Chapitre 67 : Réparations
Bonjour ! Comment allez-vous ?
Merci beaucoup pour votre patience !! La suite est enfin là, c'est un chapitre très court, vraiment de transition avant de lancer une autre dynamique...!
Merci infiniment pour vos retours, vos commentaires et vos votes <3
Je vous souhaite une bonne lecture !
Chapitre 67 : Réparations
Etna avait pris l'ancienne chambre de Satya. Il s'était passé deux semaines depuis ses aveux et sous conseils de Leo et Minerva, elle avait décidé d'enfin déménager. Ses parents ne l'en avaient pas empêché, estimant probablement qu'ils ne pouvaient pas la garder éternellement dans la maison. Au fond, ils ne l'avaient jamais gardé prisonnière, mais Etna n'avait pas non plus trouvé le courage de faire ses valises et de couper les ponts. La proximité avec Minerva était bienvenue. Cette période semblait être un tournant pas seulement pour elle mais aussi pour Minerva qui commençait doucement à préparer son départ du Ministère. Elle n'acceptait plus de nouveaux dossiers et pouvait tranquillement finir ceux en cours, sa pile diminuant enfin sur son bureau. Cela lui permettait également de rentrer plus tôt chez elle, se reposer. Souvent, elle pensait à Lewis, à sa réaction en lisant sa lettre -si jamais il l'avait lue. Elle se demandait ce qu'il devenait. Elle voulait lui rendre visite sans savoir si elle serait la bienvenue. Ou devait-elle disparaître de la circulation ?
Alfie avait été mis au courant de la situation d'Etna. Il avait eu un air navré mais également soulagé de voir une sortie se dégager du marasme d'incertitudes dans lequel les deux avaient été plongés.
- Tu avais raison de ne pas accuser immédiatement Leo, admit Minerva en reconnaissant son erreur de jugement.
- J'ai failli croire à cette histoire également, ce n'est rien. Je ne suis pas parvenu à saisir les sentiments qui liaient Etna et Leo.
Il eut un léger sourire triste, et son regard se déporta sur la ruelle, peu passante en ce début d'après-midi. Minerva observa son ami.
- Y a-t-il quelque chose que tu souhaiterais me dire ?
Alfie sursauta et sourit à nouveau. Il secoua la tête, la baissa, sourit à nouveau, encore de cette manière fataliste.
- Cela m'a fait du bien de retrouver Etna et j'aurais souhaité... j'ai beaucoup d'affection pour elle mais...
Alfie hocha la tête, comme s'il essayait de se convaincre lui-même.
- Elle semble avoir trouvé quelqu'un de bien dans sa vie. Quelqu'un qui l'a toujours aidée et soutenue.
Minerva se mordilla la lèvre.
- Je suis désolée pour ça, Alfie.
Celui-ci s'esclaffa.
- C'est ton grand cœur romantique qui parle ?
Minerva eut un sourire fin. Peut-être pas son cœur romantique, mais son cœur avait effectivement connu la souffrance amoureuse. Elle comprenait.
- Ce n'est rien, reprit-il, le temps fera son affaire. Tant qu'elle est heureuse avec lui, tout ira bien.
Minerva sirota sa boisson, resta silencieuse quelques instants, puis dit :
- T'es quelqu'un de bien, Alfie. Elle sera contente de t'avoir quand je serai partie.
Alfie leva un visage surpris.
- Comment ça, partie ?
- J'ai démissionné du Ministère.
Alfie se redressa violemment et se cogna le genou contre la table.
- Tu ..? Mais pourquoi ?
Minerva haussa les épaules, l'air de dire que ce n'était rien alors que c'était une des plus grosses décisions qu'elle ait faite de sa vie (après celle d'entrer dans le Ministère, ironiquement).
- Je n'y étais pas bien, pour ne pas dire mal. Rien n'allait, je m'enfermais juste dans un travail qui m'assurait un salaire, un semblant de reconnaissance, et un soulagement d'avoir l'impression de réussir ma vie. Alors que je n'étais pas heureuse, que j'y mourrais lentement.
- Wah..., souffla Alfie en posant ses coudes sur la table. Et qu'est-ce que tu vas faire, maintenant ?
Minerva réfléchit un instant.
- Je ne sais pas trop, je crois que j'ai besoin de changer d'air.
Elle n'osait pas encore le dire, mais la dernière lettre de Holly lui était revenue en tête lors de sa prise de décision. Son amie avait lâché son poste d'attrapeuse chez Holyheads pour rejoindre l'équipe de recrutement. Son courage l'avait impressionnée et surtout, elle n'avait pas oublié sa proposition de la mettre en contact avec la directrice de l'école de Uagadou. Elle n'en n'avait touché mot à personne, mais elle était curieuse de l'enseignement en métamorphose proposé. Elle qui avait lutté pour devenir Animagus, découvrait que sur un autre continent, la plupart des élèves disposaient également de ce talent.
