Chapitre 13.
Monotrope uniflore.
Ou la plante fantôme.
Je ne m'attendais pas à en trouver ici. Pourtant, entre deux racines imposantes, dans un écrin de ténèbres, les fleurs se dressaient au bout de leurs longues tiges blanches. Elles portaient bien leur nom. Véritables parasites, elles poussaient dans les lieux sombres, exactement comme celui-ci, et décimaient les forêts de conifères. Sans parler de leur apparence... Blanches, presque translucides, elles semblaient venir d'une autre planète. En fin de compte, elles se fondaient parfaitement dans le décor de Regana...
Cependant, et ce, malgré leur aspect quelque peu repoussant qui en aurait fait grimacer plus d'un, j'étais heureuse de voir des fleurs.
La petite fleuristerie de M. Béranger me manquait. Même la cage d'escalier miteuse que je partageais avec David me paraissait mieux que cet endroit. Mais au moins ce dernier n'était-il pas pire que les deux premiers cercles.
Nous nous trouvions dans une obscure forêt, très différente du désert aride ou de la vallée sanglante. Ici, d'immenses troncs noirs jaillissaient du sol et montaient si haut que j'étais incapable d'en discerner la cime. Un vent frais se faufilait entre les arbres, donnant vie aux nombreuses ombres qu'ils projetaient. Il me semblait que nous n'étions pas seuls. De temps à autre, un murmure glacé soufflait ses amères paroles à mon oreille et je sursautais.
Toujours tâchée par le sang, j'avais la curieuse impression d'être le petit chaperon rouge, perdue en pleine forêt. Il me restait encore à déterminer si Carmine était le bûcheron venu me prêter main forte ou le grand méchant loup qui me conduisait vers ma perte...
Toutefois, ce que j'aurais pu donner pour avoir dans mon petit panier une galette et un pot de beurre... Car après des jours sans rien manger, je commençais à sentir ce vide dans mon estomac. Finalement, c'était peut-être moi qui me transformerais en louve affamée si nous continuions ainsi !
Tu délires Sam...
Je me surpris à prier pour que le télépathe qui se tenait à mes côtés n'ait rien saisi de mes pensées. Je divaguais vraiment trop... J'allais définitivement passer pour une folle. Voire pire !
Secouant la tête, j'accélérai la cadence pour rattraper mon guide qui évoluait entre les arbres à toute vitesse. Il avançait, animé par sa détermination habituelle, l'air de ne pas craindre ce qui pouvait se cacher dans les ombres du bois. Je devais avouer que son apparente invulnérabilité me donnait assez de courage et de confiance pour le suivre, malgré mon instinct qui ne cessait de me hurler au danger chaque fois que je m'enfonçais un peu plus dans le cercle des damnés. C'était inexplicable, incompréhensible et même illogique. Mais avec lui, je me sentais capable d'avancer. Capable d'atteindre cet ultime cercle. Et même capable – chose complètement démentielle – de réellement m'en sortir.
L'espoir.
C'était ce qu'il représentait.
Et bien malgré moi, je m'accrochai à cet espoir, de tout mon être, de tout mon cœur, de toute mon âme. Je n'avais pas le choix. Si jamais il s'évanouissait, alors les ténèbres m'engloutiraient pour de bon.
« Où allons-nous ? m'enquis-je, grattant le sang séché sur mon poignet qui me démangeait.
Je ne savais pas comment il faisait pour ne pas avoir l'air plus perturbé que ça par l'hémoglobine qui nous couvrait encore.
Un instant ses prunelles violettes glissèrent sur moi et il ralentit légèrement pour que je puisse rester à ses côtés malgré le rythme soutenu de notre progression.
— Voir un ami.
— Tu as un ami, toi ?
Les mots m'avaient échappé sur un ton moqueur. Pourtant, j'étais réellement surprise. Je ne savais tellement rien de Carmine après tout qu'il pourrait m'apprendre avoir des gosses, je n'en réagirais pas avec plus de stupeur. Je ne connaissais même pas son âge ! Il pourrait avoir vingt ans comme deux-cents !
