Chapitre 42 : Triptyque I, peurs
OMG, un chapitre en avance ?
Profitez, cela n'arrivera sûrement plus avant longtemps X) (je suis un peu chargée demain donc je poste maintenant)
Un grand, grand merci pour vos retour du chapitre précédent ! Vraiment, je me répète, mais savoir que certain.es d'entre vous se reconnaissent dans Minerva sur un ou plusieurs points, c'est juste la plus belle des récompenses !
J'espère que vous apprécierez ce chapitre comme le précédent !
Bonne lecture !
Chapitre 42 : Triptyque I, peurs.
Elle fixait l'article sans réellement le voir. Les mots du titre apparaissaient en flash devant ses yeux, mais son cerveau n'en comprenait pas le sens. C'était elle, la fille qui souriait à l'appareil, à cette journaliste, c'était sa main qui serrait une autre, ses doigts qui agrippaient un diplôme magique. C'était son professeur, Dumbledore qui la regardait d'un air fier et satisfait. C'était elle. Elle à Poudlard, dans une école de sorcellerie où elle avait étudié durant sept ans. Meilleure de sa promotion, promise à la plus grande des réussites.
Minerva agrippa le bas de son T-shirt. Le bourdonnement aux oreilles, elle leva les yeux sur sa mère, installée à nouveau sur son fauteuil, continuant de lire le journal. Ce journal sorcier, sur la Métamorphose, cet abonnement que la jeune fille payait chaque mois, parce qu'elle adorait cette magie. Isobel dévorait le papier des yeux, en buvait ses paroles, elle se rassasiait de ces mots, s'en nourrissait, avide.
Robert Sr passa le pas de la porte. Minerva ne lui jeta pas un seul coup d'œil. La boule au ventre, elle vit sa mère relever son visage, son sourire se figer avec gêne. Elle vit sa main replier le journal, elle vit comment d'un seul geste elle tenta de le dissimuler derrière elle afin de ne pas embarrasser son mari. Elle la vit se lever, lisser ses jupes à coups de mouvements porteurs de malaise.
Elle la vit. Elle se vit.
La vision floue, Minerva tourna le dos en silence à ses parents. Le souffle court, elle emprunta l'escalier comme dans un rêve. Le corps lourd, elle se traîna dans sa chambre. Deux chouettes s'y trouvaient. Bonnie, sa chouette d'encre, qui depuis plusieurs semaines n'avait fait aucune apparition sans que Minerva n'y trouve à y redire. La seconde, qui exigeait le paiement pour le journal. La jeune fille porta la main à sa poche et attrapa quelques pièces pour les déposer dans la petite bourse que portait sa livreuse. Celle-ci pinça les doigts de Minerva : c'était des pièces moldues.
Minerva bredouilla des excuses et réfléchit un instant à l'endroit où elle avait pu mettre sa monnaie sorcière. Elle ouvrit un tiroir de son bureau, y dégotta quelques pièces que la chouette s'empressa de lui prendre avant de s'envoler. Minerva n'y prêta pas attention. Dans ce même tiroir, l'observait un objet qu'elle n'avait pas vu depuis bien longtemps. Si elle avait eu des yeux, sa baguette l'aurait regardée avec reproches, avec la douleur d'un enfant abandonné par ses amis dans la cour de récréation.
Prise de frénésie, Minerva referma son tiroir, en ouvrit un second pour tomber sur ses grimoires de magie. Un autre, et c'était ses fioles qui tintaient entre elles ; un autre et ses plumes et son encre apparaissaient. Elle savait que si elle en faisait de même avec son placard, elle y trouverait des uniformes, un chapeau de sorcière, un chaudron...
L'article continuait à lui jeter ses flèches de torture : la sorcière la plus prometteuse de sa génération, un avenir radieux devant elle, la magie au bout des doigts... Ce supplice, Minerva ne pouvait pas le faire taire. Elle se jeta au bord de sa fenêtre, faisant fuir Bonnie qui hulula avec courroux. La jeune fille chercha du regard son point d'accroche, la maison de Dougal. Le cerisier plus loin, surplombait les champs ; il n'avait pas changé, pas bougé, et le cœur de Minerva ralentit un peu. Si elle s'y rendait là, maintenant, elle retrouverait Dougal. Dougal, l'homme qu'elle aimait profondément. Dont elle sentait encore les lèvres sur sa peau, le souffle sur son visage, la main dans sa paume.
