Chapitre 66 : Clôture d'un chapitre
Coucou !
J'ai un peu de retard j'en suis désolée, je vous le poste maintenant comme ça -en Europe du moins- vous aurez le chapitre pour le réveil !
Je vous souhaite une très bonne lecture ! C'est la suite directe du chapitre dernier, où vous avez été nombreux.ses à réagir, je vous en remercie infiniment *-*
Et bonne fête des mamans !!
Chapitre 66 : Clôture d'un chapitre
Entre ses bras, le corps de Lewis était lourd. Entre ses bras, se trouvaient la peine, la douleur de Minerva, sa culpabilité et sa peur. Il bougeait à peine, sa blessure drainant ses forces. Peut-être, lui qui avait été si désireux de mourir seul au milieu de nulle part, faisait tout ce qu'il pouvait pour ne pas survivre.
Elle vit des secouristes de Sainte-Mangouste accourir vers eux, leur longue robe flottant à leurs chevilles.
- De l'aide..., supplia Minerva entre ses larmes.
De l'aide pour qui ? Pour Lewis, cette âme trahie par son frère et qui souhaitait abandonner à tout jamais son corps déchiqueté ? Pour elle, qui voyait le premier garçon qu'elle avait aimé perdre la vie ? Ce garçon qui avait été le premier à voir clair en elle, à la pousser à chercher qui elle était, qui elle voulait être. Le premier à avoir aimé ses insécurités, ses défauts. Qui l'avait fait grandir, lui déjà si mature à Poudlard, si sûr de ses décisions et du Lewis qu'il cherchait à atteindre.
Mais ce soir, dans la lumière des lampadaires brouillée par ses larmes, Minerva tenait un corps recroquevillé et si petit, si brisé.
- Aidez-nous, balbutia-t-elle alors qu'un médecin allongeait Lewis sur un brancard.
Il sembla lui parler, mais elle ne parvenait pas à l'entendre. Les sanglots de Lewis, la panique dans sa voix résonnaient dans sa tête, dans une litanie qui ne paraissait jamais vouloir s'arrêter, et qu'elle n'oublierait probablement jamais. Jamais elle ne l'avait vu pleurer, se plaindre. Son seul instant d'apparente détresse, il l'avait offerte lorsqu'il lui avait montré la photo de son frère. Aujourd'hui, Albert était à nouveau responsable.
- Si vous voulez le sauver, il faut nous dire ce qu'il s'est passé.
La voix du médecin perça dans son brouillard de détresse.
- Dites-nous ce qu'il s'est passé, répéta-t-il.
Minerva renifla, laissa échapper un sanglot étranglé. Elle songea à mentir, terrifiée des conséquences que la vérité pouvait avoir.
- Un loup-garou, finit-elle par lâcher, craignant finalement que la blessure soit mal soignée si elle donnait une autre raison.
L'air du médecin prit en gravité. Il donna plusieurs ordres autour de lui et les infirmiers et infirmières attrapèrent le brancard en un seul mouvement. D'un pas rapide, tous prirent la direction du service des urgences, Minerva titubant dans leur sillage, percutée et percutant les autres patients et visiteurs. Tout ce qu'elle voyait était la forme allongée de son ami, poupée inerte sur le drap blanc immaculé.
Les mains du médecin l'arrêtèrent à l'entrée du sas pour les urgences.
- Vous ne pouvez pas aller plus loin.
- Mais mon ami...
Le médecin secoua la tête.
- C'est nous qui avons votre ami en charge, désormais.
Il lui tourna le dos mais ses doigts faibles étreignirent un pan de sa tunique. Lorsqu'il la regarda, elle savait ses yeux suppliants, brillants de larmes qu'elle ne parvenait plus à contenir.
- Vous... vous allez le consigner ? Sur le registre ?
Le médecin tira lentement sur sa robe, cherchant à se détacher de ses doigts qui lui demandaient une faveur bien trop élevée.
- C'est le règlement. C'est la loi.
- Vous pourriez... faire une entorse ?
Le médecin se raidit.
- Je vous demande pardon ?
La gorge de Minerva émit un gargouillis alors que sa complainte mourrait avant d'atteindre ses lèvres. Une exception, pour son ami. Pour Lewis, son premier amour. Elle pouvait supplier à genoux s'il le fallait, promettre toutes les promesses, obéir à toutes les obligations, tout pour rendre la vie de Lewis moins misérable qu'elle n'allait être.
