Chapitre 34 : Une défaite pour une victoire

Bonjour ! (ou bonsoir selon où vous êtes)

Comment se déroulent vos vacances ?

J'avoue bien aimer ce chapitre, donc j'espère qu'il vous touchera aussi !

Merci infiniment pour vos réactions au chapitre précédent <3

Je ne vais pas poster pendant les vacances, j'ai trop d'examens à la rentrée donc je ne vais sûrement pas écrire ces prochaines semaines. On se retrouve ainsi le 15 janvier (oui ça fait loin dis comme ça)

Passez de très TRES bonnes fêtes, soyons tous prudents !

Bisous !

Chapitre 34 : Une défaite pour une victoire

Minerva avait l'impression de se rendre à l'échafaud. Boule au ventre, yeux écarquillés d'appréhension, les mains moites et l'odeur de la honte aux narines, elle s'avançait vers le local d'attente où déjà se trouvaient les garçons ainsi que les filles qui avaient quitté les vestiaires avant Etna et Minerva.

Aussitôt tous s'entre-regardèrent, remarquant l'absence d'un attrapeur. Peut-être était-ce pour le mieux... Peut-être Minerva pourrait-elle étouffer son choix et le reléguer au passé sans qu'aucune incidence ne soit reportée. Tant pis pour l'humiliation du match, ils joueraient sans attrapeur mais au moins l'illusion serait maintenue.

- Elle est tendue l'ambiance pour une finale de Quidditch, fit soudainement une voix masculine dans l'entrée.

Minerva tressaillit. Ce n'était certainement pas Fabio qui avait une voix aussi grave. Elle se retourna lentement, la nuque brûlante sous le regard de Grace qui faisait la navette entre elle et Zimmerman, tout apprêté dans la tunique de Quidditch des Gryffondor.

Minerva déglutit et éructa :

- T'es en retard.

Peut-être que si elle se montrait agressive envers lui, Grace comprendrait qu'elle n'avait pas eu le choix de le sélectionner. Il était vrai qu'elle ne l'appréciait pas et personne ne pouvait s'y tromper. Mais lui demander de l'aide alors que son comportement envers l'une des joueuses avait été déplorable, c'était contraire à toute intégrité. Les yeux accusateurs de Grace le confirmaient. Minerva n'avait pas prévu de la regarder, elle avait eu l'intention d'être à nouveau lâche et d'empoigner son balai pour l'enfourcher, mais il se trouvait que ses yeux avaient été forcés d'affronter ceux de la batteuse. Elle y trouva déception, trahison et même dégoût. Lequel était le pire, elle ne savait guère. Elle n'arrivait de toute manière à se défendre devant aucun, peut-être parce qu'elle-même ressentait ces émotions similaires.

Zimmerman haussa un sourcil à sa remarque mais ne répondit pas. Il attrapa un balai de l'école puisqu'il n'en possédait pas et se joignit à l'équipe. Le malaise augmenta d'un cran, en partie parce que Grace fit ostensiblement un pas en dehors du cercle, la bouche étirée dans une moue de colère. Ses mains étaient si serrées autour du bois de son balai qu'elles en ressortaient livides. Elle paraissait prête à l'asséner contre quelqu'un, au choix Zimmerman ou Minerva.

Minerva fit un pas tremblant pour faire face à son équipe. Ce n'était pas comme ça qu'elle avait imaginé faire son dernier discours. Elle avait toujours su qu'elle n'allait pas être à son aise : elle n'aimait pas les discours. Elle avait beau apprécier, admirer son équipe, elle ne parvenait pas à haranguer les foules, sauf quand il fallait crier. Ça, elle savait le faire. Elle ne parvenait pas à faire de beaux discours comme Fleamont avait l'habitude de faire. Elle n'avait pas forcément les bonnes paroles comme Jimmy, les paroles justes et sages. Et aujourd'hui, encore moins que les autres jours. Elle avait déjà perdu en légitimité. Comment une passion comme le Quidditch avait-elle pu se transformer en sensation de honte et de peur ? comment en était-elle arrivée là, elle qui s'était affirmée en partie grâce à ce sport ? Elle avait aidé une fille comme Etna à s'affirmer, avait tenté avec Grace avant d'échouer lamentablement, juste parce qu'elle voulait remporter la coupe. C'est avec tristesse qu'elle réalisa avoir converti son amour pour le Quidditch en cupidité. Sa soif de victoire lui avait fait oublier qu'avant tout, le Quidditch en lui-même lui avait apporté la reconnaissance de l'école, sans oublier d'excellents amis.

Elle était incapable de donner son discours. Elle croisa le regard d'Etna, qui reprendrait son rôle très bientôt et celle-ci sembla comprendre.

