Croyez-vous en l'au-delà ?

S'il existait, la femme devait se trouver à mi-chemin entre lui et le monde des vivants. Perdue dans ce bois, errant comme une âme en peine, serrant contre son cœur ce petit paquet si cher, si précieux, elle y croyait. Désespérément. C'était son seul espoir. Ses joues étaient humides tant elle avait pleuré et ses yeux ne pouvaient plus verser une seule larme, plus secs que son âme en cet instant même.

Tout son être n'était que souffrance. Un vide béant avait pris possession d'elle, la déchirant de l'intérieur. Elle avait mal... Tellement mal.

Elle aurait voulu mourir. Et d'une certaine façon, elle était morte. Elle était morte quand ce petit cœur si fragile qu'elle pressait contre le sien avait cessé de battre.

Mais désormais, elle s'accrochait comme une naufragée à un dernier espoir, cet espoir qui lui permettait d'avancer, qui la poussait à s'aventurer toujours plus dans ce bois, dans les ténèbres, à s'éloigner de l'hôpital qu'elle avait fui, à s'éloigner de l'humanité. L'espoir de ramener son enfant.

Elle s'arrêta un instant, pour contempler le nourrisson qu'elle serrait contre elle. Ses yeux dévoraient le visage poupin entièrement détendu, les petites paupières fermées et la mèche rousse qui bifurquait sur son front. Elle était si belle, si adorable. Une petite flamme venue raviver la joie de la femme, avant qu'elle ne s'éteigne, brutalement, avant même d'avoir pu faire profiter le monde de sa lumière. Elle venait à peine de naître. Et sa vie s'était déjà arrêtée...

Un souffle glacial parcourut soudain les ténèbres et elle se figea. Elle était arrivée. Le souffle effleura sa peau avant de l'emprisonner dans une étreinte mauvaise qui s'insinua en elle.

« T'es-tu égarée petite brebis ?

Il était là. Celui qui la sauverait...

On le disait plus puissante que tout. On le disait plus cruel que le plus terrible des monstres. On le disait fait de mal pur. Peu étaient ceux qui croyaient en lui. Mais il n'avait pas besoin que l'on croit en lui pour exister. Il était là. Et c'était tout ce qui comptait.

Elle n'eut pas besoin d'ouvrir la bouche pour s'exprimer. Ce fut comme s'il l'avait entendu sa prière muette. Un ricanement sinistre retentit.

— Tu veux réellement passer ce pacte avec moi ?

Tout ce qu'elle voulait, c'était qu'il lui ramène son enfant, qu'il inverse le temps, qu'il la tire des griffes de la mort, trop vite survenue, trop injustement arrivée. Oui. Elle le voulait. Pour sa petite chérie...

— Es-tu vraiment prête à payer le prix ?

La mère tressaillit.

Croyez-vous à l'enfer ?

Elle devait bien. C'était à lui qu'elle se condamnait. C'était vers lui qu'elle se précipitait.

La femme hocha de la tête, avec raideur, de haut en bas. Oui. Elle était prête. Tout pour que son amour puisse revivre, tout pour défaire ce que le sort lui avait infligé. Peu importait ce qu'elle allait abandonner. Peu importait ce à quoi elle les condamner... Tant qu'elle pouvait encore serrer sa fille dans ses bras, tant qu'elle pouvait encore rêver d'une vie à la veiller...

— Alors qu'il en soit ainsi.

Les bourrasques se levèrent, furieuses, cinglantes, dévorantes. Glaçant, cet être puissant et maléfique qui se cachait dans les ténèbres tourbillonna autour de la femme, masse informe et mauvaise. Autour, la forêt paraissait avoir disparu, de même que le ciel au-dessus de sa tête, et la terre sous ses pieds. Il lui sembla même un instant sentir la lancinante brûlure d'une flamme s'embraser en elle, foudroyante. Instinctivement, ses mains se resserrèrent autour du petit corps sans vie, froid, entre ses bras.

Au cœur de cette tempête, s'accrochant à son enfant comme si sa vie en dépendait, la mère entendit de nouveau ce souffle grave, vicieux, résonner à ses oreilles :

— Durant neuf années, tu n'auras rien à craindre. Mais une fois ce délai passé, vous m'appartiendrez. Toutes les deux. Et à jamais. »

Puis le vent tomba, comme il s'était levé, et elle se retrouva dans les ténèbres du bois. Seule. Au-dessus de sa tête, les étoiles scintillaient dans le ciel. Mais la Lune s'était curieusement teintée de rouge. Elle frémit. La forêt semblait de nouveau déserte, comme si ce qui venait de se passer n'avait été qu'une illusion. Comme si tout n'avait été qu'un rêve...

Mais soudain, la ramenant brutalement à la réalité, tranchant l'obscurité, un cri retentit.

Non pas un cri de douleur.

Mais les pleurs d'un enfant qui venait de naître. Ou plutôt, de renaître...

Croyez-vous au Mal ?

Elle y croyait. Elle n'avait pas le choix. Et sa fille ne l'aurait pas non plus.

Car désormais, elles lui appartenaient.

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Bonjour, bonsoir à tous et à toutes ! Bienvenue sur ma toute nouvelle histoire : Mission "Virgile" (vous découvrirez la véritable signification de ce titre si vous décidez de poursuivre votre lecture 😉).

C'est un projet assez ancien que j'ai pu enfin écrire ce printemps ! Je suis extrêmement heureuse de pouvoir vous le présenter à vous aussi  désormais ! Le rythme de publication sera d'un ou de deux chapitres par semaine, le mercredi et/ou le dimanche pour le moment ^^

Cet univers est le plus sombre que j'ai pu écrire jusque là ! J'ai hésité à classer cette histoire en mature (n'étant moi-même pas encore officiellement adulte) à cause de la violence qu'elle peut contenir. Toutefois, je m'y suis résolue car vous trouverez du sang, de la torture et d'autres scènes du genre. Je conseille donc très fortement aux âmes sensibles de s'abstenir. 

Cela dit, comme je l'ai déjà précisé, il y aura également des fou-rires, des moments attachants et des rayons de soleil (si j'ai bien fait mon travail 😉). Et l'humour mortel de mes personnages sera sûrement la chose la plus dangereuse que vous rencontrerez à travers le récit 🙃

J'espère vraiment que Samaëlle saura vous entraîner avec elle dans les cinq cercles de Regana. Préparez-vous à plonger vers les entrailles de la terre, direction l'antre du Mal ! 

Je vous souhaite à tous la bienvenue à Regana ! Et faîtes attention à votre âme 😉

Bonne lecture, 
Aerdna🖤