Les ténèbres explosèrent et Dark hurla. Tout ce qui restait était une mare de ténèbres. Puis, d'impressionnantes ailes recouvertes de plumes noires en émergèrent. Les ténèbres se rassemblèrent autour d'elles, donnant forme à un corps d'apparence vaguement humaine. Il était noir, semblant être vêtu uniquement d'obscurité. Ses pieds étaient semblables aux serres d'un corbeau. Ses mains étaient comme les griffes acérées d'un rapace. Il redressa la tête, dotée de longs cheveux noirs et soyeux. Un masque noir recouvrait la partie supérieure de son visage et lui donnait un air aquilin.

L'apparition resta debout devant tous, sans un mot. Les mercenaires avaient du mal à réaliser ce qui se passait, et seul leur capitaine osait s'adresser à la créature en face d'eux.

– Dark ? murmura Mélodie. MAIS T'ES QUOI, BORDEL ?

La créature la fixa avec curiosité, puis lui sourit.

– Moi ? Mais je suis le Roi des Ténèbres! Quand à toi... dit il en désignant Athéna. Si tu veux le pouvoir de ton père, il va falloir me suivre !

Il prit alors son envol et partit loin du village.

– Tu ne t'en tireras pas comme ça, sale monstre !

La déesse s'envola à son tour et le poursuivit.

Tous les mortels restèrent là où ils étaient, plus sûrs de bien comprendre ce dans quoi ils s'étaient embarqués. Ils décidèrent donc de se concentrer sur la seule chose qu'ils avaient totalement compris.

– Aller les gars ! C'est la véritable raison pour laquelle il nous a embauché, alors n'échouons pas ! hurla Mélodie en se jetant sur Krass. Sinon, on en entendra jamais la fin !

***

Loin du village, un autre combat bien plus intense commença. À chaque attaque, une déflagration rasa tout ce qu'il se trouvait dans les alentours. Les deux combattants volèrent dans le ciel en se pourchassant. Les griffes parèrent la lance et furent bloquées par le bouclier. Sorts magiques et ténèbres se heurtèrent au pouvoir divin. Aucun des deux ne semblait avoir le dessus.

– Impressionnant ! Tu es plutôt adroit, pour un monstre !

– Et toi, tu n'es pas si mauvaise pour une déesse !

Ils se jetèrent l'un sur l'autre, dans un déluge de coups. Athéna rapprocha son visage de celui de Dark en le défiant de son regard d'acier.

– Dis moi, qu'est ce qu'un Roi des Ténèbres ? Je ne me souviens pas d'en avoir jamais entendu parler !

– Tu as entendu parler des Miracles Vivants ? Et bien, en réalité, ce sont les neufs autres Rois. Ils ne le savent pas, mais ensemble, nous avons le pouvoir de sauver le monde. Nous pouvons arrêter tous les conflits, que les mortels soient impliqués ou pas.

– Tu veux dire que vous pouvez mettre fin à la guerre divine ? C'est impossible ! Tout comme l'idée de sauver le monde ! Les mortels ! Ils sont égoïstes, stupides et arrogants !

– Heu... On parle de qui là, les dieux ou les mortels ? Tu peux être plus précise ?

Aveuglée par la colère, Athéna invoqua un orage qui déversa toute son énergie dans sa lance.

– Voyons voir si tu peux bloquer ça !

Elle se tourna en direction du village et lança son attaque. Paniqué, Dark eut juste le temps de se placer à la lisière de ce dernier pour arrêter la décharge foudroyante. Il passa à deux doigts de l'échec, mais il parvint à le protéger. Son répit fut cependant de courte durée, car son adversaire s'était jeté sur lui, le propulsant au sol et le traînant sur plus d'une centaine de mètres. Ils se retrouvèrent au milieu du village, Dark allongé par terre avec Athéna accroupie sur lui, sa lance sur la gorge de son adversaire.

