26. La course finale
Nous marchâmes environ dix minutes, dix minutes pendant lesquelles j'avançai seule, derrière, totalement à l'écart de la classe. Tous les élèves semblaient former un groupe soudé, qui rigolait tous ensembles. J'étais dégoûtée d'être si exclue, malgré que cela soit presque un choix de ma part, car je ne supportais pas leur façon de se comporter. Mais j'avais besoin d'une personne, oui, Thomas me manquait terriblement, même si je l'avais vu hier. Mais je tentai de ne pas y penser et ravalai mes larmes de colère, en continuant à marcher, comme si de rien n'était.
Dix minutes s'étaient donc écoulées lorsque nous arrivâmes au lieu où nous étions attendus. Je n'étais jamais venue ici auparavant et fus plutôt surprise; la forêt était dense, mais laissait quand même filtrer les quelques rayons de soleil, ce qui donnait une ambiance tranquille et chaleureuse, comme figée dans le temps. Je me sentais bizarrement bien, mais bien-sûr, Maxime vint rompre le silence en lâchant;
-Genre, ils nous ont amené dans la forêt des schtroumpfs, c'est quoi ce bordel?!
Tout le monde éclata de rire, sauf moi, bien entendu. D'ailleurs, il m'aurait fallu un effort surhumain pour m'y forcer car, même en y repensant, je ne voyais pas qu'est-ce qu'il y avait de drôle.
Stressée, Mme. Riménez recommença à nous compter, mais pâlit instantanément dès qu'elle eut fini et s'écria;
-Mon Dieu! Il manque quelqu'un! J'en étais sûre, je savais que vous n'étiez pas vint-et-un, mais vingt-deux! Quelle misère, qui manque-t-il bon sang?!
J'eus presque envie de rire en voyant sa crise de nerfs, mais non, là ce n'était vraiment pas l'heure. J'avais oublié l'absence de Justine, et je n'avais même pas pensé au moment où les gens s'en rendraient compte. Mais bon, personne ne pouvait me soupçonner au fond, alors je décidai de crier haut et fort;
-Mais il manque Justine!
Toute la classe poussa des longs "Ah ouais!", puis la prof leur pria de se taire, avant de crier à son tour, telle une militaire;
-Bon. Est-ce que quelqu'un à la quelconque idée d'où elle est?
Tout le monde échangea des regards interrogateurs, mais personne ne répondit à Mme. Riménez.
-Elle doit être malade, sûrement, soupira-t-elle. Bon, maintenant, suivez-moi, d'accord?
Nous nous exécutâmes. Elle nous fit monter bien une centaine de marches, avant que nous arrivions sur une haute et grande plate-forme de bois. D'ici, on pouvait voir toute la forêt calme et silencieuse qui s'étendait d'un côté, et de l'autre la ville, active et bruyante. J'adorais cet endroit. Ici, on se sentait supérieur au monde, au-dessus de tout. J'y reviendrai, c'est sûr. Mais ce n'est plus l'heure de rêver, notre prof prend la parole;
-Écoutez-moi tous! La course d'orientation va commencer dans une dizaine de minutes, le temps que je vous donne les instructions et que je vous regroupe par binômes ou trinômes. Bon, alors je vais vous expliquer le principe pour ceux qui ne connaîtraient pas encore les règles; il y aura des postes éparpillés partout dans la forêt, par lesquels il sera obligatoire que vous passiez. Chaque poste, où un professeur vous attendra, comportera une épreuve, et à la suite de celle-ci, vous gagnerez un indice pour aller au poste suivant. Chaque groupe commencera à un poste différent et vous fonctionnerez en tournus. Dès que vous aurez passé chaque poste, vous devrez rejoindre le Refuge de la Croix, où tous vos professeurs et moi-même vous attendront pour donner la récompense à l'équipe la plus rapide. S'il y a une quelconque tentative de triche, nous vous indiquerons, par les talkies-walkies que je vais vous donner dans un instant, de retourner ici, sur cette plate-forme, et d'y rester deux minutes, sans bouger. Voilà, est-ce que c'est clair pour tout le monde désormais?
Tout le monde hocha sagement la tête.
