CHAPITRE XLIX
Publié le : 10/12/2018 | Mis à jour le : 01/06/2023
Chapitre 49.
— NOOOOOON !!! continua-t-elle de hurler le visage inondé de perles cristallines. VOUS AVIEZ DIT QUE JE LA RETROUVERAIII !!! QU'ELLE ÉTAIT AU VALINOR ET QU'ELLE M'ATTENDAIIIIIIT ! MENTEUUUR !!! JE TE TUERAI ! JE TE TUERAIII !!!
Une fulgurante douleur foudroya l'Elfe. Sa poitrine transpercée, les éclats de son cœur dispersés déchirèrent sa chair et ses entrailles. Son corps entier criait aux abois, tandis que son esprit captif s'émiettait un peu plus chaque seconde. Et rien n'aurait pu le préparer à cette réalité. Avoir accepté d'être l'instigateur de cette tragédie ne rendait guère à l'heure venue le jugement plus clément.
Il avait causé son malheur de ses mains.
L'agonie le transcendait, prolongeait cette souffrance inimaginable qui empoisonnait son sang. L'expiation d'un crime contre nature, comme s'il avait tranché sa propre chair. Quand soudain, il fut arraché à cette vision infernale. Pourtant, lorsque la jeune femme disparue, une peine bien moins miséricordieuse l'acheva. Son ami ne put le retenir de tomber à genoux. Ses poumons paralysés l'empêchèrent de hurler. Le monde accablé autour de lui entama la même valse, aussi terrible que terrifiante à voir et à subir. La danse de celle qu'il venait de perdre.
— LEGOLAS !
Le prince ouvrit ses paupières en sursaut. Les sueurs froides collées à son front s'envolèrent. Il esquiva de justesse l'attaque de l'Uruk-haï qui s'abattit sur la roche et la fendit. Le mi-Orque, mi-Gobelin, le surplombant s'apprêta à lui porter un coup fatal, lorsqu'une épée lui sortit du thorax. Il s'effondra à ses pieds dans un grondement étouffé. Son sang noir abreuva la terre souillée.
— Réveillez-vous, Legolas ! tonna à nouveau Aragorn.
Le Sinda se releva enfin, et saisissant par la poignée sa lame elfique, la tira de son fourreau pour trancher d'un tour de bras la gorge du deuxième assaillant. D'une pareille foulée, il l'échangea pour son arc et décocha une flèche dans les fourrées. Le cri qui parvint à ses oreilles lui plut, semblable au plus doux des miels. Il se jeta dans la mêlée, et d'une effroyable efficacité, tua bien plus que nécessaire.
— Laissez, l'ami !
Aragorn l'arrêta par l'épaule, et le prince se dégagea d'un geste brutal. L'un des Uruk-haï lui avait échappé.
— Qu'avez-vous fait ?! Il va revenir avec des renforts !
— Mais reprenez vos esprits, enfin ! vociféra à son tour l'Homme en langue commune. Vous vous apprêtiez à le pourchasser dans les bois qui grouillent, où aviez-vous donc la tête ?!
— Tuer ainsi ne vous apportera que la folie, renchérit Gandalf.
— En cet instant, me débarrasser de la Raison serait fort appréciable.
L'Elfe jeta un regard froid au Magicien cloué sur place par la férocité de ses mots, et maudissant ses conseils, mena la marche.
La tranquillité leur avait été refusée. La Communauté était traquée. Descendre l'Auduin aurait dû être une partie de plaisir. Ils n'auraient eu qu'à se laisser porter par le courant du grand fleuve jusqu'à l'Argonath, les portes du Gondor. Au lieu de cela, la troupe avait abandonné précipitamment leurs embarcations elfiques pour atteindre le rivage ou sinon mourir.
Le traître venait de l'Ouest, un Maia qui comme Gandalf, avait été envoyé en Terre du Milieu par les Valar pour lutter contre Sauron : Saroumane. À l'origine de l'avalanche foudroyante les ayant frappés des semaines plus tôt, celui-ci avait choisi de se rallier au Mordor. Et depuis, il semblait avoir levé des troupes de l'Isengard, sa forteresse, à la poursuite du porteur de l'Anneau. Dorénavant, le danger planerait à chaque instant sur la Communauté...
