Mission Elimination President

Quelle histoire ! Comme d'habitude, j'étais tombé bien mal. J'avais clairement l'impression que les ennuis me poursuivaient. Je séchais tranquillement les cours un vendredi après-midi, afin de faire une partie de Mission Elimination President avec mes amis. Quand soudain, mon oncle Joe vint me surprendre. Lui, ça faisait au moins cinq ans que je ne l'avais pas vu. En arrivant pile devant mon ordi gaming, il poussa un grand « Ah ! ». Puis il m'attrapa par les épaules pour me gueuler:

« Quel idiot celui-ci ! Encore sur des jeux vidéos violents où tes neurones disparaissent un par un. Et l'école ? Tu me prends pour un con ou quoi ? Je sais très bien que tu es actuellement en train de sécher les cours. Ah malheureux! Tu avais oublié la visite de ton cher oncle.

-T'étais pas censé arrivé aussi tôt, répliquai-je sur un ton froid.

-On ne t'apprend donc pas à bien parler à l'école. Ah oui c'est vrai que tu es un délinquant : la grammaire, le respect et toutes ces notions-là t'échappent. On dit : Tu N'étais. Et puis tu n'es pas content de me revoir ? Cela fait cinq ans si je me rappelle bien...

-Oui oui, je m'en souviens. C'est le temps que t'as passé en prison. Je me rappelle très bien et d'ailleurs tu ne m'as pas manqué. Aussi, quelle idée tonton d'avoir fait un braquage à main armée ?

-Ouh putain, je vais l'étrangler ! »

Curieusement, le mouvement désordonné de mon oncle et moi suscita une réaction chez le jeu. Mon oncle Joe cherchait réellement à m'étrangler. Je ne pus me libérer de son emprise que grâce aux clignotements de mon écran de PC. Il fut déconcentré pendant une fraction de secondes, et j'en profitai pour m'éloigner de lui de quelques pas. Mon écran se mettait à clignoter plusieurs fois. Il devint intensément lumineux. De plus en plus. De plus en plus...

Soudain, un flash! Puis. Plus rien. Pendant quelques secondes. Autour de moi, je ne voyais plus ni mon oncle, ni ma chambre. Par-ailleurs, je n'entendais plus rien. J'étais plongé dans une aura blanche silencieuse, qui faisait presque penser au paradis. Cela serait trop bête quand même que mon stupide oncle m'ait tué, non?

Tout-à-coup, mes sens me revinrent et je fus plongé dans un drôle d'univers. Il était plutôt réaliste car il ressemblait à une ville. Ainsi, je n'étais ni au paradis, ni dans un rêve éveillé. D'un côté c'était rassurant, d'un autre... pas trop. L'endroit dans lequel j'avais atterri était une ville mais pourtant l'allure des bâtiments était trop monotone pour être vraie. Bip ! Bip ! Je tournai la tête vers le bruit, et je vis Joe, mon oncle, dans une tenue noire, style GIGN. Un talkie-walkie faisait bip bip à sa ceinture. Éberlué, consterné, il regardait ses mains, parcourues de diverses cicatrices, qu'il ne possédait pas il y a quelques minutes. Puis il me regarda, et sursauta. Surpris moi-même de cette réaction, je m'observai dans le reflet de ma montre. J'avais complètement changé d'apparence. Mon reflet me faisait même penser à un personnage de Mission Elimination President : Fox. Et maintenant que j'y pensais, je voyais que mon oncle était aussi une version dérisoire d'un personnage de mon jeu vidéo préféré. Ainsi, il incarnait mon skin fétiche: Mario X+. Oh la la quel comble ! J'avais alors une théorie par rapport à ce qui nous arrivait : mon oncle et moi, en nous battant près de mon matos de gaming, avions été téléportés dans le jeu auquel je jouais. Pourquoi ? Comment? Je ne sais pas encore, bonne question... Et puis je n'eus pas trop le temps de réfléchir... En effet, Joe criait déjà : « Mitrailleuses ! ». Alors, nous nous jetâmes à terre pour éviter la pluie de balles, qui s'était déclenchée quand mon oncle avait voulu faire quelques pas. J'avais vraiment l'impression d'être dans mon jeu vidéo. C'était plus qu'étonnant! Encore couchés par-terre, mon oncle me cria :

« Qu'est-ce que c'est que ce bordel ?!

-Je crois qu'on a été téléporté dans mon jeu vidéo...

-Ta gueule ! Tu ne raconteras donc que des conneries. Même dans les pires moments.

-Parle pour toi. »

La salve de tirs s'arrêta. Mon talkie-walkie fit bip bip. Contrairement à mon oncle, j'eus la décence de répondre :

« Oui ?

-Agent Fox, votre mission est d'éliminer le Président. Vous êtes affublé du camarade Mario X+, sigle 3.3.0. Vous devrez alors éviter les nombreux pièges semés dans Paris, vivre d'incroyables aventures -bip- afin que votre politique se fasse respecter. Attention vous êtes considérés comme des hors-la–loi -bip- donc vous devrez faire face aux Forces de l'ordre, qui n'hésiteront pas à tenter de vous abattre. Au fil de l'aventure, vous aurez affaire d'abord à des policiers, puis à des militaires. Le niveau montera... Je compte sur vous pour mener à bien votre mission: tuer le Président. Bon courage, soldat !