Voilà, j'avais raison, il y avait une récompense à la clé, une nouveauté qui donnait un peu plus de raison d'être motivé. Mais, de toute évidence, j'allai devoir la partager avec l'imbécile qui me servira de compagnon de course. Génial.
Mais si je faisais équipe avec Marine, ça m'arrangerai bien, car c'est la seule fille à peu près sympathique dans cette classe, et encore.
Pour ne pas me torturer encore plus l'esprit, je décidai de ne plus y réfléchir et d'attendre ce que Mme. Riménez allait annoncer. Elle sembla lire dans mes pensées;
-Je pense que vous attendez tous avec impatience, le nom de votre camarade qui marchera à vos côtés, n'est-ce pas? Bon, j'ai inscrit votre nom sur un petit papier, je vais le tirer au sort avec un autre pour former les groupes. Si je calcule bien, on aura deux binômes et six trinômes.
Elle commença par tirer les duos, mon nom n'en sortit pas. J'étais donc forcément avec deux abrutis, Marine ayant été tirée. J'entendais tous les prénoms défiler, mais toujours pas le miens.
Voilà, tout le monde avait été tiré, sauf moi et mes deux camarades, dont je n'arrivais pas à connaître l'identité, car pour prolonger le suspens, notre prof avait décidé qu'on se découvre tout à la fin.
Pour cela, elle avait prié tous ceux qui avaient été appelés de se déplacer vers la gauche et que les trois derniers aillent à droite. Sans oser les regarder, je me déplaçai jusqu'à l'autre bout de la passerelle. Et tournai timidement la tête à gauche, pour voir le visage de mes "associés". Je faillis défaillir, le sort s'acharnait-il sur moi?! Oui, vous vous en doutez bien, Maxime et Vincent, se tenaient à quelques mètres de moi. Mais pourquoi toujours moi? J'en avais ma claque de ces deux connards.
J'entendis des "Oooouuh" et des "Oh mes pauvres, je vous plains!", qui était bien entendu adressés à moi, indirectement. Déjà que j'enrageai, je ne pus retentir ma colère plus longtemps, alors j'explosai, devant tout le monde, pour la première fois de ma vie;
-Putain mais vous allez fermer vos gueules, bandes de cons?!
-Chloé! tenta de s'interposer Mme. Riménez.
Mais je ne prêtai nullement attention à sa remarque.
-Mais c'est qu'elle se rebelle la Brindille! ricana Vincent.
Cette phrase me fit l'effet d'une secousse. Je m'y attendais depuis si longtemps, que je n'en fus même pas surprise. Je me retournai vers lui et lui crachai;
-Ça vaut pour toi aussi, connard.
Il ne sut même pas quoi répondre et se contenta de me fusiller du regard. Je lui souris en retour, sarcastiquement.
-Bon. Vous vous calmez les deux, sinon ça va pas aller, d'accord? Vous êtes une équipe, vous devez vous entre-aider, pas vous insulter, nous lança la prof, visiblement dépassée par la situation.
On ne lui répondit pas, mais je soupirai bien fort, pour que tout le monde entende. Je dépassais mes limites! C'était incroyable et si amusant de se sentir pour une fois supérieure à eux! Mais je n'allais tout de même pas m'arrêter en si bon chemin, non, j'allai continuer à me rebeller. D'ailleurs, en y réfléchissant, c'était une excellente nouvelle que je sois dans l'équipe de Maxime et Vincent car j'avais mes miroirs sur moi. Oui, c'est sûr, ils n'en ressortiront pas vivants de cette forêt.
Alors que je songeais à la manière dont je les tuerai, Mme. Riménez nous fit encore une fois ses recommandations;
-Si vous n'êtes vraiment pas à l'aise dans vos vêtements j'ai prévu de vous donner un ensemble de sport, mais ce n'est pas obligatoire, chacun fait ce qu'il souhaite.
Aujourd'hui, j'avais mis une robe, mais quelle mauvaise idée! Tant pis, j'allai la garder, car si j'avais du sang dessus, je ne serai pas obligée de la redonner à la prof. Je réfléchissais au moindre petit détail, susceptible de m'échapper, mais je crois bien que j'étais fin prête.
-On va pas tarder à commencer, alors posez vos sacs là, juste dans le coin.