— Vingt-quatre ans, répondit-il du tac au tac. Et c'est vexant...
Toutefois, le rictus qu'il esquissa m'indiqua qu'il était tout sauf vexé. Pour toute réponse, je lui offris mon sourire le plus faux, tentant de dissimuler ma surprise.
Vingt-quatre ans... Et il avait déjà l'air d'en savoir tant ! De plus, il m'avait avoué n'avoir jamais quitté Regana... Y avait-il vraiment vécu toutes ces années ? Je n'osai imaginer cette option. Moi qui y passais mes nuits depuis mes neuf ans n'en pouvais déjà plus. Alors toutes mes journées, depuis ma naissance et sans la moindre trêve, à errer dans cet enfer ? Pouvait-on réellement y survivre ? Sans la moindre séquelle ? Sans devenir comme ceux qui nous poursuivaient ? Sans devenir comme nos bourreaux ?
Que restait-il d'humain à quelqu'un qui avait toujours évolué dans un monde dénué d'humanité ?
S'il perçut mes pensées, Carmine n'en laissa rien paraître. J'avais remarqué qu'il se fermait aussitôt qu'on évoquait sa vie à Regana et les raisons qui le poussaient à s'engager dans cette quête suicidaire qui était la notre.
« Chacun est entravé par des chaînes différentes. Et chacun cherche à les briser » m'avait-il dit. Parfois, ses propres chaînes devenaient tangibles. Encore invisibles, il me semblait pourtant pouvoir les sentir ; lorsqu'il se figeait, presque imperceptiblement, lorsque sa noirceur ressortait, qu'il ne parvenait plus à la dissimuler.
C'était des chaînes si différentes des miennes. Mais maintenant je comprenais. Un peu.
Me reconcentrant sur le présent, et ignorant les étranges gémissements qui s'élevaient des ténèbres qui se dessinaient entre les troncs des arbres, j'évitai une pierre au sol, resserrant mes bras autour de mon corps. Curieusement, j'avais froid, même si je n'étais pas certaine que la raison fut le vent qui tournoyait autour de nous. Une main invisible semblait s'être emparée de mon cœur pour le malmener de sa poigne cruelle.
— Comment est cet ami ? m'enquis-je, quelque peu nerveuse.
La question était maladroite mais mon compagnon devait avoir compris... Il parut hésiter à répondre, l'air de chercher ses mots. Ce qui fortifia mon mauvais pressentiment. Où diable me conduisait-il ?
— Que sais-tu de la population de Regana ?
Je me figeai brièvement, trop hébétée pour dire ou faire quoique ce soit. Je dus cependant le rattraper puisqu'il semblait bien déterminer à ne pas s'arrêter... Ma stupeur première s'était volatilisée au profit d'un autre sentiment, plus amer : la confusion.
Ne lui avait-on jamais dit qu'on ne répondait pas à une question par une autre question ? J'attendais une réponse pas un interrogatoire surprise sur notre petit enfer personnel... J'eus la curieuse impression de me retrouver quatre ans en arrière, au lycée, lorsque mon détestable prof de science me demandait de lui décrire la population de carpe dans son devoir pourri sur la génétique.
Légèrement hésitante, je me lançai, sans trop de conviction, parce que j'en savais trop peu sur l'univers dans lequel nous évoluions :
— Et bien... Il y a les âmes errantes, comme moi, les damnés, des monstres et... Et Katrina et Morval ? Je suppose que puisque nous sommes en enfer nous pouvons bien les qualifier de démons...
Carmine hocha la tête lentement, de haut en bas.
— Oui, tu le peux. Il y a une différence entre eux et les damnés que tu peux croiser dans ce cercle... Là où ces âmes sont condamnées à errer ici pour l'éternité dans la tourmente, Katrina et Morval sont des êtres que la noirceur a entièrement consumé. Le Mal s'est emparé d'eux et en a fait la quintessence même de Regana. Ils échappent aux tortures infernales et à toute damnation... C'est leur cas, mais aussi celui de bien d'autres êtres que je te souhaite de ne jamais rencontrer.
