Chapitre 5: Pacte avec un drôle de diable (Partie 1)
Le silence régnait dans la plaine de Tilorif. Le soleil brillait, les animaux vivaient paisiblement leur vie simple. Une brise légère caressa cette plaine d'habitude si calme. Ce lieu dégageait une aura de paix et de tranquillité, faisant que nul conflit n'avait éclaté ici au cours de ces cent dernières années de carnage.
Ce paysage, utopique dans un monde de chaos, ne fut gâché que par l'absurde présence d'un aéronef qui s'était écrasé en plein milieu de la plaine, déchirant le sol sur une cinquantaine de mètre en s'écrasant.
– C'est pas ma faute, je vous l'avais bien dit que le vaisseau ne tiendrait pas longtemps ! hurla Lisa en frappant la table. Fallait pas y aller à pleine puissance alors qu'on était à l'arrêt, les machines n'ont pas tenu le coup !
Dans la salle à manger/salle de réunion secondaire de l'Aube, la tension se faisait sentir. Tandis qu'Al préparait les petits déjeuner dans la pièce voisine, le reste de l'équipage décidait quelle était la marche à suivre. Étant dans l'impasse pour le moment, certains décidèrent à la place de désigner un responsable, comme le ferait une organisation digne de ce nom, si on en croyait les livres d'histoire.
– Fallait qu'on s'arrache de là le plus vite possible, j'avais pas le temps de vérifier si tout était en ordre ! se défendit Cap.
– Dis moi, pourquoi t'a-t-on demandé de rentrer au vaisseau si c'était pas pour préparer le décollage ? critiqua Snipe.
– Désolé, mais déjà que c'est pas évident de faire l'état des choses avec personne dans la salle des machines pour te dire comment ça se passe sur place, je n'avais pas tellement envie de me faire bouffer le cul par un groupe de zombies !
Réalisant que Cap avait en effet géré la situation du mieux possible au vu des circonstances, on s'intéressa à quelqu'un d'autre pour endosser la responsabilité.
– J'espère que tu as une très bonne raison pour avoir désobéi aux ordres du capitaine, Snipe ! clama Zac. Tu étais sensé revenir avec nous au vaisseau !
– Et il avait bien fait de désobéir ! intervint Théo. S'il n'était pas venu avec Mel, on serait peut être morts tous les trois ! Sans lui, avec tout ce qu'on trimballait, on aurait peut être pas pu semer ces monstres !
– Tiens, d'ailleurs, demanda innocemment Al un plateau à la main, vous les avez mises où, ces pièces ? Je ne les vois pas...
Un silence gêné s'installa.
– Bah en fait, bredouilla Lisa, après avoir croisé Dark, il s'est passé plein de trucs et, dans la confusion...
Zac la fixa avec des yeux écarquillés.
– Vous avez oublié les pièces sur place ? On était en train de repousser une invasion de morts vivants pour que vous puissiez aller chercher des pièces, et vous les laissez tomber ?
– Oui, mais... commença Lisa...
– Silence !
Cet ordre implacable fit régner le calme autour de la table. Al faillit faire tomber son plateau, ne s'étant pas attendu à cela.
– C'est moi qui a demandé au groupe de se séparer, continua Mélodie. J'ai donné mon accord quand Théo et Lisa sont partis seuls. J'étais là quand on a perdu les pièces. Tout ce qui c'est passé est de ma responsabilité, et vous avez tous parfaitement bien agis au vu des circonstances. Aucun d'entre vous n'a quoi que ce soit à se reprocher !
Après ces quelques paroles, la tension redescendit. Seule une personne capable de reconnaître ses torts quand nécessaire peut se faire respecter, et seuls quelques individus dans l'histoire de ce monde l'avait comprit. Parfois, endosser toute la responsabilité d'un échec, même si l'on n'est pas en tort, est le seul moyen de garantir le retour au calme d'une situation.
Le petit déjeuner étant servi, ils mangèrent et tentèrent d'oublier les événements de la veille. Un point ne put cependant pas être oublié.
– Vous êtes sur que c'était Dark qui vous a aidé ? demanda Cap. Il ne m'a pas semblé être du genre à aider les autres sans raison !
– Chiant comme il était, ça ne pouvait être que lui, soupira Mélodie. Au début, on pensait que c'était lui qui était derrière tout ce merdier, ça nous a surpris de voir que c'était ce vieil homme...
– Oui, et il a dit des choses intéressantes au sujet de Dark et Sarcad.
– Charcad? demanda Sophie la bouche pleine, finalement remise de son choc d'hier.
Théo expliqua à ceux qui étaient absents ce qui avait été dit hier sur la place.
– À en croire la réaction de Dark sur le moment, c'était peut-être la vérité... conclut-il.
– Attends un peu, tu veux bien ? Tu es en train de me dire que ce type est peut être un des Miracles Vivants ? Un de ces êtres surpuissants qui propagent la paix et la stabilité autour d'eux ? Tu l'as bien vu, non ? La seule chose que ce type peut propager, c'est des pulsions meurtrières à son encontre ! Et ça, c'est rien qu'en tenant une conversation ordinaire !