-Madame? Est-ce que je peux garder le mien, s'il ne me gêne pas? rétorquai-je, priant pour qu'elle me laisse emmener mes armes du crime avec moi.
-Pourquoi veux-tu le garder Chloé? Tu n'en auras pas besoin dans la forêt!
-Euh... Si! J'ai des médicaments pour mon asthme et quelques autres choses, dont j'aurai sûrement besoin, mentis-je.
-Bon, d'accord, céda-t-elle, un peu étonnée.
Je fus soulagée, mais surtout excitée à l'idée de les tuer, j'aurai dû le faire depuis si longtemps! Mais voilà, l'occasion se présentait maintenant, il ne fallait pas que je rate mes deux cibles. Cependant, la tâche n'allait pas être simple; tuer deux garçons de 15 ans, deux fois plus musclé et plus grands que moi, en sachant que la forêt est si grande qu'ils pourront s'échapper en quelques fractions de secondes, non ça n'allait pas être de tout repos. Je devrai faire preuve de ruse et d'habilité, mais surtout de prudence. Cela me stressa tout d'un coup, devrai-je vraiment les tuer? Je n'en étais plus vraiment convaincue.
Après avoir passé quelques minutes à encore nous donner des ordres, Mme. Riménez nous donna enfin le numéro du poste par lequel nous devions commencer, ainsi qu'une carte de la forêt avec nos postes, une boussole et un talkie-walkie pour nous trois. Nous devions commencer par le poste 3. Il y en avait 19 en tout - un de libre entre chaque groupe - prenant en moyenne 20 minutes chacun. Ça allait être une longue, longue journée.
Sans plus attendre, tous les élèves s'élancèrent vers leur poste respectif. On aurait cru que leur vie en dépendait, à voir comment ils ont disparu dans la forêt en quelques secondes. Quant à nous, nous ne nous pressions pas. Nous descendîmes lentement les marches de l'escalier et commençâmes à regarder la carte pour pouvoir retrouver notre poste de départ. Mais déjà, des tensions apparurent.
-Bon il faut aller par la droite et continuer tout droit, affirma Vincent.
-Mais non, tu vois bien que c'est par la gauche qu'il faut qu'on aille, regarde! m'interposa-je, en montrant la carte du doigt.
-Genre la meuf elle sait même pas différencier sa droite de sa gauche, pouffa Maxime.
-Quoi?! Mais t'es con ou quoi? Là, c'est la droite, là c'est la gauche. Donc il faut qu'on aille à gauche! fis-je en haussant le ton.
Ils s'approchèrent plus près de la carte et commencèrent à la scruter. Ils remarquèrent rapidement que j'avais raison, mais ne l'admirent pas, car pour eux, c'était bien trop honteux d'être dominés par Brindille.
Voyant leur manque de sens de l'orientation important, je décidai de guider notre groupe, en marchant devant. Mais cela ne sembla pas leur plaire;
-Non, toi tu restes derrière pour fermer la marche. Les plus forts devant, les plus nuls derrière, c'est logique, non? me lança Maxime, moqueur.
Je le fusillai du regard, mais ne dis rien. Je savais bien qu'ils allaient finir par se perdre tôt ou tard, mais cela me simplifierait la tâche, pour pouvoir les tuer. Il suffirait que je me propose pour leur montrer le chemin, que je les emmène dans un coin perdu de la forêt, sans issue possible et hop! Plus de Vincent et de Maxime! Je me sentirai si fière à ce moment-là, mais j'allais encore devoir attendre un moment, que la fatigue prenne le dessus sur leur pauvre petite personne, et que leur cerveau ne fonctionne plus correctement, qu'ils ne soient plus assez vifs pour échapper à mon emprise.
Alors que j'étais plongée dans mes profondes pensées, je sentis un bras me tirer avec force en avant. Puis j'entendis la voix agacée de Vincent;
-Bon, on a pas demandé à avoir un boulet dans notre groupe, ok? Alors tu nous suis et on veut pas avoir à te le répéter encore un fois. Donc tu te tais et t'avances, rien d'autre.
-Ouais bah moi j'ai pas demandé à avoir des dictateurs dans mon groupe, alors tu me laisses faire ce que je veux, ok? riposai-je sur le même ton.