Le médecin lui tourna le dos sans qu'elle ait pu procéder, la laissant le cœur meurtri, le chagrin dévorant, l'esprit mort.
Ses pleurs dans le hall n'émurent personne, chacun se focalisant dans sa propre inquiétude, ses propres traumatismes. Elle-même n'avait que faire de cet enfant à la jambe dans le plâtre qui ne parvenait pas à avancer sur son fauteuil roulant, de cette vieille dame à la canne tremblotante, de cet homme au front barré de bandages. Lewis était au bord de la mort et sa vie allait devenir qu'une simple chute libre dans un océan de rejets, de douleurs et de peur. Elle voulait remonter le temps, revenir aux jours où il venait la soutenir aux matchs de Quidditch, une écharpe rouge autour du cou, aux jours où ils travaillaient ensemble dans l'insouciance des examens de Poudlard, aux jours de murmures et confidences sous le Saule Cogneur, dans le jardin de Fleamont, sur la terrasse des McGonagall. Elle voulait retourner aux jours emplis des rires de Lewis, de ses remarques sarcastiques, de son esprit vif, aux jours où il avait embrassé ses défauts, ses qualités, son être entier. Elle était prête à retourner aussi loin dans le passé, quitte à revivre sa rupture avec Dougal, sa dépression au Ministère, si cela voulait dire changer le destin de son ami. Elle pouvait tout endurer pour réparer ses décisions, tout supporter pour sauver celui qui l'avait guidée tant de fois durant son adolescence, qui l'avait aimée le premier avant qu'elle ne s'aime elle.
Elle attendit des heures. Des heures durant lesquelles elle espérait revoir le médecin annoncer que la morsure n'était pas assez profonde pour transformer Lewis en loup-garou, pour lui annoncer qu'ils avaient réussi l'opération. Parfois, des heures à espérer qu'il revienne avec un air de regret, ses traits annonçant avant la parole que Lewis les avait quittés. Qu'il était parti dans un monde où le loup-garou n'existerait pas, où les hommes et les femmes admireraient son être et ne regarderaient pas sa blessure, où le Ministère et ses lois n'exerceraient pas leur influence dévastatrice. Un monde dans lequel il serait plus heureux que dans celui où Minerva avait cherché à le garder.
Elle se réveilla, les yeux gonflés par les larmes, par une main qui la secouait. Le médecin.
- Mademoiselle ? Mademoiselle.
Il se redressa quand elle sembla reprendre conscience de son endroit. Ses yeux n'arboraient aucun indice, comme si lui non plus ne savait pas si le résultat de l'opération était une bonne nouvelle ou pas.
- Il va s'en sortir, dit-il simplement. Ses parents attendent d'entrer dans sa chambre, mais vous pourrez y aller après.
Il la quitta sans un mot de plus, laissant une Minerva immobile sur son siège froid. Lewis était vivant. Elle ne savait pas ce qu'elle ressentait. Elle ne saurait sûrement jamais. Lewis était vivant et désormais, il allait la haïr pour le restant de sa longue vie douloureuse et solitaire.
Elle se leva, les yeux maintenant secs, vides de larmes et d'émotions. Elle allait rentrer chez elle et ne plus jamais le revoir. Elle garderait à jamais en tête sa dernière image de Lewis, une silhouette pitoyable, détruite par un frère tout aussi misérable. Elle se souviendrait à jamais des supplications qu'elle n'avait pas écoutées. Un jour, elle l'espérait, elle aurait le courage de lui faire face et accepterait sa colère et son ressentiment.
Car dans son intention de vouloir bien faire, elle l'avait condamné à vivre.
***
Cher Lewis
Si je n'ai pas eu le courage de te faire face à l'hôpital, laisse-moi au moins écrire ces mots. Déteste-moi autant que tu le souhaites ; ce ne serait pas ta première déception venant de ma part. Tu m'as demandée de te laisser là-bas, je t'ai trahie. La seule requête que tu aies jamais prononcé à mon égard, je n'y ai pas accédé. Mais peu importe ce que tu penses, je ne laisse pas mes amis à la mort. Je ne les abandonne pas dans un lieu inconnu, meurtri par une blessure fraternelle. A vrai dire, je ne demande pas ton pardon. Je n'en ai pas besoin. Tu peux détester ton état, ta condition, tu peux me haïr, mais je ne regretterai pas mon choix. Je l'ai fait en accord avec ce en quoi je crois, avec qui je suis. C'est ce que tu as essayé de m'apprendre lorsque nous sortions ensemble, ce que j'ai échoué à comprendre pendant si longtemps.
