Chapitre 8: Pluie battante (Partie 4)
Dark s'amusa en regardant la scène. Ils avaient beau ne pas être humains, leur comportement était pourtant identique à celui des hommes dans cette situation.
– Je ne m'attendais pas à une réaction aussi banale de votre part... Comme quoi, vous vous souciez tous du bien être de cet enfant, c'est juste que vous n'aimez pas la belle-famille, n'est ce pas ?
– Mêle toi de tes affaires... bafouilla Fenris en lui donnant raison.
Dans sa camisole aquatique, Zrak observa ce qui était vraisemblablement la scène la plus pathétique qu'il avait jamais vu.
Comme quoi, pensa Dark, il n'y en a pas un pour rattraper l'autre dans ces familles ! Si Sophie a réussi à clouer le bec de Ragnar et Josil, elle s'amuserait encore plus avec leurs proches si elle les voient comme ça !
– Bon, tel que je vois la situation, deux choix s'offrent à nous. Soit vous enterrez la hache de guerre pendant quelques heures et vous accomplissez votre devoir en tant que famille, soit on s'affronte ici et maintenant, et c'est avec des béquilles que vous rencontrerez le gamin...
– Tu n'as toujours pas l'intention de nous tuer alors, gamin ?
– J'ai pour règle de ne jamais casser un outil qui pourrait m'être utile. Alors, qu'en dites-vous ?
Millia fut la première à réagir.
– Ce que j'en dis, c'est que je n'ai pas à écouter quelqu'un qui me sous-estime...
Des ronces noires sortirent du sol et ligotèrent Dark qui s'embrasa afin de se libérer aussitôt. Les deux loup-garous se jetèrent sur lui, mais ils percutèrent un mur de ténèbres.
– Si vous pensiez que je serai affaibli après ce combat, je suis au regret de vous dire que c'est vous qui me sous-estimez !
En réponse à cette provocation, Millia créa des serviteurs d'ombre qui tentèrent d'occire leur cible. Dark évita toutes les attaques tout en ripostant, détruisant à main nue les pantins. Il ne baissa pas sa garde pour autant, esquivant l'attaque d'un groupe de guerriers en armure noire.
– Voici quelques sorts transmis à chaque chef du clan des Lisoras. Alors, qu'en dites-vous ?
Les chevaliers se retournèrent alors et marchèrent vers Millia. Déstabilisée, elle évita leurs attaques, et détruisit les traîtres, sans comprendre ce qui s'était passé.
– Ce que j'en dit, c'est qu'il est déconseillé d'utiliser de la magie des ténèbres contre leur Roi !
Dark se baissa, laissant les crocs de Fenris se refermer au dessus de lui, puis lui donna un puissant coup de tête en arrière, le sonnant. Dark attrapa ses pattes arrières et s'en servit comme d'une arme pour repousser Reys qui arrivait dans la direction opposée.
– Est-ce que vous essayez, au moins ? Seul, je n'ai aucun mal à vous maîtriser tous les trois !
– Il y a une limite à l'arrogance, jeune homme... souffla une présence dans son dos.
Dark tenta de la frapper, mais il réalisa que personne ne se trouvait là. Des canines se plantèrent alors dans son cou et il tenta de se débarrasser de Millia. Elle recula, laissant Dark tituber.
– Vous avez beau ne pas être humain, les morsures de vampire peuvent malgré tout vous anémier. Votre corps qui était déjà lourd va s'engourdir encore plus...
En se sentant tout à coup nauséeux, Dark posa un genoux à terre, luttant pour rester éveillé. Fenris et Reys se jetèrent sur lui tandis que Millia lui lançait un rayon obscur. Soudain, une vague de ténèbres déferla sur toute la place, repoussant le sort de Millia et l'aveuglant temporairement. Quand elle vit se qui se passait devant elle, elle se figea car elle n'aurait jamais imaginé une scène pareille.