-Rah, mais qu'est-ce que tu peux être chiante parfois, toi! D'accord je te donne pas d'ordres, mais toi tu nous suis et tu traînes pas!
-Oui, j'avais compris, merci! lui répondis-je, provocatrice.
Il soupira, agacé et passa une main dans ses cheveux bruns, avant de faire signe à Maxime de continuer à marcher. J'étais fière de moi; j'avais encore une fois réussi à les dominer, en leur rétorquant ce qu'ils ne voulaient pas entendre.
À force de chercher notre poste, nous nous étions enfoncés plus profondément dans la forêt, qui devenait de plus en plus dense. Les rayons de soleil se faisaient plus discrets, et les branchages plus nombreux. Mais depuis combien de temps marchions-nous? Bien vingt minutes je pense, et pas l'ombre de notre but à l'horizon. Nous étions-nous perdus? Si seulement. Mais non, à peine avais-je envisagé cette possibilité, que je vis Vincent et Maxime se précipiter vers une table, posée au milieu des feuilles mortes.
En me rapprochant, je vis que cette table était recouverte d'une nappe blanche, sur laquelle était posée trois assiettes, surmontés d'une cloche en métal. Mme Rimoy, notre prof de cuisine, nous attendait, tout sourire, les mains derrière le dos.
-Je commençais à m'impatienter, nous lança-t-elle. Vous vous êtes perdus?
-Non, non, c'était juste Brin euh... Chloé qui trainait derrière, lui répondit Maxime, énervé.
-Pardon?! Je te signale que je vous ai suivi à la trace, alors arrête de mettre la faute sur moi! m'indignai-je, exaspérée par leur comportement.
-Vous n'allez tout de même pas vous chamailler ainsi pendant toute la course? intervint Mme. Rimoy. Bon, vous avez déjà perdu assez de temps comme ça, alors je vais vous expliquer ce que vous devrez faire pour pouvoir avoir l'emplacement du prochain poste! Alors tout d'abord, choisissez tous une cloche différente, et mettez-vous derrière celle-ci.
Je me dirigeai vers la première, mais Vincent arriva avant moi, et me fit comprendre par son regard que je devais en choisir une autre. Je lui obéis, pour ne pas m'attirer des ennuis, et me plaçai derrière la deuxième.
-Par-fait! Alors nous avons intitulé ce poste; le mange-tout, cela vous donnera sûrement une indication sur ce que vous devrez faire! Sous chaque cloche, vous devrez manger intégralement tout le contenu de votre assiette. Allez-y! Relevez et regardez votre diner!
Hésitants, nous relevâmes en même temps notre cloche. En voyant ce que j'allais devoir engloutir, je faillis rendre mon petit-déjeuner. Un tas d'aliments de toutes les couleurs, n'ayant rien à voir ensemble, formaient une masse gluante et puante. Mais en jetant un coup d'œil à mes acolytes, je remarquai que je n'étais pas la plus à plaindre.
-Alors? Appétissant, non? nous lança Mme. Rimoy. Bon, de gauche à droite; Vincent tu as une soupe épaisse avec de la farine, du poisson, des choux, du miel et du chocolat. Chloé, tu as une assiette d'huîtres enlevées de leur coquilles, recouverte de fraises, de camembert, de lait, d'anchois et... Qu'y a-t-il d'autre déjà? Ah oui! De la crème chantilly! Et pour finir, Maxime tu as une délicieuse mousse au chocolat, avec du poivre, du citron, des épinards, des bonbons de gélatine et du curry! Aller, bon appétit!
L'annonce de ce qui se trouvait sous mon nez n'arrangea rien, j'eus la nausée. Était-ce réellement permis de nous faire manger ça? N'y avait-il pas de droit de l'Homme, vis-à-vis de la nourriture? À en voir nos assiettes, il fallait croire que non.
Nous avions l'air totalement déconfit, nous ne savions pas si nous devions commencer à manger ou pas. Mais ne voyant aucun mouvement à mes côtés, je me lançai, en engloutissant une énorme fourchette de cette mixture. J'en eus des frissons.