Cachée dans les débris, Solange observait la scène. Elle avait décidé de rester dans le village pour aider ceux qui en faisaient de même, mais contrairement aux autres, elle ne se cachait pas. C'est ainsi qu'elle put alors voir sa vision se réaliser sous ses yeux.

– Je ne te savais pas si entreprenante... ricana le corbeau.

– Assez plaisanté ! hurla la chouette.

La jeune fille les regarda avec horreur. Elle avait entendu la discussion qui avait eu lieu plus tôt à la lisière du village, et elle avait alors compris toute l'importance de son rêve. Derrière elle, le mur commença à se fissurer, sans qu'elle ne s'en rende compte.

– Et c'est avec une force aussi pitoyable que tu comptais sauver les mortels ? Arrêter la guerre des dieux ? Ridicule ! Pendant longtemps, j'ai moi aussi tout tenté pour protéger les mortels, les humains en particulier, même contre mes semblables ! Mais ce qui m'a fallu des millénaires à comprendre, c'est qu'ils sont une cause perdue ! Peu importe combien de fois on les sauve, peu importe combien de fois on les aide, il y aura toujours un nouveau danger en train de les attendre ! Tu savais que, de tous les êtres dotés de la raison, l'homme est celui qui a failli le plus souvent disparaître ? Si on ne garde pas constamment l'œil sur eux, ils finissent tous par mourir stupidement. La preuve...

Dark suivit du regard la direction indiquée par Athéna et comprit ce qui allait se passer. En voyant que la déesse la pointait du doigt, Solange se retourna et vit que le mur derrière elle allait s'écrouler sur elle. Pétrifiée par la peur, elle ne put s'échapper.

Dark tandis le bras vers elle pour lancer un sort, mais Athéna le transperça pour l'en empêcher.

– Tu vois ? Si pitoyable ! Sans personne pour lui venir en aide, une simple humaine ne peut pas échapper à une mort aussi ridicule ! Pourquoi la sauver aujourd'hui si elle va mourir demain ?

Le mur s'écroula. Solange se couvrit les yeux et attendit la mort.

Mais elle n'arriva pas.

Lorsqu'elle réalisa qu'elle était encore en vie, elle leva la tête et découvrit qu'un colosse d'acier l'avait protégée des décombres. Il se redressa, et tendit le bras vers les deux combattants, le pouce levé.

– Mais c'est quoi cette horreur ? hurla Athéna.

Dark lui décocha un coup de pied pour éloigner la déesse et se releva en frottant son bras blessé.

– Ça, c'est Rust !

En affichant un large sourire, Dark leva son pouce en direction de son alliée avant de se jeter sur la déesse.

***

– Mais c'est quoi cette boite de conserve géante ? s'écria Al en s'approchant du titan de métal.

– C'est pas gentil de dire ça ! s'indigna le colosse avec une voix étrangement familière. Il a un nom, c'est Rust !

– Lisa, c'est toi ? demanda son frère en arrivant. Mais qu'est ce que tu fais là dedans ? Ça vient d'où ?

– Ben de mon labo ! Ça fait un moment que je travaille dessus, et le seul à qui je l'avais montré jusqu'à maintenant, c'est Dark !

– Quoi, il a été dans ton labo ? paniqua Théo.

– Plus tard ! intervint Zac. Nous ne sommes pas encore tirés d'affaire !

Un membre des Berserks sortit de l'ombre et se jeta sur lui. Il fut arrêté par une attaque portée à la tête. Le groupe se retourna et vit Cap descendre du ciel avec sa planche volante, une dague à la main.

– Faites gaffe les gars, il en reste encore dans le coin ! rappela-t-il avant de fixer Rust avec effarement. Mais c'est quoi ça, une de leurs armes ?

– Non, c'est une des nôtres... grommela Zac.

– En tout cas, Dark a quand même l'air d'avoir un peu de mal face à Athéna... fit remarquer Sophie en sortant de sa cachette.

