- Je vais vous conduire à vos appartements. Vous pourrez vous y reposer, ou visiter le palais si vous le souhaitez. Quelqu'un viendra vous chercher lorsque ce sera l'heure de dîner.
Nous avancions dans des couloirs sombres et étroits. À plusieurs reprises, nous croisâmes d'autres personnes qui nous regardaient avec de grands yeux, j'imaginais que nous devions avoir l'air bien à côté d'eux. Ils étaient si beaux, si parfaitement équilibrés en tout point, tandis que nous n'étions que... humains.
Au bout de quelques minutes de marche, notre guide s'arrêta devant une porte.
- Votre chambre se trouve ici, m'expliqua-t-il.
- Oh.
- Quelque chose ne va pas ? s'enquit-il avec un sourire en coin.
- Non. Je... En fait...
- Ici, deux personnes de sexes différents ne peuvent pas partager la même chambre. Même les rois et reines font chambre à part.
- Très bien. Bien sûr, il n'y a pas de soucis.
Décidément. Même dans ce royaume, j'allais devoir être séparée de Silver. Quelle plaie.
Je fis un signe de la main à Silver et Lazarus et entrai à l'intérieur de la pièce, tandis qu'ils s'éloignaient déjà.
J'eus vite fait le tour de la chambre : un lit de taille moyenne, une chaise et une vasque avec une cruche d'eau.
La fée qui nous avait accueilli avait précisé que nous pouvions visiter le palais, mais j'avais trop peur de me perdre, toute seule. Aussi je préférai m'étendre sur le matelas et attendre que le temps passe.
*
J'avais dû m'endormir, car je fus réveillée soudainement par des cris dans les couloirs. J'eus tout juste le temps de me relever, que la porte de ma chambre s'ouvrit et qu'une jeune femme entra dedans en grande trombe.
- Ce n'est pas possible ! Celthar, cette fois-ci tu es allé trop loin !
Je n'avais jamais vu une personne plus belle de toute ma vie. Sa beauté semblait irréelle tant tout en elle est parfait : d .
- Je suis vraiment navrée. Je tiens à m'excuser au nom de mon ignoble cousin qui ne sait décidément pas se tenir correctement.
Je reste sans voix, ne comprenant pas ce qu'il se passe.
- Oh, mais bien sûr. Vous ne savez même pas qui je suis.
La jeune femme, qui semblait un peu plus âgée que moi, me tendit une main que je regardai sans bouger. Ses doigts étaient longs et fins et pourtant, je ne doutais pas un seul instant qu'ils étaient empreints d'une grande force. Était-ce le propre des fées d'avoir l'air aussi parfait en tout point ? J'avais beaucoup de mal à détacher les yeux d'elle, j'étais comme hypnotisée par sa prestance.
- Je suis Enda.
Je relevai aussitôt mes yeux pour la regarder. Enda, la reine des Fées ?
Celle-ci me regarda avec amusement, sa main toujours tendue dans ma direction. Je la pris aussitôt, tout en me demandant si le protocole ne voudrait pas plutôt que je fasse la révérence.
- Je suis vraiment navrée. J'aurais dû être présente lors de votre arrivée, mais j'ai dû aller régler un problème à l'une de nos frontières. J'avais dit à Celthar que je serais de retour demain et apparemment, il a décidé d'en profiter pour s'amuser un peu avec vous. Heureusement que j'ai pu rentrer plus tôt. Je n'aurais pas toléré que mes invités passent une nuit dans les chambres des domestiques.
Pas un mot ne sortait de ma bouche. J'étais bien trop abasourdie pour réussir à parler.
- Oh, je suis tellement désolée, vous avez mal pris cette plaisanterie et maintenant vous êtes fâchée. Je le comprends, bien évidemment...
- Non, je ne suis pas du tout fâchée. Je suis juste... impressionnée, avouai-je.
La reine Enda partit dans un grand rire cristallin et m'attrapa par le bras pour me faire sortir de la pièce dans laquelle nous étions.
- Il ne faut surtout pas ! Vous êtes mes invités, vous et vos amis. Je vais vous conduire à votre chambre, votre vraie chambre. Vous pourrez vous changer et nous pourrons faire plus ample connaissance lors du repas qui nous attend dans la salle à manger.