Il était temps qu'elle quitte son poste de capitaine.

Les portes s'ouvrirent sans même qu'elle puisse prononcer un mot, et ce fut pour le mieux. Ils fusèrent sur le terrain sous les cris et applaudissements des étudiants. Kerry Miller, le capitaine des Serpentard, était déjà au centre en compagnie du professeur de Vol. Minerva aperçut Lewis plus loin qui tapait de sa batte contre celle de Fabio et Grace pour les saluer. Minerva atterrit souplement, même si ses jambes tremblaient légèrement et tendit une main à Miller. Le professeur, conscient qu'il se trouvait devant deux septièmes années souhaitant ardemment gagner, essayer de tempérer le jeu avant même qu'il ne commence :

- Vous êtes deux capitaines assez matures pour ne pas faire de coups bas. S'il vous plaît, gardez en tête l'esprit franc-jeu du Quidditch.

Miller salua Minerva avec un hochement de tête. Sûrement gardait-il en tête sa défaite de l'année précédente.

Quand le jeu fut lancé, l'angoisse au ventre de Minerva disparut. Elle oublia momentanément sa peur, son malaise, sa honte pour se concentrer sur le jeu. Et le jeu se déroula plutôt bien. Certes, la compétition était rude, mais le trio féminin des Gryffondor avait gardé en fluidité, comme si la tension du vestiaire y était justement restée. Fabio et Grace formaient un bon duo et plusieurs fois ceux-ci avaient empêché l'attrapeur adverse de s'emparer du Vif d'Or. Zimmerman effectuait des cercles dans le ciel et avait au moins le mérite d'être présent. Autrement, Minerva ne l'avait guère vu en action, ce qui agrémentait l'idée qu'ils auraient pu se passer d'un attrapeur. Au bout d'une heure de match où aucune équipe ne parut prendre l'avantage, Minerva demanda un temps mort. Olga, qui venait d'encaisser un but, accueillit la nouvelle avec soulagement.

- Tu fais du bon boulot, Olga, rassura Minerva avant de se tourner vers les autres. Alex, Etna : il faut que nous mettions plus de rage, nos remontées de Souafle ne sont pas assez rapides. Il y a eu trop de pertes aussi, on ne peut pas se permettre de laisser tomber le Souafle dans les mains des Serpentards.

En vérité, il n'y avait pas eu beaucoup de pertes, mais face à une équipe comme les vert et argent, un Souafle de perdu pouvait se payer très cher.

- Les batteurs, vous êtes trop gentils, reprit Minerva. Vous êtes parfaits en défense, en revanche il faut vous mettre à attaquer l'adversaire plus que ça.

- Incroyable, réprimandés pour être « trop gentils », coupa Mallony d'une voix sarcastique.

- Grace, prévint Etna d'un ton sévère.

Minerva croisa les yeux de sa batteuse et elle sut qu'elle commençait tout juste à lui signifier son ressentiment envers elle. Elle savait très bien qu'elle jouait sur les mots.

- Ce sont des conseils que je te donne, répliqua Minerva. Bien, tout le monde, vous faites du bon jeu, continuez comme ça.

Elle allait retourner sur son balai lorsque Grace reprit la parole :

- Et Zimmerman, tu ne lui dis rien ? Audric avait toujours une réflexion, lui.

Minerva ne répondit rien. A vrai dire, elle aimerait lui dire de continuer ses tours et de faire illusion de sa présence. Grace ne cherchait qu'à lui faire goûter à ce qu'elle considérait comme une trahison.

- Ca serait dommage qu'il finisse blessé, lui aussi.

- Cela suffit, intervint Etna en s'interposant. Grace tu retournes sur le terrain, les autres aussi. Minerva...

- Laisse tomber, fit celle-ci. Elle sera bientôt débarrassée de moi.

Minerva enfourcha son balai. Sa boule au ventre était revenue tel un uppercut au visage. Elle sentait son visage en feu, et son cœur battait tout autant de malaise que de colère. Ses mains étaient tremblantes lorsqu'elle attrapait le Souafle, son lancer était moins précis quand elle le renvoyait, ses tirs perdaient en puissance si elle trouvait le courage de viser les anneaux...

Elle n'entendait plus le speaker car un bourdonnement incessant lui vrillait les oreilles. Ses doigts devenaient moites et elle avait du mal à agripper son balai. Ses muscles de bras, sentant que la prise devenait instable, s'ankylosaient de crispation. Elle prenait du retard sur ses coéquipières qui ne pouvaient désormais plus lui faire la passe. Minerva ne parvenait même plus à surveiller ses alentours, encore moins le travail des batteurs ou de Zimmerman. Elle souhaitait juste revenir sur le sol. Même lors de son tout premier match, elle n'avait pas eu cette impression infernale du Quidditch. Penser à Grace, à Audric et à Zimmerman en même temps, représentait une accumulation des trois émotions qui l'envahissaient à l'instant présent : honte, culpabilité et colère. Et cela lui était insupportable.

