque.

Mais tout à coup, alors qu'elle prenait son élan, Adicie fut percutée par une chose de plein fouet. Une adolescente avec un bouclier venait de la bousculer et de se placer devant moi.

C'était étrange, car au fond de moi, je ne ressentais que de la méfiance et de la colère envers elle pour une raison que j'ignorais. Comme si nous étions destinés à nous haïr. La jeune fille sortit un petit sac de tissu mauve de derrière son bouclier.

— Toi ! Tu viens de gagner un allez-simple vers les Enfers ! pesta Adicie.

La jeune fille n'y prit pas gare et prit une petite bille dans le sac. Elle la posa sur son bouclier et la propulsa d'un doigt. La bille frôla Adicie mais la manqua de peu.

— Peut-être viser avant de tirer ! dis-je ironiquement.

Elle se retourna avec un sourire et me répondit :

— Pas besoin !

La bille ricocha sur une gouttière puis sur le mur et ensuite le sol pour enfin atterrir entre les deux yeux d'Adicie, le visage figé par la stupeur. Elle s'effondra sur le sol et son corps se transforma en fumée.

J'étais ébahi, cette fille n'avait même pas visé avant de propulser la bille.

Je me relevai avec peine, grimaçant de douleur. La fille saisit une épée qui était placée à l'arrière du bouclier et me la lança.

— Allez, je te laisse tuer le dernier !

Je me tournai vers Dolos, mon esprit était troublé par la douleur. Je m'approchai de lui, pointant mon épée sur sa gorge en me répétant : « Ce n'est pas un humain mais un spectre venu pour te tuer ! ». Lorsque je m'apprêtai à porter le coup létal, il prit la parole. Et sa voix inspirait à la fois la méfiance et la sécurité, comme si on savait que ce qu'il allait dire était faux mais qu'on y croyait quand même.

— Si j'étais toi, je ne ferais pas ça !

Je souris et lui demandai amusé :

— Tiens donc ! Et pourquoi ?

Ses traits se déformèrent, maintenant, il arborait un sourire sadique et me regardait avec un regard malicieux.

— Car si tu fais cela, la dernière personne qui compte pour toi mourra sur le champs !

— Ne l'écoute pas ! Il ment ! me cria la fille derrière moi.

— Elle a raison, je n'ai plus personne !

Il ricana et plongea son regard dans le mien.

— Vraiment ? Même ce cher Bart', le sans-abri qui t'a aidé  ? Il serait vraiment dommage qu'il lui arrive malheur alors qu'il n'a rien fait...

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