Dimanche Vingt-Quatre
Dimanche vingt-quatre, le réveillon de Noël. Probablement la journée la plus attendue de l'année par bon nombre d'enfants à travers le monde. Et ce n'étaient pas les élèves du collège Françoise Dupont qui allaient affirmer le contraire. La petite fête organisée par Marinette, Adrien, Alya et Nino était prévue pour le soir même, et les préparatifs étaient pratiquement terminés. Il ne restait plus qu'à terminer la préparation du repas, et tout serait parfait.
Par conséquent, c'est en cuisine que se trouvaient les quatre amis, qui travaillaient sous la direction de Marlena Cesaire au Palace Hôtel. La chef cuisinière arrivait on ne sait comment à gérer à la fois les cuisiniers qu'elle dirigeait habituellement en plus des adolescents, le tout dans la même pièce.
Depuis le matin, ils découpaient, éminçaient, assaisonnaient, taillaient, hachaient, faisaient rissoler, cuire, revenir, frire, le tout dans la joie et la bonne humeur. Ils reçurent même après le service l'aide d'un jeune serveur du restaurant.
Cela n'étonnera donc personne si en fin d'après-midi, Marlena annonça aux enfants qu'ils pouvaient aller se préparer, qu'elle saurait se débrouiller pour le reste.
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Alya était la seule du quatuor à n'être pas rentrée chez elle. En effet, sa robe se trouvait toujours chez Marinette, et c'est donc au domicile de la bleutée qu'elles se dirigeaient toutes les deux.
La séance de préparation fut rapide. Elles n'étaient pas du genre à tergiverser, et de toute façon, leurs tenues étaient prêtes, elles n'avaient pas à en essayer plusieurs.
Une touche très discrète de maquillage plus tard, elles étaient parées. Et c'est toutes guillerettes qu'elles se rendirent à la salle des fêtes, pour arriver les premières.
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Quelques rues plus loin, dans le manoir Agreste, Adrien découvrait la tenue conçue par son père qu'il porterait ce soir-là. Le plus étonnant fut que c'est Gabriel Agreste himself qui lui apporta, présenta, et offrit.
Il expliqua une nouvelle fois à son fils qu'il avait décidé de reprendre leur relation, et que par conséquent c'était tout à fait normal que ce soit lui qui s'occupe de ce genre de choses. Que c'était normal qu'ils aillent ensemble à la soirée également.
Adrien se regarda dans un miroir. Les vêtements que lui avait confectionnés son père étaient sublimes, comme d'habitude. Il cherchait encore qui de Marinette ou de lui faisait les plus belles tenues. Probablement lui, expérience oblige, mais sa petite-amie ne tarderait sans doute pas à le rattraper si elle continuait dans cette voie.
Il croisa le regard de son père dans le miroir, et eut un sursaut. Il ne l'avait pas remarqué lors des quelques minutes précédentes, mais il avait mauvaise mine.
— Tout va bien, père ? Vous semblez... fatigué, hasarda le jeune homme.
Gabriel Agreste se força à sourire et adopta un ton qu'il voulait joyeux.
— Un petit peu, j'ai eu une semaine... difficile. Mais ça va bien, je dormirai mieux la semaine prochaine, ne t'en fais pas !
— Si vous avez besoin de parler, je suis aussi là pour ça, vous savez.
— Voyons, Adrien, je suis ton père. Si tu as des problèmes, tu peux m'en parler – même si j'ai peur de ne pas forcément être très utile –, mais je n'ai pas à t'ennuyer avec les miens.
— J'insiste.
Adrien vit très nettement son père hésiter. Il avait l'air en grand conflit intérieur, c'était inquiétant, lui, Gabriel Agreste, dont l'impassibilité était réputée inébranlable.
— Je te remercie, fils. Mais nous verrons plus tard, il est hors de question que je te gâche la soirée. C'est Noël, profitons-en !
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Lorsque Adrien sortit de la voiture en compagnie de son père, Marinette, Nino et Alya étaient déjà présents, accompagnés de leurs familles respectives, mais également Kagami et sa mère, la famille d'Alix ainsi que Nathaniel et ses parents.
Tout le monde était sur son 31. Heureusement, il savait que son père avait fait du beau travail – c'était son métier, après tout – et qu'il ne faisait donc pas tache.
Alya appela Marinette lorsque la voiture d'Adrien se gara devant la salle. Le jeune homme en descendit accompagné de Gabriel, et la bleutée en eut le souffle coupé. Le blond était vêtu d'un complet bleu pâle, d'un t-shirt sombre et d'un foulard couleur crème noué autour de son cou. Ce garçon respirait la classe, et la jeune fille ne pouvait définitivement pas s'empêcher de le regarder.