-Euh attendez! Partez pas si vite! Vous êtes qui déjà? La blague est pas très drôle en fait... Genre, me kidnapper pour me fourrer dans un escape game hyper réaliste, ça se fait pas!

-Tu parles tout seul p'tit con? interrogea mon oncle, d'une façon toujours aussi aimable.

-Non. »

Ce que je pensais se confirmait. J'étais à la fois inquiet et excité de devoir jouer pour de vrai à l'un des mes jeux préférés. J'y avais passé tellement d'heures. Je ne saurais même pas compter. Somme toute, j'étais un véritable passionné. Et maintenant, j'étais là, avec mon oncle inutile, à tenter de tuer le Président, dans mon jeu vidéo. Cet escape game était vraiment très réaliste. Mais j'avais peur... Et je n'étais pas vraiment consentant. Je me déplaçai pour rejoindre l'oncle, avec qui je devrais faire équipe. Je l'informai du message dont on m'avait fait part. Il réagit plutôt mal.

En effet, il empoigna son talkie-walkie, répondit à l'ordre de mission par les plus basses insultes puis envoya valdinguer son appareil. Il exigeait des explications pour, je cite, « cette espèce de délire ». Je lui expliquai alors simplement les règles, et mes stratégies dans ce jeu. Bizarrement, il m'écouta. Je pense qu'il devait alors avoir une très grande envie de se sortir de cette situation. Une envie plus grande que celle de m'étrangler.

« OK Johnny, donc si je comprends bien, il faut tuer le président pour gagner. Et alors on sortira sûrement d'ici. Parfait ça m'a l'air simple, j'ai toujours rêvé d'assassiner un président. »

C'est alors que se forma l'une des plus singulières alliances : mon oncle Joe, que je détestais, et moi Johnny, un élève de seconde qui passait tout son temps à jouer aux jeux vidéos. Nous allions mettre en commun son expérience de bandit et mon expérience de gamer, pour gagner à Mission Elimination President.

Pour nous mettre à couvert, nous commençâmes par rejoindre un bois. Sur le chemin, nous n'avions dû faire face qu'à un policier avec son chien. Tous deux avaient remarqués notre drôle d'allure. Je fus impressionné lorsque mon oncle plaqua le chien au sol. Ce dernier, écrasé par des kilos et des kilos de graisse, ne tarda pas à mourir. C'était donc ça être un bandit, cela ne me faisait pas rêver du tout. Pauvre chien. Le pire étant qu'il ne sera pas notre dernière victime. Le policier, bien remonté, s'approcha de nous un taser à la main. Il nous fallait réagir vite, et alors qu'il était à un mètre de moi, je lui assénai un incroyable kick à la tête. Il s'effondra. Mon dieu ! Je n'avais jamais fait ce genre de truc dans la vraie vie, qu'est-ce qu'il m'arrivait d'un coup ? Je devenais comme mon oncle...un affreux bandit seulement motivé par ses propres intérêts. Et de drôles d'intérêts en plus : tuer un président. En inspirant, je pris conscience que j'avais obtenu les capacités du personnage Fox. Avec sang-froid, je m'imaginais alors en train de faire une partie. Tout cela n'était pas réel. Ensuite je pensai: "Qu'est-ce que je ferai alors ? J'ai passé beaucoup de temps à élaborer des stratégies dans ce jeu, sans pourtant jamais arriver à bout de la mission". Donc, première stratégie, simple: se mettre à couvert, observer les forces mises en place et intervenir le plus vite possible, avant que l'alarme ne soit donnée. Le policier était évanoui, et nous avions tout au plus un quart d'heure avant que d'autres policiers ne se lancent à notre poursuite. Nous trouvâmes un bois bien positionné, plutôt au centre de Paris. Je ne me situais pas encore très bien. Nous avions couru de toits en toits, pour privilégier la discrétion. Malheureusement dans notre « bois », il y avait plus de personnes que d'arbres. Notre taux de discrétion chuta. Heureusement, nous étions à Paris, c'est-à-dire que les parisiens ne faisaient guère attention aux bizarreries. A un moment, un groupe d'enfants un peu trop curieux nous entoura. J'allais leur dire que nous n'étions que des soldats en mission, quand soudain mon oncle leur tira dessus. Interloqué, mon regard allait de lui aux enfants. Il me sourit en me disant que ça n'était qu'un jeu. Raaah, je devrai encore le supporter longtemps?

Suite à cet acte de violence irréfléchi, ce fut la panique. Nous utilisâmes alors cette panique à bon escient. En effet, nous ôtâmes nos uniformes trop visibles et nous mêlâmes à la foule. Des gyrophares se rapprochaient...