- Mais Etna aura probablement besoin d'un peu de familiarité autour d'elle, donc je vais rester un peu dans les parages quelques temps.
Cela lui paraissait une bonne idée, mais moins aux yeux d'Alfie qui sembla interloqué.
- Mais, pendant combien de temps ? Et que feras-tu en attendant ?
- Je ne sais pas, je vais déjà terminer mes deux dernières semaines de travail, et je verrai après pour la suite.
Alfie haussa un sourcil.
- Ça te terrifie tant que ça ?
Minerva papillonna des yeux.
- Quitter le Ministère et ne pas avoir un filet de secours auquel te raccrocher, ça te terrifie, n'est-ce pas ?
- Qui ne le serait pas, bougonna Minerva qui avait l'impression d'être angoissée de tout dans sa vie.
Alfie croisa ses bras et inspira.
- C'est vrai, mais Etna est une grande fille qui sait prendre soin d'elle. Elle détesterait vivre à tes crochets.
Oui mais cela lui donnait une excuse pour rester à Londres, ville dans laquelle elle n'appréciait pourtant pas habiter. Au moins avait-elle conscience d'en partie utiliser son amie comme excuse pour ne pas rentrer immédiatement. Du moins, pas avant d'avoir un plan qui prendrait suite à sa démission. Elle n'allait tout de même pas retourner chez ses parents en leur annonçant que, jusqu'à nouvel ordre, elle resterait à Caithness parce qu'elle avait quitté son emploi, somme toute stable et prestigieux, pour se jeter dans l'inconnu. Dans quelques jours, elle vivrait sur ses économies et lesdites économies ne tiendraient pas éternellement. Elle n'avait pour le moment rien annoncé à ses parents, de peur de leur réaction -la joie de sa mère à sa prise de poste au Ministère restait gravée dans son esprit- mais elle ne pourrait pas garder le secret éternellement. Pour une fois cependant, elle avait la certitude d'avoir fait le bon choix. Il fût une époque où elle aurait considéré son geste comme trop impulsif, qu'elle aurait dû attendre d'avoir un plan B, qu'elle aurait dû vérifier que le mousqueton de sécurité était bien en place avant de sauter. Mais elle en était arrivée à un point où elle ne parvenait plus à supporter son rythme au Ministère, sa vie là-bas, et presque à ne plus se reconnaître. Alors tant pis. Il était trop fatiguant de toujours penser à ce qu'il pouvait arriver, à en avoir tellement peur que cela l'empêchait d'agir. Désormais, il lui fallait assumer les conséquences de ses décisions, et c'était une chose plus compliquée à faire que ce qu'elle n'avait pensé. D'autant plus que l'ambiance au travail s'était détériorée. Ses collègues ne prenaient plus la peine de lui adresser la parole, elle la jeune diplômée qui n'avait même pas tenu deux ans alors que son supérieur lui proposait une promotion.
Comme d'habitude, c'était toujours les mêmes qui éprouvaient de la sympathie envers sa personne, à savoir Elphinston, Marchbank et la secrétaire -toujours autant débordée par le travail. A l'inverse de Minerva, celle-ci n'avait pas le luxe de tout lâcher comme elle le souhaiterait, ayant une famille à sa charge.
Plus les jours passaient, plus les tâches de Minerva au Ministère étaient mécaniques. Elle faisait toujours bien son travail et n'avait, selon elle, rien à se reprocher, mais jamais son poste ne lui avait paru aussi ennuyeux qu'il ne l'était depuis quelque temps. Peut-être était-ce à cause de sa démission, peut-être ne se sentait-elle plus obligée de faire semblant d'apprécier ce qu'elle faisait, de se rassurer. Donc ses journées se résumaient à travailler en surveillant le calendrier et passer ses soirées avec Etna sa nouvelle voisine. Cela au moins, était une des rares activités qu'elle trouvait appréciable et qu'elle regretterait en quittant son emploi. Depuis le départ de Satya, la chambre avait été tristement vide, attendant désespérément sa nouvelle locataire. Etna ne cherchait pas encore d'emploi. Elle avait repris son habitude d'errer au Chemin de Traverse et rentrait juste avant les horaires de fin de travail, comme si son horloge interne ne parvenait pas à se défaire de la stratégie qu'elle avait suivie pendant de si longues semaines. Les deux amies passaient leurs soirées à discuter tranquillement, créant une douce routine qui semblait apaiser leur deux esprits.
