Jeudi Vingt-et-Un


Noël approchait à grands pas, et Marinette le savait mieux que personne. En effet, la jeune fille préparait pour l'occasion avec ses amis une grande fête. Mais ça, tout le monde – à la condition de ne pas vivre dans une grotte – le savait. Ce que les gens ne savaient pas, c'est qu'en plus de cela, elle était Ladybug, ce qui lui prenait une bonne partie de son temps libre. Et ce que les gens ne savaient – pour le moment du moins – pas non plus, c'est qu'elle avait depuis tout récemment un petit ami. Adrien Agreste, perfection faite adolescent, détenteur de surcroit du Miraculous du Chat Noir, sortait secrètement avec elle depuis à présent un peu plus de quarante-neuf heures.

Il était donc quinze heures, et les élèves sortaient de cours. Monsieur D'Argencourt avait exceptionnellement annulé leur cours d'éducation physique à cause d'une bronchite aiguë qui avait amené son médecin à suspendre son travail. Après tout, avait-il dit, c'est bientôt les vacances !

Marinette, après avoir souhaité une bonne fin de journée à ses amis, partit en direction de la résidence de la famille Tsurugi. Elle profitait ainsi de ces deux heures supplémentaires imprévues pour s'entraîner d'une part, et terminer la tenue de Kagami d'autre part.


▬ ▬ ▬


Elle arriva rapidement à destination et, comme la fois précédente, c'est la jeune Japonaise qui vint lui ouvrir.

— Bonjour Marinette, pas de sport aujourd'hui ?

— Le prof est malade. Comment tu sais que j'étais censée avoir sport ?

Kagami haussa les épaules, et invita sa camarade à la suivre. L'odeur de yuzu planait toujours dans l'air, et la bleutée reconnut le son du koto de la maîtresse de maison.

— Je t'ai apporté ta tenue, afin que tu l'essayes et, qu'au besoin, je fasse quelques retouches.

— Je te remercie. Nous verrons cela après l'entrainement, si tu le veux bien.

— Pas de souci, affirma Marinette.

Elle suivit la jeune fille jusqu'à la salle d'entraînement habituelle. Une fois changées, elles prirent place au centre de la pièce.

— Ma mère sera là dans quelques instants. En attendant, je te propose de nous échauffer tranquillement. Fais bien travailler tous tes muscles, ils risquent d'être sollicités aujourd'hui.

— Entendu.

Marinette fit donc chauffer l'ensemble des muscles de son corps, ne lésinant sur aucune partie et mettant à rude épreuve sa souplesse.


Quelques minutes plus tard, Yukiko, la mère de Kagami, fit coulisser la porte et entra dans la pièce. Elle salua Marinette, puis s'assit comme à son habitude en tailleur contre le mur, avant de prendre la parole.

— Rien de bien nouveau pour aujourd'hui, nous reprenons comme mardi dernier.

Les deux jeunes filles acquiescèrent, et la bleutée surprit un échange de regard et un léger hochement de tête de la part de la mère. Puis le combat commença.

Rapidement, Marinette fut débordée. L'énergie déployée par Kagami était sans commune mesure avec celle à laquelle elle avait dû faire face la fois précédente. Elle croyait que la Japonaise était bien meilleure qu'elle, mais elle était en fait loin du compte. Elle n'apercevait pas la limite de son talent, et ne préférait pas imaginer le niveau de sa mère. Elle se concentra donc du mieux qu'elle put sur le combat.

La jeune Franco-Chinoise était condamnée à la défensive. Elle parait ou évitait du mieux qu'elle pouvait les coups qui pleuvaient sur elle, mais à aucun moment son adversaire ne fut menacée d'une quelconque manière. Elle frappait du pied, du poing, enchaînant les frappes à différentes hauteurs. Elle semblait arriver de partout à la fois, virevoltant autour d'une Marinette qui n'en menait pas large, et finit par s'effondrer.

— Comment tu fais pour te déplacer aussi vite ? questionna-t-elle, étonnée.

— Entraînement, entraînement, et entraînement, assena son adversaire. Mais tu as tenu très longtemps au vu de la pression que je te faisais subir, c'est bien.

