Chapitre VI
« Tout simplement parce que le vrai amour, le grand, ça n'existe pas ! »
Neva était retournée chez elle. Elle avait pris un bain brûlant et elle était allongée sur son lit. Elle serrait Herod contre son cœur, blottit sous sa couette, le regard posé sur les escaliers. A présent, elle avait peur qu'un monstre surgisse. Elle eut un rire désespéré. Elle avait encore peur du noir ? A son âge ? Neva secoua la tête et se mit en boule. Elle tentait de chasser ces images de sa tête sans succès. Finalement, c'est exténuée que la jeune fille s'endormit.
- Tu n'aurais jamais dû faire ça !
Neva hurla de terreur et se leva. Elle respira avec difficulté, tentant de calmer son souffle. Elle regarda l'heure qu'affichait son réveil : 7h30. Neva, encore tremblante, déposa Herod sur son oreiller et se leva. Elle descendit. Son père sirotait son café et demanda.
- Ça va mieux ma chérie ?
Neva lui sourit tentant de le rassurer d'un regard. Visiblement, il n'était pas convaincu. Neva murmura d'une voix qu'elle s'efforçait assurée.
- Je vais mieux. Il me faut encore un peu de temps mais ça va, ne t'inquiète pas Papa.
Son père sourit légèrement et termina son café devant le journal du matin. Neva enfila un jean slim et un débardeur moulant dévoilant ses bras fins et musclés. Elle attrapa son sac et sortit. Elle arriva au lycée et sentait quelques regards sur elle. Elle rejoignit ses amis avant la sonnerie. Reika la serra dans ses bras en demandant.
- Tu es sûre que ça va ?
Neva lui sourit légèrement en hochant la tête. Cosme et elle se dirigèrent vers la salle de cours. Etrangement, Shawn n'était pas là. Neva se demandait pourquoi il était partit si vite, sans même lui dire au revoir. Shawn...En réalité, il n'était pas si étrange que ça. Il était même très ouvert et curieux de tout. Elle appréciait son rire et elle aimait se plonger dans la froideur de ses yeux qui ne l'effrayait plus du tout. D'ailleurs, comment avait-elle pu avoir peur de ses yeux ? Comment avait-elle pu penser qu'ils étaient capables de la tuer ? Neva soupira. Elle commençait à ressentir des choses pour lui. Elle n'allait tout de même pas tomber amoureuse de lui ! Pourquoi pas...Elle était réellement tombée sous le charme de son regard bienveillant.
Elle n'écoutait les profs qu'à moitié. Cette journée se déroula normalement et tranquillement. Alors qu'elle sortait pour aller à son cours de danse, Shawn apparut soudainement. Neva s'arrêta pour calmer sa frayeur et lâcha froidement. Pourquoi froidement ? Pourquoi était-elle énervée contre lui alors qu'elle le trouvait très beau et gentil à son égard ?
- Tu peux arrêter de faire ça ? Ça me saoule !
Shawn fronça les sourcils et demanda d'une voix calme.
- Faire quoi ?
- Surgir tout le temps et effrayer les autres par la même occasion !
- Très bien.
Neva se remit à marcher d'une vive allure. Pourquoi lui avait-elle répondu ainsi ? Il était attentionné pourtant. Shawn la suivit. Peut-être était-ce parce qu'il était parti très vite hier soir sans lui expliquer la cause. La jeune fille demanda.
- Pourquoi tu es parti si vite hier ?
Shawn ne répondit pas et gardait un visage sombre. Neva leva les yeux au ciel. L'étrangeté de Shawn agaçait la jeune fille. Mais sa sympathie et sa gentillesse à son égard compensait. L'adolescent aux yeux bleus glaciaux la fixait attentivement et murmura.
- Je ne peux pas te le dire mais je m'excuse sincèrement. La soirée d'hier était une des plus tranquilles depuis longtemps.
Tout l'énervement de Neva disparut. Un sourire des plus sincères se dessina sur ses lèvres. Le visage de Shawn s'adoucit à son tour et l'atmosphère entre les deux adolescents changea. Shawn questionna.
- Qu'est-ce que tu fais ici ?