Les invités défilèrent au fur et à mesure, se répartissant par petits groupes dans la salle. La soirée permettait également de rencontrer de nouvelles personnes, et la bleutée était heureuse de voir que les gens ne se limitaient pas à leurs connaissances préalables.
Puis arriva Chloé, accompagnée par son père, ce qui provoqua un instant de flottement quand elle entra dans la salle. Adrien le premier se reprit, et alla la saluer.
— N'oublie pas, c'est Noël, donne-lui une chance, lui murmura-t-il à l'oreille.
La jeune fille soupira, et ne répondit rien.
Elle s'approcha des trois autres, dit bonjour à Nino et Alya, inspira un grand coup, et fit la bise à Marinette. Elle lui glissa même un compliment sur sa très jolie robe rose. Mais la bleutée ne semblait pas particulièrement réceptive, pour ne pas dire presque dégoûtée par la proximité de la blonde. Cette dernière haussa donc les épaules, et se détourna.
— Tu vois ? Je peux faire des efforts, mais si elle n'en fait pas, je ne vois pas pourquoi je serais la seule à devoir me fatiguer.
— Je vais aller lui parler. Mmh... Tant que j'y pense, parce qu'il vaut mieux que ce soit de ma bouche que tu l'apprennes. C'est ma petite-amie, maintenant, Marinette.
— Je te connais par cœur, Adrichou, depuis le temps. Je l'ai vu dans tes yeux à la seconde où je suis entrée. Félicitations, je suppose... Du moment que tu es heureux, c'est le principal, mon chou.
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C'est aux alentours de vingt heures, alors que tous les invités étaient présents – Marinette était d'ailleurs extrêmement étonnée que tout le monde ait pu venir – et picoraient diverses mises en bouche, que Marlena Cesaire débarqua au volant d'une camionnette empruntée à la mairie qui permettait de garder les aliments au chaud. La mère d'Alya avait quand même pris le temps de se changer, ce qui était de toute évidence au goût de son compagnon.
Tout le monde passa alors à table, dégustant le menu concocté par la chef, et ses aides commis en la personne des adolescents.
Le repas se déroula dans la bonne humeur, malgré l'absence d'alcool. Contrairement à la croyance populaire, il était tout à fait possible de s'amuser sans alcool, preuve en était du calme tout à fait relatif qui régnait dans la salle. Les conversations allaient bon train, tout le monde discutait avec ses voisins de table, faisant connaissance autour d'un succulent repas.
L'étranger est un ami que l'on n'a pas encore rencontré, paraît-il. C'était d'autant plus vrai ce soir-là, où de nombreuses nouvelles connaissances se firent, dans la joie apportée par l'esprit de Noël.
Les haut-parleurs diffusaient continuellement une douce musique de fond. Du moins, jusqu'à ce que Nino s'empare du micro entre le fromage et le dessert.
Les ventres étaient remplis. Bien remplis. Peut-être trop remplis pour certaines personnes. Faire une pause permettrait à tout le monde de digérer, et aux parents Dupain-Cheng de ramener leurs gourmandises de fin de soirée.
Mais faire une pause permettait également à Nino de montrer ses talents à l'ensemble des présents. Il enchaîna ainsi diverses musiques, réussissant même – à sa plus grande joie et pour la deuxième fois – à faire se trémousser monsieur Bourgeois, le maire de Paris en personne.
Cette pause était également l'occasion pour Adrien de franchir une étape qui – il l'espérait fortement – pourrait se passer sans heurt. Il avait décidé d'officialiser son couple à son père.
Il en avait longuement parlé avec Marinette, et la jeune fille, qui lui avait précisé que ses parents étaient bel et bien au courant, l'avait encouragé. Il était petit à petit en train de renouer avec son père, et l'honnêteté était primordiale dans ce genre de relation. S'il jugeait qu'il était temps de lui annoncer, elle le soutenait, quoi qu'il arrive.
C'est en repensant à cette conversation qu'il avait pris la main de sa petite amie, et s'était dirigé à la table où était assis son père, resté seul après le départ temporaire des parents de Marinette.
— Père, commença le jeune homme. Puis-je vous parler quelques minutes ?
— Mais bien sûr, Adrien, ce n'est pas que je suis très occupé, pour le moment.
— Enfin, Gabriel, vous pourriez danser ! s'exclama Sabine Cheng, qui revenait à l'instant un plateau dans les mains.