Je la suivis, tant bien que mal, tandis qu'elle avalait les escaliers à pas de géant et m'emmenai dans un dédale de couloirs.
- Je suis si heureuse que vous ayez accepté mon invitation. J'avais peur de recevoir un refus de votre part, me confia-t-elle sans se retourner.
- C'est que, j'étais très curieuse de savoir pourquoi vous vouliez me rencontrer.
- Nous en parlerons plus longuement autour d'un bon repas. Pour l'heure, nous voici arrivés devant votre chambre.
Alors qu'elle s'apprêtait à ouvrir la porte, la reine se retourna vers moi avec un grand sourire :
- Ah, et bien évidemment il n'y a rien stipulant que deux personnes de sexe différents ne puissent pas partager la même chambre. Au contraire, vous apprendrez vite que le peuple des Fées n'aime pas dormir seul.
Et tout en m'adressant un clin d'œil, elle ouvrit la porte, me laissant entrevoir Silver, allongé sur un canapé, un livre à la main.
Je rentrai dans la pièce, toujours un peu interloquée par ce qu'il venait de se passer.
Silver relève ses yeux de sa lecture et ricana en voyant ma mine déconfite.
- Ma pauvre, tu as l'air complètement perdue.
- Non, mais je ne comprends rien à ce qu'il vient de se passer.
- Il semblerait qu'on nous ait joué un vilain tour.
- Sans blague.
Je me laissai choir sur l'immense lit qui trônait au milieu de la chambre et Silver s'allongea à côté de moi.
- C'est juste que...
Je cherchai les mots. Mon esprit était encore un peu confus.
- Je sais que j'ai passé pas mal d'années enfermée et qu'il y a beaucoup de choses que je ne comprends pas. Ce que j'ai appris des interactions sociales, je l'ai vu dans les tonnes de films qui me servaient de fenêtres sur la réalité. Mais... je ne sais pas. J'imagine que pour moi les fées devaient être des êtres nobles et distingués. Pas à faire des blagues à leurs invités.
- Ça a l'air de t'avoir bien marqué en effet, rit-il en caressant mes cheveux.
- C'est juste qu'ils ne correspondent pas à l'image que je m'étais faite d'eux.
- Et comment devraient-ils être, selon toi ?
- Sérieux, conclus-je après quelques secondes de réflexion.
- Mia, je sais que tu as grandis loin de tout cet univers. Mais depuis le temps, tu devrais savoir que la réalité n'est pas comme dans les livres.
- Parce que tu savais, toi, que les fées aimaient faire des blagues ? Et que la reine s'adresserait à nous comme si elle n'était pas une reine ?
- Tu t'attendais à quoi ? À devoir faire la révérence ?
- Peut-être. Oui.
- Est-ce que tu penses que tu vas t'en remettre ?
- Ha, ha, ha. Je ne sais pas comment tu fais pour prendre tout ça à la légère.
- J'ai un peu plus d'expérience que toi.
- C'est vrai que j'ai parfois tendance à oublier qu'en réalité tu es un vrai petit papy.
J'eu à peine fini ma phrase que Silver se positionne sur moi, bloquant mes mains au-dessus de ma tête.
- Je te trouve bien impertinente ces derniers temps.
- Et tu comptes faire quoi ?
- Oh, j'ai plein de choses en tête pour toi, ne t'en fais pas.
- Quel dommage qu'il faille se préparer pour aller manger.
- Je te rappellerais que tu es à ma merci.
- Ah oui ?
Aussitôt je me téléportai de façon à me retrouver debout derrière lui, provoquant un déséquilibre qui le fit chuter en avant sur le lit.
Mais je n'eus pas le temps de rire qu'il était déjà debout et me plaquait contre un mur.
- Oh, Mia... tu joues décidément à un jeu très dangereux.
- Je suis amoureuse d'un vampire, je crois bien que ma notion du danger est légèrement altérée, me moquai-je.
Tandis que je parlais, Silver plongea son nez dans mon cou, provoquant une vague de frissons qui me traversèrent le corps. Sa bouche déposa une multitude de baisers dans ma nuque, en descendant sur mes épaules. Quand j'essayai de libérer une de mes mains pour venir la passer dans ses cheveux, Silver la bloqua en la coinçant sur le côté. S'il voulait jouer à ça, pas de soucis, on pouvait jouer.
