____CHAPITRE 07____

-Il m'a protégé, et moi, je l'ai détruit-

ꕥ___Jude___ꕥ

ISTANBUL - TURQUIE - APPARTEMENT.

Quelle conne.
Comment ai-je pu faire une chose pareille ? Me mettre presque nue devant lui.
J'en ai la nausée.

Assise sur le bord du lit, j'observe la chambre autour de moi puis finis par poser mes yeux sur le dos du garde du corps en train de dormir comme un porc. Son dos se soulève doucement, il dort paisiblement à mes côtés. Quand il dit que ses heures de sommeil lui sont précieuses, il ne blague pas. C'est presque flippant.

Les vêtements que je porte actuellement — un tee-shirt qui devait aller au ligne et un pantalon qui n'est rien d'un pyjama — ne sont pas ce que j'aurais mis habituellement. Ce qui veut dire... Jude admets le ! Qu'il t'a enfilé un haut et un bas comme une gamine de cinq ans. La honte...

Je déglutis. Comment ai-je pu en arriver là ? J'ai juste pris une gorgée et mon corps a de suite agi différemment.

De mes yeux encore à moitié ouverts, j'observe le dos contracté de Jake, sa tête repose sur le coussin blanc, ses bras se situent en dessous du coussin et la couverture est à moitié sur son corps.

ATTENDS ! Si il est torse nu et que je porte des vêtements inadéquats, me dit pas que... 

Non Jude ne te fais pas de film, c'est impossible, il ne va tout de même pas faire ça alors que je ne suis même pas consentante. Quelle blague.

Malgré ma situation actuelle et la relation ultra fusionnelle que j'ai avec lui, je tire la couverture que j'ai sur mes pieds et la dépose correctement sur le corps de celui-ci. Pourtant, je remarque une anomalie sur le bas de son dos. Enfin... pas complètement une anomalie, c'est un autre tatouage. Après le Yin et le Yang, qu'est ce que celui-ci peut signifier ?

Curieuse, je me penche et pivote la tête du bon sens. Je plisse les yeux en rapprochant mon visage, espérant comprendre la phrase marquée horizontalement tout en long de son bas dos.

— Qu'est ce qu'il peut bien être inscrit ? chuchoté-je tout en effleurant sa peau à l'aide de mon index. Mais à peine touché, son corps frissonne.

Je retire ma main puis finis par me relever du lit. J'attrape les miens et les place sur ma poitrine pour les démêler à l'aide de mes mains. J'essaye de me souvenir d'hier soir. Comment j'ai fait pour venir à la maison... Cette scène inattendue avec l'italien... Jake en train de me changer...

Jake m'a sauvée de ses bras. Jake m'a ramené jusqu'ici. Jake m'a habillé comme un enfant. Jake m'a laissé dormir à côté de lui. Jake m'a protégé.

Tout le monde l'aurait fait, Jude, Jake n'est pas le seul garde du corps qui existe. Arrête de penser que c'est un exploit. C'est son travail, rien d'autre...

Mais alors pourquoi les pensées fulminent en moi ? 

Je secoue la tête et glisse en dehors de la chambre, le laisse dormir pour rejoindre la salle de bains. Je dois prendre une bonne douche avec tout ce qu'il s'est déroulé la veille, j'en ai bien besoin.

***

Après m'être douché, j'ai décidé de préparer un déjeuner traditionnel. La table est joliment dressée : des crudités, du fromage, du thé bien chaud. Jake s'assoit face à moi, vêtu d'un tee-shirt qu'il a enfilé en arrivant à table. Sans un mot, il attrape le thé bien chaud mais repousse l'assiette comportant les poivrons découpés.

— Mange ça, pas moi, dit-il avant de porter le thé à ses lèvres. Sa pomme d'Adam remonte et redescend d'un coup sec.

Je détourne le regard pour ne pas le mettre mal à l'aise. Non, pour ne pas me mettre mal à l'aise.

— Ça fait deux fois que tu ne manges pas de poivrons... Tu n'aimes pas ça ?

— J'en suis allergique, avoue-t-il d'une énorme froideur.

Il mange quelques tomates ainsi que des concombres découpés. Puis, il étale du beurre et du miel sur du pain. De mon côté, je l'observe tout en buvant silencieusement du thé. Je réfléchis et me questionne sur la soirée d'hier.

— Pourquoi j'étais dans ton lit ? Tu m'as habillée ? Tu n'as pas honte de regarder mes sous-vêtements ?!

— Et ça recommence... râle-t-il en se levant, son pain et son thé entre les mains.

— Tu m'as changé c'est ça ? Tu pouvais bien me laisser en robe, non ? Et puis pourquoi me faire dormir à tes côtés ? Je sais très bien gérer mes pipis au lit même droguée !