Emporté par le flot de personnes, je perdis Joe de vue. Au bout d'un moment, après avoir été emporté sur plusieurs kilomètres sans réussir à me détacher du groupe, je me réfugiai dans une rue adjacente à celle des Champs-Élysées. Je le savais car j'avais vu l'arc de triomphe au loin. Je soufflais deux minutes. A peine eus-je finis que, déjà, une brigade de policiers passa devant moi. Ouf ! Ils ne m'avaient pas vu. Je sortis petit-à-petit de ma rue, je passai discrètement le nez pour voir si la voie était libre. Que nenni ! Des voitures de police de partout, comme je m'y attendais. De ce fait, j'adoptai l'attitude du passant, discret par excellence.

Tout-à-coup, j'entendis des coups de feu et des grognements. A quelques mètres de ma position, mon oncle se faisait maîtriser par quatre policiers. Son arme était à terre, et il grognait comme un porc. Quel spectacle plaisant, hé hé. Merde c'était mon coéquipier quand même, et, dans une moindre mesure, mon oncle. Bon ben, dans ce cas-là, je consultai ce que j'avais dans mes poches et avec une vitesse fulgurante je sautai sur les policiers qui malmenaient mon oncle. Uppercut, crochet, direct, direct, uppercut, kick tournant et c'en était terminé des quatre policiers. Gloups, d'autres flics arrivaient... « Cours ! »criai-je à mon oncle. Il fit ce que je dis, mais alors qu'une voiture de policier s'arrêtait à ma hauteur, il se retourna vers moi et me cria «Décale ! » avant de lancer une grenade sur la voiture. Boum ! Viom ! Un hélicoptère se mit alors à notre poursuite. A la droite de mon œil gauche, s'enclencha un compteur. Je vis alors que l'on avait douze voitures de police à nos trousses, un hélicoptère et quatre unités de militaires à pied. C'était l'heure de la guerre ! Le moment que je préférais le plus dans le jeu. Mes capacités de combat furent poussées jusqu'à leurs limites. Je fus blessé plusieurs fois, mais grâce à mon oncle costaud et expert en armes, nous avions l'avantage. Heureusement, nous n'avions que des blessures superficielles. Autrement, ça serait retour à la case départ. La mission aurait échoué, puisque on serait mort. Dans le jeu vidéo. Et puis, dur de dire ça, avec mon oncle, nous formions une bonne équipe dans le jeu.

Malgré le difficile combat, nous n'oubliâmes pas notre objectif : éliminer le Président. J'exposai alors un plan à mon oncle, rapidement. 

Lui, il passerait par l'entrée principale en faisant le plus de dégâts possibles. Après, il s'échapperait et nous irions à deux sur un bâtiment donnant sur le jardin du palais de l'Élysée. L'objectif étant ensuite de shooter le président au sniper. Cela serait ardu et je pense que c'était alors mon pire plan.

Pourquoi il marcha alors ? Étonnamment, alors que nous avions vingt-huit voitures de police, deux hélicoptères, quatre tanks et seize unités de militaires à pied à nos trousses, nous avions réussi à éliminer un président, vingt-deux civils, trois fonctionnaires, soixante policiers et vingt-et-un militaires. Notre périple m'avait paru inimaginable, comme si toutes nos actions s'étaient déroulées dans la brume d'un rêve. Mon oncle me dit même :

« Bien joué...coéquipier.

-Toi aussi...tonton.

-Et merci pour tout. J'ai cru mourir tellement de fois et j'ai cru que j'allais te laisser mourir tellement de fois que...

-T'inquiètes moi aussi...j'ai trouvé ton aide utile.

-On dit ça mais ça ne te donne pas l'excuse de sécher les cours.

-Et toi d'aller en prison.

-Ouh putain je vais t'étrangler.

-Tu rigoles j'espère! Ça serait bête de mourir maintenant quand même. On recommencerait tous les deux à zéro. On est coéquipiers n'est-ce pas?

-Oui oui, je disais ça pour rigoler. Et sache que tu es aussi mon neveu. »

Alors, quelque chose d'encore plus étonnant que tuer un président, advint. Mon oncle et moi nous fîmes un câlin. Comme ça n'était jamais arrivé. Ensuite, quand nous vîmes le sigle Mission Accomplie devant nous, il ne se passa rien.

« Bordel ! Qu'est-ce qu'il se passe ?

-Vous avez réussi votre mission. Merci d'avoir joué à Mission Elimination President. Pour refaire une partie, appuyer sur X. Pour revenir au menu principal, appuyer sur O. »

Sans réfléchir, j'appuyai sur O, sur mon bras. Allez ça devait être la touche pour le retour à la maison. 

Yes ! C'était ça ! Nous nous retrouvâmes dans ma chambre. Enfin, après bien des épreuves virtuelles... Encore désorientés, nous nous regardâmes avec un sourire. Puis nous vîmes un texte s'afficher sur l'écran de mon ordinateur :

« Ceci était une mise à jour de Mission Elimination President. Vous avez été sélectionné pour le test de la version: réalité augmentée. Test réussi, toutes mes félicitations ! Merci de votre participation ! »

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