— Si tu le dis. J'ai surtout eu l'impression de ne rien pouvoir faire !

— Ne crois pas cela. Nous reprenons quand tu es prête.

Marinette but quelques gorgées d'eau avant de se replacer au centre de la pièce.

— Je suis prête, affirma-t-elle.

— Bien.

Et Kagami reprit son assaut, feu follet insaisissable tournoyant tout autour de la jeune fille. De nouveau condamnée à la défensive, Marinette se concentra du mieux qu'elle pouvait sur les mouvements de son adversaire. Si elle pouvait apercevoir la moindre faille, la moindre séquence répétitive, peut-être pourrait-elle... Là, Kagami levait son bras un petit peu haut pour le coup qu'elle portait. Marinette devait frapper. Maintenant.

Touchée dans les côtes pendant son mouvement, Kagami recula d'un pas. Marinette profita de l'avantage et voulut asséner une nouvelle frappe. Mais la Japonaise s'était déjà reprise, et para sans peine. Néanmoins, un coup avait été porté, et la bleutée était de nouveau confiante. Son adversaire n'était pas infaillible, et elle faisait encore des erreurs en combattant.

Durant encore quelques minutes, les coups s'enchaînèrent. Marinette économisait le plus possible ses forces pour placer, ponctuellement, un atemi violent qui touchait presque toujours. Elle réussit même à enchaîner un coup de poing, puis un coup de pied, faisant reculer son adversaire de plusieurs pas.


— Stop.

Le combat prit fin. Les deux jeunes filles étaient exténuées, et transpirantes.

— Je pense que cela suffit pour aujourd'hui. Marinette, j'aimerais te parler. Mais tu peux prendre une douche si tu le souhaites d'abord, Kagami va te montrer.


▬ ▬ ▬


Une dizaine de minutes et une douche bien chaude plus tard, Marinette se trouvait, son corps propre et son esprit serein, devant Yukiko Tsurugi. Kagami prenait à son tour sa douche, mais de toute évidence cette discussion ne la concernait pas.

— Sache, Marinette, que je ne suis pas du genre à tergiverser. Je vais donc être directe. Je sais que tu es Ladybug.

Marinette eut un hoquet de stupeur. Elle tenta de noyer le poisson, sans grand succès.

— Moi ? Ladybug ? Non, vous devez faire erreur ! Je...

— Ce n'est pas la peine de mentir, la coupa-t-elle. Premièrement, votre style de combat est le même. C'est pour cela que j'ai demandé à Kagami de te pousser dans tes retranchements. Deuxièmement, j'étais présente à Notre-Dame.

— Vous êtes catholique ? demanda Marinette.

— Non, mais là n'est pas la question. J'ai senti que quelque chose se préparait ce jour-là. Et j'ai, de toute évidence, eu raison de venir. N'aie crainte, précisa-t-elle en voyant le regard de la jeune fille s'affoler, tu n'as aucune raison d'avoir à te méfier de moi. Je ne peux rien t'expliquer pour le moment, mais je t'assure que je suis dans ton camp. Ton secret est bien gardé avec moi, comme celui de ton ami – petit ami n'est-ce pas ? – Adrien. Il me semblait simplement honnête que tu sois mise au courant.

— Je... Je ne sais pas quoi dire... J'espère que je peux vous faire confiance, en effet. Merci de me l'avoir dit.

Madame Tsurugi s'inclina, et se détourna, rappelant à Marinette qu'elle avait un kimono à faire essayer. Celle-ci récupéra donc son paquet contenant ledit habit, et se mit à la recherche de Kagami.


▬ ▬ ▬


À la place de la jeune fille, elle trouva une pièce vide. Vide, à l'exception d'un mur, auquel une gigantesque peinture était accrochée. Peinture représentant une splendide grue du Japon, reconnaissable à sa tache rouge sur le sommet du crâne. L'animal, dont la silhouette se découpait devant une montagne, était criant de vérité. Tous les détails étaient reproduits. Les plumes extrêmement réalistes, les yeux brillants, les ailes à demi déployées, le tout était si vrai que la jeune fille avait l'impression que l'oiseau était vivant et la regardait.

