23. Un meurtre royal

Après avoir passé quelques minutes enfouie dans ses bras, il me relâcha doucement et me regarda fixement, avant de me dire;

-Chloé? Pourquoi te sens-tu obligée de tuer?

-Simple question de vengeance. Tout le monde me veut du mal, je suis bien obligée de me défendre.

-Mais pourquoi est-ce que tu tues tous ces gens innocents? me demanda-t-il, pas le moins du monde surpris par la réponse que je venais de lui donner.

-Ils ne sont pas innocents, crois-moi.

Il me regarda, sans rien dire, puis me reprit dans ses bras, avec un sourire plein de compassion, l'air de dire; "Ma pauvre, je te plains!".

-Et ça te rend heureuse de commettre des meurtres, ou tu t'en veux en y réfléchissant? me fit-il.

-Ni l'un, ni l'autre. J'attends simplement de pouvoir en commettre d'autres. Mais pourquoi tu me demandes tout ça?

-Je veux simplement te comprendre un peu mieux. Mais tu sais, je n'ai jamais vu de filles aussi difficiles à cerner que toi!

Devais-je prendre cela pour un compliment? Je ne savais pas et décidai de sourire, un peu gênée.

-Je veux pas t'embarquer là-dedans, tu sais. Je sais que t'es pas à l'aise, que tout ça te dégoute, alors je crois que c'est mieux si je vais aller commettre mon meurtre seule cette nuit, avouai-je alors.

-T'as vraiment envie de tuer? C'est une obligation? T'as pas besoin de tout ça pour exister, je t'assure, prends pas de risques si ça en vaut pas la peine, me répondit-il, tentant de me résonner.

Mais il n'y avait rien à faire, j'allai tuer Justine cette nuit, un point c'est tout.

-Ça en vaut la peine. Je vais y aller et j'assumerai les conséquences, mais je veux pas t'embarquer avec moi.

Il eut l'air contrarié et se mordit les lèvres. Puis il desserra ses bras et m'attrapa par les épaules, en me tenant fermement avant de me lancer;

-Si t'y vas, j'y vais, t'as pas le choix, d'accord?

J'acquiesçai, malgré moi, et commençai à lui expliquer en quoi allait consister le meurtre. Il m'écouta attentivement, sans broncher, et ne réagit même pas à l'annonce du nom de notre victime, qu'il avait pourtant déjà dû croiser.

Sans plus attendre, je décidai de me diriger en direction de l'immeuble où habitait Justine. Thomas me suivit, sans rien dire.

Arrivés au pied de l'immeuble; énorme déception. Nous devions avoir un code pour entrer dans le bâtiment.

-Merde, on va rien pouvoir faire de plus, fis-je, en appuyant sur la porte, comme si elle allait s'ouvrir par magie.

-Mais si! me répondit Thomas, avec un sourire en coin, qui ne présageait rien de bon.

Et d'un coup, il m'attrapa par la taille et me posa sur son épaule, comme un vulgaire sac. J'essayai de me débattre, mais je ne faisais clairement pas le poids contre sa force bien supérieure à la mienne.

-Mais qu'est-ce que tu fous?! lançai-je, tentant de maîtriser ma voix, pour ne pas réveiller tout l'immeuble.

-Je vais simplement t'aider à accomplir ce que tu as à faire, me répondit-il, sûr de lui.

En réalité, je ne m'inquiétais pas trop de l'endroit où il allait m'emmener. Ce qui me dérangeait, c'était la manière qu'il avait de me porter, ce qui me mettait dans une situation plutôt embarrassante. J'eus soudain des bouffées de chaleur, signe que je rougissais, et j'espérai vraiment qu'il ne le remarque pas.

Après quelques mètres à être trimballée ainsi, il me reposa enfin. J'essayai de me recoiffer tant bien que mal, en respirant un bon coup, pour retrouver ma peau blanche, mais ce fut peine perdue. Je rougis de plus belle.

Thomas le remarqua instantanément et s'approcha de moi. Il replaça une de mes mèches de cheveux, avant d'ajouter;

-Alors Princesse? Ça ne te plaît pas d'être aidée par ton prince charmant.

Je rigolai de façon forcée, terriblement embarrassée qu'il ait réussi à connaître mes sentiments, que j'essayais de cacher.

Pour détourner l'attention, je lui donnai un coup dans le joue, tout doucement, comme si je le faisais en ralenti. Il fit semblant d'avoir mal, en se frottant la joue, les sourcils froncés.

-Tu m'as fait mal! J'aurais besoin d'un bisou magique! me dit-il, en tendant sa joue dans ma direction.

On aurait dit un vrai gamin, mais ses techniques de drague me faisaient rire. Je souris et lui rétorquai;

-Ça devrait être l'inverse! Ce sont toujours les princes charmants qui embrassent les princesses en premier!

-D'accord, très bien. Mais est-ce que la princesse a mérité son baiser?

