17. Départ (partie 2)
Vêtue d'une longue robe de couleur or qui épousait parfaitement ses formes, ses cheveux rouges relâchés atteignant le bas du dos, la reine attendait patiemment l'arrivée des trois sœurs. Assise sur le trône Royal, un verre en cristal contenant un liquide jaune dans sa main droite, et l'autre soutenant son menton, elle avait le regard perdu au loin. Une expression de tristesse et de lutte intérieure planait sur son visage sans défaut.
Chaque fois qu'elle se retrouvait seule, c'était toujours pareil. Elle ne pouvait s'empêcher de revivre ses malheureux souvenirs. De sentir sa poitrine se comprimer douloureusement, ses yeux se voiler de larmes, sa gorge devenir sèche et l'air commencer à lui manquer, comme ce jour fatidique.
Sa main, tenant le verre de cristal, se mit à trembler et elle s'empressa de vider le contenu pour se calmer.
Qu'elle les haïssait ! Tout était de leur faute. Rien que de penser à eux, la douleur qu'elle ressentait fit place à de la rage. Cette même rage qui lui avait permise de survivre, de ne pas sombrer, de devenir plus forte pour ce jour. Ce jour où ils régneraient ensemble sur Mirabel et le reste des mondes.
Le verre dans sa main se brisa, la coupant par la même occasion. Elle regarda quelques secondes le liquide rouge s'égoutter sur le tapis décoré de riches motifs qui recouvraient le sol de la salle, puis un sourire naquit sur ses lèvres.
Bientôt, du sang coulerait. Ça serait le début de l'accomplissement de son plan. Et celui du déclin de la vie de la princesse. Elle lécha sa blessure qui se referma lentement.
Percevant l'aura des Divas depuis l'entrée du château, elle reprit une posture noble et attendit leur arrivée.
Quelques minutes plus tard, les trois sœurs pénétrèrent dans la grande salle, précédées d'Arielle. Celle-ci était apeurée et peinait à retenir ses tremblements. Dès son réveil, on l'avait forcée à revêtir une longue robe noire, puis on l'avait conduite dans cette salle. En voyant la femme assise sur le trône, un frisson glacé lui parcourut l'échine. Elle eut l'impression que les yeux noirs de la régnante posés sur elle la sondaient jusqu'aux tréfonds de son âme. Son cœur se mit à faire des sauts périlleux dans sa poitrine, et elle pinça ses lèvres de nervosité.
— Soyez la bienvenue dans mon humble demeure, souhaita-t-elle à la praticienne d'une voix qui se voulait douce.
Au lieu de la rassurer, cela accentua le malaise d'Arielle.
— Q...que me v...voulez-vous ? osa-t-elle demander.
Elle était toujours debout au milieu de la salle et ses tremblements ne cessaient de l'agiter. Quel était donc ce lieu ? Pourquoi l'avait-on emmenée ici ? Lidya, était-elle saine et sauve ? Toutes ces questions trottaient dans sa tête.
Prosternée, la tête maintenue vers le bas, les Divas attendaient les nouveaux ordres de la reine.
— À vous, rien ! C'est votre fille que je veux, lâcha sèchement la reine.
Toute trace de douceur avait disparu sur son visage ainsi que de sa voix, faisant place à de la colère.
— Pourquoi ? couina Arielle en reculant.
Elle essayait de résister à l'aura maléfique qui se propageait petit à petit dans la salle et qui commençait à l'étouffer.
— Je veux qu'elle souffre ! Qu'elle me supplie de l'achever, proféra la reine, ses yeux noirs devenus sombres comme la nuit.
N'en pouvant plus de lutter contre cette force surnaturelle qui la privait d'air, Arielle chancela et tomba évanouie.
— Allez vous préparer. Nous partons pour Persillia ce soir, annonça-t-elle aux trois sœurs.
Ces dernières se relevèrent, et Nora prit Arielle qu'elle mit sans ménagement sur ses épaules.
Le voyage n'enchantait guère les trois sœurs, et il y avait de quoi ! Persillia était le territoire des Taurix et se situait au Sud d'El-Dorado, par-delà les terres inconnues. Contrairement à la capitale où il restait quelques traces de l'époque avant la guerre, il régnait dans cette partie de Mirabel une atmosphère hostile et sinistre due à l'environnement des lieux et à ses habitants. Mais c'étaient les ordres de la grande et puissante reine Sélena. Et personne ne désobéissait à Sa Majesté.
La plus déçue était Nora, car elle voyait sa soirée de retour au bercail annulée. Plus de fêtes, plus de garçons, bref... l'ennui total.
Elle alla déposer la prisonnière dans l'une des somptueuses chambres du château et prit soin de bloquer la porte avant de rejoindre ses sœurs dans le jardin royal.
