CHAPITRE XLVII
Publié le : 02/12/2018 | Mis à jour le : 10/05/2023
Chapitre 47.
Sur la colline de Cerin Amroth, la robe blanche se fraya un chemin à travers la bruyère baignée de lumière. La rosée avait imprégné le fin tissu qui vint épouser la silhouette de ses jambes courtaudes, mais aux courbes harmonieuses d'un bourgeon tout juste sortit de terre. Elle portait un panier en osier auquel s'ajouta au bouquet une jolie fleur pâle qu'elle avait délicatement cueillie sans abîmer la tige. Une niphredil.
En observant la scène, Orophin comprit l'attachement que son aîné vouait à la jeune femme. Et comment cette dernière, dans le premier siècle de sa vie, avait réalisé l'improbable exploit de capturer le cœur du fils du roi de la Forêt Noire. Lui qui d'habitude, tenait en horreur les Nains, ne pouvait nier que l'être devant lui possédait également des attributs elfiques. Un étrange mélange qu'aucun Galadhrim ayant amassé tous les savoirs d'Ennor n'aurait cru possible.
Sa longue chevelure à la couleur si particulière, si vive, recouvrait ses épaules dénudées. Plein de gravité, le visage contrarié de la demoiselle le bouscula dans sa contemplation. Il tressaillit à l'intensité de ses prunelles noires.
— N'as-tu pas honte de m'épier, Petit Arbre ?!
Peu importait la différence d'âge qui les séparait, l'Elfe éprouvait toujours de la gêne lorsqu'elle s'adressait ainsi à lui. Quelle éducation avait-elle bien pu recevoir ? Aucune autre n'avait jamais fait preuve d'autant de familiarité que Mirmel.
Le Galadhrim rejoignit l'Orge d'Aulë sur la colline, et à ses côtés, ne trouva rien de mieux à s'occuper que de lui tenir son panier. Debout près d'elle, il ne s'abstint pas de détailler ce qu'il pouvait, récoltant de nouvelles remarques d'agacement de la part de la rousse qui ne se sentait pas à son aise. Mais c'était plus fort que lui, l'inconnu l'avait toujours farouchement attiré, et dans son esprit, la semi-Elfe était l'incarnation du mystère. Oui, elle était captivante.
Leurs regards se rencontrèrent et elle rompit aussitôt le contact. Orophin resta abasourdi. Bien qu'il côtoyait Mirmel depuis peu, la lueur logée dans ses yeux était familière, douloureuse.
— Vous pouvez pleurer. Laisser votre colère s'exprimer.
Il vit la jeune femme se raidir, secouer la tête avant de reprendre ses gestes.
— Je n'en ressens pas l'envie.
— Vous savez bien que c'est faux, démentit l'Elfe. Que ce qui vous arrive est pareil à un fléau.
Mirmel cassa la tige d'une niphredil qui se tordit, comme pour témoigner sa douleur.
— Et après ? À quoi cela servirait-il ? Je me réveillerai ? Tout ceci ne serait en fait qu'un rêve ? Une mascarade ? Je ne crois pas.
— Mais votre souffrance gardée, elle ne fera que s'attiser.
Elle répondit cette fois d'un ton sec, amer, interrompant sa tâche.
— Elle m'appartient. En quoi cela te concerne ?
Orophin encaissa sans broncher ses propos chargés d'acide. Son propre vécu lui permettait une interprétation différente des mots.
— Je suis navré si je vous ai offensé. Vous êtes notre invitée.
— Oui... Comme tu dis, je ne suis qu'une « invitée ».
Le Galadhrim s'accorda à avouer que cette fois, l'erreur venait de lui.
— Ce n'est pas... Vous êtes l'une des nôtres. Je ne suggérai rien d'autre.
— Je doute d'être un jour considérée comme telle.
— Il faudrait pour ce faire que vous cessiez vos actes solitaires.
Seconde erreur, plus grosse que la précédente. Il aurait dû se taire. À l'évidence, sa bouche parlait sans réflexion avisée. Et la réaction de la demoiselle fut immédiate, tranchante.
— Arrête de t'exprimer en vers, ou je te ferai disparaître !
Elle reprit son panier et rentra à la hâte. Le Galadhrim la regarda s'éloigner les mains vides, mais avec une forte impression de déjà-vu. Il la suivit à distance, simplement pour veiller sur elle. Si cela avait d'abord été un service rendu à son frère, il ressentait maintenant le besoin de la savoir en sécurité, par soucis pour elle.
Haldir sentit le sol trembler bien avant que Mirmel fasse irruption dans la salle des archives. Il ne releva cependant guère plus la tête, concentré sur les écrits où il formulait des réponses à certaines questions qui le nécessitaient. Juste un pressentiment.
Du blanc de l'œil, il l'observa se tortiller à ses pieds. Un sourire naquit sur les lèvres du chef des Galadhrim et protecteur de la Lothlórien. Il posa sa plume. Puisque sa bouche ne voulait se découdre, il parlerait en premier.
— À bout après seulement une semaine ?
La demoiselle explosa alors devant lui, signalant si ce n'était déjà fait sa présence aux alentours.
— J'ignore comment est l'aîné, mais le cadet est insupportable !
— Comment Orophin a-t-il réussi à vous énerver à ce point ?
Aussitôt, un couinement s'extirpa de la gorge de Mirmel.
— Il me donne mal au crâne avec ses poèmes... ! Sa voix résonne dans ma tête... Elle m'empêche de dormir !!
« Des poèmes » ? Haldir réfléchit, et songeur, finit par laisser échapper un rire bref et entendu.
— Si ce n'est que cela, vous vous y ferez. Cela lui arrive... parfois.
Il n'en révélerait pas plus au risque de froisser son petit frère.
— QUOI ?? Non ! s'indigna la jeune femme. Trouvez plutôt une solution !
— Vous a-t-il d'une quelconque façon blessée ou... offensée ?
Mirmel se tut. Prise de court, elle ne sut quoi dire. Serrant le poing, elle lutta pour ne pas l'abattre sur son ami. À la place, elle frappa la table, et repartit comme une tornade. Haldir se leva pour ramasser l'encrier renversé sur le sol. Il ne ressentait nulle colère ou irritation. Il connaissait la raison de son mécontentement, et elle n'était pas celle que la semi-Elfe exprimait. Aussi et pareille aux autres, cette nuit serait bercée par les sanglots d'une âme esseulée.
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N/A
Entrée en scène d'un nouveau personnage : Orophin ! Ce n'est pas un OC puisqu'il existait déjà avant, mais je me permets de le mijoter à ma façon, étant donné que nous avons très peu d'info sur lui. *rire*
L'un des deux frères d'Haldir donc, le cadet ou « Petit Arbre » pour les intimes. L'aîné de la fratrie viendra plus tard. Pour un second rôle, c'est pas grave (sentez le sarcasme).
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