Je voulais en finir le plus vite possible, mais impossible; je n'arrivais pas à déglutir. Toute la nourriture visqueuse semblait bouger dans ma bouche, c'était surement la sensation la plus horrible que je n'aie jamais ressentie. Je voulais tout recracher, vomir, me laver entièrement la bouche, mais non, je devais avaler ça.
Alors que je tournais frénétiquement sur moi-même, pour pouvoir déglutir, je vis que les deux garçons avaient aussi commencé à manger le contenu de leur assiette. Ils semblaient mieux partis que moi, car je voyais qu'ils reprenaient de la nourriture, alors que moi je n'arrivais toujours pas à faire disparaître ce que j'avais dans la bouche.
Mais après un effort surhumain, j'y arrivai enfin. Je crus que tout allait remonter, mais nous avions déjà perdu assez de temps comme ça, je devais absolument faire un effort.
Après plus de dix minutes passées ainsi, à se battre contre notre propre nourriture, nous finîmes enfin. Vincent et Maxime se tapèrent dans le dos, en se félicitant, et se contentèrent de m'adresser un timide sourire, en soufflant un petit "Bravo".
-Félicitations! Vous pouvez être fiers de vous, vous avez été courageux! Voici pour vous l'emplacement du prochain poste! fit notre prof de cuisine, en traçant un point rouge sur notre carte.
Sans plus attendre, nous nous élançâmes dans la forêt à la recherche de cette nouvelle étape. Je ne me sentais vraiment pas bien, mais décidai de suivre leur rythme soutenu, pour ne pas leur faire perdre de temps. Curieusement, nous le trouvâmes très rapidement, après seulement quelques minutes de course effrénée entre les branchages de la forêt.
Notre professeur de chimie nous attendait patiemment, les bras croisés sur le torse. Il y avait devant lui neuf petits pots différents. Le but; trouver en deux minutes toutes les senteurs qu'ils contenaient. Ce n'était vraiment pas dans ce domaine que j'étais bonne, mais tant pis, je n'avais pas le choix.
-Trois, deux, un, à vos nez! nous fit notre prof en rigolant.
Chacun notre tour, nous sentîmes le contenu du premier.
-C'est de la cannelle! lança Vincent.
On acquiesça, en attrapant le suivant. Mais qu'est-ce que c'était cette odeur? Elle me semblait si familière et pourtant je n'arrivais pas à mettre le doigt dessus.
-Du sel, du sel! s'exclama Maxime, sûr de lui.
-Non, c'est pas du sel! lui répondis-je. C'est... C'est...
-Mais oui, c'est du sel! Arrête de nous faire perdre du temps, toi! me cracha Vincent, en défendant son pote.
-Mais non! C'est... Mais oui! C'est du sang!
-Ta gueule! Tu dis de la merde! Tu crois vraiment qu'ils auraient pris du sang?! me dit Maxime en criant. Bref, c'est du sel! Au suivant!
Mais pour qui il se prenait lui?! J'avais raison, j'en étais certaine. Et le prof de chimie ne me défendit même pas, pour ne pas nous donner d'avantage. Là, c'était trop. Ils m'insultaient ouvertement, et moi, je ne pouvais rien dire. Je décidai de m'écarter, pour les laisser se "débrouiller" seuls. Et comme je l'avais prévu, les deux minutes qui suivirent furent un véritable massacre; aucune bonne réponse. Ils avaient même fini par s'insulter.
Et moi je rigolais dans mon coin, amusée par la situation. Mais ils s'approchèrent de moi et Vincent m'attrapa par le col de ma robe et tenta de me soulever du sol;
-Pauvre conne, ça t'amuse de nous faire perdre du temps? Il y a une récompense à la fin, t'as compris ça, hein? T'as compris?! Non je pense pas, tu fais ta gamine rebelle depuis le début et tu nous tapes vraiment sur les nerfs. On risque pas de supporter ça longtemps, alors tu fermes ta gueule et t'obéis, d'accord?!
J'étais sous le choc. Il osait me traiter comme un chien, m'insulter et pensait que tout était de ma faute. Non mais il allait voir ce qu'il allait voir, car moi non plus je ne risque pas de supporter ça longtemps.
-Oh! Vincent tu te calmes! Chloé avait raison et vous ne l'avez pas écouté alors tu peux t'en prendre qu'à toi même! intervint notre prof de chimie.