- Cela va me faire tout drôle lorsque tu vas partir, fit Etna allongée sur le matelas de fortune de Minerva.
Celle-ci sourit.
- Ce n'est pas pour tout de suite.
Etna se redressa, en même temps que son sourcil droit.
- Bah pour quand, alors ? Tu vas t'ennuyer si tu ne fais rien ici.
- Il y a plein de choses à faire à Londres, répondit simplement Minerva.
Le deuxième sourcil d'Etna se leva.
- Tu vas rester dans la capitale ? Je croyais que tu n'aimais pas cette ville.
Non, elle ne l'aimait pas. Trop de monde, trop de personnes pressées et surtout, elle accueillait trop de mauvais souvenirs.
- Où veux-tu que j'aille de toute façon ?
Etna s'assit en tailleur et pointa un doigt accusateur sur elle.
- T'as eu le courage de quitter le Ministère, et maintenant tu comptes rester sagement dans ton logement en attendant qu'une solution te tombe toute cuite dans le bec ?
- Pas vraiment...
- Pour me convaincre de partir de chez mes parents, tu m'as dit que ça me ferait du bien de partir, de m'éloigner d'un environnement toxique. Toi aussi, prends de la distance avec ton cercle toxique.
Minerva soupira.
- Je t'ai promis que je ne te laisserai plus tomber.
Etna eut le culot de rouler des yeux.
- Tu n'as pas besoin de vivre de l'autre côté de mon mur d'appartement pour me soutenir, tu exagères. Arrête de vouloir prendre soin des autres avant de prendre soin de toi.
Minerva ouvrit la bouche, puis la referma, vexée. Etna sembla amusée de sa réaction.
- Tu es une bonne amie, et je te suis très reconnaissante. A jamais, d'ailleurs. Mais tu ne m'aideras pas si tu ne te prends pas en main à cause de moi.
Minerva hocha la tête, afin de mettre un terme à la conversation. Cela ne résolvait pas son problème sur son plan B. Ou du moins, son nouveau plan A.
- Et puis, je ne suis pas seule ; Leo est là, Alfie aussi. Lewis probablement, même si je n'ai pas eu l'occasion de beaucoup lui parler la dernière fois. D'ailleurs, comment va-t-il ? Je ne parviens plus à avoir de ses nouvelles.
***
La dernière fois qu'elle était venue ici, elle était une autre Minerva. Plus jeune, plus innocente, plus protégée dans sa bulle de Poudlard, qui ne prêtait pas attention au monde extérieur. Elle était amoureuse, aussi.
Elle ignorait s'il serait là. Elle ne savait pas ce qui lui était arrivé depuis la dernière fois qu'elle l'avait vu. La boule qu'elle avait au ventre ne faisait que grossir au fur et à mesure qu'elle s'approchait du pas de la porte. La suite des événements la terrifiait mais elle n'avait pas le choix. Quitter l'hôpital avait été lâche. Aussi bouleversée avait-elle été, Lewis devait l'être encore plus. Tant pis s'il lui hurlait dessus, s'il mettait un terme aux dernières bribes de relations qu'ils avaient, elle se devait lui rendre visite.
Ce fut Faye Rollin, la maman de Lewis, qui lui ouvrit. Elle avait à peine entrouvert la porte, son air méfiant apparaissant dans l'encadrement. Bien qu'elle n'ait pas vu Minerva depuis plusieurs années, elle sembla la reconnaître car elle ouvrit un peu plus la porte. Ses cheveux blonds étaient attachés dans une queue de cheval basse et négligée et sa peau était pâle, presque maladive. Sous ses yeux, étaient dessinés deux arcs bleutés de fatigue et d'angoisse mêlée. Son dos voûté la força à lever les yeux vers Minerva.
- Ah, bonjour. Pardon, je ne peux pas trop discuter...
- C'est à propos de Lewis...
Le coin de la bouche de Faye eut un tic nerveux.
- Je n'ai pas le temps.
Elle s'apprêtait à refermer la porte, mais Minerva s'avança.
- On ne vous a pas dit ? C'est...
Elle inspira, la respiration tremblante. « C'est moi qui suis responsable de l'état de votre fils » ? « J'étais là quand votre aîné a mordu votre plus jeune enfant » ? Rien ne semblait approprié. Surtout, peu importe comment elle tournait la phrase, la culpabilité lui rongeait l'estomac.
- J'étais à l'hôpital, ce soir-là, finit-elle par avouer du bout des lèvres et rien que ces mots lui firent tourner la tête.
Faye resta immobile un très long moment, ou peut-être le temps parut ralenti au regard de Minerva, alors qu'elles se regardaient droit dans les yeux, chacune se remémorant ce soir tragique. Faye finit par détourner les yeux pour jeter un œil derrière elle.
