CHAPITRE XLV - LIVRE III
Publié le : 13/10/2018 | Mis à jour le : 25/04/2023
Chapitre 45.
— Maman ! Maman ! Regarde !
L'enfant rentra toute excitée à l'intérieur du logis. Elle accourut puis trépigna devant la table où se tenait une femme assise. Cette dernière leva les yeux de sa tâche anodine et l'accueillit avec la chaleur d'un sourire.
— Regarde ! Regarde ce que j'ai trouvé maman !
Son petit poing s'ouvrit sur une mésange. Pourtant, le regard pétillant de la fillette tourna vite à la déception.
— Bah. Pourquoi il bouge plus ?
Elle tâta du doigt son beau plumage, mais l'oiseau refusa d'exaucer son souhait. Elle interrogea sa mère qui ne souriait plus.
— J'ai rien fait ! s'exclama alors l'enfant en refermant ses doigts, les mains dans le dos, comme pour cacher une bêtise. Il bougeait ! C'est vrai ! C'est pas moi ! J'ai rien fait !
Elle devait la croire. Elle était innocente.
— Où l'as-tu trouvée ?
— Là-bas ! s'écria vivement l'enfant en pointant dehors. Sous le grand arbre !
La femme leva sa main au-dessus de sa fille qui se crispa. Elle caressa sa tête rousse et la petite commença alors à pleurer.
— C'est pas moi ! Je le jure ! insista-t-elle en hoquetant. Pourquoi il bouge plus ? Il bougeait ! Pourquoi, maman... ?
C'était un lieu étrange, hors du temps. Les couleurs ici étaient plus vives, vivantes, un émerveillement dans les yeux transcendant les âges. Il y avait ces deux êtres qui se regardaient, unis par un lien qui ne se déferait jamais, celui d'une mère et son enfant.
— Combien de temps comptes-tu rester là ? s'enquit la femme-Elfe à la chevelure brune.
— J'aime être avec toi, répondit la fillette blottie dans ses bras.
— Tu sais que tout ceci n'est pas réel, n'est-ce pas ?
— Bien sûr. Mon esprit t'a fait apparaître afin que je ne sombre pas entièrement.
— Cela ne peut pas durer éternellement, trésor...
— ... Cela fait-il mal ? demanda subitement l'enfant.
— ... Que sais-tu de la mort, Mirmel ?
Elle nicha davantage sa tête contre les vêtements de sa mère.
— Je suis encore vivante. Comment pourrais-je savoir ?
— Réfléchis-y sérieusement.
— Pas envie.
— Mirmel..., prévint Tauriel.
— D'accord..., se résigna la rousse. Les cavernes de Mandos. C'est là-bas que tu t'es rendue après ta...
— « Mort ». Il n'y a aucun mal à prononcer ce mot.
La petite agrippa sa tunique, les mains tremblantes.
— J'ai peur, maman, avoua-t-elle.
— De quoi, ma chérie ? demanda la femme-Elfe en lui caressant les cheveux.
— Que tu disparaisses.
— Je ne disparais pas, s'amusa la Sylvaine. C'est une nouvelle vie qui s'offre à moi. De mortel. Avec toutes les joies et les peines propres à la nature des Hommes. Une seconde vie, ce n'est pas si mal...
— Mais tu ne seras plus la même ! s'écria la fillette. Et moi... M'auras-tu vraiment oubliée ?
— TOI, tu te souviendras de moi, répondit-elle en lui chatouillant le bout du nez. N'est-ce pas ce qui importe ? Tant que tu ne m'oublies pas, je continuerai d'exister.
Aussitôt, l'enfant se dressa sur ses bras pour plonger ses yeux charbon dans les siens et protester.
— Non... ! Non ! répéta-t-elle. Je ne veux pas...
— Que veux-tu, trésor ? Rester avec moi, ici ? Et laisser tes amis ?
— Je les connais à peine..., marmonna Mirmel.
— Et Legolas ?
En entendant ce nom, la petite devint sévère et colérique. Elle se plaignit d'une voix criarde.