Ceux qui avaient croisé Dark furent d'accord avec Zac sur ce dernier point. Mélodie fit cependant part de ses doutes.
– Même s'il serait absurde de le définir de «Miracle Vivant», il est impossible de nier que sa force est bien réelle...
– Ouais, enfin bon, à vous entendre parler, ce type doit être un drôle de diable, résuma Al. Mais, ce qu'il ne faut pas oublier, c'est qu'il est resté en ville seul avec des centaines de zombies ! Fort ou non, humain ou non, je le vois mal survivre !
À cet instant précis, l'alarme du vaisseau se mit à retentir de nouveau.
– Que se passe-t-il, Lucie ? demanda son capitaine.
– Je perçois une déformation dimensionnelle juste au dessus de vous !
– Quoi, au dessus de l'Aube ? s'écria Snipe en courant vers la porte.
– Non ! Dans la salle à manger !
Ils levèrent tous la tête pour apercevoir un nuage de brume noire se former au dessus d'eux. Puis, une lueur sombre éclaira la pièce et quelque chose tomba sur la table.
– Mais, ce sont les pièces ! cria Lisa, surprise.
Il y avait une note sur les sacs. Mélodie la ramassa, craignant ce qu'elle allait lire. Elle soupira d'exaspération.
– Ça dit quoi ? demanda Al.
– «Et nous avons quatre vainqueurs !», soupira Mélodie d'une voix lasse.
– Ça veut dire quoi, ça ? demanda Sophie.
– Rien, répondirent en cœur quatre de ses compagnons.
– Heu dites...
– Qu'est ce qu'il y a, Lucie ? demanda Théo.
– Vous ne pouvez pas baisser d'un ton, il y en a qui ont besoin de dormir...
Toute la salle tourna son attention vers le canapé qui se trouvait dans un coin de la pièce et ils dévisagèrent la personne affalée dessus.
– Je voulais juste dire que quelque chose d'autre était apparu...
***
Pendant ce temps, une femme en armure s'approchait d'un temple. Tout autour de ce dernier, les gens s'écartaient, ressentant sa puissante aura qui était palpable à des kilomètres à la ronde. Devant le temple, un groupe d'elfes la dévisageait étrangement, mais ils ne tentèrent pas de la retenir alors qu'elle entrait. Ils sentaient qu'essayer de la retenir ne leur apporterait rien de bon.
– Je vois que les habitants de ce village sont plus sages que les autres. Même si ça ne changera rien, sur le long terme...
Elle scruta les lieux du regard alors que les prêtres présents la fixaient avec stupeur. D'habitude, ils auraient demandé à tout nouvel arrivant ce qu'ils voulaient, mais ils savaient ce qu'était leur invitée et avaient compris que lui adresser la parole aurait été dangereux. Elle ferma les yeux et se concentra. Comme dans tout les autres temples, elle ne ressenti aucune présence particulière. Ennuyée d'avoir fait mouche à nouveau, elle s'en alla. Une fois dehors, elle tendit son bras et fit apparaître une gigantesque chouette. Elle monta dessus et le volatile prit son envol devant les regards effarés des passants. Dans le temple, un des prêtres voulu faire part de ses inquiétudes.
– Vous pensez que c'était...
– Je ne veux pas le savoir ! s'exclama un de ses collègues. La seule chose qui est sûre, c'est que nous avons la chance d'être encore en vie, alors n'attirons pas le mauvais œil sur nous !
***
– Je te le redemande, comment as tu fait pour venir ici ?
– Et je te le répète, je suis fatigué, réessaye plus tard !
Cela faisait près de dix minutes que cet interrogatoire tournait en rond. Zac tentait de soutirer des informations à Dark qui lui tournait le dos en essayant de s'installer confortablement sur le canapé. Derrière le second, Al et Sophie analysaient l'homme en noir d'un œil critique, peu impressionnés.
– Il n'a pas l'air si terrible que ça, tout compte fait... fit remarquer Sophie. Il ne coopère pas, d'accord, mais à part ça...
– Attends qu'il ai récupéré... souffla Snipe. En forme, il est très dur à supporter !
Mélodie observa la scène quelques instants puis trouva un compromis. Elle s'approcha de son indésirable invité, écartant Zac qui recula en comprenant que son capitaine avait un plan.
– Si tu nous explique tout, ici et maintenant, je conçois à te prêter une chambre libre pour quelques temps. Ce sera toujours mieux que ce canapé avec Zac qui te crie dans les oreilles...
Dark demeura silencieux pendant plusieurs longues secondes qui semblaient interminables. Puis, il se retourna et la regarda droit dans les yeux.
– Sérieuse ?
– Très ! lui répondit elle.
Il sembla considérer l'offre puis se leva avant de s'asseoir à la table à manger.
– D'accord, mais je veux un petit déjeuner, parce que j'ai faim et je hais parler le ventre vide...
– Non mais dis donc, toi... commença Zac, prêt à exploser.
– C'est d'accord, coupa son supérieur en se tournant vers Al. Prépare donc quelque chose à notre invité, tu veux bien ?
