Hoseok apparaît dans l'ouverture. Mon regard est aussitôt attiré par sa coupe. Ses cheveux noirs lui arrivent presque aux épaules. Quelques mèches blondes parsèment sa nuque ainsi que sa frange qui est relevée, laissant son front visible. Il paraît si mature et intouchable. Cependant, ce qui est le plus remarquable est son immense sourire. Il rayonne de beauté et de bonne humeur.

— Hello ! s'exclame-t-il en entrant. Je vous dérange pas ?

— Non, lui répond Jimin en se relevant. On a fini pour aujourd'hui de toute façon.

À cette déclaration, Hoseok entre dans la salle, tout joyeux. Je tente de me relever rapidement, mais j'ai quelques courbatures. Je grimace alors qu'une douleur traversent mes mollets. Je me courbe malgré tout devant Hoseok en le saluant. Une de mes mains se calle aussitôt au niveau de mes lombaires.

— Tu nous as cassé le célèbre JK ou quoi ?

— Mais... je suis pas...

Pris au dépourvu, je bafouille en me redressant.

— Pas de ma faute s'il n'est pas aussi endurant que tout le monde le croit.

Mes yeux s'écarquillent à la réplique de Jimin. Je voudrais me défendre, mais j'ai la sensation que quoi que je dise ça ne servira pas en ma faveur. Alors je me contente de lever les yeux au ciel.

— Tu as réussi à dompter cette chorée avant de te retrouver en pièces détachées ? me demande Hoseok, taquin.

Instinctivement, je jette un coup d'œil à Jimin cherchant son avis. Les bras croisés devant lui, il semble réfléchir à la question. Après de trop longues secondes d'hésitation, il hoche la tête.

— Disons qu'elle commence à se laisser apprivoiser.

Hoseok rit en s'avançant. Arrivé à ma hauteur, il me donne une tape amicale sur le bras.

— Avec Jimin comme prof, je ne doute pas que vous ayez fait des merveilles.

Sa bonne humeur et sa confiance en son ami me font sourire.

— T'es con, murmure Jimin, amusé.

— Il est excellent, en effet, approuvé-je, les surprenant tous les deux.

Ils me fixent un instant avant que mon professeur du jour se détourne en marmonnant :

— Vous en racontez des conneries ce soir. Parlons d'autre chose !

Si Hoseok semble toujours autant réjoui, je ne souhaite pas gêner plus Jimin alors je change de conversation en me tournant vers le nouvel arrivant :

— Tu as passé une bonne journée avec ta sœur, hyung ?

À peine mes mots sont sortis que Hoseok perd un peu son sourire et échange un regard avec Jimin. Ça ne dure pas plus de quelques secondes, mais c'est assez pour me prouver leur complicité et leur capacité à dialoguer sans un mot.

— Ça me fait penser, commence Hoseok.

Il se tourne complètement vers moi et se courbe, me faisant ouvrir de grands yeux, choqué.

— Mais... qu'est-ce que...

— Veux-tu bien m'excuser ?

— De... de quoi ? bafouillé-je.

Il se relève et m'explique :

— J'avais promis à Namjoon et à toi par extension que je t'aiderais aujourd'hui, mais à la place, je...

— N'importe quoi, le coupé-je.

Je secoue la tête et entame de petits exercices pour détendre un peu mes muscles.

— Tu as tenu ta promesse.

— Comment ça ? s'étonne-t-il en fronçant les sourcils.

— Tu m'as envoyé un excellent danseur et professeur génial. Si ça, c'est pas de l'aide, je ne sais ce que c'est.

Même de là où je me trouve, les joues rougies de Jimin ne passent pas inaperçues. Je relève les mains au-dessus de ma tête et m'étire, faisant craquer mes épaules au passage.

— Alors cette journée ? insisté-je.

— Génial ! Comme toujours quand je viens à Séoul, ma sœur tente par tous les moyens de me convaincre de revenir vivre ici.

Il échappe un rire en allant s'installer par terre, contre le miroir.

— Et pourquoi tu ne reviens pas ? m'intéressé-je.

— Parce que mon travail est à Busan.

Je fais une petite moue avant de lui faire remarquer :

— Enfin tu pourrais facilement en trouver un autre ici. Je suis sûr que l'agence te proposerait à nouveau d'être l'un de ses chorégraphes.

