Chapitre 36 - Yin Yang
Marinette prit une longue inspiration et commença à raconter.
- J'avais chargé mon cataclysme pour piéger l'akumatisé. Mais Meduzhair a pris l'avantage et Lordbug s'est retrouvé entre ma cible et moi. Quand je l'ai touché, il y a eu des flashs lumineux blancs et noirs en même temps qu'une explosion.
Adrien redoubla d'attention parce qu'il était déjà inconscient à ce moment-là. Elle regarda sa main droite puis sa main gauche.
- Quand je me suis réveillée, ma main gauche était blanche avec des particules d'énergie flottant autour. L'akumatisé était indemne et j'étais piégée. Elle en a profité pour tenter de me voler mon miraculous. Mais il n'était déjà plus à mon doigt. Alors...
Elle déglutit avant de reprendre son récit.
- Alors j'ai plaqué ma main gauche sur son visage. La lumière m'a éblouie et quand j'ai rouvert les yeux, l'akumatisé s'était détransformé.
Son compagnon était abasourdi et se tourna vers Maître Fu qui semblait aussi surpris que lui.
- Peu après, je me suis moi-même détransformée. Plagg n'était pas là. Et ensuite... j'ai perdu conscience.
Le jeune homme lui prit la main et la serra. Elle la lui serra en retour. Il savait pertinemment tout ce qu'elle avait traversé, seule, en le pensant mort.
- C'est à partir de ce moment où je suis entré en scène, déclara le gardien. Les secours arrivaient et j'avais peu de temps pour agir. Alors j'ai pris Lordbug avec moi et décidé de le ramener chez lui. En lui laissant de quoi vous menez jusqu'à moi quand vous jugeriez le moment opportun.
Il se passa les mains sur le visage. Wayzz semblait choqué.
- Vous êtes certains que vous n'avez pas perdu vos miraculous ? Qu'on ne vous les a pas pris ? insista ce dernier.
- Certains, nous pouvons nous transformer. Bien que j'ignore pourquoi ni comment, déclara Adrien.
- Montrez-moi, leur demanda Maître Fu.
Les héros se levèrent et en un battement de cils, des étincelles rouges et vertes les enveloppèrent pour les transformer. Il constata alors des changements dans leur costume.
Ceux apportés à celui de Lordbug étaient subtiles. Certaines pièces semblaient avoir epaissi, comme des renforcements. Notamment dans le dos, les épaules, les coudes, les mains. Les bottes remontaient jusqu'aux genoux, s'approchant plus de la pièce d'armure que des simples chaussures.
Les changements les plus voyants étaient chez Chat Noir. Des griffes métalliques ornaient désormais ses mains et ses pieds, complétés par des ergots aux talons et aux coudes. Son masque recouvrait désormais l'intégralité du haut de son visage ainsi que l'arrière de sa tête, devenant par conséquent plus un casque.
- Fascinant, commenta le vieil homme en se rapprochant pour les inspecter.
Il éleva les mains, paumes dirigées vers eux et fit des cercles en l'air. Les yeux fermés et les sourcils froncés, son front se couvrit de sueur sous l'effort qu'il semblait faire. Une fois son examen terminé sur Lordbug, il le réitéra sur Chat Noir.
- Wayzz ? Est-ce que tu les sens toi aussi ?
Le kwami s'éleva et leur tourna autour en les scrutant de la même manière.
- Je crois, Maître. Mais c'est étrange. Je les sens tous les deux... chez tous les deux, fit-il avec un certain ébahissement.
- Vous pourriez être plus précis ? s'impatienta Chat Noir dont les doigts tapaient en rythme contre ses bras croisés.
Le gardien l'ignora superbement et se lança dans un conciliabule avec son kwami. Exaspérée, l'héroïne leva les bras au ciel. Lordbug la fixait avec émotion, elle s'en rendit compte et s'enquit de son état d'esprit.
- C'est juste que je réalise tout ce que tu as dû traverser toute seule alors que je n'étais pas là pour te soutenir, dit-il avec regret.
Elle eut un pauvre sourire et détourna la tête. Elle passa une main dans ses cheveux noirs.
- J'agissais en pensant que je n'avais plus rien à perdre. Je n'avais pas vraiment l'intention d'en ressortir vivante sans toi, avoua-t-elle tout bas.
Le héros crut recevoir un coup de poing dans le ventre. Elle était sérieuse ?
- Ce doit être ça ! s'écria Maître Fu en faisant un high-five à son kwami.
Il se retourna vers les héros les yeux brillants d'excitation puis prit un air grave.
- Alors ? le pressa Marinette qui laissa tomber le masque.
Maître Fu prit le temps de se rasseoir et les invita à faire de même. Peut-être jouait-il avec les nerfs de la jeune fille, mais il prit le temps de choisir ses mots avant de parler.