Elle avait réellement envie de pleurer et luttait pour que les larmes ne viennent pas brouiller sa vue. Comment avait-elle pu gâcher ce dernier match ? Si elle n'avait pas sélectionné Zimmerman, elle n'aurait pas déçu Grace ou Etna, n'aurait pas eu cette peur au ventre, n'aurait pas subi ces tremblements, ces larmes, cette gorge serrée. Si elle ne l'avait pas sélectionné, elle aurait peut-être perdu ce match, mais au moins elle aurait gardé la tête haute. Olga, Fabio, Grace, Etna et Alexandra auraient eu d'autres chances de remporter la gloire, et Audric serait revenu à temps pour en profiter également. Fleamont n'aurait jamais fait ça. Lui qui avait subi des brimades contre son nom, n'aurait jamais accepté un harceleur au sein de son équipe, dernier match ou pas dernier match. Et si par malheur il en avait émis la possibilité, Jimmy l'en aurait dissuadé. Tout comme Holly l'aurait fait à sa capitaine, tout comme Etna l'a si justement fait. Mais Minerva n'avait pas écouté, et elle espérait que Jimmy n'assistait pas à cette scène de là où il était.

Il était temps de poser le pied à terre et d'arrêter les frais. Il était temps de se stopper, de contempler le bien qu'elle avait réalisé et transformé en mal par son égoïsme. Il était temps de se mettre en retrait. Il était temps de...

Tomber.

Elle tombait.

Un cognard l'avait heurtée sur le flanc gauche. Elle ignorait si elle ne l'avait pas vu parce qu'il avait été trop rapide ou elle trop inattentive. Elle n'avait ressenti aucune douleur sur le moment. Plutôt une libération, car le choc du cognard semblait avoir transpercé la boule au ventre qui logeait depuis trop longtemps en elle. Sa chute finale n'avait pas été très longue car elle ne volait pas haut à ce moment-là. Sous le choc, elle avait lâché le Souafle et ses mains glissantes n'avaient guère pu s'accrocher. Elle avait glissé et, dans le silence bourdonnant qui n'avait pas cessé depuis la reprise du match, elle avait frappé le sol.

Ironiquement, elle apprendrait plus tard que le cognard avait été envoyé par Lewis. Celui qui lui avait entrouvert les yeux quelques mois auparavant finissait par les lui fermer alors qu'elle s'éveillait enfin.

***

Elle avait les paupières si lourdes. Sa tête, comme enserrée dans un étau, la lançait violemment et sa gorge criait silencieusement, aussi sèche que les cendres encore fumantes d'un brasier.

Minerva tenta de bouger mais aussitôt poussa un gémissement de douleur. Ses côtes lui faisaient si mal, comme si elles lui lacéraient les entrailles. Même sa respiration laborieuse et sifflante lui portaient peine. Lorsqu'elle entrouvrit les paupières elle eut un mouvement de panique. Elle ne voyait rien. Ou du moins, elle voyait flou, pire que sans ses lunettes, comme si ses yeux étaient brouillés de larmes contenues. Un voile noir lui obstruait le haut de sa paupière.

- Calme-toi, ton bandage a glissé sur tes yeux, fit une voix familière.

Des mains fraîches remontèrent délicatement un bandage sur son front et le voile noir se dégagea. En revanche, sa vision était toujours aussi mauvaise. La lumière blanche autour d'elle lui agressait les paupières. L'odeur de menthe poivrée, de potions anesthésiantes et aseptiques firent comprendre à son cerveau embrouillé qu'elle devait se trouver à l'infirmerie.

- T'as fait une chute affreuse apparemment, reprit la voix. Pire que la mienne.

Minerva capta une lueur rougeoyante là où se trouvait la voix, et elle comprit que c'était Audric, bien évidemment, qui lui parlait.

Elle n'arrivait plus à se souvenir de ce qu'il s'était passé. Tout ce que son esprit embrumé ressentait, c'était qu'elle se sentait extrêmement seule dans ce lit chaud par son corps brisé. Elle perçut Audric se rasseoir sur son lit.

- Sois tranquille, continua-t-il alors que sa voix lui parvenait de moins en moins aux oreilles comme si celles-ci étaient bouchées par du coton. Tu as plusieurs côtes cassées et une commotion. Pomfresh était très inquiète.