Le jour où tu souhaiteras me revoir, je serai là. J'attendrai. Peu importe l'endroit où je serai à cette période de ta vie, je veux que tu saches que je viendrai, toujours. Parce que je te dois tout. À tes yeux, j'ai peut-être détruit ta vie. Et cela va probablement te paraître culotté mais à l'inverse, tu as sauvé la mienne. Tu fais partie intégrante de ma vie, de qui je suis maintenant. Que tu le veuilles ou non désormais, ma vie sans toi aurait pris des virages différents.
Aujourd'hui, je vais poser ma démission. Je vais quitter ce Ministère qui m'a fait souffrir, qui m'a fait grandir par la douleur, qui m'a fait traverser des périodes de peine et de désespoir. Un Ministère pour lequel je me suis accrochée, aveuglée par mes craintes mais aussi par mes espoirs d'un monde nouveau auquel je voulais déposer ma pierre. Désormais, j'ai épuisé toutes mes forces, expiré tout mon souffle pour une vie qui ne m'aiderait pas. Pour une vie qui me brûle à petit feu. Je ne travaillerai plus pour ce Ministère qui cherche à te rejeter, dont les lois paraissent immuables, gravées dans un roc indestructible. Je ne veux plus de cela.
Et c'est encore toi qui me sauve. À nouveau.
Lewis. Lorsque tu seras prêt, laisse-moi être là pour toi.
À jamais,
Minerva
Elphinston baissa les yeux de la lettre que Minerva lui tendait.
- Vous êtes sûre ?
Minerva hocha la tête.
- Même avec...
- Même avec votre promotion, oui.
Une promotion prestigieuse. Qui avait fait battre son cœur. Qui lui avait fait miroiter des champs de possibilités, de renouveau, de refonte du département de la Justice. Une promotion qui finirait comme la précédente : une routine lassante, effrayante, inarrêtable. Infernale.
Alors, pas cette fois. Cette fois, elle partirait, volontairement, consciemment, la tête haute, l'esprit assuré et soulagé. Cette lettre de démission qu'Elphinston tenait entre ses doigts, elle ne la regretterait pas.
- Soyons réalistes, dit-elle, je ne...
- La plupart du temps, les personnes réalistes sont juste des idéalistes qui ont vu leurs rêves se briser en chemin, interrompit Elphinston. Ne soyez pas réaliste, Minerva, pas vous.
Il posa la lettre, s'adossa à son siège. Se passa la main dans les cheveux.
- Est-ce à cause de moi ? Je vous ai trouvée distante depuis quelques jours.
Minerva émit une sorte de ricanement.
- Ne soyez pas trop prétentieux. Vous n'avez rien fait de mal.
Au contraire. Il avait été bon, attentif. Trop, peut-être. Si elle réfléchissait bien, la condition de Lewis n'était pas la seule raison qui la poussait à son départ, même s'il en était l'instigateur. Les sentiments qu'elle éprouvait pour Elphinston lui étaient douloureux. Ce n'était pas de l'amour, mais l'affection qu'elle lui portait était bien plus forte qu'une simple relation entre collègues ou même amis. A lui aussi, elle devait beaucoup. Mais le spectre de Dougal pesait encore bien lourd sur son esprit, et le moindre instant d'affection qu'elle éprouvait pour son supérieur se soldait par l'ombre de la culpabilité. Alors, s'éloigner d'Elphinston quelques temps lui serait bénéfique, même si tout paraissait plus simple parce que lui, était sorcier. Ce qui ajoutait une nouvelle raison à son départ du Ministère. Elle n'avait jamais été en accord avec les lois de son département. Elle songeait à Alan né-moldu, son père moldu marié à une sorcière, Filius le mi-gobelin, Dougal son amour... Aucune des ces relations n'étaient bien perçues par son administration. Et désormais, Lewis le loup-garou, dont la vie était condamnée par des lois décidées par des sorciers pourris jusqu'à la moelle.