Mais lorsque je voulus utiliser mes pouvoirs pour le repousser, rien ne se passa.
Je tentai de réfléchir, malgré les baisers de Silver qui avaient la fâcheuse tendance à me déconcentrer.
J'observai alors la chambre : l'immense lit, le canapé, les tableaux aux murs, les oliviers qui s'épanouissaient sur la terrasse, la bibliothèque, la porte de la salle de bains entrouverte... mes yeux vagabondaient de l'un à l'autre, à la recherche d'un détail qui le trahirait. Quand je regardai à nouveau le lit, je réalisai soudainement ce qui n'allait pas.
- Le lit est fait ! m'exclamai-je.
- Mmh ?
Silver continua de me distraire en reprenant possession de ma bouche et essayer de m'exprimer devint très compliqué.
- Le lit... tu as oublié... mmh... les draps étaient défaits il y a encore quelques instants.
Silver recula alors en riant et une fraction de seconde plus tard, j'étais à nouveau entre lui et le mur, sauf que cette fois-ci, je pouvais utiliser mes pouvoirs. Je le repoussai et le fis tomber sur le canapé qui recula de quelques centimètres sous le choc, tandis qu'il était écroulé de rire.
- Tu n'as pas bientôt fini de te moquer ?
- Excuse-moi, mais tu sais que j'aime bien t'embêter. Et puis je te ferais dire que tu es celle qui a commencé à utiliser ses pouvoirs en premier.
- C'est petit.
- Vois le bon côté des choses, tu deviens de plus en plus forte à ce petit jeu.
- N'essaye pas de te rattraper, c'était nul, insistai-je en riant tout en le pointant du doigt.
Et en finissant ma phrase, je fis apparaître une énorme flaque d'eau qui lui tomba dessus. Silver s'arrêta aussitôt de rire, abasourdi par le froid.
- Alors ça, pour reprendre tes mots, c'était petit.
- Bien fait ! le narguai-je en courant me réfugier dans la salle de bains.
- Tu ne pourras pas toujours te cacher, Mia ! me menaça-t-il.
J'essuyai une larme qui coulait à force de trop rire. Mes abdominaux me faisaient mal et mes zygomatiques étaient douloureux. La dernière fois que je m'étais sentie aussi heureuse, me semblait si loin. Ce sentiment de légèreté et de bien-être m'avait manqué.
Après avoir enlevé mes vêtements, je m'approchai de ce qui s'apparentai à une douche et restai sceptique quelques instants en me demandant comment faire pour la faire fonctionner. Pas de mitigeurs, pas de robinet...
- Et on fait comment pour avoir un peu d'eau chaude, ici ? m'interrogeai-je à voix haute.
J'eus à peine le temps de finir ma phrase qu'une fine pluie de gouttes d'eaux à une température idéale se mit à couler le long de mon corps. Une légère odeur de pamplemousse parvint à mon nez, comme si l'eau en était naturellement parfumée.
Les yeux fermés, je me délectai de cette sensation, quand j'entendis quelques coups contre la porte.
- Tu veux quoi ? demandai-je.
- Je me suis dit qu'on pourrait profiter d'être sorti de chez Moïra, si tu vois ce que je veux dire...
Un sourire s'étira sur mes lèvres. Il avait raison, nous aurions eu tort de ne pas en profiter. D'un geste de la main, j'ouvris le verrou et lui permis ainsi de me rejoindre dans la salle de bain. Une fois dans la pièce, ses yeux se posèrent sur mon corps dénudé et un sourire carnassier s'étira sur son visage. En un clignement de paupières, Silver se retrouva lui aussi complètement nu et se faufila sous la douche.
- C'est pratique, quand même, cette super vitesse vampirique, susurrai-je en passant mes mains autour de son cou.
- À qui le dis-tu.
Il attrapa mon visage entre ses mains et dévora ma bouche avec ardeur. Mon corps se cambra alors pour se coller au sien et ses doigts se glissèrent dans mon dos, réveillant une multitude de frissons qui me parcoururent de la tête aux pieds. Le contraste entre l'eau chaude et son corps froid était saisissant.
- Tu m'as manqué.
- Pourtant, on se voit tous les jours, badinai-je contre ses lèvres.