– Comme le dernier repas d'un condamné ? ricana Cap.
Tout le monde fut réuni autour de la table, Dark présidant un bout, ravi de pouvoir se remplir la pense. En face de lui, Mélodie lui demanda d'honorer sa part du marché.
– Ouais, et pour commencer, comment t'a fait pour nous retrouver aussi vite ? questionna Snipe.
Dark avala ce qu'il avait en bouche. Il prenait son temps, clairement ravi d'être le centre de l'attention, même si la plupart des regards posés sur lui étaient noirs.
– De la même manière que je vous ai trouvé hier, toi et tes trois amis sur cette place. J'avais placé une pièce magique couverte d'un sort de dissimulation sur votre capitaine. Je suis le seul qui peut ressentir sa présence magique et la suivre. Ce matin, j'ai lancé un sort de transfert dimensionnel en me servant de cette pièce comme balise. C'était simple comme bonjour !
Sans un mot, Mélodie fouilla ses poches et sortit une ancienne pièce qui avait l'air parfaitement normale à ses yeux. Elle se demanda comment elle était arrivée là, vu qu'elle ne s'était jamais approchée de moins de deux mètres de Dark la veille.
– Je vois... fit-elle en jetant la pièce par une fenêtre. Et tu en as profité pour nous ramener nos affaires par la même occasion. C'est assez gentil de ta part, même si ton message l'était moins... Qu'as tu fait, une fois que nous sommes partis ?
– 'allait 'ien 'e 'el'un éli'ine 'ous 'es 'om'is, parvint il à dire la bouche pleine avant d'avaler. Un seul de ces monstres peut convertir des centaines de personnes, je ne pouvais donc pas les laisser s'échapper ! Ça m'a pris toute la nuit pour les traquer, je ne vous raconte pas la galère ! Au bout d'un moment, j'en ai eu assez, alors j'ai vérifié s'il restait des survivants, puis j'ai rasé la ville.
– Tu as quoi ? s'exclama Al.
– Enfin, pas toute la ville, je ne pouvais pas détruire la muraille, ça aurait pris trop de temps. Sans oublier que personne dans le bidonville avait été transformé, j'ai vérifié. Je n'allais pas les massacrer alors qu'ils n'avaient rien fait de mal, quand même ! Après, je suis sorti achever les zombis qui étaient déjà partis. C'était bien fatiguant !
– Et pourquoi t'es tu donné tout ce mal ? demanda Zac, incrédule.
Dark lui répondit avec un sourire radieux que le mercenaire apprenait à haïr.
– Mais parce que je suis un quelqu'un de sympathique, ami avec tout le monde, qui place les intérêts d'autrui avant les siens!
Même ceux qui le rencontraient pour la première fois sentirent l'arnaque. Il ne donnait pas franchement l'impression d'être le genre de personne qui ferait quelque chose sans rien espérer en retour.
– Je te rappelle que tu as utilisé un sort déplaisant pour payer tes frais de restauration... fit remarquer Théo.
– C'étaient des ordures, ça leur aurait servi de leçon... rappela Dark avec désintéressement. Et puis, il se trouvait qu'ils étaient déjà morts de toute façon, alors ce n'est pas si grave !
– Quoi, tu savais déjà que c'était des zombies à ce moment là ?
– Non, je n'en avais pas la moindre idée. Je ne m'en suis rendu compte que quand Vilodas les a laissé faire leur petit carnage. Avant ça, ils avaient même oublié qu'ils étaient morts. Voilà combien il était doué ! Et puis, je ne vois pas de quoi tu te plains ! Tu étais content quand je vous avais offert ce lingot, non ?
– Sauf qu'on en a pas eu besoin vu que le vendeur nous a attaqué alors qu'on allait payer ! claironna Lisa. Résultat des courses, on ne te dois rien ! Tu peux le récupérer, ton lingot !
Dark dévisagea Lisa, puis son frère afin de s'assurer si c'était la vérité. Théo fut pris d'un doute.
– Lisa... demanda ce dernier. Tu en a fais quoi, de ce lingot ?
– Ben, je l'ai rangé dans un des sacs, pourquoi ?
Dark et Théo échangèrent un regard en grimaçant et fixèrent les sacs sur la table tout en reculant un peu.
Un horrible pressentiment effleura l'esprit de Mélodie.
– Ce sort que tu as utilisé, c'était quoi au juste ?
Curieuse, Lisa commença à ouvrir les sacs solidement fermés.
– Il y en avais deux, en fait. Le premier consistait à réunir les éléments nécessaires au lancement du second sort pour créer de l'or...
– Et c'était quoi, cet élément ? demanda Mélodie en commençant à regretter de ne pas avoir quitté la pièce plus tôt.
Lisa ouvrit le dernier sac. Une odeur pestilentielle remplit la salle à manger en l'espace de quelques secondes, prenant tout le monde à la gorge.
– Putain de merde ! toussa Cap.
– Comme tu dis ! répondit Théo en sortant, suivi par tout le monde.
– T'es un vrai malade, Dark ! Aboya Mélodie en se couvrant la bouche.
– Je n'ai jamais dis le contraire !
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