- Plagg a dû te mettre en garde contre l'utilisation du cataclysme sur un autre miraculous ? commença-t-il d'une voix posée.
Elle hocha sombrement de la tête.
- Ce n'est qu'une théorie mais la plus probable. Il semblerait que ton pouvoir ait fonctionné malgré tout. Et détruit vos miraculous.
Ils le regardèrent avec effroi.
- Mais alors Plagg ? Et Tikki ? Ils sont... ? demanda-t-elle sans oser terminer sa question.
- Ils ne peuvent pas mourir, Chat Noir. En tout cas, pas au sens où vous l'entendez. Le miraculous est l'intermédiaire entre le porteur et le kwami, permettant au premier de bénéficier des pouvoirs du second.Quand un kwami fusionne avec son miraculous, il revêt une forme purifiée si je puis dire. Ils ne sont plus que pure énergie magique.
Wayzz se posa sur la table et reprit.
- Maître Fu et moi pensons que la destruction de vos miraculous a fait que vos kwamis n'ont pu retrouver leur forme première. De fait, sous peine d'être totalement dispersés et de créer une explosion cataclysmique, ils ont cherché refuge dans le vaisseau le plus approprié pour eux.
- C'est-à-dire ? osa Adrien, ayant peur de comprendre.
- Vous, déclara Maître Fu avec gravité.
Adrien regarda ses bras et ses mains comme si c'était la première fois qu'il les voyait avant de lever la tête vers Marinette qui faisait de même.
- Oh, fit-elle sous le coup d'une réalisation. Ça expliquerait mes sens sur-développés et ma vision nocturne. Sans compter la fringale de camembert que je me tape depuis mon retour à la maison.
- Et moi, l'envie boulimique de sucre. Cela explique même mes performances hors normes à l'escrime.
- Ah bon ? Tu t'es surpassé à ce point ?
- J'ai battu Monsieur D'argencourt.
Elle en fut très impressionnée.
- A trois reprises.
Elle siffla carrément d'admiration.
- Mais n'est-ce pas dangereux d'avoir toute cette énergie en nous, sans intermédiaire ? demanda Adrien, inquiet.
Le front de Maître Fu arbora un pli soucieux.
- C'est justement ça le problème. Vous n'auriez pas dû y survivre. L'explosion qui a suivi vous donne une petite idée de la puissance qu'une divinité possède. Un corps humain ordinaire ne peut pas la supporter. Mais c'est l'étrange pouvoir que Chat Noir a manifesté qui m'a fait reconsidéré les choses.
- Attendez une minute... Wayzz a dit qu'il les "sentait tous les deux chez tous les deux", se rappela Marinette, comprenant peu à peu.
- Nous pensons qu'au moment où les miraculous ont été détruits, une partie de l'énergie de Plagg s'est réfugiée chez Adrien et qu'une partie de l'énergie de Tikki s'est réfugiée chez Marinette, expliqua le kwami vert.
- Un peu de la destruction chez le porteur de la coccinelle, un peu de la création chez la porteuse du chat noir, continua le gardien en tendant une main vers l'un puis une main vers l'autre. Comme un yin yang.
Il joignit ses deux mains en crochets pour illustrer son propos.
- Cela doit créer une sorte d'équilibre, précaire mais un équilibre tout de même, ajouta Wayzz. Cela nous laissera du temps pour reforger les miraculous.
- C'est possible ?! s'exclamèrent-ils.
- Oui. Cela prendra du temps, de l'énergie et des ressources. Mais, à terme, nous pourrons recréer vos bijoux et permettre à Plagg et Tikki de reprendre leur forme première et ainsi vous mettre hors de danger, leur confirma Maître Fu.
Marinette se rendit compte qu'elle avait retenu son souffle et se tourna vers Adrien, soulagée. Mais ce dernier semblait en proie à de sombres réflexions.
- Cela veut dire que j'ai hérité d'un pouvoir de destruction, réalisa Adrien, angoissant un peu à l'idée d'utiliser à nouveau son lucky charm.
- C'est très vraisemblable, mais il ne sera pas à la mesure du cataclysme de Chat Noir, le rassura le vieil homme. Il sera forcément... "teinté" de ton pouvoir de création. En revanche, je n'ai aucune idée de ce qu'il sera. A toi de le découvrir et de le maîtriser.
- N'y a-t-il pas un risque d'utiliser nos pouvoirs alors que nous sommes dans une situation si précaire ? demanda le héros.
Le gardien se passa les mains sur le visage avant de le regarder d'un air fatigué.
- Si. Mais quand le Papillon frappera, pourrez-vous rester en arrière sans rien faire ?
L'air décidé des deux héros suffit pour lui confirmer que non. Maître Fu se réjouit en son fort intérieur d'avoir trouvé des êtres aussi dévoués et déterminés à remplir ce devoir qui leur était tombé dessus sans crier gare. En cent quatre-vint six ans d'existence, il en avait croisé des héros. Mais jamais comme ces deux-là. Leurs âmes était brillantes et s'accordaient parfaitement l'une à l'autre.
