Chapitre 27 - Sur le fil
Nino l'avait suggéré sur le ton de la rigolade, mais force était de constater qu'il n'y avait pas eu d'attaque depuis les vacances de Noël. Rien. Niet. Nada. Nichts. Que. Dalle.
Loin de les rassurer, nos héros étaient sur des charbons ardents. Un événement de grande importance leur avait-il échappé ? Ou bien, était-ce le calme avant la tempête ? Tout Paris s'en étonnait et s'interrogeait : était-il mort ? Avait-il des remords ? Faisait-il une trêve pendant les fêtes ? Les torturait-il psychologiquement pour mieux les attaquer quand leur vigilance se relâcherait ?
- Du coup, je n'ai plus de contenu pour alimenter mon blog depuis des semaines ! se plaignit Alya en surfant sur son téléphone. J'aurais tellement dû assister au Bal du Nouvel An !
- Quel sens des priorités, Al' ! fit Marinette d'un ton acide. On croirait presque que tu souhaites que le Papillon frappe !
C'était la rentrée de janvier. Après s'être souhaités la bonne année, le groupe d'amis se racontait son noël en famille.
- Désolée, mais il y a plein de rumeurs qui circulent sur le net autour de la romance entre Lordbug et Chat Noir, et je n'étais pas là pour documenter tout ça ! geignit-elle rageusement.
Adrien et Marinette ne purent s'empêcher d'échanger un regard avant de revenir au sujet d'origine.
- Avec mon père et Nathalie, on a passé la Veillée à regarder des vieilles photos de famille. C'était la première fois qu'on fêtait Noël au Manoir depuis la mort de ma mère, expliqua ce dernier avec un petit sourire. Je suis content de l'avoir fait. Et toi, Nino ?
- Oh, tu sais ! Dans ma famille, on a une façon bien à nous de fêter Noël, commença le jeune Lahiffe en se grattant la tête.
- Ah ouais ? l'interrogea Chloé, interloquée.
- On fait du lasertag en famille puis on mange au resto.
- Trop cool ! firent ses amis.
- De mon côté, ma grand-mère a posé ses valises pendant quelques jours avec nous. Un record quand on connaît sa bougeotte aiguë, commenta Marinette d'un ton rêveur. Et mon grand-oncle est également venu nous voir. C'était simple mais sympa. Et puis je ne suis plus privée de sortie ! ajouta-t-elle avec enthousiasme.
- Oh mais c'est super ! s'exclama Alya, à côté d'elle. On va pouvoir aller au cinéma, faire du lèche-vitrine !
Amusée, Marinette fixa Alya quelques instants avant que Chloé n'intervienne :
- Ou bien, passer du temps avec ma copine en-dehors du lycée ? suggéra cette dernière en lui montrant leurs mains jointes.
- Ah... oui, oui. Bien sûr ! Je ne voulais pas m'immiscer, hein ! Mais ça fait un moment qu'on n'est pas allé au ciné...
La jeune Césaire se tortillait les doigts avec embarras ce qui souleva les rires amusés du groupe.
- Alors, ça vous dit d'aller voir un film ? proposa Nino en volant au secours de sa copine.
Tous acquiescèrent. Ils se mirent d'accord pour le lendemain.
Il faisait très froid en ce mois de janvier, mais rien ne pourrait gâcher le plaisir de Marinette. Elle pouvait sortir ! Elle pouvait respirer et avoir un début de vie normale !
Les garçons étaient déjà là et ils discutaient de banalités d'adolescents de leur âge. Et c'était tellement rafraîchissant pour la jeune fille.
- Ultime Mecha Strike 5 était beaucoup mieux que le 4 ! s'insurgea Nino.
- Je te l'accorde. Ils ont amélioré les graphismes et certaines mécaniques de jeu. Mais le mode d'histoire du 4 était beaucoup mieux fait. Dans le 5, le scénario tient sur un post-it. Petit format ! répliqua son meilleur ami.
- Mon pote, c'est un jeu de BASTON ! On s'en fout du mode scénario ! Je ne savais même pas qu'il en existait un avant que tu m'en parles ! Pour te dire...
- Ben écoute, vu qu'on a une championne parmi nous, autant lui poser la question !