Elle s'adossa au mur, s'y laissant glisser, les yeux fermés. Elle se remémora le sourire de Dougal, ses yeux pétillants et sarcastiques, elle s'imagina la brise souffler dans ses boucles brunes, le soleil éclairer son teint rosé. Demain, elle le retrouverait. Sous leur cerisier, tout irait mieux.
Ce soir-là, elle prétexta un mal de ventre et resta dans sa chambre. Son corps avait surréagi et son cerveau avait perdu le contrôle, mais au matin, à tête reposée, elle réalisera que sa réaction avait été exagérée.
Et ce fut le cas. Elle avait longuement dormi mais au moins son appétit était revenu, et elle avait dévoré avec entrain ce que sa mère avait préparé. Un sourire à nouveau plaqué au visage, elle songeait déjà à son rendez-vous avec Dougal. L'article avait été relégué dans le tiroir avec ses autres artefacts et n'occupait désormais plus son esprit. Vexée d'avoir été ignorée la veille, Bonnie n'était pas revenue.
Néanmoins, un malaise persistait sans que Minerva ne parvienne à l'ignorer complètement. Le malaise pesa sur elle toute la matinée, croissant au fur et à mesure des heures. Peu à peu, même l'idée de voir Dougal n'arrivait pas à noyer la boule au ventre qu'elle avait. Puis, en milieu d'après-midi, un nouvel hibou vint déranger la vie tranquille qu'elle pensait pouvoir mener.
Le hibou grand-duc se percha sur le rebord de sa fenêtre ouverte, ses yeux perçants cillant à peine face à une Minerva figée. Il tendit sa patte à laquelle pendait une lourde enveloppe frappée d'un sceau que la jeune fille reconnut sans mal, sorti d'un vieux souvenir de sa mémoire. Les doigts tremblants, elle décrocha le cordon, libérant le hibou de sa mission et laissant sa destinataire immobile, fixant le cœur battant la lettre qui lui était destinée. Le Ministère la contactait. Pourquoi ? Elle n'en n'avait pas la moindre idée.
Elle décacheta l'enveloppe.
« Mademoiselle McGonagall,
A la suite d'une étude approfondie de votre dossier scolaire, ainsi qu'à l'analyse de vos compétences en matières magiques, nous vous proposons un entretien afin d'intégrer le département de Justice Magique qui, nous le pensons, conviendrait à vos capacités et ambitions. Un échange sur le poste en question sera prévu à cet égard.
Dans le cas où cette offre vous intéresserait, merci de bien vouloir répondre avant le 15 août prochain.
Avec toutes nos sincères salutations,
Hector Gordon, chargé de recrutement au département de la Justice Magique, Ministère de la Magie, Londres. »
L'épée de Damoclès était tombée sur une Minerva au visage choqué. Pas nécessairement pas l'offre. Mais bien parce qu'elle comprenait désormais le malaise qui l'avait rongée toute la journée, et qu'elle avait essayé d'étouffer. En dehors de Caithness, au-delà des marécages écossais qui entouraient son village, vivait son ancienne école Poudlard, résidaient ses amis, se propageait la magie. C'était son passé qui l'entourait et qu'elle ignorait depuis plusieurs semaines. Et à travers la lettre du Ministère, était-ce son futur qui l'appelait ? qui la rappelait ? Celui pour qui elle s'était posé tant de questions, lui offrait une réponse. Qu'est-ce que cela impliquait... la raison de Minerva le savait. Son cœur le refusait.
Elle pouvait encore l'écouter. Elle devait encore l'écouter. Si elle ne le faisait pas, quand le ferait-elle à nouveau ? Quand arriverait-elle encore une nouvelle fois à suivre son cœur ? Elle avait pris le courage de le faire ces dernières semaines, elle savait qu'elle avait eu raison. Non, au-delà de la raison, elle avait eu le droit. Lewis lui avait reproché sa restreinte, sa peur, sa lâcheté, tout cela elle l'avait mis à terre pour Dougal. Pour elle, pour lui, elle avait réduit au silence sa rationalité, et jamais elle n'avait été aussi heureuse.