— Qu'étaient-ils avant ?
— Des Hommes je suppose...
L'Homme est un loup pour l'Homme. C'était une belle démonstration ici. Les cœurs pouvaient tant se laisser tenter par la noirceur... Et alors, il devait être si aisé de nuire à son semblable... Il n'y avait qu'à voir ce que les Hommes avaient pu commettre par le passé et ce qu'ils continuaient de commettre...
Mais les jumeaux avaient-ils encore quelque chose d'humain ? Je ne parierais pas là-dessus. J'avais trop fait les frais de leur inhumanité, de leur monstruosité... Mon corps en portait encore la mémoire.
Toutefois, le jeune homme n'avait pas répondu à mes questions. Evitant une racine qui aurait bien pu m'envoyer au tapis, mes doigts s'entortillant dans le bas de mon chandail, je repris, d'une voix que j'avais espérée moins vacillante :
— Et ton ami ?
— C'est un « démon », lui aussi.
Le mot avait claqué dans l'air, comme un coup de fouet, et je frissonnai aussitôt. Un démon. Comme les jumeaux. Un de ces êtres qu'il avait décrit comme la quintessence du Mal ? Une boule se logea dans ma gorge, m'empêchant de respirer correctement. Je n'étais plus tout à fait sûre de vouloir le suivre... Mon incertitude n'échappa évidemment pas à mon compagnon de route qui s'empressa de me rassurer :
— Il ne représente pas une menace. Je ne nous y conduirais pas sinon. Mais nous devons nous débarrasser de ce sang. Tu sais bien qu'il attire les monstres...
Oh oui, je me rappelais très bien la capacité terrifiante de Morval à flairer ma piste si j'avais le malheur de m'entailler. Mon cauchemar de cette nuit, quand bien même n'avait-il pas été réel, m'avait rappelé les cruels pouvoirs du métamorphe. Je pouvais encore sentir l'étreinte douloureuse de ses crocs sur mon visage. Ils étaient à ma poursuite. De cela j'en était consciente. Sang ou pas sang. Katrina et Morval ne me laisseraient jamais fuir.
Et cette idée me hantait, m'obsédait, empoisonnant mon corps, mon coeur et mon esprit.
Je préférais tenter d'ironiser pour oublier cette crainte sourde qui ne me lâchait pas, plus coriace qu'un parasite :
— Pitié, dis moi qu'il y a une douche chez ton ami ?
— Il y en a.
De nouveau, je bugai. Littéralement. Durant quelques secondes, ce fut comme si mon cerveau cessa de fonctionner, répétant en boucle sa réponse. Mais face à l'absence de rictus narquois et de ricanement taquin, et face à l'air tout à fait sérieux du brun, je dû me rendre à l'évidence.
Ce n'était pas de la moquerie.
Une douche ? À Regana ? C'était possible ?
— Tout est possible à Regana, Sam' ! rit doucement le jeune homme à mes côtés.
C'était une phrase qu'il aimait décidément me répéter. Et j'avais la preuve de sa véracité chaque jour...
Le silence s'installa entre nous. Pour le moment, nous n'avions croisé aucun damné. Je ne pouvais cependant pas abandonner ma vigilance. Tendue comme un arc sur le point de craquer, mon regard fuyait sur les fourrés, à la recherche de ce qui pourrait nous tomber dessus. Tous mes sens étaient en alerte et c'en était presque douloureux. Le moindre bruit se faufilait dans mon crâne pour y résonner avec fracas. Et la tension qui m'habitait épuisait mes nerfs. Je ne pouvais cependant pas faire autrement.
Peut-être Carmine en eut-il marre, lui qui avait si facilement accès à mon esprit car il m'interrogea soudain, comme pour me distraire :
— Qui sont M. Béranger et David ?
Je butai un instant contre une racine en entendant sa demande.
— Je t'ai entendu penser leur nom tout à l'heure, se justifia-t-il face à mon regard interloqué et ma mine déboussolée.