- Nous serons prudents, affirma Marinette.
- Nous utiliserons le moins possible nos pouvoirs, conclut Adrien après avoir consulté sa partenaire du regard.
- Bien, si vous n'avez pas d'autres questions, nous avons du travail qui nous attend avec Wayzz...
Le gardien fit mine de se lever.
- Pourquoi le Papillon désire tant nos miraculous ? lui demanda soudainement Marinette.
Il sembla prendre dix ans avant de se rasseoir.
Il se racla la gorge, but du thé et joignit les mains sur la table. Les deux héros étaient pendus à ses lèvres.
- Parmi tous les miraculous, ceux du chat noir et de la coccinelle sont les plus puissants qui existent. La légende raconte que les posséder tous les deux permet d'acquérir le pouvoir absolu et d'exaucer un souhait. Cependant, cela ne se fait pas sans contrepartie. Pour obtenir quelque chose, on doit forcément en abandonner l'équivalent. Je vous laisse en imaginer les conséquences.
- Alors le Papillon désire quelque chose que seule la magie peut lui offrir ? supposa Adrien, l'air pensif.
- Vraisemblablement, acquiesça Maître Fu. Votre mission est de le trouver, le neutraliser et de récupérer son miraculous pour que je puisse le mettre en lieu sûr.
- Vous ne croyez pas que ça aurait été plus simple de nous le dire en personne dès le début ? demanda Marinette, acide. J'ai dû soudoyé mon kwami à coup de roue de camembert pour qu'il me sorte des infos parcellaires.
Le gardien se mit à rire, Wayzz l'accompagnant dans son hilarité.
- Du Plagg tout craché ! fit le kwami tortue.
- Tellement ! Enfin... Si je vous avais tout dit dès le début, vous n'auriez pas appréhendé les choses de la même manière. Il fallait que vous soyez confrontés à l'adversité et que vous fassiez ce choix en votre âme et conscience, sans influence extérieure.
- Certes... commenta Adrien. Mais cela ne nous avance pas plus. Il attaque, on défend. Et on en est toujours au même point depuis des mois. Aucun n'arrive à avoir le dessus. Ses victimes perdent la mémoire et je doute qu'il nous dise spontanément où il se trouve si on lui demande gentiment !
- Non, en effet. Je n'ai hélas pas plus d'informations à vous donner.
Adrien raccompagna Marinette chez elle. Ils n'échangèrent que peu sur le chemin, plongés dans leurs pensées. Arrivés à la boulangerie, elle lui proposa de monter faire une partie de jeux vidéos.
- Je ne suis pas censé être banni de chez toi ? s'inquiéta-t-il.
La jeune fille se passa une main sur le visage en grommelant.
- J'avais oublié de te le dire. Mais en même temps, c'était tellement hypocrite et embarrassant que j'ai préféré passer ça sous silence.
Elle inspira en passant la porte d'entrée de son immeuble.
- Ma mère estime, maintenant, que je n'ai plus assez de présence masculine dans mon entourage. Donc... tu es à nouveau le bienvenu dans la demeure Dupain-Cheng ! C'est pas génial ?
Le jeune homme acquiesça à défaut d'offrir une meilleure réponse, les paroles de Nino lui revenant en mémoire.
Dans l'ascenseur, Marinette baissait les yeux.
- C'est bien la première fois de ma vie que je me réjouis que ma mère ne veuille pas recevoir Chloé chez nous, fit-elle tout bas.
- C'est... tellement triste, commenta Adrien.
- Ouais.
Il lui ouvrit galamment la porte et la laissa passer. En sortant ses clés, Marinette ne désira qu'une seule chose : s'abrutir devant des jeux vidéos et ne penser à rien.
Mais le destin (ou l'auteure, c'est comme vous voulez) en avait décidé autrement.
En entrant dans l'appartement, les deux héros tombèrent sur son père attablé dans la cuisine avec la dernière personne que Marinette voulait voir aujourd'hui.
- Ah, Marinette ! la salua Tom Dupain.
- Salut, papa, lui répondit-elle par automatisme.
- Je me suis permis d'inviter ton amie pour discuter un peu avec elle. Nous faisions un peu plus connaissance, lui dit-il avec un grand sourire.
Chloé se tourna vers elle avec appréhension. En apercevant Adrien à ses côtés, son expression déjà pas rassurée se décomposa.
Adrien eut l'envie soudaine de se terrer dans un trou de souris pour les dix prochaines années.
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Trop de choses arrivent en même temps. Comment notre chère Marinette va-t-elle gérer tout ça ?
Réponse dans le prochain chapitre ! /0/
PS : félicitations à celles/ceux qui avaient deviné les dessous de l'affaire ! Vous êtes géniaux :D
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