- Faisons le tour.
- Lewis est ici ? demanda Minerva en trébuchant sur ses pieds alors que Faye s'avançait.
Celle-ci s'arrêta quelques secondes, les yeux baissés.
- Il ne voudra pas te voir.
Minerva sentit son cœur dégringoler et rejoindre la boule dans son ventre, mais elle hocha la tête. Elle comprenait.
- Faisons le tour, répéta la mère de Lewis avant de longer la maison.
Elle désigna une table et deux chaises posées à l'ombre d'un arbre tout maigre. Les deux s'assirent de manière raide, sans se regarder, la respiration pesante et contrôlée. Minerva ne savait pas qui devait commencer la conversation et si c'était à elle, de quelle manière.
- Je suis soulagée de savoir Lewis chez lui, dit-elle dans un souffle.
Faye leva des yeux creux vers elle.
- J'ai déjà perdu un fils, comment pourrais-je abandonner mon deuxième enfant ?
Minerva acquiesça, ce qui voulait tout et ne rien dire. Elle n'avait aucune idée de comment réagir. Mais au moins savait-elle que Lewis était entre de bonnes mains.
- Je suis profondément désolée, dit Minerva en se tournant vers Faye.
Faye ne dit rien. Minerva se demanda si elle considérait de lui crier dessus, de la frapper, de la jeter en dehors de chez elle ou de fondre tout simplement en larmes. Elle accepterait tout. Elle n'osait pas imaginer dans quel état cette mère se trouvait. Elle avait dû apprendre à vivre avec l'idée que son fils aîné, devenu loup-garou et meurtrier, avait rejoint le côté sombre de la magie, avait menti à son benjamin pour le préserver de tout malheur alors qu'elle le voyait fouiller dans des ténèbres dangereuses. Minerva se souvenait de son éclat de colère lorsqu'elles s'étaient rencontrées. « Tu vas finir par te brûler les ailes ». Comme devait-elle se sentir aujourd'hui, elle qui avait été si terrifiée de la fin de cette histoire, et qui voyait sa prédiction s'accomplir, sans n'avoir rien pu faire ?
- Tu m'as ramenée mon fils, murmura-t-elle finalement au prix de grands efforts.
Elle s'arrêta là. Derrière l'absence de mots, Minerva sentait que l'état de Lewis lui était bien trop lourd pour qu'elle puisse exprimer une forme de reconnaissance. La mère en elle était tiraillée entre le soulagement d'avoir son garçon près d'elle, et le chagrin de savoir sa vie détruite.
- Pourquoi as-tu quitté l'hôpital ce soir-là ? demanda Faye d'une voix monotone. Le médecin a dit que la jeune fille qui avait ramené notre fils avait attendu durant toute l'opération pour avoir des nouvelles. Pourquoi être partie après ?
Minerva s'agrippa les mains.
- Je me sentais coupable. Je me sens toujours coupable.
- As-tu parlé de ce qu'il s'est passé à quelqu'un ?
Minerva secoua vivement la tête.
- Non, pas du tout, je garderai le secret !
Personne n'était au courant, pas même Etna, à qui elle avait dit que Lewis semblait très occupé. Faye secoua la tête.
- Tu devrais en parler. Aux personnes de confiance. Toi aussi, tu as vécu une situation terrifiante et qui a dû te marquer l'esprit. Ce n'est pas bon de tout garder pour soi.
- Je...
- Ne néglige pas tes émotions sous prétexte que tu penses que ceux des autres sont plus légitimes que les tiens.
Elle sourit devant le regard surpris de Minerva qui trouvait qu'elle parlait comme son fils.
- Lewis nous parlait beaucoup de toi, tu sais. Même après votre rupture, il se demandait si tu avançais dans le bon chemin.
Faye se leva, semblant vouloir mettre fin à leur discussion, sûrement trop difficile pour elle.
- Prenez soin de lui, balbutia Minerva d'un ton suppliant. Il... il préférait mourir plutôt que de devenir loup-garou et je...
Elle eut un hoquet et Faye posa une main sur son épaule. Comment pouvait-elle tenter de la consoler alors qu'elle savait que son fils aurait voulu mourir, Minerva ne le saurait jamais.
- Lewis n'a vu personne depuis son accident. Ce n'est pas toi qu'il rejette, c'est tout le monde. Je lui dirai que tu es passée.
Minerva comprit le message. Il était temps de partir. Faye avait épuisé toutes ses forces et toutes ses ressources pour lui ouvrir la porte, discuter et la rassurer. Elle allait retourner à son fils et son désespoir, espérant que Lewis lui rouvre la porte, un jour.
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