Fenris et Reys étaient tenus en échec, leurs têtes coincées dans des griffes semblables à celles d'un rapace. Elle savait qu'elles appartenaient à Dark Raven, mais elle avait du mal à le reconnaître. La personne debout devant elle semblait plus grand, ses longs cheveux noirs flottaient dans le vent, ressemblant aux vagues d'une mer troublée en pleine nuit. Son corps était plus obscur que le ciel nocturne, tout comme ses majestueuses ailes.
L'apparition projeta alors Fenris à travers un mur, provoquant l'effondrement de tous les bâtiments qu'il rencontra dans son vol plané. Dans le même mouvement, elle écrasa le corps de Reys au sol, ravageant encore plus le sol qui avait souffert du combat précédant. Le Roi des Ténèbres se retourna alors vers Millia. Elle fixa avec horreur le masque qui portait à présent son attention sur elle.
– Il est temps pour vous autres enfants de la nuit de comprendre qui est votre maître...
***
Autour du clocher, la situation sembla se calmer. Ne percevant plus de vampires ou de loup-garous conscients, Lucie annonça aux autres que la tempête était passée. Mélodie se dirigea alors vers la tour, redevenue paisible.
– Voila une nuit que j'ai bien envie d'oublier... bailla Mélodie en passant la porte.
– Chut !
N'ayant pas l'habitude d'entendre un membre de son équipage lui dire de se taire, le capitaine de l'équipage de l'Aube Argentée s'intéressa à ce qui attirait l'attention de tout le monde. Devant elle se trouvait Josil, un sourire béat sur le visage, qui tenait quelque chose dans ses bras.
– C'est un garçon... résuma Sophie qui était affalée sur une table, épuisée.
– Tu as fait du bon travail.
– Je n'ai pas arrêté de faire du bon travail sans me reposer correctement pendant plus de vingt-quatre heures, alors laisse moi dormir, tu veux bien ?
– Prends tout le repos qu'il te faut, répondit Mélodie en se penchant vers le nouveau né.
Il ressemblait à un bébé tout à fait normal. Il n'avait ni fourrure, ni crocs, il était ordinaire. Ou du moins, d'apparence. En le voyant ainsi, calme et endormi dans les bras de sa mère, il était impossible de savoir que ce petit être avait été la cause de tant de troubles.
Mélodie s'adressa alors au père qui était sur son petit nuage en fixant son fils.
– Bon, et maintenant ? Nous avons réglé un problème, mais il nous en reste encore un. Qu'avez-vous l'intention de faire à présent ?
– Votre amie nous a dit qu'un navire pourrait nous amener loin d'ici, alors je pense que nous allons suivre son conseil. Dès que Josil aura récupéré, nous partirons.
– Ça me fait penser que nous devrions dire à Cap et Plonir que le plan a un peu changé. Comme nous avons coupé toutes les communications pour éviter d'êtres repérés, ils ne...
– Je m'en suis déjà chargé ! déclara Zac en se redressant, réprimant un salut. J'ai jugé que nous devions les prévenir le plus tôt possible. Athé est aussi partie pour leur faire un rapport plus complet.
– Je vois...
L'ambiance était anormalement calme pour une pièce occupée par autant de membres de l'équipage de l'Aube Argentée. Dans ce silence, ils regardaient l'innocent visage endormi qui apaisait les esprits. Puis, Jaws remarqua quelque chose.
– Quelqu'un a vu Dark, au fait ?
Comme en réponse à cette question, quelque chose traversa le plafond, s'écrasant au sol. Le tout eu lieu dans un bruit de fracas et une explosion de poussière. Sophie avait bondi en arrière, ce qui voulu dire qu'elle tomba en arrière étant donné qu'elle était assise. Plusieurs regards noirs se posèrent alors sur l'apparition qui avait réveillé l'enfant qui commençait à crier. Dans le nuage de poussière, ils pouvaient distinguer une forme imposante, qui se révéla être Dark Raven, toujours dans sa forme de Roi. Il portait un énorme colis gesticulant sur son épaule. La première personne ayant réussi à ordonner ses pensées fut Mélodie et elle laissa exploser sa colère et sa surprise.