Le silence qui suit ma déclaration me fait froid dans le dos. J'ai l'impression d'avoir dit une bêtise. Pourtant, je suis sûr que Namjoon m'a dit que l'agence a voulu le recruter et cela malgré le fait qu'il les ait lâchés du jour au lendemain. Selon les rumeurs, il aurait dû faire ses débuts dans le même groupe que Namjoon et Suga. Cependant, ma phrase passe mal. Quand je jette un coup d'œil à Jimin, je remarque qu'il s'est littéralement figé, les yeux posés sur son ami.

— Ils t'ont déjà offert un poste ? le questionne-t-il, sur un ton neutre.

Hoseok hausse les épaules dans une vaine tentative de paraître nonchalant.

— Je... ouais, l'année dernière ou celle d'avant. Je m'en souviens plus, ça ne m'intéressait pas.

— C'est faux, le contre Jimin.

— Je suis désolé, interviens-je. Je ne voulais pas... Je ne pensais pas que... Je veux pas qu'il y ait de problème...

— Ne t'inquiète pas, Jungkook, me rassure Hoseok. Il n'y a pas de problème. Oui, ils m'ont appelé pour me faire une proposition et j'ai refusé en mon âme et conscience.

Il tourne son visage vers son ami et ajoute :

— Et je ne regrette pas !

Jimin secoue la tête. Son regard signifie clairement qu'il n'en a pas fini avec cette histoire. Une sonnerie vient à notre aide en brisant le malaise ambiant. Hoseok se redresse brusquement tel un diablotin sur ressort sortant de sa boîte et se dépêche de sortir son téléphone de son jean. Il nous informe :

— Ah c'est notre grand gaillard !

Je fronce les sourcils à ce surnom alors qu'il décroche, en ayant retrouvé son enthousiasme :

— Coucou Namjoonie !

Il hoche la tête machinalement en écoutant le producteur.

— À la salle de danse, avec les gars.

Il revient vers nous, son téléphone collé à l'oreille et un air taquin sur ses traits fins.

— Ouais, ils viennent de finir... Attends...

Il descend son bras, appuie dessus et reprend :

— C'est bon, on t'entend tous les trois.

Aussitôt la voix de mon ami retentit :

— OK. Je voulais seulement vous proposer de dîner avec nous si ça vous tente.

— C'est toi qui paies ? l'interroge Hoseok.

— Non, le gamin avec toi, affirme Namjoon.

Je souris. Avec toute l'aide qu'ils m'apportent, je peux leur offrir un repas. Je lui réponds alors :

— Avec plaisir.

— Super, je commande dès que je raccroche alors...

— Attends un peu, le modère Hoseok.

— Pourquoi ?

— Ils sentent le bouc, maugrée-t-il en grimaçant.

Hoseok et Namjoon ricanent alors que Jimin lève les yeux au ciel.

— Vous moquez pas ! m'écrié-je, outré par ce manque de respect de mes aînés.

— Je ne me moque pas. C'est pour vous que je dis ça.

— Et puis, si vous vous récurez pas, ajoute Namjoon, vous risquez de couper l'appétit de tout le monde !

— Moi qui suis à côté de vous, commence Hoseok, je peux vous dire qu'il a entièrement raison ! J'ai l'estomac qui se retourne.

— Hey ! m'exclamé-je, outré. N'exagère pas !

Leurs rires reprennent. J'en profite pour me diriger vers mon sac dans lequel je trouve ma gourde. J'en bois une grande rasade pendant que les garçons se mettent d'accord sur la suite. J'ai toujours été un garçon incapable de prendre une décision. La seule que j'ai réellement prise, c'est d'auditionner pour devenir chanteur.

Mon métier d'idol d'une grande agence est parfait pour mon caractère. La direction, le staff, mon manager, les producteurs, les chorégraphes... tous me disent quoi faire et même parfois quoi penser. À quel moment manger, dormir, faire du sport, appeler ma famille... Et la plupart du temps, ça me convient. Ça me donne une structure que je n'arrive pas à m'imposer tout seul.

Alors quand Hoseok m'explique que Namjoon s'occupe de commander une tonne de poulet frit pendant que Jimin et moi prenons une douche bien méritée, je suis satisfait. Nous ne tardons pas à rejoindre les vestiaires. Je tente par tous les moyens de ne pas penser au fait que Jimin se trouve dans la cabine à côté de la mienne. Nu. Dégoulinant d'eau. À la place, je repense à la journée que je viens de vivre durant laquelle j'ai très vite oublié mon admiration pour lui et seulement apprécié ses conseils et sa bienveillance. Ma maîtrise de la danse n'est pas encore parfaite, mais je suis ravi du travail effectué.