— Non, je vous remercie, Sabine, répondit ce dernier en essuyant ses lunettes, très peu pour moi. La danse, ce n'est pas tellement ma tasse de thé.
Adrien cligna des yeux. Il redécouvrait son père au fur et à mesure que le temps passait.
— Et donc, Adrien, tu désirais ?
— Euh... Eh bien, je voulais vous annoncer que je sors avec Marinette. Avec, euh... votre permission, bien sûr ?
— Oh, grande nouvelle ! Enfin, je suppose. Je... ne suis pas spécialement habitué à ce genre de choses, mais je crois que je suis censé vous féliciter, ou quelque chose de ce genre. Enfin, mon fils, si tu es heureux, c'est tout ce que je demande. Et puis, Marinette me paraît être une fille extrêmement bien, donc...
— Extrêmement bien ? Un peu mon n'veu ! Mais c'est qu'elle a de qui tenir aussi !
C'était au tour de Tom Dupain d'intervenir dans la discussion. Et Marinette ne savait plus où se mettre. Elle était cachée dans l'ombre d'Adrien depuis le début de la conversation, mais espérait à présent complètement disparaître derrière le jeune homme.
— Ne vous cachez pas, jeune fille, voyons, ces compliments m'ont l'air tout à fait mérités. Je peux vous dire un mot, en privé ?
— Euh, oui bien sûr... Adrien ?
— J'ai un truc à demander à Nino, je reviens ! affirma celui-ci.
— Je sais que je vous l'ai déjà dit, il y a de cela une vingtaine de jours, mais je vous remercie. Je me doutais bien que lorsque vous m'aviez dit « j'aime beaucoup Adrien », vous l'aimiez vraiment beaucoup, mais j'ai l'impression qu'il est réellement plus heureux quand il est avec vous. Alors merci, du fond du cœur, de ce que vous faites pour lui. Presque pour nous, devrais-je dire.
— Oh, euh... Il n'y a vraiment pas de quoi. Et puis, vous savez, c'est aussi grâce à vous qu'il est plus heureux. On en a déjà longuement parlé, et il est vraiment très content de l'évolution de votre relation. Il a toujours simplement cherché à avoir un père qui l'aime, et...
Elle s'interrompit, remarquant un profond soupir doublé d'une expression coupable sur le visage de Gabriel Agreste. À moins qu'elle n'ait mal vu. Le père d'Adrien avait retrouvé un sourire qu'on ne pouvait certes pas qualifier de jovial, mais qui tranchait tout de même nettement avec l'austérité dont il pouvait faire preuve habituellement.
— Il y a un problème, monsieur Agreste ?
— Non, ce n'est rien. J'ai conscience que j'ai beaucoup de retard à rattraper, mais j'essaierai de m'y employer du mieux que je peux.
— Il n'y a pas de formule miracle, vous savez, il a juste besoin de son père.
— Vous me faites penser à sa mère. Elle vous aurait bien appréciée, je crois. En tout cas...
— Et maintenant, pour celle qui a organisé la majorité de cette soirée, celle qui a géré la déco, celle qui a fait en sorte que tout soit possible ce soir, et celle qui a permis que je sois habillé de manière aussi classe, mesdames et messieurs, je vous demande un tonnerre d'applaudissements pour Marinette Dupain-Cheng !
La jeune fille s'était attendue à tout sauf à ça. Nino aimait faire le show, bien sûr. Il adorait haranguer le public, évidemment. Mais il n'était vraiment, vraiment pas obligé d'attirer tous les regards sur elle. Et c'est sous les vivats qu'elle s'excusa auprès de Gabriel Agreste pour se diriger vers l'estrade où elle arracha des mains de son ami métis le micro.
— Merci, merci beaucoup. Mais je n'aurais rien pu faire sans l'aide à laquelle j'ai eu droit. Merci à Alya, Nino et Adrien, qui m'ont suivie et aidée depuis le début. Merci à Monsieur Bourgeois de nous avoir gracieusement prêté cette salle.
— Mais ce n'est rien, voyons, affirma celui-ci. Tout le monde aime faire bonne chère, surtout à Noël !