Le soleil au zénith, Legolas dut se plier à la décision commune d'une nouvelle pause. Il n'en démordrait pas, ils devaient à tout prix avancer et éviter de demeurer trop longtemps statique. Le lieu ne les préviendrait pas d'une embuscade, même dissimulés par les sous-bois bordant le fleuve.
Le Sinda resta debout sur la rive. Tenu en vigilance, il fixait un point au loin, les oreilles attentives. Bien que tout le corps de l'Elfe exprimait une fatigue notable, il ne ferait plus l'erreur de se relâcher. Chaque songe l'abandonnait en proie à la faiblesse de son esprit. Un rappel encore et toujours afin qu'il n'oublie pas. Comment seulement le pourrait-il ? Alors qu'elle n'était plus là.
— Bien que regarder d'où l'on vient ne nous empêche pas d'avancer, cela ne nous prévient pas de chuter.
La voix de la sagesse était une boussole qu'il ne méritait guère. Le prince se sentait misérable à présent, et condamnait son comportement un peu plus tôt à l'égard du Magicien. S'il n'osa faire face au vieil homme qui lui accordait son pardon par honte, il ouvrit toutefois son cœur. Il exposa ainsi le mal qui sévissait en lui, succombant à ce que ce dernier endolori chuchotait : un aveu. Pour la première fois, il s'autorisa à formuler ces mots.
— À chaque fois que je ferme les yeux..., commença-t-il l'expression noyée dans l'eau, je la revois encore. Rayonnante sous le soleil d'été, à s'occuper de ce loup ou de que sais-je... Comme si rien d'autre ne compte. Sans le réaliser, je décoche déjà une flèche qui fait fuir l'animal. Ses aronias se posent alors sur moi, et tandis que je la rejoins, j'oublie la satisfaction qui m'emplit. J'ai... toujours eu conscience... que l'attachement que je ressentais était... unique. Mais avant que je consente à cette éventualité, il était trop tard...
La Communauté se combla dans le silence en écoutant leur compagnon. Depuis leur départ, Legolas n'avait en effet guère partagé un quelconque sentiment avant ce jour. Comme si la semi-Elfe, leur amie et camarade de route, n'avait jamais fait partie du voyage.
— En deux mille ans, je pensais avoir appris... vu... Mais en réalité, je suis un ignorant. Et tandis que la terre tremble et les pousses grandissent, j'en viens parfois à rêver qu'il en soit autrement. Que mes décisions ne m'amènent pas en ce jour où le seul souvenir qui me hante est la souffrance qui l'a brisée devant moi. J'étais... responsable d'elle. Pourtant, je n'ai pas su la protéger. Je l'ai... trahis. Alors je l'accepte... Elle a des raisons de me détester, de me haïr... Pour les lui avoir données.
En écoutant la fin de sa confession, les membres de la Communauté comprenaient maintenant à quel point, plus que n'importe qui, la séparation l'avait affecté. Et en toute franchise, compatissant, et avant qu'une autre voix s'élève, Gimli se racla la gorge et grommela.
— Tous vos malheurs me démangent le postérieur.
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N/A
Mirmel & Legolas ont une vision similaire et douloureuse des événements les ayant séparés, mais toutefois différente. La façon dont ils l'expriment est différente.
Legolas fait preuve d'une réelle sincérité en avouant ouvertement ses sentiments à l'égard de Mirmel, un sacré saut ! Même si ce n'est pas à la principale intéressée... Il y a du progrès ! Pour ceux qui y auraient pensé, Legolas fait référence à une scène qui n'est autre que celle peinte dans le chapitre 14 (« Messager royal »). Une nouvelle interprétation, donc.
Quant à Gimli, il est vrai que sa compassion s'exprime à la naine !
Pour finir, une petite question qui a toute son importance : « Quelles conséquences aura cette confession sur sa façon d'agir et d'entreprendre à l'avenir ? » ^v^*
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