S'il était facile au médecin de briser les membres d'êtres au tempérament bestial avec son vaudou, les mortels dotés d'une conscience ne pouvaient être contrôlés que dans leurs gestes. Surtout que, plus ils étaient forts, moins elle pouvait les manipuler facilement, et ce dans des groupes de plus en plus réduits. Pour cette raison, elle avait préféré se tenir en retrait, se concentrant sur les blessures des autres mercenaires.

– Ouais, mais il se débrouille plutôt bien, vu qu'il combat une déesse ! fit remarquer Snipe, son fusil en joue. On fait quoi, on l'aide ?

– Et tu fais quoi si tu la loupes ? demanda Zac, inquiet.

– Pire, tu fais quoi si tu la touches ? s'exclama Cap, pas très tenté par l'idée d'énerver une déesse et d'être la cible de sa colère.

– Bon ben, dans ce cas, mieux vaut rester là à attendre... dit Lisa.

– Mais... Elle est où Mel ?

***

– La vermine se rassemble, on dirait ! grinça Athéna en voyant les mercenaires se regrouper.

– Tu ferais mieux de ne pas les sous estimer ! fit remarquer Dark. Certains pourraient te surprendre !

Plusieurs murs explosèrent en cet instant, laissant ce qui semblait être une torpille s'écraser entre les deux combattants. Ils s'en approchèrent et reconnurent Krass, baignant dans son sang et lutant pour rester conscient.

– Tu n'as pas encore fini ? Ça commence à traîner en longueur, cette histoire !

Ils se tournèrent tous en direction de Mélodie qui regardait Dark et Athéna avec lassitude.

– Magnes toi qu'on rentre ! Ce porc m'a fait courir dans tous les sens, je suis pleine de sueur, c'est horrible ! Je n'ai qu'une envie, c'est de prendre un bon bain !

– Minute, papillon ! s'exclama Dark. Quand on fait la cour à une dame, il ne faut jamais presser les choses !

– Parce que t'appelles ça draguer, toi ? s'étonna Mélodie en montrant les ruines alentours. Si, ça, c'est la manière douce, je ne voudrais pas voir la manière forte...

– Ça suffit ! cria Athéna. Tout est une blague pour vous mortels ! Vous ne réalisez jamais pleinement l'importance de la situation ! Vous êtes incapables de survivre sans que l'on vous tienne la main ! Vous auriez du disparaître il y a des millénaires de cela !

– Et pourtant, ils sont encore là ! la contredit le ténébreux. Certes, ils ont souvent eu besoin d'aide par le passé, mais ils n'auraient jamais survécu s'ils n'en avaient pas la capacité ! Ce qui pousse les mortels à se surpasser, c'est cette rage de vivre ! Ils savent que leur vie est limitée, et pourtant ils s'y accrochent de toutes leurs forces, quelles que soient les épreuves et les souffrances ! Grâce à cela, les humains que tu dénigres par exemple, sont passés d'un peuple à peine capable de se réchauffer à une civilisation pouvant accomplir bien des miracles ! Même quand le monde à basculé il y a cent ans, même quand ils étaient au bord de l'extinction, alors qu'il n'y avait plus d'espoir, ils se sont accrochés, ils ont lutté ! Ils ont cherché à devenir plus forts afin de survivre ! Quelques soient les difficultés, les humains n'ont jamais pu être vaincus par ce monde ! Ils sont même capables de rivaliser avec les dieux ! C'est en sauvant tout les mortels que j'arrêterais les dieux ! Et je n'aurai pas besoin de cette simple pièce et de son pouvoir !

Dark tendit l'objet en question devant lui, jugeant que la déesse était trop éloignée pour la lui prendre. Il vit l'incertitude dans les yeux d'Athéna, ses propos commençant tout juste à percer son armure.

– Si tu n'en veux pas, je le prends !

Krass se jeta sur le bras de Dark qui jeta la pièce en l'air pour l'éloigner de l'orc. Athéna saisit cette occasion et se rua sur elle.