Mes dents vinrent se planter dans ma lèvre, si profondément que je sentis le goût de sang perler contre ma langue. J'hésitai à lui répondre. David comme M. Béranger faisaient tous deux partie de ma vie réelle. Une vie que j'avais toujours tenté de préserver de Regana. Tant que je les maintenais séparer, la réalité demeurait encore un refuge dans lequel je pouvais oublier mes nuits infernales. Si jamais je les abordais maintenant, j'abandonnais cette barrière protectrice. Je n'étais pas sûre d'être capable de le faire.
— Des amis...
Ce n'était pas réellement un mensonge. Le patron de la fleuristerie avait été la personne qui s'était le plus occupée de moi ces dernières années. Quant à David, il était celui qui s'approchait le plus d'un ami. Bon sang, j'avais carrément fumé un joint en sa compagnie... Si ce n'était pas un geste d'amitié ça ! Un rire nerveux m'échappa.
— Tu as des amis, toi ? me taquina mon comparse, répétant mot pour mot ce que je lui avais lancé un peu plus tôt.
Je ne pus m'empêcher de rire à l'entente de sa pique. Le son s'envola, réellement disgracieux mais à ma grande surprise, le sourire de mon interlocuteur ne fit que s'accroître. Alors je préférai rentrer dans le jeu, et rejetant faussement mes cheveux alourdis par le sang en arrière, je minaudai :
— Et oui, aussi fou que cela puisse paraître !
Ses pupilles se fendirent, semblables à celle d'un félin, avant qu'il ne rétorque, dans un ronronnement taquin :
— Bientôt, le ciel nous tombera sur la tête et tu m'annonceras que nous sommes amis !
— Tu peux toujours rêver ! répliquai-je aussitôt !
Seul son rire résonna de nouveau et je me surpris à apprécier cette mélodie grave et sincère. L'espace d'un instant, j'avais oublié où nous nous trouvions. C'était étrange. Même si Carmine m'insupportait la plupart du temps, cela faisait du bien d'échanger nos piques, ainsi. Je me sentais moins seule, moins perdue. Plus comprise peut-être...
C'était surtout très idiot comme réflexion !
Je pouvais presque entendre la voix de mon compagnon ricaner en me qualifiant de « petite idiote ». Et il n'aurait même pas tort.
Coupant court à cet instant d'imprévue légèreté, le brun se figea devant moi et je dû en faire de même pour ne pas lui rendre dedans. Je dû me retenir de justesse de l'insulter. Mais le contournant, je pus admirer la raison d'un arrêt si brutale, mon coeur gagné aussitôt par une étrange chaleur.
Dans une petite clairière, se trouvait une maison. Pas bien grande, mais tout de même ! Une maison en brisque, bien réelle, avec une porte et des fenêtres. Par la cheminée, une légère fumée s'élevait et grimpait vers le ciel avant de se perdre dans les branches des arbres qui s'étiraient toujours plus.
Le petit chaperon rouge avait trouvé la maison de sa grand-mère... Restait à savoir si son propriétaire n'allait pas tenter de nous dévorer.
Carmine s'avança, me traînant à sa suite, sans me laisser l'occasion de me défiler. Il donna trois légers coups à la porte, ses épaules entièrement décontractés, avec une telle nonchalance que je me demandais comment est-ce qu'il faisait pour avoir l'air aussi indifférent.
Nous n'eûmes pas à attendre longtemps. Des bruits de pas résonnèrent derrière la paroi de bois avant que le bruit de clés dans une serrure ne retentisse. Et enfin, la porte s'ouvrit.
Eh bien ! Si je m'étais comparée au petit chaperon rouge, c'était parce que je n'avais pas encore vu le fameux ami qui se découpait dans l'entrée.
Entièrement vêtu d'écarlate, il arborait une chevelure dorée méchée de noir, coiffée d'une couronne de laurier. Ses traits paraissaient taillés à la serpe, presque squelettiques, figés dans une sévérité que son regard translucide accentuait. Je ne saurais dire son âge. Il n'avait l'air ni jeune, ni vieux. Il n'avait même pas l'air humain. Et dans un certain sens, c'était normal puisqu'il ne l'était pas.