Silver me plaqua contre la paroi de la douche, ne me laissant aucune chance de lui échapper. Sauf si j'utilisais mes pouvoirs. Mais même si nous savions tous les deux que grâce à eux, j'étais plus forte que lui, j'aimais lui laisser le dessus. C'était... grisant.
- Tu deviens très confiante quand même, fit-il remarquer. Il va falloir remédier à ça.
- Comment ? m'enquis-je avec les yeux brillants.
- Fais gaffe, je vais finir par croire que tu veux te faire punir.
Sa main glissa le long de ma jambe pour empoigner ma cuisse et ainsi réduire un peu plus la distance entre nos deux corps. Ses yeux gris me fixaient intensément et je pus y apercevoir tout l'amour qu'il ressentait pour moi. Ma poitrine se gonfla sous le coup de l'émotion. Cela faisait longtemps que nous ne nous étions pas retrouvés juste lui et moi, aussi intimes, en dehors de ma tête. Je me jetai sur sa bouche et gémis de plaisir quand il commence à me faire l'amour dans une lenteur divine. Je devais le reconnaître, ça m'avait manqué. Sentir nos deux êtres en communion, nos respirations haletantes se caler l'une sur l'autre, nos corps se mouvoir ensemble, de plus en plus vite... Silver me retourna soudainement et je me retrouvai le ventre contre le mur froid de la douche. Il attrapa alors mes seins dans ses mains et m'embrassa dans le cou, éveillant en moi toujours plus d'envie de luxure.
- J'avais très envie de faire ça.
Ses mains prirent les miennes pour les placer au-dessus de ma tête, me permettant de me cambrer un peu plus.
- Tu m'as manquée, souffla Silver à mon oreille en recommençant ses mouvements de va-et-vient.
- Dis donc, papy, tu te répètes, me moquai-je gentiment entre deux respirations saccadées.
Il me mordit l'épaule, comme un avertissement face à mon insolence, mais je n'avais pas peur. Je n'aurais jamais peur de lui.
Petit à petit, je sentis une vague de plaisir monter en moi, jusqu'à atteindre le sommet en même temps que Silver, nos deux voix se retrouvant dans ce plaisir que nous nous accordions.
Après nous être savonnés, nous décidâmes de sortir de la salle de bains.
- Euh... j'aimerais arrêter ma douche, merci ? tentai-je en me sentant un peu ridicule.
Au même instant, l'eau s'arrêta net. Il fallait avouer que c'était bien pratique. Silver trouva une serviette posée sur un tabouret et m'enroula dedans, m'embrassant au passage sur le front. C'était ce genre de moments hors du temps qui m'avaient manqué. Avoir de l'intimité, juste tous les deux, comme lorsque nous étions dans mon appartement à Hillsborough. Cette période semblait si lointaine.
En sortant de la salle de bain, j'aperçus sur le lit deux paquets qui n'y étaient pas encore un peu plus tôt.
- C'est quoi ? m'étonnai-je.
- On nous a amené de quoi pouvoir nous changer avant d'aller manger, supposa Silver.
Je m'approchai du lit et pris l'emballage sur lequel se trouvait une carte portant mon nom. En l'ouvrant, je trouvai une tenue dans un mélange de coton beige et de cuir marron. J'enfilai les habits, tout en tentant de me débrouiller tant bien que mal avec les lacets des bottes.
- Et ben, dis donc. Tu ressembles à une super héroïne comme ça, releva Silver.
Je me regardai dans un miroir et dus reconnaître que j'avais fière allure. Une tunique beige, dont les coutures étaient renforcées avec du fil marron, s'ouvrait sur le côté sur un pantalon en cuir brun qui allongeait mes jambes et ma taille était ceinturé par une corde de cuir de couleur ébène.
Cela me changeait de mon jean droit et de mon sweat.
Quand je me retournai, Silver avait également enfilé sa tenue. Tout en marron et beige, nous étions parfaitement assortis.
Il se positionna à côté de moi, face au miroir et m'embrassa sur la joue.
- Je ne sais pas ce que tu en penses, mais je trouve que nous avons belle allure, ainsi vêtu.
Je nous observai, les yeux brillants de malice.
- Je pensais exactement la même chose.
Il me tendit alors son bras.
- Prête à rencontrer la reine des fées ?
- Techniquement, c'est déjà fait.
J'attrapai son bras et ainsi, l'un contre l'autre, nous sortîmes de notre chambre.
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