Lewis, celui qui avait longtemps cherché à lui ouvrir les yeux, à lui donner confiance en elle, à la forcer à être elle-même, droite, en accord avec ses valeurs, avait enfin réussi. Dans son sacrifice non-intentionnel, il avait éclairci l'esprit de Minerva. Et la voilà qui déposait, dans un cri silencieux de soulagement, une démission à la saveur de victoire amère.
- Vous avez tout de même conscience qu'il vous reste un mois ici ? Votre préavis entre en effectivité dès aujourd'hui.
Minerva acquiesça.
- Vous pourrez compter sur moi durant tout ce mois, bien évidemment.
Elphinston sourit et laissa planer quelques secondes de silence.
- Je suis triste de devoir vous laisser partir. Vous avez fait du bon travail. Mais j'imagine, et j'en suis satisfait malgré tout, que le travail bien fait n'est pas votre seul objectif de vie. J'espère que vous serez plus heureuse, peu importe où vous vous trouverez.
Son sourire prit une touche de nostalgie.
- Vous resterez en contact, n'est-ce pas ?
Elle prendrait des nouvelles, écrirait des lettres, discuterait autour d'un thé... Avec la distance physique, elle parviendrait à faire la part des choses, à maîtriser et dompter les sentiments qui l'habitaient.
- En attendant, vous n'êtes pas encore partie, alors au boulot !
Minerva sourit et obéit en reprenant le chemin vers son bureau. Elle qui avait tant craint ce jour, s'en était échappéé, cette perspective qui l'emplissait de désespoir, se retrouvait le cœur libéré, léger. Elle ne savait pas ce qu'elle ferait après, où elle irait, qui elle rencontrerait, mais désormais, elle était prête à accepter l'inconnu. Tout simplement parce qu'elle tournait le dos à quelque chose de pire.
Marchbank sembla comprendre avant même que Minerva n'ait à prononcer un mot. La vieille dame opina de la tête, l'air d'approuver.
- Ce navire ne mérite pas que vous tentiez de le sauver. Vous avez raison de sauter avant de couler avec lui.
***
Etna arriva pile à l'heure. Malgré les événements passés, la morsure de Lewis, la démission, Minerva n'avait pas oublié le cas de son amie. Consciente des rares possibilités qu'elle avait de la voir, elle avait adressé sa lettre à la ruelle des sorciers errants. Ne sachant pas si Etna la verrait rapidement, elle avait décidé d'une date pour une semaine plus tard. Minerva avait quitté le travail plus tôt spécifiquement pour rentrer dans le délai de liberté que son amie avait, avant que ses parents (ou son copain ?) ne rentrent du travail.
Le toquement à la porte était discret, presque timide, hésitant. Cette fois, lorsque Minerva ouvrit la porte, elle n'eut pas la surprise de voir son amie, pas d'attente de voir Dougal.
- C'est bon de te voir, dit-elle. Volontairement, je veux dire.
Minerva avait compris que leurs rencontres n'avaient pas été dues au hasard, et Etna sembla le réaliser. Elle entra dans le studio à petits pas et s'assit naturellement sur le lit de Minerva, l'appartement toujours aussi peu meublé et qui n'avait désormais plus aucune chance de l'être.
- Du thé ? proposa Minerva avant de se diriger vers son seul mais indispensable produit électroménager, à savoir sa bouilloire. Comment vont tes parents ?
Elle observa attentivement la réaction d'Etna : un regard fuyant, des mains sagement placées sur ses genoux.
- Ils vont bien...
- Et ton copain ?
- Bien aussi.
Mais le ton était plus léger, c'était indéniable.
- J'ai parlé à Lewis, il y a peu, tu sais.
Etna redressa la tête, surprise.
- Oh, comment va-t-il ?
Minerva ne répondit pas. S'il y avait des explications à donner, elle les fournirait plus tard, mais pas aujourd'hui.
- On a parlé de toi, de ta rencontre avec lui.
Minerva chercha ses mots, longuement, pour ne pas la blesser, ne pas lui faire peur. Puis elle se dit que la manière de rendre la conversation plus naturelle était peut-être juste de ne pas prendre trop de pincettes. Si Etna était venue la trouver, c'était qu'elle lui faisait confiance avec la manière dont elle pouvait gérer la situation.
