Smoke and Mirrors
Paris, 2004.
Dario dessinait dans son carnet de dessin, de la musique dans les oreilles. Enfin, par rapport à son nouveau patron, il gribouillait plus qu'autre chose.
Même si son ancien surnom de Gorilla lui collait encore à la peau, il avait changé.
Il était libre, enfin. Il avait pu partir, s'échapper.
Show me a sign, sweep me away...
Il pensait à la manière dont Gabriel Agreste l'avait sauvé.
À la fin de l'année 1993, il avait pris son courage à deux mains et avait disparu, fuyant la mafia.
Sauf que sans argent, il n'avait pas la possibilité de quitter Naples. Et vouloir quitter la famiglia, ça ne se fait pas. Il l'avait appris à ses dépens, s'engageant dans une folle course-poursuite qui avait duré près de dix ans.
Life taker, open up my mind!
All I believe, is it a dream?
Puis Gabriel avait surgi de nulle part, rachetant sa liberté, lui demandant de le suivre.
Dario n'avait pu qu'accepter, ivre de reconnaissance. Et il n'en revenait toujours pas, un an après. Toute sa nouvelle vie était un rêve, tout ce en quoi il croyait maintenant était comme un rêve...
I wanna believe! But all that I know, is it just smoke and mirrors?
Il sourît. La chanson dépeignait parfaitement son incrédulité, sa difficulté à accepter à quel point sa vie avait changé. Il voulait y croire, oui, mais une part de lui remettait toujours les événements en cause.
Et le changement avait été tellement complet, ça n'aidait pas. Passer de pion dans les mêlées, misérable et mal-aimé, étrangement pauvre, à garde du corps et chauffeur de riche, avec le respect associé, c'était radical. Et puis, il y avait la douceur d'Adrien, le fils de son patron, âgé de trois ans et absolument adorable. Et qui adorait le garde du corps.
I'm starting to cave, I'm losing my flame...
Dario laissa échapper un sourire mi-heureux, mi-triste. Encore une fois, les chanteurs avaient étrangement juste. Cela faisait seulement un an mais ce bonheur auquel il ne s'habituait pas le brisait quelque part. Les années de sa fuite, il avait toujours été combattif et courageux, déterminé... Là, par moments, il se sentait vide. Il n'avait pas d'énergie.
Life-taker...
Le mot frappa les oreilles de l'Italien. Il secoua aussitôt la tête, avec effroi. Non, ça, plus jamais. Il le jurait. Il avait déjà trop pris de vies pour continuer. S'il fallait vivre vide, il serait vide, mais il refusait de quitter cet endroit sécurisant comme la pensée l'en avait effleuré un instant.
Il regarda son dessin, sur lequel il avait cessé de se concentrer depuis un moment, laissant sa main tracer les traits seule. En voyant qu'il avait dessiné, dans une jolie réunion, les sept personnes autour de lui, Gabriel et Émilie avec leur fils Adrien, et Raphaël et Amélie avec Félix, sous le regard toujours bienveillant mais énigmatique de Nathalie, sa collègue, il sourît.
Cela, c'était une vraie image du bonheur.
But all that I hope, is it just smoke and mirrors?
Il n'avait pas encore fait sa place dans ce bonheur-là, il se contentait de l'observer et de le préserver de loin. Mais il espérait y arriver, se frayer un chemin jusque là.
Et quand il aurait appris à être heureux ici, ça ne serait pas un reflet illusoire, une trace de fumée.
Il reprît son crayon et, dans le bord opposé de la page, il commença à dessiner un personnage qui lui ressemblait un peu.
Want to believe...
Son sourire s'accentua. Oui, il voulait croire. Vraiment. Et vouloir croire, c'est le premier pas pour croire réellement.
En traçant son ombre imagée dans le tableau, en écoutant les notes ricocher autour de lui, il décida qu'il s'intégrerait à la vie du manoir Agreste.
Chaque jour, il ferait un pas de plus. Ça n'était pas compliqué.
All that I hope, is it just smoke and mirrors?
Alors que la question était répétée, Dario haussa ses larges épaules. Il refusait de douter. Ce qu'il voyait, la complicité entre les deux sœurs, leur amitié avec Nathalie, la relation fraternelle entre leurs époux, les rires des deux enfants qui se poursuivaient et jouaient dans la demeure, ce n'était pas faux. Ce n'était pas de la fumée. Ce n'était pas un trompeur reflet de réalité.
Les voix qui l'avaient autrefois poussé à se rebeller, qui aujourd'hui était venu répondre à ses doutes, ne l'entraînerait pas cette fois.
Il se le promît encore dans les derniers échos de musique.
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728 Mots.
Eh beh c'est pas mal... Peut-être un peu embrouillé, mais j'ai réussi à faire un truc correct alors que l'inspi n'était clairement pas là. La concentration, n'en parlons pas...
Vous suivez la chronologie, pas trop perdus ?
Je suis trop contente d'avoir trouvé un nom pour le Gorille, aussi ! Italien, compte tenu de l'OS précédent le concernant... Mais assez pas courant quand même je crois...
Ca vous a plu ? Dites-moi vos avis !
Bises,
Jeanne.
(17/11/2021)
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