-Hum... Je n'en suis pas certaine! La princesse doit d'abord commettre un meurtre!

Notre conversation était vraiment étrange; mêler les contes de fées de mon enfance, au meurtre que j'allai accomplir, je ne l'avais jamais fait, mais je trouvais cela plutôt amusant.

Il me regarda, avec une pointe de déception dans ses magnifiques yeux bleus. Puis, il esquissa un irrésistible sourire, relevant ses lèvres parfaites, auxquelles je dus bien renoncer, pour le moment en tout cas.

Je me rendis enfin compte de la raison pour laquelle il m'avait soulevée et amenée ici, à côté de l'immense arbre; on allait devoir y grimper pour rejoindre la chambre de Justine, suitée au troisième étage. L'idée ne me rassurait franchement pas, mais il fallait tenter.

-J'y vais d'abord, lança-t-il, déjà en train de monter sur les premières branches. Toi, tu restes ici, d'accord?

-D'accord, mais fais attention!

-Ne t'inquiète pas.

Il me fit un clin d'œil, puis commença son ascension. Il montait avec énormément de précaution, choisissant chaque branche où il posait les pieds.

Arrivé à la hauteur du balcon de la chambre de Justine, il fit une grimace et redescendit sans plus attendre.

-Elle est encore réveillée! Elle est sur son ordinateur, ça va être dur d'entrer les deux, sans qu'elle crie ou je ne sais quoi... Mais au moins, la fenêtre de sa chambre est grande ouverte!

Je réfléchis un moment, avant d'avoir une idée de génie, plutôt osée;

-Tu vas monter dans l'arbre, je te suivrai, tout en restant à une certaine distance pour qu'elle ne me voit pas. Ensuite tu diras son prénom, pour capter son attention, et ne pas l'effrayer. Elle va sûrement paraître surprise, mais tu devras faire appel à tes talents d'acteur, et commencer à la séduire.

-Quoi?! Mais non, pas elle! s'indigna-t-il aussitôt.

-Si, t'as pas le choix! répondis-je, autoritaire. Bien-sûr, la connaissant, elle va tomber dans le panneau direct, et sera aux anges en te voyant. Bref, tu vas entrer dans sa chambre, pour la charmer, après c'est toi qui vois. Il faudra juste que t'arrives à la placée dos à la fenêtre, pour que je puisse entrer, la tuer. Mais attention, tu dois rien toucher, il ne faut pas qu'il y ait la moindre empreintes!

Il avait l'air contrarié.

-Mais...je veux pas draguer une fille sous tes yeux, je peux pas!

Je fus flattée qu'il pense autant à moi, surtout qu'il savait qu'elle était belle et séduisante, elle aussi.

-T'en fais pas Thomas, c'est pour la bonne cause!

-Mmh... Ouais, t'as raison.

Je n'eus même pas le temps de lui répondre, qu'il s'était déjà élancé dans l'arbre. Je le suivis, sans plus attendre, en veillant à rester quand même bien à l'écart. Je le vis arriver à la hauteur du troisième étage, hésiter un moment, avant de se lancer;

-Eh, Justine, jolie demoiselle! Mais que fais-tu encore éveillée? Les beautés doivent se reposer pour être encore plus ravissantes! Quoique, tu dois l'être en toutes circonstances!

Mon cœur se serra, il draguait si bien. Mais il draguait ma pire ennemie, avec une assurance déconcertante. J'espérai que c'était ses talents d'acteurs qui faisaient surface et non pas ses vrais sentiments.

-M-mais comment connais-tu mon prénom, bel inconnu? répliqua-t-elle, de sa voix stridente.

Rien qu'à l'entendre, j'en eus des frissons de dégoût.

-Mais je suis bien obligé de connaître le prénom d'une telle perfection, c'est si rare! (Elle rigola, hystérique) Et si quelque chose de sérieux pouvait se passer entre nous, tu ne crois-pas? Moi, j'en suis persuadé! Aller, fais-moi entrer, charmante créature!

Créature? Monstre, ouais!

Elle ne se le fit pas dire deux fois et accouru à la fenêtre, folle de joie. Elle bougeait ses mains dans tous les sens, surexcitée, avec cet air de pouffiasse qui lui allait si bien.

-Mais pourquoi t'es monté par l'arbre? Juste pour me voir, t'as risqué ta vie, quoi! Comment tu t'appelles en fait? lui demanda-t-elle, en le faisant entrer dans sa chambre par le balcon.

J'en profitai pour monter un peu plus haut, pour continuer à les voir et à "profiter" de leur conversation.

-Mais je risquerais ma vie pour arriver à te voir, tu es tellement sublime! Et je m'appelle Alexandre, mais tu peux m'appeler Alex!

Thomas était bien plus futé que je ne le pensais, car je n'avais même pas pensés à l'avertir de ne pas donner son prénom.