La force de sa prestance m'obligea à reculer d'un pas.
Mais le moment où j'hallucinai le plus fut celui où Carmine s'exclama, avec entrain, pas le moins du monde impacté par l'austérité de l'homme face à lui :
— Salut Dante !
Dante ? Comme Dante Alighieri ?
Je n'eus pas le temps de me remettre de ma surprise que ledit Dante soupira avant de s'exclamer, esquissant un sourire froid qui révéla des dents taillées en pointes :
— Que me vaut le plaisir de ta visite, Carmine ?
— Virgile.
L'homme se figea aussitôt et ses traits déjà tirés gagnèrent en sévérité. Dans ses yeux jusque-là inexpressifs, un éclat vif s'embrasa. C'était comme si on venait de prononcer une formule magique. Il hocha la tête, lentement, de haut en bas.
Pour ma part, je demeurais perplexe, encore trop perturbée par ce qu'il se passait. J'avais l'impression de me retrouver à côté de la plaque, hors du temps. J'étais incapable de me saisir à pleine main des événements pour m'immerger dans l'instant présent.
Virgile ?
— C'est par ce nom que je désigne ma descente aux enfers, me répondit la voix de mon compagnon. Notre quête si tu préfères.
Avait-il réellement appelé notre entreprise suicidaire par le nom du poète qui accompagnait Dante au cours de son périple dans la Divine Comédie ?
Je nageais littéralement en pleine folie.
— Crois le ou non, petite diablesse, mais la poésie transcende même les frontières de l'enfer.
Restait à savoir si c'était le poète qui était devenu démon ou le démon qui s'était improvisé poète... Je doutais d'avoir un jour la réponse à cette question. Le sourire en coin du jeune homme ne fit que confirmer mes doutes.
Loin de se laisser impressionner et ce, malgré son intérêt qui paraissait désormais bien éveillé, le regard de Dante glissa un instant sur moi avant de revenir sur celui qui se disait son ami. Je devais lutter pour ne pas aller me cacher derrière ce dernier.
— Vous avez passé le cercle du sang ?
— Ça ne se voit pas ? railla Carmine, exhibant ses vêtements souillés.
Le démon roula des yeux. Voilà enfin quelqu'un d'autre qui semblait peiner à apprécier le caractère de mon compagnon de route. Pourtant, quelque chose dans l'attitude du blond me dérangeait. Malgré son calme apparent, il y avait une forme d'appréhension et de maîtrise qui venait titiller mon instinct. Quelque chose m'échappait. Mais quoi ?
Il fronça du nez comme si la vue de notre état le dégoûtait.
— Je suppose que vous avez besoin de vous débarrasser de tout ce sang...
— Tu supposes très bien. Nous ne voudrions pas qu'une des créatures de Regana ne nous prennent pour son dîner...
Encore une fois, notre hôte paraissait immunisé aux railleries. Haussant des épaules, il finit par lâcher :
— Bien. Vous pouvez rester ici tant que vous le voulez. Après tout Carmine, tu es presque chez toi ici. »
Sur ces mots, il se décala sur le pas de la porte pour nous laisser entrer. Alors, pour la première fois, Carmine se tourna légèrement vers moi. Malgré le sarcasme dont il faisait preuve, une certaine inquiétude luisait dans son regard. Avec douceur sa main vint se poser sur mon poignet afin de m'inviter à le suivre à l'intérieur, exerçant une légère pression.
« Tu la voulais ta douche, non ? » souffla-t-il dans le secret de nos esprits.
J'étais trop tendue pour réagir à la pique. Mais il avait raison. Luttant contre la méfiance qui ne cessait de grandir en moi, enfouissant au plus profond de mon être l'impression d'être tout bonnement perdue, je pris une profonde inspiration.
En enjambant le palier, curieusement, et alors que je pensais avoir tout oublié de cette œuvre étudiée il y a des années, ce fut la phrase qui annonçait l'entrée en enfer dans la Divine Comédie qui me revint en tête.
Vous qui entrez, laissez toute espérance.
Dante referma la porte derrière nous.
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