- A vrai dire, j'ai toujours trouvé ton copain étrange. Peu aimable lors de notre rencontre et très suspect.
- Leo...
- Lorsque j'en ai parlé à Lewis, il n'a pas semblé d'accord, continua Minerva en fixant sa bouilloire qui commençait à émettre un sifflement. Que ton copain était probablement plus suspicieux que suspect. Alors, Etna, je vais te poser une question simple.
Elle se retourna, s'adossa à son plan de travail et fixa son amie qui serrait ses mains entre elles.
- Est-ce de ton copain ou de tes parents dont je dois me méfier ?
Etna ouvrit la bouche, la ferma. Elle inspira brièvement, comme si elle cherchait à débloquer un nœud dans sa gorge avant de baisser la tête. Et de fondre en larmes. Minerva lâcha précipitamment sa bouilloire et s'approcha, une main tendue mais qui s'arrêta, comme d'habitude, avant d'atteindre son objectif. A la place, elle s'assit, les genoux repliés, patientant sagement qu'Etna finisse de pleurer. Elle sentait que de toute façon, elle n'avait pas besoin de la consoler. Il n'y avait personne à consoler. C'était des larmes d'angoisse et de pression qui retombaient, de soulagement mêlé. Et Minerva se sentie à nouveau coupable, coupable de ne pas avoir compris plus tôt le problème, découvert plus rapidement les responsables.
- Je suis désolée, fit la voix d'Etna entre deux sanglots.
- T'en fais pas, le parquet ne craint pas l'eau.
Etna s'étouffa mais releva la tête dans un sourire humide. Minerva retourna à la préparation du thé. Elle laissa son amie reprendre son souffle puis lui tendit sa tasse.
- Tu veux bien m'expliquer ? J'étais persuadée que ton copain...
Minerva grimaça.
- Si ce sont tes parents... alors, depuis combien de temps cela dure-t-il ?
- Je ne sais pas trop... Depuis ma quatrième année de Poudlard ? Mais cela allait à l'époque, je rentrais rarement pour les vacances, et durant l'été, je traînais avec Leo. Mais depuis que j'ai quitté Poudlard...
Etna baissa la tête.
- Est-ce que... commença Minerva avant de s'arrêter quelques secondes, sans trop savoir comment aborder le sujet. Est-ce que... cela arrivait souvent qu'ils...?
Elle pointa sa pommette et Etna sembla comprendre. Elle secoua la tête.
- C'était la première fois, ce jour-là. Mon père est violent quand il boit, mais jamais encore il ne m'avait... frappée. C'est plus... mental, en général.
Par mental, Minerva comprit qu'elle parlait d'harcèlement moral. Probablement un harcèlement continu, constant, pressant pour qu'elle en vienne à demander de l'aide aussi ardemment.
- Lorsqu'ils t'ont invitée, c'était effectivement pour apprendre à te connaître. Savoir si tu représentais une menace, si tu pouvais les soupçonner. Jamais ils n'ont pu repousser Leo sans que cela paraisse étrange, car nous avons presque grandi ensemble.
Minerva repensa à son comportement lors du déjeuner. Ils avaient dû la prendre pour la plus idiote des sorcières, avec ses allusions contre Leo. Bien évidemment que celui-ci était resté tendu durant tout le repas, voyant qu'elle ciblait la mauvaise personne.
- Je sais à quoi tu penses, fit Etna, mais tu leur as bel et bien fait peur en mentionnant tes connaissances du Ministère de la Justice et chez la police.
Minerva alla la rejoindre avec sa propre tasse et s'assit en tailleur, sans trop savoir comment enchaîner les explications.
- Avec ma mère, reprit Etna finalement, c'est compliqué. J'ai toujours grandi avec ses remarques, son regard réprobateur, ses reproches sur mon comportement, mes actions, mon physique. Que je ne devais pas être trop gourmande dans mes ambitions. Que j'étais déjà jolie et qu'il ne fallait pas que j'en demande plus.
Minerva se souvint de toutes ces fois où les élèves de Poudlard se retournaient sur son passage et au lieu de s'en enorgueillir, Etna avait tout fait pour ignorer les regards. Quand elle assurait qu'elle était plus qu'un joli visage. La frustration provenait d'au delà des étudiants de Poudlard, elle était déjà présente par sa mère, assez toxique pour détester et repousser le succès de son enfants.