Ils se tournèrent vers elle dans un mouvement synchronisé. Elle se sentit l'âme d'un lapin observé par deux rapaces.
- Quoi ? demanda-t-elle alors qu'elle textotait.
Adrien entoura ses épaules d'un bras et désigna Nino de l'autre.
- Marinette ! Dis à cet inculte que le mode scénario de la série UMS est une composante primordiale du jeu !
- Il y a un mode scénario ? s'étonna-t-elle en tournant la tête vers son ami.
Ce dernier se décomposa sous les rires étouffés de Nino. Chloé arriva précisément à cet instant et arracha presque Marinette à l'étreinte d'Adrien en lui sautant au cou. Alya la suivit de peu et salua tout le monde.
- Moi aussi, je suis contente de te voir, Honey.
Elle déposa un baiser sur ses lèvres et ils allèrent chercher du popcorn à grignoter. La salle était modérément remplie mais s'asseoir sur le même rang s'annonçait difficile. Finalement, ils trouvèrent trois places libres sur un rang et deux autres plus loin. Nino et Alya s'y assirent précipitamment quand les lumières s'éteignirent. Adrien s'avança pour s'asseoir, Marinette allait s'engager quand Chloé la devança pour s'asseoir entre eux deux. La jeune femme resta un instant con devant ce passage forcé mais ne dit rien.
Le film fut sympa. Il y avait de l'action, les décors et les costumes étaient magnifiques, et la musique était enchanteresse. Le scénario en lui-même restait assez basique. Un roi légitime versus un héritier légitime mais abandonné par les siens. Les personnages féminins étaient BADASS et avaient une bonne écriture ! Et ça faisait du bien. Marinette rêvassa un peu sur le design du costume de superhéros du personnage principal. Noir et mystérieux, régalien et si élégant. Elle en baverait presque. Est-ce que ce serait possible de faire quelques ajustements sur le sien ?
- Ce ship qu'il y a sur internet sur eux, quand même ! s'exclama Nino en parcourant son téléphone.
- En même temps, c'est une bromance très particulière quand même ! commenta Alya en riant. Et qui dure depuis leur premier film.
- Vous en avez pensé quoi du film ? demanda Adrien à la sortie du cinéma.
Chloé s'agrippa un peu vigoureusement au bras de Marinette qui lui demanda gentiment de refréner ses élans amoureux en public. Cette dernière fit comme si elle ne l'avait pas entendu et répondit à son ami d'enfance.
- L'acteur principal est trop beau ! lança-t-elle dans un gloussement. Son cousin dans le film aussi, mais il est complètement taré !
- Il n'est pas taré, il a de bonnes raisons d'être en rogne, lui répondit sa copine qui commençait à ne plus sentir le sang circuler dans son bras.
- Ah bon ? Parce que tu trouves qu'un terroriste a de bonnes raisons d'agir comme il le fait ?
Marinette la décrocha sans douceur de son bras et se le massa pour soulager l'inconfort de la reprise de la circulation du sang. Elle la prit par la main et s'éloigna du groupe pour avoir une discussion privée.
- Chloé. Qu'est-ce qui ne va pas ?
Étonnée de ce changement de conversation, elle ne répondit pas tout de suite. Mais sa copine vit très clairement le moment où elle se drapa dans sa dignité et monta sur son piédestal de dédain.
- Mais tout va bien, Mari. Quelle question ! lui répondit-elle sèchement.
Cette dernière se sentit blessée de ce manque d'honnêteté bien plus que du ton employé. Elle soupira, ne sachant pas quoi dire, ni quoi faire. Quand elle était comme ça, impossible de lui tirer les vers du nez. Même sous la torture, un banquier suisse se montrerait plus bavard qu'elle. Elle secoua la tête et rejoignit le groupe.
Quand elles reconstituèrent le cercle, un certain malaise s'était installé. Puis l'évidence la frappa. Alya était entre Adrien et Nino. Nino était à la droite de Marinette. Et Chloé venait de forcer le passage pour se mettre entre Adrien et elle. Elle lui avait pris la main et l'héroïne sentit cette fois l'élan possessif dans ce geste supposé affectueux. Elle ne put empêcher le soudain frisson qui lui parcourut l'échine.
- Mari ? l'appela Chloé, inquiète.