Neva remonta la bretelle de son sac à dos sur l'épaule et répondit.
- Mon plus grand rêve est de devenir danseuse étoile à l'Opéra Garnier donc je travaille dur depuis plus de dix ans. D'ailleurs, il y a un ballet en fin d'année et c'est moi qui joue le premier rôle.
Neva n'aimait pas se vanter encore moins se plaindre, mais dire qu'elle interprèterait Odette la remplissait de fierté. Comme s'il avait lu dans ses pensées, Shawn reprit.
- Le Lac des cygnes ?
Neva se figea de stupeur.
- Comment tu l'as su ?
Shawn se frotta ses cheveux blonds déjà bien ébouriffés.
- Simple déduction...C'est mon ballet préféré.
- Moi aussi.
- Est-ce que tu aimes le roman que l'on lit en Français ?
- Roméo et Juliette ? Pas du tout !
- Pourquoi ça ? J'apprécie énormément l'histoire d'amour passionnelle entre ces deux personnes.
- Moi pas. Tout simplement parce que le vrai amour, le grand, ça n'existe pas ! C'est une souffrance !
- Pourquoi tu dis ça ? demanda-t-il d'une voix légèrement triste.
- La souffrance d'aimer quelqu'un qui ne t'aimeras jamais est pire que tout.
Neva salua Shawn brièvement avant d'entrer dans la salle de danse. Pourquoi elle lui avait lâché ça comme ça ? Il devait la trouver bizarre et pas nette du tout à présent. Le jeune homme regarda une dernière fois la jeune fille avant de partir.
La nuit était tombée depuis bien longtemps et Neva était à peine rentrée chez elle. Le cours d'aujourd'hui avait duré plutôt quatre heures que deux heures. Robin n'arrivait pas à effectuer un porté. Il devait la saisir à la taille et la soulever au-dessus de lui, puis la baisser de sorte que sa tête soit proche du sol et que ses jambes, parfaitement tendues, soient au-dessus de la tête de Robin. Neva déposa son sac de cours et se prépara un beau sandwich qu'elle dévora devant la télé. Son père rentra au moment où Neva débarrassait la table et éteignait la télé. Le policier demanda.
- Ta journée s'est bien passée ma chérie ?
- Oui très bien.
- Je suis désolé de ne pas être plus souvent présent pour toi...
Neva se figea et regarda attentivement son père. Il ne fallait pas qu'il s'inquiète. Elle murmura.
- J'aime cette solitude. Et puis je sais que même si tu ne me le montres pas tout le temps, tu m'aimes très fort. Je préfère être ici avec toi qu'avec Maman qui cherche toujours à me gâter. Ne te fait pas de sang d'encre, je suis très heureuse ici.
Son père sourit encore plus et prit Neva dans ses bras. La jeune fille salua son père et après une bonne douche et une tenue confortable, elle se blottit dans sa couette, sa peluche contre elle et le sommeil l'étreignit.
Neva n'avait pas cours aujourd'hui mais ça ne l'empêchait pas de se lever tôt. Son père était en uniforme à lire le journal. Visiblement, il n'allait pas tarder à partir. Neva, après avoir bu un grand thé vert, demanda.
- C'est quoi les nouvelles aujourd'hui ?
Son père grogna.
- Un étrange homme fait notre travail !
Neva lut la une par-dessus l'épaule de Stefan.
« Un étrange chevalier casqué sauve une jeune fille en détresse »
Neva remarqua une photo en dessous du titre, certes floue, mais assez visible pour voir que le chevalier casqué était la même personne que celui qui l'avait sauvée. Qui était cette personne ? Neva ne dit rien à son père. Devait-elle le lui cacher ? Son instinct le niait. Elle finit son petit-déjeuner et se vêtit d'une belle combi-short grise. Elle prit son sac à main et sortit. Elle avait fourré un roman dedans. Neva arriva à son endroit favori. Elle l'avait découvert la semaine de son arrivée.