Elle mima l'éventail avec sa main, comme s'il la chauffait beaucoup trop pour pouvoir respirer correctement. J'avais la rage de la voir devant celui que j'aimais peut-être le plus au monde, mais je tentai de ne pas craquer.

Et là, elle essaya de l'enlacer, mais il se recula avec un sourire en coin.

-Non, on ne va pas aller si vite! Tu sais quoi? Je te défie de ne même pas m'effleurer à ce premier rendez-vous!

-Nan, c'est pas possible! s'opposa -t-elle, en faisant mine de bouder.

Il s'approcha d'elle et lui chuchota à l'oreille;

-Si t'y arrives, tu auras une surprise au prochain rendez-vous. Une énorme surprise.

-Quoi comme surprise? demanda-t-elle, en rigolant.

Il se recula, et lui fit un clin d'œil, en lui faisant un petit "ha ha". Elle fut d'autant plus hystérique.

-Mais on va s'ennuyer, si il y a aucun contact physique! lâcha-t-elle, alors.

-Mmh... Tu crois? lui fit-il, toujours avec son sourire en coin. Moi, j'ai une bonne idée! Est-ce que t'as un foulard?

Elle acquiesça et alla le chercher.

-Parfait. Maintenant, noue-le autour de ta bouche, jusqu'à ce que tu ne puisses plus ni crier, ni parler, d'accord?

Elle s'exécuta, un peu méfiante. Thomas lui souriait de toutes ses dents et lui fit, pour la tester;

-Maintenant, crie.

Elle essaya mais n'y arriva pas.

-Tu es douée, beauté! Viens mets-toi là, face au mur et ferme les yeux, je vais te faire quelque chose, mais ne bouge surtout pas!

Il s'éloigna d'elle et me fit signe. C'était donc à mon tour d'entrer en scène. J'entrai silencieusement et pris de mon sac les deux plus gros morceaux de miroirs, presque plus grands que ma main.

-Essaie de te relaxer, de ne penser plus à rien, fais le vide dans ta tête, dit Thomas, à l'attention de Justine.

Elle hocha la tête, et sembla se détendre totalement. Puis je vis Thomas qui me faisait signe d'y aller. Je hochai la tête à mon tour.

Je m'approchai d'elle et levai mes bouts de miroir vers son cou. Elle sembla me sentir et frissonna, pensant que c'était Thomas. Puis je passai à l'acte. Je m'écartai pour prendre un peu d'élan, puis enfonçai de toutes mes forces le verre dans la peau de ma victime.

Elle fut projetée en avant et se prit le mur en pleine tête, qui fut instantanément imprégné de sang. Je retirai les morceaux de miroir de sa peau et commençai à les planter partout dans le corps de Justine. Elle tressaillait, ne pouvant même pas se retourner pour voir l'identité de son agresseur. Le sang giclait de partout, s'était plaisant.

-Alex! Alex! Arrête! Qu'est-ce que tu fous?!

Plié de rire, Thomas essaya de reprendre son sérieux et lui lançai;

-Mais je ne fais rien, Justine! Pourquoi tu t'agites comme ça?

Je posai mon pied sur son dos, pour l'obliger à rester au sol, sans pouvoir se retourner. Thomas s'approcha de mon sac, prit un morceau de mon sac et m'aida à achever mon travail.

Elle ne fut pas facile à tuer, mais nous réussîmes enfin, au bout de bien vingt minutes d'acharnement.

En entendant du bruit provenant de l'appartement, nous ramassâmes nos affaires en quatrième vitesse, et quittèrent l'appartement, sans toucher le moindre centimètre de la chambre de Justine. Mais sur le balcon, je fis remarquer que nous allions laisser du sang sur l'arbre, et donc nos empreintes. Mais Thomas, toujours aussi surprenant, me sortit du gel antibactérien et des mouchoirs. Je rigolai et pris ce qu'il me tendait avec plaisir.

Après notre petit nettoyage, nous redescendîmes par l'arbre et regagnâmes le sol, soulagés.

Sans échanger le moindre mot, on se dirigea à notre lieu de rencontre. Il faisait totalement nuit, il devait bientôt être minuit.

-Bravo Princesse, tu as été formidable, me dit-il tendrement.

-Te sous-estimes pas, t'as fait presque tout le boulot! Tu t'es débrouillé comme un chef!

Il me sourit, et, comme à son habitude, me prit dans ses bras. Puis me chuchota;

-Alors tu veux ton petit baiser?

Je rougis légèrement et hochai la tête, un peu gênée.

Je tendis la joue, comme il l'avait fait, m'apprêtant à recevoir mon baiser. Il m'attrapa tendrement par le menton, et pencha ses lèvres pour toucher ma joue. Mais au dernier moment, il me tourna la tête, de sorte à ce que je sois face à lui, puis, sans avoir eu le temps de réagir, il m'embrassa.

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