Leurs amis avaient interrompu leur conversation et les regardaient avec interrogation. Elle ouvrit la bouche puis la referma. Mais elle fut incapable de dire quoi que ce soit.
Heureusement -ou malheureusement- pour elle, l'alarme akuma retentit dans toute la rue.
"Une attaque d'akuma a lieu actuellement à la Défense. Veuillez rester calme et évacuer la zone alentour. En-dehors d'instructions particulières, restez chez vous ou rejoignez les points de ralliement les plus proches. Ne sortez pas pendant que Lordbug et Chat Noir sont à l'œuvre pour gérer la menace. Attendez le feu vert de votre responsable sécurité pour retourner à vos activités. Bonne journée."
Dans les minutes qui suivirent, l'avenue se vida. Les passants se réfugièrent dans les magasins ou vers les points de ralliement. Le groupe d'amis retourna à l'intérieur du cinéma. Marinette n'eut pas besoin de se retourner pour savoir qu'Adrien était sur ses talons. Profitant d'un mouvement de foule, ils disparurent pour s'enfermer dans un local d'entretien. Une fenêtre en hauteur leur permettrait de sortir et rentrer sans difficulté.
Bloquant la porte avec une chaise, des étincelles vertes illuminèrent la pièce pendant la transformation de Chat Noir. L'héroïne féline semblait broyer du noir plus tôt, maintenant elle arborait un sourire narquois.
- Allez, Milord, ne fais pas ton timide. On va être en retard pour les festivités !
Adrien haussa les sourcils. C'était perturbant de la voir passer d'un personnage à l'autre. Dans un nuage d'étincelles rouges, il revêtit les atours de Lordbug et sortit à sa suite. A l'air libre, ils cherchèrent ensemble la direction de la Défense puis s'élancèrent.
A son expression, il sut qu'elle était déjà concentrée sur le combat. Adrien aimerait pouvoir parler avec elle de tout à l'heure mais Lordbug avait d'autres chats à fouetter. Ha ! Voilà qu'il se mettait à faire des jeux de mots lui aussi !
Lorsqu'ils arrivèrent sur la place de la Défense, ils retinrent une expression horrifiée. L'arche de la Défense était recouverte d'immenses toiles d'araignée. Tous les bâtiments semblaient disparaître sous des quantités astronomiques de soie. La place prenait des allures de cathédrale de fils blancs. Si ce n'était pas un évident signe de danger, les deux héros auraient pu être captivés par la beauté des lieux.
- Je suppose que ce n'est pas le bon moment pour dire que je suis légèrement arachnophobe ? lâcha Chat Noir avec une fausse indifférence.
Son partenaire se tourna vers elle, se demandant si elle blaguait ou pas. Le léger tremblement de ses lèvres le détrompa aussitôt. Le combat devra être le plus court possible. Mais où était l'aku-...
- CHAT NOIR ! LORDBUG ! s'exclama une voix crissante.
L'héroïne sursauta sous le coup de la surprise mais lâcha un gémissement terrifié en voyant la nouvelle victime du Papillon.
De forme humanoïde jusqu'à la taille, l'akumatisé possédait le corps et les pattes d'une araignée. Géante. Entièrement gris et couvert de poils, ses huit yeux noirs brillaient d'une lueur malveillante.
- Je suis Arania ! Bienvenue dans mon nouveau chez-moi ! J'espère que vous aimez la déco ! Je l'ai faite moi-même !
- Un peu filandreux mais j'ai vu pire, répliqua Lordbug en mettant de la distance entre l'akumatisé et lui.
- Oh ? Eh bien, trêve de bavardage ! Donnez-moi vos miraculous !
Arania lança des toiles pour les immobiliser mais les héros s'écartèrent. L'un par réflexe, l'autre d'horreur. C'est à ce moment-là qu'ils réalisèrent qu'il y avait des civils prisonniers dans les toiles. Chat Noir sortit son bâton malgré les tremblements de ses mains et son air pas du tout rassuré.
- Je sens que ça va être cocon, dit-elle d'une voix tremblante.
Lordbug fut curieusement rassuré par ce trait d'esprit.
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Qui devinera le titre du film qu'ils sont allés voir ? ^^
A bientôt pour la suite /o/
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