Ah bah il était temps qu'il se bouge lui! C'était pas trop tôt! Mais son petit énervement fit son effet; Vincent se recula, en serrant les dents. Nous ne nous quittions pas du regard, comme si le premier à le baisser serait le faible. Mais Maxime s'interposa et prit Vincent à l'écart, pour lui dire quelque chose, que je n'étais donc pas sensée entendre. Mais quoi? Qu'avaient-ils à se dire? J'allai bientôt le savoir...
-Bon, comme vous n'avez pas réussi le poste, vous allez devoir faire un détour par la cascade du Loup, qui se trouve juste ici, nous annonça notre prof, en pointant un petit cours d'eau à quelques kilomètres de là. Alors, allez-y, dépêchez-vous!
Sans plus attendre, on s'élança en direction de cette cascade. On avait beaucoup de marche à faire jusqu'à cet endroit, mais heureusement, la végétation y devenait moins dense, à mesure qu'on s'en rapprochait. Mais essoufflés, on décida de ralentir le pas. J'étais toujours derrière, et eux, toujours devant, en train de faire des messes basses.
Mais alors que je continuais à marcher à mon rythme, je vis qu'ils étaient en train de ralentir. Puis ces trois mots, prononcés par Maxime;
-Un, deux, trois!
Et je les vis les deux, se jeter sur moi sans ménagement. Vincent me prit par les épaules et me plaqua au sol, tandis que Maxime me tenait les pieds. Mais qu'est-ce qu'ils foutaient?!
-Lâchez-moi, bande de connards!
-Arrête de nous parler sur ce ton, t'es tellement chiante, putain! On a décidé de pas te tuer, rassure-toi, mais on va te faire souffrir si tu fais pas ce qu'on te dit de faire, est-ce que c'est clair?! me cria Maxime.
-Oui, c'est clair! Mais lâchez-moi maintenant!
-Maintenant lève-toi, et marche devant, comme ça t'arrête de trainer les pieds et de nous faire chier. Tu vas nous conduire à la cascade le plus vite possible, rajouta Vincent, en me relevant avec force.
Je ne discutai pas et m'exécutai. Tout se déroulait à merveille! Il fallait juste que j'établisse un plan le plus vite possible, pour les piéger, et en finir une fois pour toute.
Je pris donc la carte et fis mine de marcher en direction de cette cascade, mais en réalité, j'allai les emmener dans un endroit reculé, pour pouvoir les fatiguer. Et c'est de ce pas que je partis dans la direction inverse de la cascade.
C'est après plus d'une heure de marche que je commençai à m'exécuter. D'ailleurs, ils devaient vraiment être débiles profonds pour ne pas avoir remarqué quelque chose d'anormal dans cette longue marche. Bref, passons, c'était à mon tour d'entrer en scène;
-Bon, les mecs, je crois qu'on s'est perdu. Mais comme c'est de ma faute, je décide de partir en éclaireuse pour aller voir si la cascade est proche et si je la vois après une vingtaine de minutes, je viendrai vous chercher. Sinon, on rebroussera chemin, d'accord?
Ils n'avaient clairement pas l'air enchanté par cette propositions, mais j'allai devoir à nouveau ruser;
-Et puis... Je suis vraiment désolée pour les problèmes que je vous ai causés, c'est tout de ma faute. Donc pour me faire pardonner, je vais y aller, comme ça vous vous reposerez, d'accord?
Il y eu comme une étincelle dans leur regard, qui s'adoucit immédiatement. Puis ils hochèrent la tête, sans dire un mot, me faisant signe d'y aller.
-Vous bougez pas, promis? De toute façon vous aurez besoin de moi, alors, pas le choix! fis-je en rigolant.
Ils me sourirent en même temps. Et Vincent me fit;
-T'inquiète pas, mais dépêche-toi alors!
Mais qu'est-ce qu'ils étaient cons et naïfs, c'était hallucinant! Mais tant mieux pour moi!
Ils s'assirent côte à côte sur un tronc d'arbre, et ne semblèrent plus vouloir bouger de là. Alors sans plus attendre, je partis dans les bois, d'un pas décidé.