— Jude ferme ta bouche, putain ! s'exclame-t-il, la mâchoire inférieure en avant justifiant son mécontentement face à mes propos.

 — Dis-moi la vérité, Jake. Tu m'as fait quelque chose pour qu'on dorme ensemble dans ce même lit ?

— Mais n'importe quoi bordel ! C'est TOI qui est rentrée à moitié à poil dans ma chambre en chialant parce qu'il y avait un monstre dans la tienne !

— Arrête de raconter des conneries ! J'aurai pas fait ça...

— On aurait dit une vraie gamine, Jude ! Je t'ai habillé, tu m'as même touché le visage et j'ai dû t'arrêter ! Tu as pleuré et tu as appelé Matthieu "papa".

Je sens mon cœur se serrer. Mes lèvres créent un demi-cercle se renversant vers mon menton. J'ai honte, tellement honte d'avoir fait tout ça. Comme si je ne m'étais pas déjà assez humilié.

— Je voulais te prouver que je pouvais me débrouiller seule face à cette soirée ! Sans toi !

Jake ricane mais c'est forcé, il se force. Ce qui s'apprête à dire, va ouvrir les portes de l'enfer.

— Tu allais te faire prendre par un suceur d'italien et te faire baiser par un con qui fout de la drogue dans ces verres ! T'es qu'une gamine qui ne pense à rien ! Tu allais te mettre en danger et mettre en danger mon travail !

— J'aurai préféré me mettre en danger juste pour que tu sois viré de ce boulot !! hurlé-je sans réfléchir, la colère prenant le dessus de mes émotions.

Mes mots m'arrachent la gorge. Mes mains tremblent. Je ne voulais absolument pas dire ça mais Jake devait comprendre que je ne suis pas qu'une simple mission. Pour toute réponse, son visage se fige et sans prévenir, il balance son verre à thé contre le mur. Le verre se brise. Je sursaute et pose mes mains sur mes oreilles. Mes yeux se referment par la peur de son geste soudain.

— Ne-redit-plus-jamais-ça-Jude. Tu as pigé ?

Je rouvre les yeux. La colère traverse ses iris bicolores.

— Parce que tu as peur pour ton travail, c'est ça ?! Tu as peur de te faire virer pour te retrouver à la rue ?!

Tout à coup, son expression change. Il recule d'un pas, racle sa gorge et murmure pour lui des mots que je n'arrive pas à décrypter. Qu'est ce que j'ai dit de mal ? C'est la vérité. Il partira avec ses valises.

— J'avais peur que tu te fasses... que ces hommes te pénètrent, te violent, Jude...

— Pourquoi tu ne dis jamais le mot, hein ?! Tu avais peur que je me fasse violer ?! Eh bien, ce n'est pas le cas ! Arrête de parler comme si je l'avais été ! Arrête de parler comme si tu l'avais été !

— JE L'AI ÉTÉ ! J'AI ÉTÉ PUTAIN DE VIOLÉ ! ON M'A VIOLÉ !! hurle-t-il, sa voix se brisant sous ses révélations.

Je reste sans mot, immobile telle une statue. Le silence après le chaos est devenu notre ami. Jake détourne le regard et marche vers la porte.

Il s'était fait violer ?... Jake s'était fait violer ?

— Bordel, pourquoi j'ai dit ça... murmure-t-il avant de claquer brusquement la porte d'entrée. 

Je regarde la porte se refermer devant mes yeux. Je marche à reculons et tombe en arrière après m'être prise le coin d'une chaise. Kitty se ramène à mes côtés et me colle la jambe. Je reste sans voix. Les larmes montent sans prévenir et glissent sur mes joues. Je m'en veux. Je m'en veux de l'avoir poussé à bout car malgré cet événement, il s'est porté volontaire pour m'aider. Il m'a protégé de ces pédophiles car il avait peur que je me fasse violer.

Au final, ce n'est pas moi qui est détruit, c'est lui.

Jake s'est fait violer mais à tout de même gardé la tête haute jusqu'à maintenant. Il me protège pour son travail mais il a peur de savoir qu'il m'arrive quelque chose de grave. Cependant, il ne le dit pas et ne le dira pas mais j'ai bien compris. Il a peur de révéler ce tout nouveau côté de lui : la soumission et la compassion.

Et malgré tout, il vient de me l'avouer en l'espace de cinq minutes...

-À suivre-

J'aime beaucoup ce chapitre ! Je suis fière de ce que j'ai écrit, pour une fois 😭

Et bien évidemment j'ai eu de la peine, ce n'est pas toujours qu'on peut entendre ça venant d'un homme.

1480 mots.