— Tu dors ici ? me questionne Hoseok de l'autre côté de la paroi de la douche.

Je réalise que j'ai un peu trop rêvassé. En me rinçant, je bredouille alors :

— Euh... non, non, j'arrive... J'arrive tout de suite.

J'éteins sans attendre l'eau et m'essuie rapidement. Après avoir enfilé des vêtements propres, je retrouve le brun dans la salle de danse. Assis par terre, il tapote sur son téléphone, un sourire en coin. Quand il m'entend, il relève la tête vers moi et me taquine :

— Je croyais que dans cette grande machine à broyer qu'est l'industrie musicale, on vous apprenait que le temps c'est de l'argent...

Je lève juste les yeux au ciel, bien qu'il n'ait pas tort. Au contraire, les employés de l'agence me l'ont tellement répété que je ne peux pas l'oublier.

— Je ne t'imaginais pas si lent... Ou alors tu te faisais plaisir...

— Hyung ! m'écrié-je, gêné.

Il se contente de rire en se levant.

— De quoi vous parlez ? intervient Jimin depuis la porte de la salle.

À plusieurs reprises, je passe mon regard de Jimin à la porte qui mène aux douches. Qu'est-ce qu'il fait dehors ?

— Du fait que Jungkook se fasse plaisir sous la douche !

Mes yeux s'écarquillent de honte.

— Mais  ?

Jimin, lui, se retient de rire et je crois que c'est encore pire que s'il avait laissé libre cours à son hilarité. Après que Hoseok m'a fait signe de le suivre, nous quittons la salle.

— Namjoon m'avait dit que tu étais du genre pudique voire innocent, reprend Hoseok en arrivant au bout du couloir.

Tout en appuyant sur le bouton pour appeler l'ascenseur, je fronce les sourcils à l'écoute de ses mots. Nam et lui ont parlé de moi ? Quand et surtout pourquoi ? Et je ne suis pas sûr que beaucoup qu'ils le fassent et encore moins qu'ils pensent que je suis innocent comme si j'étais encore ce gamin de quinze ans.

— Je pensais qu'il exagérait, ne voulant juste pas casser l'image... pure qu'il a de toi.

La cabine s'ouvre et nous nous engouffrons dedans. Hoseok clique sur le bouton de l'étage des studios de Namjoon et Suga. Ça m'étonne un peu. Cela fait une éternité qu'il a quitté l'agence et à l'époque, nous n'étions pas encore dans ces locaux. Comment mon prof d'un jour peut se repérer si facilement ? Je n'ai pas le temps d'y réfléchir plus en détail qu'il me questionne :

— Parce qu'avec ta popularité, bon sang, tu dois avoir un sacré succès, non ?

— Hoseok, le réprimande Jimin qui s'est adossé à la paroi.

Mes épaules se haussent presque d'elles-mêmes. J'ignore ce que je dois répondre sans passer pour un crétin ou un prétentieux parce que Hoseok a vu juste. Oui, j'ai du succès et clairement si un soir, je me sens seul ou que j'ai envie de m'amuser, j'ai une liste de personnes prêtes à me rejoindre dans une douche, un lit ou même une voiture. Cependant, ce succès ou mon expérience intime n'ont rien à voir avec le fait que j'aime ou non parler de sexe avec mes amis ou pire avec Hoseok que je connais à peine.

— Oh , s'exclame-t-il.

Il me donne une tape dans le bras et surpris par son geste, je perds un peu l'équilibre. Je me rattrape au miroir ce qui l'amuse grandement. Jimin baisse les yeux sur ses mains liées devant lui.

— Donc tu as bien du succès et tu ne laisses pas ta part, hein ?

Je ne peux pas retenir un petit sourire en coin de fleurir. Pas pour les mots qu'il vient de dire, mais à cause de la petite moue adorable que Jimin vient de faire.

— OK, pudique, mais pas innocent, enchaine Hoseok. Je note.

— Laisse-le tranquille, souffle Jimin comme exaspéré.

— C'est Namjoon qui va être surpris, me murmure le brun sur le ton de la confidence pour que Jimin ne l'entende pas.

Il m'adresse un clin d'œil au moment où nous arrivonsà destination.