Paradis
Comme tous les matins depuis les quatre mois qu'elle vivait ici, Pétunia quitta son petit appartement à huit heures pile. Le matin était frisquet et le ciel gris et lourd, alors elle remonta le col de son veston, mais c'est avec un sourire et le pas enjoué qu'elle partit vers son travail.
Elle avait rarement été si heureuse de sa vie.
Elle avait fait exactement ce qu'elle avait dit à Lily : elle avait quitté Cokeworth pour Londres, avait suivi un petit cours de typographie et s'était rapidement déniché un emploi de secrétaire chez Pritchard's, une grande entreprise du coin qui fabriquait des agrafeuses. Elle passait ses soirées à lire, ou bien à faire du tricot, et n'avait pas parlé à sa sœur depuis l'été précédent. Elle en arriverait presque, par moments, à oublier l'existence du monde des sorciers et de la tare de sa famille.
Quand elle arriva dans l'immeuble gris et carré de Pritchard's, elle grimpa jusqu'au troisième et posa son sac à main sur son petit bureau avant de se rendre à la cuisine avec son petit arrosoir. Belinda, l'autre secrétaire de l'entreprise, s'y trouvait déjà, devant la machine, et se tourna avec un sourire quand elle entendit Pétunia entrer.
— Hey, salut !
— Bonjour, Belinda, répondit Pétunia en remplissant son arrosoir. Comment vas-tu ?
— Super. Dis, Killorn et les gars du quatrième nous invitent à sortir prendre un verre ce soir. Ça te dit ?
Pétunia dut s'empêcher de lever les yeux au ciel. Aller prendre un verre en pleine semaine de travail, franchement. Elle en avait de ces idées, Belinda !
— Non, merci, je ne crois pas.
— Bon, comme tu veux, dit Belinda en haussant une épaule.
Puis, portant sa tasse de café à ses lèvres, elle fixa du regard quelque chose derrière Pétunia et sourit.
— Bonjour, Vernon !
Pétunia se raidit. Vernon Dursley était-il vraiment derrière elle, ou Belinda se moquait-elle d'elle ?
— Belinda, répondit une voix bourrue. Pétunia.
Belinda fit un signe de la tête et sortit de la cuisine, non sans envoyer un clin d'œil à Pétunia. Celle-ci prit quelques grandes inspirations avant de se tourner vers le jeune homme qui faisait battre son cœur à toute vitesse, plaquant un sourire sur ses lèvres.
— Vernon, dit-elle. Bonjour.
L'homme la fixait de ses yeux bleus et sa moustache blonde semblait bouger toute seule. Après un moment, il finit par ouvrir la bouche.
— Pétunia Evans, dit-il d'un ton formel. J'ai des billets pour aller voir l'exposition d'aiguilles à tricoter au musée samedi. Voudrais-tu... Enfin, serais-tu intéressé à m'y accompagner ?
Pétunia se sentit rougir jusqu'à la racine des cheveux. Depuis le temps qu'elle rêvait à cela. Elle avait repéré Vernon Dursley dès sa première semaine à Pritchard's, et il l'avait tout de suite attirée, par sa normalité des plus terre-à-terre. Elle passait de longs moments depuis, entre deux appels à son bureau, à rêvasser au moment où il l'inviterait quelque part, à prendre un thé ou à faire une marche dans le parc. Et on ne prenait pas souvent Pétunia à rêvasser, surtout pendant les heures de bureau !
Et voilà que le moment était enfin arrivé, et il était encore mieux que tout ce qu'elle avait imaginé. Une exposition d'aiguilles à tricoter, c'était parfait !
— Bien sûr, Vernon, répondit Pétunia. J'adorerais aller au musée avec toi.
Vernon hocha la tête.
— Parfait. Je passerai te chercher à quatorze heures, ça te va ?
— Tout à fait. Vivement samedi.
Vernon hocha à nouveau la tête, puis adressa un sourire crispé à Pétunia, tourna sur ses talons et quitta la cuisine.
Quand Pétunia retourna à son bureau, son sourire avait doublé d'ampleur. En arrosant sa petite plante verte, elle se surprit même à chantonner.
La journée commençait vraiment très, très bien.
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