— Celui-ci est de ma mère. Elle l'a peint au Japon, devant le Fuji-San, que l'on aperçoit derrière. Quand je te disais que les plus beaux tableaux étaient les siens, je ne mentais pas, n'est-ce pas ?

— Oh, Kagami, excuse-moi, je ne voulais pas fouiller dans vos affaires, je suis entrée par hasard. Je te cherchais.

— Il n'y a pas de mal. Viens, il faut que j'essaye ton œuvre.


Elles se dirigèrent vers la chambre de la jeune Japonaise. Une décoration sobre, des meubles fonctionnels, la pièce était à l'image de la jeune fille. Rien d'extravagant, aucune fioriture.

— Alors ? Montre-moi, demanda Kagami.

Marinette déballa le paquet qu'elle tenait toujours dans ses mains, et en sortit le kimono confectionné par ses soins.

— Bien, tout ceci me parait excellent. Je peux l'essayer ?

— Bien sûr !

La jeune fille commença à retirer le t-shirt qu'elle portait. Sortant tout juste de la douche, elle s'était habillée de manière très décontractée, tranchant nettement avec ses tenues habituelles. Marinette rougit, et se détourna en grommelant.

— Mais qu'est-ce que vous avez toutes à vous mettre presque nues devant moi ?

— Mmh ?

— Alya dimanche, puis toi maintenant... Le concept de pudeur vous est-il étranger ?

— Je suis en sous-vêtements, dis-toi que je suis en maillot de bain et tout ira bien.

Silence. Kagami regarda son amie. Joues rosées, sourire gêné, elle était toujours aussi mignonne. Mais elle avait de toute évidence encore beaucoup à apprendre.

— Un corps se respecte, que ce soit le tien ou celui d'un autre. Inutile d'en avoir honte, ou, au contraire, de s'en enorgueillir. Je n'éprouve pas de plaisir particulier à me montrer nue, mais cela ne me provoque pas d'embarras. Ou ne m'en provoque plus, devrais-je dire...

Elle enfila le vêtement. Le tissu glissait souplement contre sa peau. Taillé par Marinette, il était parfaitement adapté à la carrure de la jeune fille.

La bleutée observa d'un œil critique son travail, vérifiant de tous les côtés si tout était parfait. Ce qui était le cas. Rassérénée, elle soupira et sourit.

— Ça te plait ? C'est la première fois que je fais ce type de vêtement, alors ce n'est sans doute pas parfait. Si tu as besoin d'une retouche, c'est maintenant ou jamais.

Kagami fit quelques pas, tourna sur elle-même, tendit les bras, en avant, puis en arrière, testant la souplesse du tissu.

Elle s'observa dans un miroir. Le tissu, d'un rouge bordeaux, était agrémenté de longues branches dorées de pin blanc du Japon réparties sporadiquement et montant depuis le bas jusqu'à la taille. Un kamon était présent dans le dos, et deux sur les manches. Manches larges, plus longues que ses bras, qui cachaient par conséquent ses mains. Inutile de s'enorgueillir de son corps, avait-elle dit. Peut-être, mais il fallait avouer que Marinette savait parfaitement le mettre en valeur.

— C'est parfait, Marinette, je te remercie, dit-elle en s'inclinant.

— Oh bah tu sais, il n'y a pas de quoi, disons que c'est un échange, avec l'entraînement, et tout...

La jeune fille se déshabilla, plia proprement le kimono, et remit ses habits, provoquant une nouvelle fois le rouge sur les joues de Marinette.


▬ ▬ ▬


La nuit était tombée sur Paris. Le ciel était dégagé et les étoiles bien visibles, contrairement à la lune qui venait tout juste de réapparaître. Le froid piqua les joues de Marinette, qui prit le chemin du retour.

Elle changea rapidement d'avis. Sa combinaison la protégeant du froid, une petite ronde ne pouvait pas faire de mal. Elle s'assura donc d'être hors de vue, avant de se transformer.

Derrière une fenêtre, Kagami observa Ladybug s'envoler à travers la ville. 

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