Une commotion ? Elle ne savait pas ce que c'était exactement, mais elle savait que cela pouvait prendre des proportions graves, avec des conséquences sur le long terme. Mais elle était si perdue actuellement qu'elle était incapable de se pencher sur des éventualités.

- Rollin ne t'a pas loupée, il a un sacré coup de batte... Tu crois qu'il l'a fait exprès ? A cause de votre rupture ? Si c'est le cas...

Minerva voulut réfuter, mais il lui fut impossible de produire autre chose qu'un gargouillement de gorge. Bien sûr que non, Lewis n'avait eu aucune intention malveillante. Il jouait tout simplement au Quidditch. Et inconsciemment, il avait mis un terme à sa spirale de honte qui la rongeait ces derniers jours.

- Tout le monde était assez abasourdi après ta chute, ils ont hésité à reprendre le match... Mais ils se sont dit que tu n'aurais pas aimé que Gryffondor déclare forfait et encore moins en finale. Bon, pour être honnête, le match a été vite plié. Mais je crois que l'attrapeur Serpentard voulait en finir, parce que l'ambiance était sacrément mauvaise, même moi de l'infirmerie je pouvais sentir que l'air était lourd.

Minerva se remettait à papillonner des yeux. Sans surprise, Serpentard l'avait emporté, mais elle était contente que son équipe ait continué à se battre. Enfin... peu importait désormais.

- Ne tourne pas la tête, mais beaucoup d'étudiants t'ont apporté à manger. Ça fait trois jours que je suis là et je n'en ai pas eu autant, nota Audric avec une touche d'humour dans la voix.

Minerva voulut regarder à son chevet, mais sa tête lui faisait tellement mal qu'elle s'obligea à rester immobile.

- Attends, je vais te dire ce que tu as reçu... alors, je vois des plumes en sucre, de la Patacitrouille, des Dragées Surprises de Bertie Crochu, du chocolat -beaucoup de chocolat-, des fleurs... ça c'est joli mais ça ne remplit pas le ventre.

Minerva étira ses lèvres dans sa tentative d'humour. Il avait forcément dû entendre parler de son remplacement par Zimmerman, et sûrement n'avait été-t-il pas d'accord. Pourtant, il ne semblait pas lui en tenir rigueur.

- Toute l'équipe est venue, tu sais... Grace a mis du temps, mais elle t'a écrit une carte. Tu veux que je te la lise ?

Minerva refusa et referma les yeux. Elle ne savait pas si elle aurait le courage de la lire. Savoir que sa batteuse était venue lui rendre visite la rendait encore plus coupable de l'avoir trahie.

- Quelques Serpentard aussi : celle qui sort avec ton ami Alan, l'attrapeur également. Miller est venu avec sa coupe dans les mains donc je ne sais pas s'il voulait te soutenir ou te narguer... Rollin avait une tête coupable quand il a débarqué. Il est resté un petit moment.

Minerva avait de nouveau envie de pleurer. Cette septième année avait été bien trop riche en émotions pour elle. Ceux qui avaient toutes leurs raisons de lui en vouloir étaient venus à son chevet, étaient restés tout en espérant sincèrement son rétablissement. Malgré toutes ses erreurs.

Il y avait là une bonne leçon pour elle. Elle avait eu la chance que ses amis lui pardonnent, tournent la page, la comprennent ou du moins essaient. Le Quidditch en était le parfait exemple. Elle avait acquis en maturité, en confiance grâce à lui. Elle avait noué de fortes amitiés, avait fait naître des rêves et passions. Elle avait propulsé certains dans la réussite et la reconnaissance, leur avait trouvé une place sûre. Peut-être à son détriment. Peut-être qu'en voulant tout donner et en même temps tout obtenir, elle s'était perdue en cours de route. Son équilibre entre les deux avait basculé, et si la chute avait été rude, l'atterrissage final, malgré les brisures de son corps, lui permettait d'ouvrir les yeux.

Le Quidditch avait été son outil pour faire du bien aux autres. Envers elle, elle l'avait exploité, pressé jusqu'à ce que sa douceur se diffuse en zestes d'amertume et l'entraîne à l'infirmerie. Elle accueillit sa décision tant avec soulagement qu'avec un pointe de peine. Peine de la nostalgie des moments passés, soulagement de transmettre le flambeau avant qu'il ne l'immole entièrement.

Sa vision n'avait jamais été aussi nette dans cette infirmerie aux contours flous. Elle avait choisi de voler plus bas que prévu, afin de ne pas se brûler les ailes. Elle avait choisi qu'elle ne remonterait plus sur un balai.

Et pour la première fois depuis très longtemps, elle se sentit victorieuse.

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