— Alors LUI. C'est quoi cet ami, maman ?! « Fais-lui confiance » ?! C'est le pire conseil que tu m'aies donné ! L'ERREUR DU SIÈCLE ! UN AMI ?! S'il tenait à moi, pourquoi m'avoir menti durant tout ce temps ?! Tu te rends compte que si je n'étais pas arrivée au « mauvais moment », je ne l'aurais probablement jamais su ? Je lui souhaite tout le malheur du monde ! Qu'un Orque l'emporte !!! Je ne veux plus jamais le voir.
— Pourquoi alors crois-tu qu'il soit resté « tout ce temps » avec toi ?
La tête rousse retomba sur ses genoux, mais son air fâché ne la quitta pas.
— Par culpabilité, bien sûr ! Ainsi que pour tenir sa promesse envers la femme qu'il aimait...
— Et si tu commençais par être un peu moins naïve et un peu plus honnête avec toi-même ?
— Pfff. C'est lui le menteur. Même déformer la vérité ou la cacher c'est mentir. Et je déteste les mensonges.
— Tu es mon enfant... et celui de ton père. Tu peux te fourvoyer, mais tu finiras par prendre la bonne décision. Alors, bouge-toi le derrière et va ! Je ne suis pas partie pour que ma fille se morfonde sur son sort, incapable de pardonner les erreurs passées de ceux qui cherchent seulement à la protéger.
La fillette souffla à nouveau puis se leva, résolue à en finir avec cette conversation que son esprit renvoyait en boucle depuis trop longtemps. C'était lassant, épuisant. Sa résultante la ramenait toujours à une simple et même question : « Pardonner ? ».
La semi-Elfe savait qu'elle ne pouvait encore l'envisager. Non, elle n'était pas prête. Et la douleur lui perforant la poitrine lui faisait signifier qu'elle n'était pas prête aux autres choses qui l'attendaient d'ailleurs. Mais ce n'était pas en fuyant la réalité qu'elle allait changer. Elle n'évoluerait jamais en restant ici.
— Tu sais, tu es très convaincante comme mère quand tu te fâches.
— Je sais, rit gaiement la femme-Elfe.
Toutes deux se dévisagèrent avant qu'un sourire étire les traits de la fillette.
— Tu sais comment j'imaginais nos retrouvailles ?
— Dis-moi ?
— Autour de l'un de tes bons gâteaux ! Tu m'aurais adressée le même sourire, en m'écoutant te conter toutes mes aventures. Mais aujourd'hui... C'est à peine si je me souviens de leur goût... Pourtant... J'en suis sûre. Celui-là aurait été le meilleur.
— Tu les aimais tant ?
Un second temps de silence, plus long que le précédent, pendant lequel la petite afficha une sombre expression. Les larmes ne vinrent pas. Elle resta courageuse jusqu'au bout.
— ... Que tu sois ou non vraiment là... Je tenais à te le dire sincèrement au moins une fois...
— Oui, ma chérie ?
— Maman... Je t'aime.
Le reflet de son esprit étira ses lèvres en un doux sourire.
— Moi aussi, trésor... Moi aussi..., répéta Tauriel avant de disparaître dans un rayon de lumière.
Mirmel ne fit qu'entrouvrir ses paupières, aveuglée par le soleil.
— Je veux parler à Legolas, requit-elle aux ombres agitées autour d'elle.
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N/A
Ce nouveau LIVRE commence donc avec un flashback. Le souvenir de Mirmel enfant où elle a pris conscience pour la première fois de la signification du paradoxe de vie/mort.
Nous enchaînons ensuite avec une scène semblable à un rêve dont Mirmel ne gardera aucun souvenir (d'où le titre « Songe »), mais qui servira à la compréhension de ses actions futures. Je ne ferme pas la porte à une seconde interprétation, libre à vous de croire ou non à la véracité de cette apparition.
Aussi, ce chapitre est en quelque sorte une transition entre les 2 parties. Il se détache de la réalité, avant de retourner à la nouvelle à laquelle Mirmel va devoir faire face.
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