Dehors, la grosse lune bleue, attribuée à la déesse mère Lunaris, brillait dans le ciel sombre et nuageux de Mirabel. L'une des conséquences de la guerre était que même en plein jour, il faisait sombre. Pour le moment, seule la capitale était touchée par le sort. Mais plus le temps passait, plus cela s'étendait.
Des roses, des fleurs de pavot de différentes couleurs, des œillets, des liserons, des lilas... se balançaient au gré du vent. Tous scintillaient comme s'ils étaient recouverts de poussière de fée. Au milieu du jardin était érigée une fontaine en or ayant la forme d'un Pégase. Dans un coin se trouvait un majestueux Flamboyant en dessous duquel il y avait des assises en pierre blanche où l'on pouvait se reposer.
Betty, Alexa et Nora profitèrent un instant du paysage terni en beauté par l'absence du soleil et du doux mélange de parfums qui flottait dans l'air. Ça allait leur manquer.
Quelques minutes plus tard, elles passèrent les portes du château et prirent la direction de leur manoir.
★
La nuit était tombée depuis belle lurette. Debout au beau milieu du salon des Johnson, et portant des sacs à dos, Lidya, Léa, Laurine et Gaël formaient un cercle. Il régnait dans la pièce un silence religieux, uniquement troublé par le hurlulement d'un hibou à l'extérieur et des miaulements de Bartok. Ce dernier se trouvait au pied de sa maîtresse. Main dans la main, yeux fermés, ils étaient concentrés comme l'avait ordonné Léa, pour pouvoir puiser dans leur énergie magique.
Comme Laurine, Lidya était tendue. Elles avaient vu Léa se téléporter deux fois, et cela les avait intriguées. Mais ce soir, c'était leur tour. Leur première fois. Le cœur de la jeune fille battait à se rompre. Elle était saisie d'appréhension. Qu'allait-il se passer ? Aurait-elle mal ? ‹‹ pourvu que tout se passe bien ›› tel était son souhait.
Lentement, des fils de lumière blanche, bleu, rouge et jaune s'échappèrent de leurs mains entrelacées. Ils se rassemblèrent au centre du cercle pour se diviser en quatre faisceaux qui les enveloppèrent chacun.
Ce fut comme si elle était entourée d'un doux cocon, duveteux et agréablement chaud. Lidya se laissa aller à cet instant de pur délice et grogna un peu lorsqu'elle entendit la voix de Léa.
— Ouvrez maintenant les yeux, leur dit-elle.
La brunette avait des gouttelettes de sueur sur le front, dû à l'effort qu'elle venait de fournir.
Lorsqu'ils firent ce que leur demandait la jeune fille, ils se rendirent compte qu'ils n'étaient plus dans le salon des Johnson, mais au bord de la mer.
— Bravo, vous avez réussi, la félicita Gaël en lui donnant une gentille petite tape sur l'épaule.
Malgré lui, il jeta un coup d'œil furtif vers Lidya. L'air émerveillé qu'elle affichait fit naître un petit sourire sur ses lèvres, qu'il s'empressa de chasser. Reprenant son sérieux, il fit signe au petit groupe de l'attendre et sous leurs regards interrogateurs, plongea dans la mer. Quelques secondes plus tard, le portail reliant la Terre à Mirabel se matérialisa devant les trois jeunes filles, tout ahuries.
Le chef des rebelles mit un peu de temps à remonter à la surface. Une fois hors de l'eau, il alla rejoindre la princesse et ses gardiennes qui regardaient le portail avec intérêt et émerveillement.
— Je passe en premier pour m'assurer que rien ne nous attend de l'autre côté, fit-il d'une voix chaleureuse.
Joignant le geste à la parole, Gaël franchit le portail. Il fut suivi de Laurine qui tenait à présent Bartok dans ses bras, de Lidya, et enfin de Léa, derrière laquelle le passage se referma.
Elles eurent l'impression que la terre se dérobait sous leurs pieds, et qu'elles étaient dans un tourbillon lumineux.
Les yeux fermés, ses longs cheveux noirs flottant au gré du courant d'air dans le passage, Lidya retint l'envie de vomir qui la tenaillait. Son cœur battait à la chamade et elle avait l'étrange sensation de flotter dans le vide. Pour ne pas céder à la panique, elle se donna du courage en se répétant intérieurement :
‹‹ Allez, garde ton calme. Tout ira bien. Ce n'est que pour quelques minutes. Bientôt, nous arriverons. Un peu de nerfs, voyons. Tu es plus forte que ça. ››
Mais lorsqu'elle ouvrit un œil et vit le trou béant lumineux dans lequel elles se trouvaient, elle ne put s'empêcher de le refermer et d'imiter Laurine.
— Aaahh..., hurlèrent-elles toutes les deux.
★★★
Hellooo 😄. Ça y est. Le grand départ pour Mirabel. Vos hypothèses sur ce qu'ils trouveront au bout du portail ?
Des critiques/ remarques ?
À samedi prochain pour la suite 😉.
N'oubliez pas la petite étoile. Bisous 💕
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