– Dark, si je me souviens bien, le plan consistait à ne pas laisser les Canire et les Lisoras arriver ici ! Tu peux m'expliquer en quoi le fait d'amener Reys, Millia et Zrak ici, ligotés ensemble, fait parti de ce plan ?
Dark fixa les trois captifs en question qui ne semblaient apprécier ni le voyage, ni la compagnie. Ils les avaient portés jusqu'ici sur son épaule, comme des vulgaires sacs à patates, ce qui était une scène étonnante quand on savait que le porteur n'avait pas le gabarit nécessaire pour l'emploi.
– Je n'allais pas les laisser dans la rue, quand même ! D'ailleurs, Sophie, j'ai besoin que tu soignes Zrak avant qu'il ne se vide complètement de son sang, s'il te plaît...
– Tu lui as arraché les bras ? s'écria le médecin en auscultant son patient. Ça serait plus simple de le laisser crever !
– Très bien, je te laisserai expliquer à Storm pourquoi on va lui envoyer son prisonnier dans un sac mortuaire, parce que moi, je n'en ai pas le courage...
– Comme si tu allais lui fournir une explication valable pour qu'elle comprenne pourquoi il va arriver en pièces détachées... grommela Sophie en soignant Zrak.
– Au fait, Mel, as-tu réglé son compte à Fléau ?
– Ne t'inquiètes pas, il ne va plus nous gêner. Sinon, je suis impressionnée que tu ais réussi à tous les vaincre en même temps !
– J'avais déjà neutralisé Zrak quand ils sont arrivés, mais Fenris était là aussi...
– Mon frère ? s'étonna Ragnar. Pourquoi n'est-il pas ici ?
– Parce qu'il doit être en train de se reposer sous les décombres d'une des maisons qu'il a détruit en apprenant à voler avec mon aide...
– Je me demande qui est le plus dangereux ici: le gamin, ses grands-parents ou toi !
– Et moi, je me demande pourquoi tu as besoin de te poser la question, Zac ! ricana Jaws.
Les chefs des deux familles furent libérés et le monde sembla s'arrêter. La tension était oppressante, tandis que Reys et Millia dévisageaient leurs enfants respectifs. Puis, ils posèrent leurs regards sur leur petit-fils.
Jusqu'à cet instant, cet enfant ne représentait qu'une arme, un outil qu'ils pouvaient utiliser pour accroître le pouvoir de leurs familles. Mais maintenant, devant cette scène qui apaisait les esprits, tout ça leur semblait si lointain. Pour la première fois, ils voyaient leur petit-fils comme un être à part entière, comme étant un membre de leurs familles.
Ragnar se leva et fit face à son père.
– Je sais ce que vous allez dire: j'ai un devoir envers les nôtres et je n'ai pas le droit de fuir. Mais ça, c'était avant ! Je n'ai pas envie que mon fils grandisse dans le même milieu que moi ! Je veux qu'il ait une enfance normale, où les autres enfants ne le regarderont pas comme un monstre ou un Canire ! Et ce n'est pas à Triliana qu'il aura droit à cela !
Reys ne sut quoi répondre à cela. Dark s'amusa à voir la montagne qui intimidait tout le monde à Triliana depuis des années rester bouche bée devant son fils qui faisait la moitié de sa taille. Millia profita de l'inaction de son rival pour s'approcher de sa fille.
– Et toi, est-ce que tu penses comme lui ?
Josil baissa les yeux pour dévisager son enfant, et trouva le courage de parler à sa mère.
– Je ne veux pas qu'il grandisse dans un monde où il craindra constamment pour sa vie...
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