C'était une petite pierre sur laquelle on pouvait s'adosser, dans la forêt, en face de la rivière. Par moment, si on était assez silencieux, on pouvait voir des cerfs ou des écureuils. Neva s'assit et sortit son livre qu'elle ouvrit au marque-page. Elle avait à peine commencé à lire qu'elle sentit une présence derrière elle. Neva se leva et remarqua une silhouette masculine enveloppée dans une cape noire qui marchait sur le pont de pierre. Neva ferma doucement son sac et se hâta de suivre l'individu. Pourtant son instinct lui hurlait de ne pas continuer. Elle s'en fichait.
Au début, elle pensait qu'on lui faisait une blague, pourtant Halloween n'était que dans deux bonnes semaines, après elle devina que ce n'était pas un costume. Aussi elle s'efforçait de ne faire aucun bruit pour ne pas se faire remarquer. L'homme s'arrêtait par moment et Neva finit par remarquer qu'un filet de sang rouge s'échappait de son flanc. Il était blessé ! Il devrait plutôt aller à l'hôpital. Neva voulait le lui faire remarquer mais décida de continuer sa discrète progression. L'inconnu pénétra dans une immense maison. Neva se stoppa. Elle n'avait jamais vu pareille demeure.
On aurait plutôt dit une villa. Toutes les façades de devant étaient en verre laissant voir l'intérieur. Un petit escalier en pierre permettait d'accéder à la porte d'entrée. Neva vit l'homme monter lentement l'escalier moderne en bois à l'intérieur de la maison, une main sur son flanc ensanglanté. Neva remarqua la porte de l'entrée entrouverte. Elle voulait rebrousser chemin, ne pas entrer dans cette étrange demeure. Alors que la peur lui serrait le ventre, la curiosité de la danseuse fut plus forte. Elle s'avança et, après s'être assuré qu'il n'y avait personne à l'intérieur, pénétra dans la maison.
Ça pouvait lui valoir cher d'entrer chez une personne comme ça, sans son autorisation. Neva monta lentement les marches de l'escalier de peur de faire du bruit. Arrivée en haut, elle déboucha dans un beau salon avec deux canapés incroyablement grands qui entouraient un bel écran plat. Une cheminée en pierre blanche se trouvait sur la droite. Tous les murs du fond étaient vitrés. Neva pouvait voir les grands sapins de la forêt. La jeune fille entendit du bruit qui provenait d'un long couloir, plus précisément de la porte du fond. Neva avança d'un pas hésitant.
Elle pouvait revenir en arrière et faire comme si rien de tout ça ne s'était passé. Cependant elle continua sa progression. Elle ne cessait de se dire « Allez Neva, arrête de faire ta chochotte ! T'es entrée ici, tu peux pas faire demi-tour. Maintenant suis ta curiosité. » En face de la porte, elle posa sa main sur la poignée et l'abaissa. La porte s'ouvrit sur une chambre en désordre.
Un grand lit double trônait au milieu de la pièce. Deux grandes bibliothèques étaient plaquées contre le mur du fond. Celui sur lequel était appuyé le lit était entièrement vitré. Plusieurs livres étaient étalés par terre. Neva trébucha sur un objet métallique. Elle se maudit d'avoir fait autant de bruit puis se baissa pour ramasser l'objet en question. C'était un casque. Sûrement celui d'une armure...
Neva l'avait déjà vu quelque part. La jeune fille releva la tête. Une armure entière était à terre. Neva remarqua plusieurs marques de griffes dessus. D'ailleurs l'une d'elles avaient presque détruit le flanc droit. Neva tourna vivement la tête. Elle venait d'entendre un gémissement de douleur. La jeune fille se releva et avança doucement. Elle n'avait pas remarqué la porte qui était sur le côté.
Elle l'entrouvrit sans bruit et vit l'homme encapuchonné appuyé sur un lavabo moderne. Une flaque de sang rouge ne cessait d'augmenter sur le sol, sous ses pieds. L'homme manqua de trébucher puis il retira sa cape. Neva ne put retenir un hoquet de surprise. L'homme qu'elle voyait dans la glace...C'était...Neva voulut s'enfuir mais une main glacée attrapa son poignet. La jeune fille voulut se débattre mais elle n'y parvenait pas. Elle se mit à crier jusqu'à ce qu'elle ferme les yeux et sombre dans le sommeil.
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