— Très juste, monsieur le maire ! Et c'est pourquoi nous devons également remercier Marlena Cesaire, qui s'est chargée à elle presque seule de toute la cuisine, ainsi qu'à mes parents, Tom et Sabine, de toute la pâtisserie que vous avez à présent devant vous. Merci Nathaniel, pour les cartons d'invitation. Merci Kim et Ivan, pour vos muscles. Merci Juleka, Rose, Mylène, Max et Alix, pour la décoration de la salle. Merci Nino, pour l'ambiance. Et merci Gabriel Agreste, qui a intégralement financé le tout. Sans lui, rien n'aurait été possible. Et bien sûr, merci à vous tous d'être présent ce soir. Je sais qu'une fête de Noël se passe souvent en famille, mais après tout, nous sommes presque une très grande famille. Alors merci à tous !
Marinette avait les joues rosées de sa longue tirade. Adrien la félicita, et Nino reprit le micro.
— Et maintenant, c'est le moment d'attraper la main de la personne la plus proche de vous, et de l'inviter à danser. Musique !
La bleutée n'eut aucun mal à reconnaître le morceau en question. C'était sans nul doute son préféré depuis qu'elle avait dansé dessus avec un certain blondinet. Blondinet qui l'invita une nouvelle fois, alors que Nino se faisait entraîner par Alya sur la piste.
Quand la danse prit fin, le jeune couple s'adossa contre un mur, et observa les divers duos danser sur le morceau suivant. Alya surgit soudain à leur côté et leur désigna le plafond au-dessus de leur tête.
— Quand je pense que j'avais prévu de vous pousser sous une boule de gui, tous les deux ! Bon, pas grave, elle servira à d'autres. Viens par là, toi ! s'exclama-t-elle en empoignant son petit ami.
Marinette et Adrien se détournèrent.
— Ah au fait, Mari. Euh... hésita le jeune homme. Ça te dérange si je te dis un mot sur Chloé ?
— Tu veux vraiment parler de Chloé maintenant ?
— Oui.
Aucune hésitation dans la voix, juste une certitude inébranlable. Assez pour intriguer Marinette, qui l'encouragea à continuer.
— Je... Comment dire ? Je lui ai suggéré, il y a déjà un petit moment de cela, d'être plus gentille avec les gens en général. Ce qui a amené la petite soirée chez elle, lors de l'akumatisation de Doudou Vilain. Et plus récemment, quand je lui ai demandé l'autorisation de son père pour la salle, j'ai... insisté pour qu'elle te laisse une chance, pour que tu puisses lui montrer que tu étais vraiment quelqu'un d'exceptionnel. Mais ta réaction lorsqu'elle est arrivée n'était pas représentative de qui tu es, et tu le sais très bien. Et... Non, je n'ai pas terminé, coupa-t-il alors que la jeune fille allait intervenir. Et je pense que, toi aussi, tu devrais laisser une chance à Chloé de te prouver qu'elle vaut mieux que la jeune fille hautaine qu'elle montre aux yeux des gens.
— Adrien, mon cœur, je sais que Chloé est ton amie depuis longtemps, mais on parle tout de même de Chloé Bourgeois. Cela fait des années que je suis dans sa classe, des années qu'elle est hautaine, méprisante, voire agressive avec tout le monde. Et tu me demandes de passer outre tout ça ? D'oublier ce qu'elle a fait ?
— Je ne te demande pas d'oublier. Mais oui, je te demande de passer outre. De lui laisser une chance de te montrer qui elle est réellement. Je crois même que vous pourriez être amies, si vous appreniez à vous connaître.
Marinette simula un haut-le-cœur. Amies, elle et Chloé Bourgeois ? Elle ne savait pas dans quelle réalité alternative c'était possible, mais sûrement pas dans celle-ci. Chloé était trop, enfin, voilà, quoi ! Non, impossible !
— J'insiste, Mari. Je sais que ça va être compliqué, surtout au début. Mais vraiment, laisse-la te prouver que si, c'est une fille bien, tout au fond d'elle-même.
— Écoute, Chaton. Je veux bien essayer. Mais vraiment, je te promets rien. On parle de Chloé, quand même.
— Merci, princesse. Je ne t'en demande pas plus.
Quelques minutes étaient passées, et minuit approchait. Approchait très fortement, d'ailleurs, car Nino avait repris son micro, et entamé un décompte accompagné de l'ensemble de la salle.
— 5 ! 4 ! 3 ! 2 ! 1 ! Joyeux Noël à tous !
S'ensuivirent de nombreux échanges de « Joyeux Noël » en tout genre, du plus sobre au plus démonstratif, du plus poli au plus affectueux, du « Joyeux Noël, Sabine, Tom » de Gabriel Agreste au « Joyeux Noël, ma Lady » d'Adrien Agreste.
Ça y est, le moment que tout le monde attendait était enfin arrivé.
Nous étions le vingt-cinq décembre.
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