Dans son comté de Caithness, elle n'avait pas eu besoin de voler sur un balai pour se sentir libre, elle n'avait pas eu besoin de la magie pour se sentir forte, elle n'avait pas eu besoin de savoir se transformer en chat pour se savoir spéciale. Aux yeux de Dougal, elle l'avait été. Elle l'était.
Oh, ce simple papier manuscrit lui faisait si peur. Tellement peur que son cœur se tordait de douleur inconsciente, que son sang refusait de circuler, que ses cheveux frissonnaient à la base de sa nuque, que ses tympans tintaient. Tellement peur que les larmes désespérées qu'elle sentait venir ne parvenaient pas à monter, sa terreur les séchant d'un souffle tyrannique.
Elle devait le voir. Elle avait besoin de voir Dougal. Pour que tout redevienne comme avant, il fallait qu'elle le rejoigne, qu'elle puisse le serrer dans ses bras, l'embrasser, respirer son odeur familière. Elle voulait que son rire transperce son angoisse, que ses mains sur son visage calment les battements de son cœur.
Si elle put bouger à ce moment-là, si ses jambes acceptèrent de lui obéir sans la trahir, c'était pour le retrouver. Pour respirer à nouveau normalement, pour récupérer son esprit léger et apaisé.
La lettre abandonnée au sol, Minerva traversa en courant sa maison, ses pieds martelant cet éternel chemin qu'elle avait emprunté tant de fois, sauf qu'aujourd'hui, aujourd'hui elle souhaitait y laisser une empreinte indélébile.
Le cerisier était là et, dans son ombre, se tenait déjà Dougal. Minerva courut à en perdre haleine, son cœur oscillant entre peur, soulagement.
- Tu n'es pas en retard, tu sais s'amusa Dougal en la voyant arriver sur lui à toute allure.
Elle ne lui laissa pas le temps de continuer et se jeta dans ses bras. Ses doigts se nouant dans son dos, son cœur battant follement contre sa poitrine, elle se laissa submerger. Ainsi contre elle, était le seul moyen pour qu'il ne lui échappe pas. Pour que les dernières minutes qu'elle venait de vivre deviennent déjà un lointain souvenir, apaisées par les mots et par la présence de Dougal.
- Ne me lâche pas, souffla-t-elle sans réfléchir.
Dougal s'écarta, mais garda ses mains dans les siennes, fermement, ardemment.
- Jamais. Mais, Minerva... que s'est-il passé ?
Son regard était rempli d'inquiétude. Minerva se retrouvait incapable de lui répondre. Que lui dire ? Dieu, que lui dire ? Merlin lui vienne en aide, car elle était à court de mots. Elle finit par secouer la tête.
- Je ne sais pas, bredouilla-t-elle avec un trémolo dans la voix.
Et elle ne savait pas réellement. Ou du moins, elle se trouvait coincée au cœur de nouvelles angoisses qu'elle avait étouffé. Pouvait-elle à nouveau les ignorer ? Les accepter ? Les avouer ? Ces angoisses, faisaient-elle partie de son âme, d'elle ? Mais qui était-elle ? Elle était sorcière pour Dumbledore, pour Alan, pour Pomona et Filius. Elle était moldue pour son père, pour Dougal. Que voulait-elle être ?
Là, sous les yeux apeurés et dévorés par le tourment de l'homme qu'elle aimait, qui voulait-elle être ? A qui appartenaient ces mains qu'il serrait avec tant de passion, et qui calmaient les tracas de son cœur ?
- Tout va bien se passer, souffla-t-il dans ses cheveux alors qu'il la reprenait dans ses bras. Peu importe ce qu'il t'est arrivé, tout ira bien.
Minerva hocha la tête. Il avait l'air si sûr de lui qu'elle avait envie de le croire. Si elle taisait son angoisse et qu'elle ne se concentrait que sur les bras qui l'enserraient, alors elle se permettait une pointe de relâchement. Elle ne pouvait qu'admirer Dougal pour sa prévenance : ignorant tout de la situation, il se montrait tout de même présent, même le secret que sa copine dissimulait pouvait bien le détruire.