- Tu sais pourquoi c'est toi que j'ai cherché à contacter ? demanda-t-elle soudainement. J'en étais venue à croire ma mère, à me dire que j'en demandais trop. Mais au moment où je commençais à baisser la tête, j'ai été sélectionnée dans l'équipe de Quidditch. Je suis devenue douée pour quelque chose, réellement douée. On me voyait désormais pour mon talent. Le Quidditch m'a donnée de la valeur.
Minerva songea à Grace, à elle-même. À Etna désormais. Trois filles avec chacune leurs problèmes, leur manque d'estime de soi. Trois filles repêchées par le Quidditch.
- Tu m'as confiée ce rôle de poursuiveuse, puis de capitaine. Te rends-tu compte du bonheur que tu m'as donnée en me valorisant ainsi ? En me rendant si humaine ?
Minerva ne répondit pas.
- Tout ceci, mes parents me l'ont enlevée également. C'était ce qui me rendait indépendante, ma bouffée d'air frais, alors ils se sont débarrassés de mon balai.
Minerva hocha la tête. C'était compréhensible, d'un point de vue pragmatique. Les deux parents travaillant durant la journée, ils pouvaient bien se douter qu'Etna ne resterait pas sagement assise dans le salon à attendre leur retour. Ne pouvant jouer au Quidditch, elle finissait par errer au Chemin de Traverse, croiser Minerva, Alfie, Lewis, demandant silencieusement de l'aide, se réfugiant chez Leo lorsque cela lui était possible.
- Je me suis rendue chez ton copain, dit-elle soudainement. Il a eu une réaction très étrange et à vrai dire, très suspicieuse.
Etna eut un léger sourire un peu coupable.
- Il m'a raconté. Il est très méfiant et il ne savait pas vraiment qui tu étais. Il pensait que tu étais liée d'une manière ou d'une autre à mes parents, alors il a préféré être prudent. C'est le seul homme que mes parents tolèrent dans mon entourage, car cela fait trop longtemps que l'on se connaît pour pouvoir rompre la relation sans être suspicieux.
Minerva se souvenait de la tension de son amie en présence d'Alan, ou même de son comportement distant avec Alfie. Etait-ce par crainte que ses parents l'apprennent ?
- Ta bague, demanda-t-elle, j'imagine qu'elle n'est pas de ton copain ?
A nouveau, Etna sembla essayer de la retirer mais son annulaire se rétracta comme par instinct.
- Je... j'essaie de l'enlever mais... ils m'ont dit que c'était simplement pour ma sécurité, que je ne serais pas embêtée ainsi, et je sais que ce sont des mensonges mais... dès que j'essaie de l'enlever, je n'y parviens pas. je sais que je vais avoir des problèmes s'ils s'en rendent compte.
Elle se tut pendant quelques instants, puis baissa la tête et la releva avec un sourire vaillant.
- Je sais que cela peut paraître stupide, je fais probablement toute une histoire pour pas grand chose.
A ce moment, Minerva eut de la peine. Elle pensait qu'Etna, consciente de la toxicité de ses parents, avait juste besoin d'un coup de main pour se dégager de leur emprise. Mais sa dernière remarque démontrait bien qu'ils avaient déjà investi son cerveau en l'obligeant à relativiser et amoindrir ses problèmes.
- Etna, si tu es là aujourd'hui chez moi, si tu es venue me chercher autant de fois, c'est que tu as besoin d'aide. Que ce que tu vis est non seulement grave, mais grave pour toi aussi. Tu n'as pas le droit d'étouffer cette douleur ; elle est là, alors il faut la prendre en main et tout faire pour s'en débarrasser.
- J'essaie, Minerva, j'essaie. Je te le promets. Mais quand tu cries et que personne ne t'entend, est-ce que tu as vraiment crié ?
Minerva se mordilla la lèvre.
- C'est moi qui n'ai pas su t'entendre. Je te demande pardon. C'est moi qui, dans ma précipitation aussi, allait accuser un innocent, alors qu'il a été le seul à pouvoir t'aider.
Elle posa sa tasse sur son parquet et se rapprocha.
- Je ne te laisserai plus tomber, Etna. Cette fois-ci, c'est moi qui te le jure.
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