Après cinq minutes de marche, lorsqu'ils furent hors de vue, je sortis de mon sac les morceaux de miroir les plus tranchants. Une fois en main, je fis demi-tour, en m'éloignant du chemin, pour pouvoir retourner vers eux, par derrière, sans qu'ils m'aperçoivent.
Voilà, ils étaient là, toujours sagement assis sur leur tronc d'arbre. Ils ne bougeaient pas, je crus d'abord qu'ils s'étaient endormis, mais Maxime recoiffa ses cheveux blonds, ce qui me refroidit, car la tâche allait être bien moins facile. Mais je n'abandonnai pas; je me reprochai d'eux à pas feutrés, faisant attention de ne pas mettre mes pieds sur des branches.
Je n'étais plus qu'à quelques pas d'eux, mais les attaquer ainsi, serait bien trop risqué, alors j'approchai mes mains, tout doucement, de leur tête, les mettant vers leur temps extérieure. Je priai pour qu'ils ne les voient pas, mais non, ils ne remarquèrent rien. Alors, sans perdre de temps, j'approchai mes mains, comme pour applaudir. Mon but était simple; les assommer en les faisant entrer en collision. Et cela marcha à merveille; leur tête fit un bruit sourd en se heurtant, et ils tombèrent mollement, inconscients, au sol.
Je devais me dépêcher, car notre absence pourrait se faire suspecte. Alors, je décidai de commencer par Maxime. Je pris mes morceaux de miroir, et sans hésiter, je les plantai dans le cou, ses tempes, et l'intérieur de son coude. Le sang giclait de partout, je jubilais! Même si j'aurais voulu plus profiter de ce spectacle, que j'attendais depuis si longtemps, je ne m'attardai pas plus sur le corps sans vie de Maxime. Mais alors que je voulais m'approcher de Vincent pour l'achever, je le vis, déjà en train de reprendre ses esprits. Je ne comprenais pas comment il avait fait pour se remettre de son choc, je fus prise au dépourvu. Et le temps que je reprenne moi aussi mes esprits, il était déjà trop tard; Vincent avait pris la fuite et s'échappait par le sentier.
Sans plus attendre, je m'élançai à sa poursuite. Mais comment faisait-il pour courir si vite? Il avait déjà disparu de ma vision. Je voyais les arbres et le sol qui défilaient si vite autour de moi! Oui, moi aussi je devais courir vite. C'est après plus de dix minutes de course effrénée parmi les arbres que je vis enfin sa silhouette se dessiner au loin. Il était essoufflé et n'arrivait plus à courir, il devait sûrement avoir un point de côté. Alors je piquai un véritable sprint, je n'avais jamais été si rapide, même en cours de gym, et me jetai littéralement sur lui, pour le plaquer au sol.
-T'as tué Maxime?! me lança-t-il, haletant. Non, pas toi! C'est pas possible, j'ai rêvé, hein?!
-Oui, je l'ai tué, un problème peut-être? fis-je, ironique.
-Pitié, pas moi, pitié Brin.. euh Chloé!
-Mais tu vas souffrir sans ton meilleur pote... Alors... pas le choix!
Et d'un coup, je plantai de toutes mes forces mon morceau de miroir dans son cou. Un énorme jet de sang en gicla, le plus gros que je n'aie jamais vu. Et je plantai, plantai sans relâche mon bout de verre dans tout son corps. Il se faisait de plus en plus faible, puis plus rien, il était inerte.
J'avais réussi! Enfin! Plus de souffrance, plus rien! J'allai enfin pouvoir vivre une vie heureuse, car je serai fière de ce que j'aurais accompli. Le bonheur, le rêve, le paradis!
Je m'allongeai sur le sol, essoufflée. Peut-être que j'allai être soupçonnée pour ces meurtres, peut-être pas, mais je pourrai inventer énormément d'excuses à ce sujet. Je n'avais donc plus à m'inquiéter de rien, plus rien à craindre. Mais je n'allai pas garder tout ce sang sur moi et mes morceaux de miroir, cela serait bien trop suspect. Alors j'attrapai mon sac, mon morceau de miroir et la carte, et allai signer mes deux meurtres. Puis je tentai de rejoindre la ville, ou, plus précisément, Thomas.
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