J'suis recroquevillée contre le mur de ma chambre. J'suis seule dans cette maison et j'ai froid comme si on était en décembre alors qu'on est en juillet. J'ai les joues étirées par les larmes séchées.

Je sais pas trop comment me sentir à vrai dire. Je crois que j'ai peut-être un peu trop refoulé tout ce qui n'allait pas ces derniers mois. J'essaye de guérir mais est-ce que je suis prête à accueillir ces nouvelles sensations ? Je ne sais pas. Je ne sais rien. Même pas si je vais mal, si je vais bien.

J'arrête pas en ce moment. Au début, je trouvais ça bien. Je me disais qu'au moins je ne penserais à rien. J'suis comme ça, j'ai peur des émotions, peur de la solitude, peur qu'on m'abandonne, peur de n'être jamais assez. Le déni c'est tellement plus simple que de regarder droit dans les yeux tous ses ennuis. Et il faut avouer que je les traine depuis longtemps maintenant.

J'me sens seule alors que je ne réponds pas aux messages de mes amies. J'arrive même plus à comprendre le fonctionnement de ma propre vie. Est-ce que c'est pas contradictoire ? Est-ce que je me mets pas seule dans ce foutoir ? J'en sais rien. Je sais rien.

J'me sens seule et en même temps j'ai peur de ce qui m'entoure. J'ai encore des crises de panique parce que j'ai des visions où je le vois m'approcher. J'ai peur de lui, peur de tout. Peur que mes illusions le portent près de ma peau, peur de tout revivre, peur qu'elles le collent à moi, pour que nos corps s'entremêlent encore une fois, qu'il en profite pour m'étrangler, me tuer et me laisser morte une seconde fois.

J'ai envie de pleurer mais je sais même plus pourquoi. Tout allait bien tout à l'heure et tout a dérapé d'un coup sans que je ne contrôle rien.

J'ai peur aussi parce que je ne veux pas revoir toutes ces personnes, elles ne me connaissent pas et me jugeront selon mon ancienne moi. Je ne veux pas m'infliger ça. Je me déteste déjà assez comme ça, j'ai pas besoin d'aide pour ça. J'ai qu'à me regarder dans le miroir, mon reflet est là pour me donner envie de gerber.

J'ai peur de les décevoir comme je déçois déjà mes parents. J'ai toujours été celle qu'on aime à moitié : j'ai toujours été trop ou pas assez. Je crois que je sais pas doser.

J'ai peur qu'elles critiquent mon physique, que j'ai mis tant de temps à accepter et qui me fait encore douter, comme elles le font depuis que je suis toute petite. Je dis que j'aime mon corps, comment il est, mais un rien me fait rechuter. Et mon produit à 20 balles pour cacher ma peau blanche et bleutée peut en témoigner. Mais c'est pas ma faute, c'est celle de ceux qui m'ont critiquée et qui ont transformé mes particularités en complexes.

J'ai peur de revoir des gens avec qui je sais que j'ai partagé des conversations sensibles et personnelles dont je suis incapable de me rappeler puisque j'ai oublié la grande majorité de ma vie.

J'ai peur, j'ai peur, j'ai peur.

J'ai peur de respirer mais j'ai peur de mourir.

J'ai peur et j'ai froid.

J'ai peur, mais de quoi ? J'ai tellement peur de tout que je finis par ne plus avoir peur de rien.

Je suis perdue.