Ils s'installèrent comme à leur habitude contre le tronc du cerisier, blottis l'un contre l'autre, un silence de plus en plus apaisé entrecoupant leurs murmures alors que le soleil tombait derrière la cime des arbres. S'abandonnant contre l'épaule de Dougal, Minerva se laissa doucement envahir par la sensation de bien-être qui caractérisait chacune de ses rencontres avec le jeune homme. La première fois qu'ils s'étaient vus, elle partait découvrir son grand-père Eugene. A l'époque, il prenait soin à ne pas laisser une mèche de cheveux sortir des rangs ; aujourd'hui, il semblait avoir abandonné, à la joie secrète de Minerva qui appréciait passer ses doigts dans ses boucles brunes. Elle avait rougi comme une enfant quand il lui avait adressée la parole. Elle eut un pouffement.
- Qu'est-ce qui te fait rire ? s'amusa Dougal en baissant le regard sur elle.
Elle lui expliqua et il eut un sourire qu'elle qualifia d'attendri.
- Tu avais l'air bien perdue dans ce village. Je me suis demandé ce que t'y faisais, c'était rare de croiser des inconnus à Lacock.
Il retomba dans le silence. Minerva lui jeta un regard surpris, elle qui pensait qu'il allait prendre un malin plaisir à se moquer de sa réaction à l'époque. Elle se demanda s'il était encore troublé par son comportement plus tôt.
- Tu sais, pour tout à l'heure... ça va mieux, je t'assure, dit-elle en se redressant.
Il l'observa longuement, comme s'il contemplait l'image d'un futur idyllique. Il lui offrit un léger sourire et coinça une mèche de cheveux qui s'était échappée de son chignon derrière l'oreille.
- Le silence est la langue que tu parles. Dis-moi que tu refuses mon aide et je saurai rester à tes côtés. Dis-moi que tu es heureuse, et je saurai te consoler.
- Et pour les fois où je serai vraiment heureuse, ou que je n'aurai réellement pas besoin d'aide ? répliqua Minerva malgré ses joues rosies. Tu as de la chance que je t'apprécie, parce que certains pourraient te trouver envahissant !
Dougal roula des yeux.
- Cela faisait longtemps, tiens. Laisse-moi parler, je n'ai pas fini.
Minerva redevint muette, car Dougal était celui qui était mal à l'aise cette fois.
- Tu sais..., commença-t-il sans la regarder. Parfois, j'ai le sentiment que nous sommes très différents, sans savoir sur quoi exactement. Mais à la fois, je n'ai jamais été aussi proche et autant en accord avec quelqu'un. J'aime nous comparer comme à deux piliers qui soutiennent un édifice : séparés, mais assez rapprochés tout de même. Et que si l'un de nous s'effondre ne serait-ce qu'un peu, l'édifice ne pourrait pas tenir.
Il tourna cette fois ses yeux dans ceux de la jeune fille qui ne prononçait toujours pas mot.
- Je veux être présent si jamais tu titubes, je te veux à mes côtés quand j'aurai des doutes, des angoisses. Parce que je n'imagine personne d'autre. Tu es la seule qui me comprenne, qui me soutienne sans hésitation, la seule qui me fasse rire et sourire. Nom de Dieu, tu sais que parfois, chez moi, je me trouve diablement niais en pensant à toi et espérant que tu y sois aussi ? Et puis, je réalise que cela me rend heureux.
Comme dans un tourbillon de pensées et d'émotions, Minerva le vit mettre une main à la poche. Sur son visage, se jouaient un paradoxal mélange d'hésitation et de confiance.
- Accompagne-moi pour les mois, les années, les décennies à venir, continua Dougal en sortant un boîtier sombre. Permets-moi d'être l'épaule sur laquelle pleurer si tu ne vas pas bien, d'être la main qui te soutiendra si tu trébuches, le sourire qui te consolera, le regard qui te rassurera.
Il ouvrit le boîtier dans lequel scintillait un fin anneau délicat serti d'une minuscule pierre émeraude.
- Minerva McGonagall, termina-t-il dans un souffle et le nom flotta entre eux un instant. Veux-tu m'épouser ?
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